Lynn Jisr, les défis d’une femme chef au Moyen-Orient

Pour Lynn Jisr, toutes les cuisines – de la libanaise à la thaïlandaise – empruntent à la cuisine française. (Photos Fournies)
Pour Lynn Jisr, toutes les cuisines – de la libanaise à la thaïlandaise – empruntent à la cuisine française. (Photos Fournies)
Lynn Jisr avec le chef renome Alain Ducasse
Lynn Jisr avec le chef renome Alain Ducasse
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Publié le Jeudi 13 août 2020

Lynn Jisr, les défis d’une femme chef au Moyen-Orient

  • A seulement 25 ans, Lynn Jisr décroche un diplôme à la prestigieuse école de cuisine du chef français Alain Ducasse
  • « J’ai choisi Paris parce que c’est la capitale de la cuisine dans le monde, et parce que les Français sont des pionniers en matière de cuisine »

DUBAI: Lynn Jisr a ouvert la voix aux femmes arabes dans le secteur de la gastronomie. Née au Liban, elle se passionne pour la cuisine dès son plus jeune âge. Ses talents, ainsi que son fin palais, la conduisent en France, où à seulement 25 ans, elle décroche un diplôme à la prestigieuse école de cuisine du chef français Alain Ducasse.

« J’ai choisi Paris parce que c’est la capitale de la cuisine dans le monde, et parce que les Français sont des pionniers en la matière, raconte t-elle à Arab News. Un chef comme Auguste Escoffier a révolutionné la manière de cuisiner, et a placé la barre très haut en matière de restauration et d’organisation du travail de la brigade dans les cuisines. »

Après avoir effectué des recherches sur les différentes écoles de cuisine en Europe, et une expérience dans l’hôtellerie à Beyrouth, Lynn a découvert Alain Ducasse et son école de cuisine. « C’est l’un des meilleurs chefs au monde. » Elle a franchi le pas de l’inscription et a été retenue. Elle confie à Arab News que cette école a été l’une des plus belles expériences de sa vie.

Pour elle, toutes les cuisines – de la libanaise à la thaïlandaise – empruntent à la cuisine française. « Tous les termes utilisés sont en français, des noms des bases de toutes les sauces tels que le “roux” pour la béchamel, jusqu’aux noms de découpes, comme la “julienne”, la “brunoise” ou la “paysanne”. Ce sont les français qui ont fait de la cuisine un art, et d’une certaine manière une profession, qu’ils ont grandement perfectionnée. »

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Cependant, les Français et les Libanais ne cuisinent pas de la même façon. Leur approche est différente. La cuisine française utilise des ingrédients très variés comme la viande, le poulet ou les légumes. « Ils se concentrent sur le goût même des ingrédients. Ils possèdent toute une technique: ils ont créé des bouillons et des sauces pour agrémenter les plats, a-t-elle ajouté. Dans la cuisine libanaise, nous utilisons un grand nombre d’épices et d’herbes sur lesquels nous comptons pour donner des saveurs à tous les plats. Avec la cuisine française, ce sont les produits eux-mêmes qui sont mis en valeur. »

Le stéréotype des femmes qui ne cuisinent qu’à la maison

Étudier et travailler à Paris a été très utile pour la jeune Lynn. Elle a appris des Français « la façon adéquate de travailler professionnellement ». Aujourd’hui, elle se sent  capable de préparer n’importe quelle cuisine. « Si quelqu’un me demande ce que je préfère cuisiner, je ne saurais pas quoi lui répondre. Une fois que vous connaissez les règles de base, tout est réalisable, raconte t-elle à Arab News. Bien sûr, certaines recettes demandent de la pratique, mais je sais capter l’essentiel. La cuisine française vous apprend à comprendre les aliments, les sons et les odeurs – tout est question de sensations. »

Après avoir obtenu son diplôme de l’École Ducasse, Lynn Jisr a effectué un stage de six mois au restaurant raffiné Les Ombres à Paris. Après l’expiration de son visa de travail, elle est rentrée au Liban où elle a travaillé un an et demi au Baron, un restaurant bien connu à Beyrouth. « J’ai aimé le cadre. C’était ma première expérience dans une cuisine ouverte, nous devions nous mettre en scène devant les clients. » C’était également la première fois qu’elle devait démontrer sa créativité en cuisine, et travailler aux côtés d’autres femmes. « Il y a toujours ce stéréotype qui persiste selon lequel les femmes cuisinent à la maison et pas professionnellement, ajoute t-elle. Le restaurant serait soi-disant un environnement trop compliqué pour une femme mais, en fait, il n’y a rien que nous ne puissions gérer. »

C’est malgré tout un domaine qui peut se révéler par moments épuisant. Les chefs travaillent six jours par semaine, terminent quotidiennement à 1h du matin et sont rarement disponibles pour leur famille pendant les périodes de fêtes.

Après une courte expérience de six mois chez Zomato, Lynn a fait une pause, tout en restant bien connectée au marché. Rapidement, elle a été contactée pour la réouverture du restaurant en vogue à Beyrouth, le Pacifico, où elle a pris le poste de chef de cuisine. « Ça a été une expérience incroyable, a-t-elle confié à Arab News. Je gérais ma propre cuisine, et j’y ai beaucoup appris. ». Mais en tant que femme chef au Moyen-Orient,  elle a dû faire face à de nombreux défis. « Mon équipe entière était composée d’hommes et j’ai été confrontée à des problèmes de légitimité et d’autorité, assure t-elle. Même les fournisseurs demandaient le chef de cuisine quand ils me voyaient. C’était un vrai problème. »

Auprès d’Alain Ducasse, l’école de la rigueur

Lynn a dû maintes fois contrôler ses émotions pour imposer le respect à ses collègues. « Cela m’a beaucoup appris. Et a contrario lorsque j’ai voulu partir, ils ne se sentaient plus capables de continuer sans moi. Selon eux, les femmes accordent plus de soin à la cuisine et prêtent davantage attention aux détails. »

C’est la révolution d’octobre 2019 qui a mis fin à sa collaboration au Pacifico. En effet, depuis dix mois, les restaurants et les bars du Liban ont énormément souffert économiquement. La chef explique que le secteur a été l’un des premiers touchés, même si certains Libanais continuaient de sortir dîner pour faire la fête après les manifestations. Cela n’a hélas pas suffi et les restaurants de la capitale ont fini par fermer.

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« J’ai eu peur pour ma carrière, je ne voulais pas qu’elle s’arrête là. À cette époque, je vivais seule à Beyrouth – ma famille est à Dubaï et en Égypte. Si je voulais m’en sortir, je devais travailler. Et j’avais ce besoin de prouver qu’une femme pouvait être chef. J’ai alors compris que je  n’avais pas d’autre choix que de partir. »

Après un congé sabbatique pris au début de cette année, elle s’est rendue à Dubaï où elle a commencé à postuler à des offres d’emploi. C’est là qu’est arrivée la pandémie de Covid-19, où le monde s’est arrêté. Malgré tout, elle a commencé à poster sur son compte Instagram des photos de ses plats et gâteaux faits maison, suscitant autour d’elle de nombreux commentaires positifs. « Une des amies de ma mère a tellement aimé un gâteau que je lui avais fait qu’elle a voulu l’acheter. Au début, j’ai trouvé cela bizarre, mais elle a  fait passer le message, et j’ai réalisé que c’était ce que je pouvais faire de mieux ici. »

La jeune femme raconte que la pandémie a aiguisé sa créativité et l’avait poussée à sortir des sentiers battus, en allant au-delà de la recherche d’un emploi ordinaire. « Je prends les choses en douceur, mais je me rends compte que les gens aiment les gâteaux faits maison, et les plats préparés qu’il n’y plus qu’à réchauffer, fait-elle remarquer. Les choses ne se passent pas toujours comme vous l’aviez prévu, mais cela peut être une bénédiction. ». Même si son projet manque encore de stabilité, les indicateurs sont positifs et la jeune chef est très confiante.

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« Je vais prendre mon temps, dit-elle. On est tellement surmenés dans un restaurant que je n’ai pas envie d’y retourner. Il existe tellement de possibilités d’exercer pour les chefs à Dubaï qu’il n’y a pas de raison de se limiter. » En repensant à son parcours, elle est heureuse de son expérience au sein de l’école Alain Ducasse, qui, dit-elle, lui a appris à être modeste, disciplinée et perfectionniste. « À l’école, quand une carotte n’était pas parfaitement coupée, on devait la jeter, se souvient-elle. Cela m’a endurcie. Il n’était pas question de se plaindre. Chacun souffrait en silence. »

Elle a également été impressionnée par l’égalité des genres qu’elle a pu observer à Paris, et affirme que le Moyen-Orient a encore beaucoup à apprendre. « Le chef de cuisine pouvait me crier dessus comme personne ne l’avait encore fait avant lui, confie t-elle. Le fait que je sois une femme ne faisait aucune différence. Ce que vous êtes n’est pas important, seul compte le travail. Sur cette question, le Moyen-Orient a encore un long chemin à parcourir. Les Libanais, par exemple, se font de fausses idées sur les femmes qui exercent des travaux difficiles. Pour eux, les femmes sont trop émotives et ne sont pas à même de supporter l’aspect physique d’un travail. Ils ne peuvent pas être plus loin de la vérité. »


Une nouvelle initiative cinématographique à AlUla vise à stimuler le talent créatif saoudien

Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production. (SPA)
Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production. (SPA)
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  • Les efforts visent à soutenir les jeunes talents et à contribuer à la croissance du secteur cinématographique du Royaume
  • Villa Hegra organise également des programmes éducatifs et interactifs pour les enfants afin de développer leurs talents et leurs capacités créatives

ALULA : Villa Hegra, en collaboration avec Film AlUla, a lancé un programme spécialisé dans la réalisation de films pour développer les compétences cinématographiques et soutenir les talents créatifs, a rapporté lundi l'Agence de presse saoudienne.

Cette initiative reflète l'engagement de Villa Hegra à renforcer l'activité culturelle et cinématographique tout en favorisant un environnement inspirant pour les créateurs de contenu et les cinéphiles.

Le programme propose des cours de formation et des ateliers couvrant toutes les étapes de la production cinématographique, de l'écriture du scénario et de la réalisation à la cinématographie, au montage et à la post-production.

Ces efforts visent à soutenir les jeunes talents et à contribuer à la croissance du secteur cinématographique du Royaume, a ajouté la SPA.

Villa Hegra organise également des programmes éducatifs et interactifs pour les enfants afin de développer leurs talents et leurs capacités créatives.

Ces programmes comprennent des ateliers qui simplifient les concepts scientifiques et les intègrent aux pratiques artistiques modernes, créant ainsi un environnement d'apprentissage qui encourage la découverte et l'innovation.

Ils ont suscité une forte participation des élèves dans tout le gouvernorat en raison de leur approche pratique et interactive, qui renforce la réflexion et la créativité des enfants.

Les initiatives sont mises en œuvre en collaboration avec des institutions françaises et saoudiennes, reflétant ainsi la diversité culturelle et les partenariats internationaux tout en améliorant la qualité du contenu éducatif pour les jeunes générations.

Villa Hegra est la première fondation culturelle franco-saoudienne basée à AlUla. Lancée en octobre, elle soutient la scène culturelle de la région en proposant des plateformes éducatives qui développent les compétences des enfants et des jeunes saoudiens, tout en renforçant la présence d'AlUla sur la scène culturelle internationale.


Eurovision: Nemo rend son trophée 2024 pour protester contre la participation d'Israël

Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
Le chanteur suisse Nemo, qui représentait la Suisse avec la chanson « The Code », célèbre sur scène avec son trophée après avoir remporté la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (CEC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmö Arena de Malmö, en Suède. (AFP)
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  • L’artiste suisse Nemo, vainqueur de l’Eurovision 2024, rend son trophée pour protester contre la participation maintenue d’Israël, dénonçant une contradiction avec les valeurs d’unité et de dignité affichées par l’UER
  • Cinq pays — Islande, Espagne, Pays-Bas, Irlande et Slovénie — ont déjà annoncé leur boycott de l’édition 2026, sur fond de critiques liées à la guerre à Gaza et d’accusations d’irrégularités de vote

GENEVE: L'artiste suisse Nemo, qui a remporté l’Eurovision 2024 en Suède, a annoncé jeudi rendre son trophée pour protester contre le maintien de la participation d'Israël dans la compétition, qui a déjà provoqué le boycott de cinq pays.

"En tant que personne et en tant qu'artiste, aujourd'hui, je ne pense plus que ce trophée ait sa place sur mon étagère", a déclaré dans une vidéo postée sur Instagram Nemo, qui s'était déjà joint aux appels réclamant l'exclusion d'Israël du plus grand événement musical télévisé en direct au monde.

"L'Eurovision prétend défendre l'unité, l'inclusion et la dignité de tous (...) Mais la participation continue d'Israël, alors que la commission d'enquête internationale indépendante (mandatée par) l'ONU a conclu à un génocide, démontre un conflit évident entre ces idéaux et les décisions prises par" l'Union européenne de Radio-Télévision (UER), a déclaré le chanteur de 26 ans.

"Il ne s'agit pas d'individus ou d'artistes. Il s'agit du fait que le concours a été utilisé à maintes reprises pour redorer l'image d'un État accusé de graves atrocités", a ajouté Nemo, devenu en 2024 le premier artiste non binaire à être sacré à l'issue d'une édition déjà marquée par une controverses sur la participation d'Israël en pleine guerre dans la bande de Gaza.

Mercredi, la télévision publique islandaise RUV a annoncé boycotter l'édition 2026 de l'Eurovision après le feu vert donné à la participation d'Israël, devenant le cinquième pays à ne pas participer au prochain concours à Vienne.

Début décembre, la majorité des membres de l'UER avaient estimé qu'il n'était pas nécessaire de voter sur la participation d'Israël avec sa télévision publique KAN.

Cette décision a déclenché instantanément les annonces de boycott des diffuseurs de l'Espagne, des Pays-Bas, de l'Irlande et de la Slovénie, sur fond de critiques de la guerre dans la bande de Gaza mais aussi d'accusations d'irrégularités dans les votes lors des précédentes éditions.

"Quand des pays entiers se retirent, il est évident que quelque chose ne va pas du tout. C'est pourquoi j'ai décidé de renvoyer ce trophée au siège de l'UER à Genève, avec gratitude et un message clair : incarnez vos valeurs", a ajouté Nemo, avant de déposer son trophée dans une boite.


Layali Diriyah réchauffe le cœur historique du Royaume

Layali Diriyah est organisé dans l'une des fermes du district d'Al-Murayih, transformant ce site historique en une expérience vivante et en plein air. (Photo AN/Huda Bashatah)
Layali Diriyah est organisé dans l'une des fermes du district d'Al-Murayih, transformant ce site historique en une expérience vivante et en plein air. (Photo AN/Huda Bashatah)
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  • L’événement constitue un pilier de la Diriyah Season, célébration vibrante de la culture saoudienne
  • La gastronomie y occupe une place majeure, avec un large éventail de cuisines saoudiennes et internationales

​​​​​​RIYAD : Layali Diriyah est de retour comme pièce maîtresse de la Diriyah Season de cette année, attirant les visiteurs vers un Al-Murayih transformé en une célébration en plein air de la culture, de la cuisine et de l’artisanat saoudiens.

L’événement se tient tous les jours de 17h à 2h du matin jusqu’en mars 2026. Des allées bordées de palmiers illuminées de guirlandes scintillantes instaurent une atmosphère mêlant l’héritage traditionnel najdi à la créativité saoudienne contemporaine.

Pour de nombreux visiteurs, le cadre lui-même fait partie de l’expérience. Shatha Abdulaziz, une visiteuse, a confié à Arab News : « Mon expérience a été merveilleuse et très agréable. Ce qui m’a réellement impressionnée, c’est l’atmosphère paisible, le thème traditionnel, l’organisation et les détails.

« Bien que je sois déjà venue lors des saisons précédentes, je pense qu’il y a eu une amélioration significative cette année. »

La gastronomie est un attrait majeur, avec un large choix de cuisines saoudiennes et internationales, dont des spécialités italiennes et méditerranéennes proposées par des restaurants exclusifs présents cette année.

« Ce fut une excellente expérience », a déclaré le visiteur Mohammed Fahad, ajoutant que l’attention portée aux détails était remarquable, tout comme « l’authenticité historique dans chaque recoin de Diriyah Nights ».

Il a ajouté : « Cela mêle véritablement le présent et le passé avec une touche raffinée et artistique. »

Des boutiques et stands proposent des articles en édition limitée à ceux en quête d’une expérience de shopping singulière.

Rawan Alsubaie, habituée de Diriyah mais présente à Layali Diriyah pour la première fois, a souligné le caractère exclusif des produits.

Elle a expliqué : « J’ai regardé certaines boutiques et stands et je les ai trouvés uniques, avec des produits introuvables en dehors de Diriyah Nights.

« Il y a des parfums que je n’ai trouvés nulle part ailleurs. J’ai même demandé aux commerçants s’ils avaient d’autres points de vente, mais ils m’ont dit que non, ce que je trouve remarquable.

« Je suis venue en m’attendant à découvrir quelque chose d’exceptionnel et, effectivement, l’endroit est magnifique, surtout durant la saison hivernale. C’est parfait. »

La Diriyah Season de cette année continue de mettre en valeur la richesse de l’héritage najdi tout en embrassant la créativité qui façonne l’Arabie saoudite moderne.

À travers des spectacles, des expositions et des expériences immersives, les visiteurs découvrent les traditions qui définissent Diriyah, ainsi que l'énergie qui anime son renouveau culturel.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com