Condamnation historique d'un ex-agent syrien en Allemagne

L'accusé syrien Eyad al-Gharib, accusé de crimes contre l'humanité dans le premier procès de ce type à émerger du conflit syrien, arrive pour entendre son verdict dans la salle d'audience le 24 février 2021 à Coblence, en Allemagne occidentale. (Thomas Lohnes / AFP / POOL)
L'accusé syrien Eyad al-Gharib, accusé de crimes contre l'humanité dans le premier procès de ce type à émerger du conflit syrien, arrive pour entendre son verdict dans la salle d'audience le 24 février 2021 à Coblence, en Allemagne occidentale. (Thomas Lohnes / AFP / POOL)
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Publié le Mercredi 24 février 2021

Condamnation historique d'un ex-agent syrien en Allemagne

  • Le tribunal est resté en dessous des réquisitions du parquet qui avait demandé cinq ans et demi
  • Plus d'une dizaine de Syriens et de Syriennes ont défilé à la barre pour témoigner des effroyables sévices qu'ils ont endurés dans la prison d'Al-Khatib

COBLENCE : La justice allemande a condamné mercredi un ancien membre des services de renseignement syrien à 4 ans et demi de prison pour "complicité de crimes contre l'humanité" dans le cadre du premier procès au monde lié aux exactions imputées au régime de Bachar al-Assad.

La Haute Cour régionale de Coblence a reconnu coupable le Syrien Eyad al-Gharib, 44 ans, d'avoir participé à l'arrestation en septembre ou octobre 2011 d'au moins 30 manifestants à Douma, près de Damas, et à leur transfert vers un centre de détention des services de renseignement.

L'accusé s'est caché le visage face aux caméras avec un dossier et a écouté son verdict les bras croisés, le regard fixe, avec un masque médical sur le visage.

Le tribunal est resté en dessous des réquisitions du parquet qui avait demandé cinq ans et demi.

Le chef de la diplomatie salue un "verdict historique" dans le procès sur la torture en Syrie


            
Le ministre allemand des Affaires étrangères a salué mercredi un "verdict historique" après la première condamnation au monde d'un ancien agent des services de renseignement syriens en lien avec la torture imputée au régime de Bachar al-Assad.


"C'est le premier jugement qui demande des comptes aux responsables de la torture en Syrie", a souligné dans un tweet Heiko Maas, évoquant aussi "la signification symbolique élevée" pour les Syriens de la condamnation par la justice allemande à quatre ans et demi de prison d'un ancien agent du renseignement pour complicité de crimes contre l'humanité.

 

                

A l'approche du dixième anniversaire du début du soulèvement populaire en Syrie le 15 mars 2011, c'est la première fois dans le monde qu'un tribunal se prononce sur un dossier lié à la répression brutale et sanglante par Damas des manifestations pour la liberté organisées dans le cadre des "Printemps arabes".

Eyad al-Gharib répondait de complicité de crimes contre l'humanité. Il était accusé d'avoir participé à l'arrestation et à l'incarcération dans un centre de détention secret du régime, "la branche 251" ou Al-Khatib, d'au moins 30 manifestants à l'issue d'un rassemblement à Douma, chef-lieu de la Ghouta orientale, en septembre ou octobre 2011. 

Il a été le premier des deux accusés qui comparaissent depuis le 23 avril dernier devant la Haute Cour régionale de Coblence (ouest) à recevoir sa sentence, les juges ayant choisi de scinder la procédure en deux.

Le second accusé, Anwar Raslan, 58 ans, considéré comme bien plus central dans le vaste appareil sécuritaire syrien, est poursuivi pour crimes contre l'humanité pour la mort de 58 personnes et la torture de 4.000 détenus notamment.

Le procès de cet ancien colonel devrait durer au moins jusqu'à la fin octobre. 

Pour les juger, l'Allemagne applique le principe de la compétence universelle qui permet de poursuivre les auteurs des crimes les plus graves quels que soient leur nationalité et l'endroit où les crimes ont été commis.

Diaspora

Les recours devant des juridictions nationales en Allemagne, en Suède ou en France se multiplient à l'initiative de l'importante diaspora syrienne réfugiée en Europe. Ils sont à l'heure actuelle la seule possibilité de juger les exactions perpétrées en Syrie en raison de la paralysie de la justice internationale.

Eyad al-Gharib officia dans les plus bas échelons du renseignement avant de déserter en 2012 puis finalement de fuir la Syrie en février 2013.

Arrivé le 25 avril 2018 en Allemagne après une longue odyssée en Turquie puis en Grèce, il n'a jamais dissimulé son passé. 

C'est même lorsqu'il a raconté son parcours sinueux aux autorités chargées de statuer sur sa demande d'asile que la justice allemande a commencé à s'intéresser à lui, ce qui a conduit à son interpellation en février 2019.

L'accusation assure qu'il a été un rouage dans un système où la torture se pratiquait avec "une ampleur presque industrielle". 

Resté dans l'ombre d'Anwar Raslan durant les 10 mois d'audience, Eyad al-Gharib a gardé le silence et caché son visage aux caméras. Il a néanmoins écrit une lettre dans laquelle il a exprimé sa peine pour les victimes.

Férule

Un avocat des parties civiles, Patrick Kroker, a déploré son mutisme. Les gens "de son grade peuvent s'avérer très importants pour nous informer sur les (responsables syriens) que nous visons vraiment, mais c'est quelque chose qu'il a choisi de ne pas faire", a-t-il dit.

Plus d'une dizaine de Syriens et de Syriennes ont défilé à la barre pour témoigner des effroyables sévices qu'ils ont endurés dans la prison d'Al-Khatib. 

Certains témoins ont été entendus anonymement, le visage dissimulé ou coiffé d'une perruque par crainte de représailles sur leurs proches toujours en Syrie. 

Pour la première fois, des photos du "dossier César" ont en outre été présentées dans un tribunal. Cet ex-photographe de la police militaire a exfiltré au péril de sa vie 50.000 clichés montrant 6.786 détenus syriens figés par une mort brutale, affamés et suppliciés. 

Des photos qui ont été analysées devant la Cour par un médecin légiste, le professeur Markus Rotschild, constituant des preuves matérielles accablantes.


Pont effondré à Baltimore: les corps de deux des six ouvriers retrouvés

Le pont Francis Scott Key, effondré, se trouve au sommet du porte-conteneurs Dali à Baltimore, dans le Maryland, le 27 mars 2024. (AFP)
Le pont Francis Scott Key, effondré, se trouve au sommet du porte-conteneurs Dali à Baltimore, dans le Maryland, le 27 mars 2024. (AFP)
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  • Les corps repêchés ont été identifiés comme ceux de deux hommes âgés de 35 et 26 ans, originaires du Mexique et du Guatemala
  • En raison de la quantité de béton et de débris, «les plongeurs ne sont plus en mesure de se frayer un chemin en sécurité» vers «ce que nous pensons être les véhicules piégés», dit la police

BALTIMORE: Les corps sans vie de deux des six ouvriers recherchés ont été repêchés mercredi des eaux glacées du port de Baltimore, sur la côte Est américaine, ont annoncé les autorités, au lendemain de l'effondrement spectaculaire d'un pont percuté par un porte-conteneurs.

"Des plongeurs ont localisé un pick-up rouge à environ 7.6 mètres de profondeur", a annoncé lors d'un point presse, la police du Maryland, l'Etat où se situe Baltimore. "Deux victimes du drame étaient prisonnières du véhicule".

Les corps repêchés ont été identifiés comme ceux de deux hommes âgés de 35 et 26 ans, originaires du Mexique et du Guatemala, qui faisaient partie de l'équipe d'ouvriers présente sur la chaussée du pont Francis Scott Key au moment de l'accident.

Les corps de quatre de leurs collègues, tous présumés morts, n'ont eux pas encore été retrouvés, ont ajouté les autorités.

Mais, en raison notamment de la quantité de béton et de débris, "les plongeurs ne sont plus en mesure de se frayer un chemin en sécurité" vers "ce que nous pensons être les véhicules piégés", a déclaré Roland Butler, de la police du Maryland.

Les secours vont donc chercher à retirer la structure de l'eau pour faciliter l'accès aux plongeurs, a-t-il précisé.

Les autorités avaient averti mardi soir qu'elles ne pensaient pas pouvoir "retrouver ces individus encore en vie", alors que deux membres de leur équipe avaient été secourus peu après le drame.

Les victimes, originaires d'Amérique latine selon la presse américaine, réparaient des nids de poule sur le pont lorsqu'il s'est écroulé dans le fleuve Patapsco.

«Pas conçu pour résister»

L'agence américaine de sécurité des transports (NTSB) a fourni mercredi une chronologie détaillée de la tragédie, basée sur l'analyse préliminaire de l'enregistreur de données du porte-conteneurs.

Long de 300 mètres pour 48 mètres de largeur, le Dali, battant pavillon singapourien, a quitté le quai du port de Baltimore mardi à 0H39 (04H39 GMT) à destination de l'Asie, a indiqué Marcel Muise, enquêteur du NTSB, lors d'une conférence de presse.

À 1H24 locales, des alarmes ont commencé à retentir à bord du navire, signalant des problèmes de propulsion. Le pilote a rapidement informé les autorités portuaires par radio que le navire se dirigeait vers le pont, et a demandé l'intervention de remorqueurs.

L'appel à l'aide a été également reçu par deux équipes de l'autorité locale des transports qui se trouvaient sur le pont en raison des travaux. Ces dernières ont alors fermé toutes les voies de circulation, sauvant ainsi probablement des vies.

Puis, à 1H29, l'enregistreur du navire a enregistré des "sons correspondant à la collision".

Le pont, emprunté chaque jour par des dizaines de milliers de véhicules, s'est alors effondré tel un château de cartes, des pans entiers de la structure se retrouvant sur le bateau.

Des images impressionnantes de vidéosurveillance montrent le porte-conteneurs dévier de son cap, heurter une pile du pont inauguré en 1977 puis s'écrouler.

Pour le ministre américain des Transports Pete Buttigieg, "ce type de pont (...) n'a tout simplement pas été conçu pour résister à un choc direct contre pilier de soutien essentiel".

L'équipage avait tenté en vain de ralentir la course du navire en jetant l'ancre.

L'enquête préliminaire montre qu'il s'agit d'un accident, selon les autorités.

«Coût de la reconstruction»

Le président Joe Biden s'est engagé à ce que "l'Etat fédéral paie la totalité du coût de la reconstruction" du pont, qui porte le nom de l'auteur des paroles de l'hymne national américain, en admettant que cela prendrait du temps.

"Nous serons aux côtés des habitants de Baltimore aussi longtemps qu'il le faudra", a-t-il encore assuré mercredi soir sur le réseau social X.

Car l'enjeu est aussi économique: ce pont à quatre voies, long de 2,6 km, est situé sur un axe nord-sud crucial pour l'économie de la côte Est des Etats-Unis.

Pour l'heure, le transport maritime y est "suspendu jusqu'à nouvel ordre", selon les autorités. Le port de Baltimore est le neuvième du pays en termes d'activité et génère plus de 15.000 emplois.

Le Dali est "stable" et ne représente pas de danger pour l'environnement et le public, en dépit de la présence à bord de 5,6 milliards de litres de diesel et de quelques conteneurs de matières dangereuses, a assuré mercredi Peter Gautier, responsable des gardes-côtes.

Deux conteneurs, sur un total de 4,700, sont tombés à l'eau.

Le navire est exploité par la société maritime Synergy Group et affrété par le géant danois du transport maritime Maersk.

Les autorités portuaires de Singapour ont déclaré mercredi qu'il avait passé avec succès deux inspections en 2023 et qu'une jauge de contrôle de la pression du carburant défectueuse avait été réparée en juin.

Les autorités chiliennes avaient signalé en 2023 un défaut dans les machines du navire, une anomalie rapidement réparée selon elles.


Mer de Chine méridionale: nouvel échange acerbe entre Manille et Pékin

Cette photo prise le 5 mars 2024 montre un navire des garde-côtes chinois dans la mer de Chine méridionale contestée. (AFP)
Cette photo prise le 5 mars 2024 montre un navire des garde-côtes chinois dans la mer de Chine méridionale contestée. (AFP)
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  • Samedi, trois soldats philippins ont été blessés lors d'un accrochage avec les garde-côtes chinois, qui ont bloqué leur navire
  • Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, y compris des eaux et des îles proches des côtes de plusieurs pays voisins

MANILLE: La Chine et les Philippines ont échangé jeudi de nouvelles accusations après de nouveaux accrochages en mer de Chine méridionale, où les deux pays ont des revendications concurrentes.

Samedi, trois soldats philippins ont été blessés lors d'un accrochage avec les garde-côtes chinois, qui ont bloqué leur navire et l'ont endommagé à l'aide de puissants canons à eau au large d'un des récifs disputés, l'atoll Second Thomas.

"Nous ne cherchons pas à entrer en conflit avec quelque nation que ce soit, en particulier avec les nations qui prétendent être nos amies, mais nous ne nous laisserons pas réduire au silence, à la soumission ou à l'asservissement", a déclaré jeudi dans un communiqué le président philippin Ferdinand Marcos.


Le nombre de migrants ayant traversé la Manche à un niveau record depuis janvier

Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
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  • Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4 644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre
  • En 2023, près de 30 000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche

LONDRES: Plus de 4.600 migrants ont rejoint l'Angleterre par la Manche illégalement à bord de canots depuis le 1er janvier, un record pour les trois premiers mois de l'année malgré les promesses du gouvernement conservateur de mettre fin à ces dangereuses traversées.

Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4.644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre, soit une augmentation de 23% par rapport à la même période l'année dernière (3.700).

Le dernier record avait été établi en 2022 avec 4.548 traversées entre début janvier et fin mars.

Rien que mardi, 338 personnes ont gagné les côtes anglaises dans ces embarcations, le plus souvent des canots pneumatiques chargés de dizaines de passagers.

Depuis le début de l'année, au moins sept migrants, dont une fillette de sept ans et un adolescent de 14 ans, sont morts en mer et sur un canal en tentant de rejoindre l'Angleterre.

"Il y a une prise de risque de plus en plus grande" et "l'année qui vient n'augure rien de bon", avait averti début mars l'association française d'aide aux migrants Utopia 56, selon laquelle le rythme de décès depuis le début de l'année atteint un niveau inédit depuis trois ans.

Depuis son arrivée à Downing Street il y a un an et demi, le Premier ministre Rishi Sunak a fait de la lutte contre l'immigration irrégulière l'une de ses priorités, martelant vouloir "stopper les bateaux".

Projet de loi contreversé

En 2023, près de 30.000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche, un chiffre en forte baisse par rapport au record atteint en 2022 (45.000), que le gouvernement met en avant dans son bilan.

Toute progression des arrivées sur le sol britannique risque de fragiliser les conservateurs à quelques mois des élections législatives, pour lesquelles l'opposition travailliste est donnée largement en tête dans les sondages.

Le projet de loi controversé du gouvernement pour expulser les migrants au Rwanda se heurte par ailleurs à la résistance de la chambre haute du Parlement, celle des Lords, qui souhaite adoucir ce texte.

Lundi, le ministère de l'Intérieur a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour dissuader les ressortissants vietnamiens, de plus en plus nombreux, à tenter de traverser la Manche.