La rue s’embrase face à la crise économique et politique au Liban

Les militants ont demandé à l'armée et aux forces de sécurité de protéger les manifestants. (Photo fournie)
Les militants ont demandé à l'armée et aux forces de sécurité de protéger les manifestants. (Photo fournie)
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Publié le Vendredi 05 mars 2021

La rue s’embrase face à la crise économique et politique au Liban

  • «Cent médecins chevronnés de l'Hôpital universitaire américain ont quitté le pays»
  • Le premier ministre désigné Saad Hariri a publiquement nommé et dénoncé le président Aoun et le Hezbollah

BEYROUTH: Excédés par «l'incompétence des leaders» qui n’ont toujours pas formé un nouveau gouvernement, les Libanais sont descendus dans la rue pour la troisième journée consécutive et ont bloqué les routes avec des pneus en flammes , alors que le premier ministre désigné du pays imputait l'impasse politique au président et au Hezbollah.

Les épreuves du pays qui s’éternisent et l’incertitude politique ont ravivé la rage publique, et les militants ont sommé l’armée et les forces de sécurité de protéger les manifestants.

«Les gens vivent dans la peur», dit le médecin et activiste Ziyad Abdel Samad à Arab News.

«Il y a des groupes payés pour transformer les manifestations en émeutes, comme il y a ceux qui profitent de cette situation chaotique. Nous vivons un vacuum à tous les niveaux; politiques internes et régionaux, et tout le monde vit dans l’expectative. Les gens ont vraiment faim. Il est plus facile d’alimenter le chaos est plus grande que la possibilité d’organiser et de diriger».

Les militants ont révélé que la reprise des manifestations découle aussi des «conditions de vie» épouvantables qui ne font qu’épuiser les Libanais.

«La menace pour leur avenir en matière de sécurité, de vie sociale, d’économie et de santé est à présent bien réelle, et la souveraineté du Liban s’en retrouve violée», ont-ils ajouté.

Jeudi, le premier ministre libanais désigné Saad Hariri a publiquement nommé et dénoncé le président et le Hezbollah qui font obstacle à la formation d’un nouveau gouvernement.

Hariri a été chargé de former un gouvernement en octobre dernier, mais il n’a pas réussi à créer un cabinet au milieu d'un différend avec le président Michel Aoun et d'autres partis sur les noms des ministres dans la nouvelle administration et les portefeuilles que ces ministres devraient obtenir.

Un communiqué du bureau des médias de Hariri indique que «contrairement au Hezbollah, qui attend toujours les instructions de Téhéran pour prendre une décision, Hariri n’attend certainement pas l’approbation d’une quiconque partie étrangère pour former le gouvernement. Il attend l'approbation d'Aoun pour former un gouvernement de technocrates, avec les modifications suggérées officiellement par Hariri à Aoun. Le Hezbollah effectue des manœuvres politiques dans le but de prolonger le vide gouvernemental. Il attend que l'Iran entame ses négociations avec la nouvelle administration américaine, en exploitant la stabilité du Liban influence».

Le gouvernement a démissionné en août dernier à la suite de l'explosion dévastatrice du port de Beyrouth. Mais la colère publique contre l'élite politique précède la tragédie, et la tient responsable pour son échec dans la lutte contre la corruption, l’amélioration des conditions de vie et la résolution de la crise économique du pays, avec la démission de Hariri de son poste de premier ministre en octobre 2019.

Le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, a déclaré lors d'une réunion Zoom que le Liban est devenu une «plate-forme pour les missiles iraniens».

«Le Hezbollah se porte bien aujourd'hui», a-t-il ajouté. «Il a sa propre banque centrale. Quant à la banque centrale de l’État, ses réserves obligatoires vont sans doute s’épuiser d’ici un an. Ce parti est-il capable de supporter toutes les conséquences sociales?»

Joumblatt a aussi averti que le chaos total approche, et que plus la livre libanaise s’effondre, plus ce chaos serait dramatique.

«Les soldats libanais gagnaient environ 500 dollars avant l'effondrement, aujourd'hui leur salaire est évalué à 60 dollars. Que fera ce soldat qui assure la sécurité? Un jour, il se rebellera. Le Hezbollah est-il conscient de cela?  Quelles que soient ses moyens, un chaos ne jouerait guère en sa faveur».

L’impact de la détérioration de la monnaie locale se fait sentir partout. Les hôpitaux privés ont même commencé à facturer leurs services au taux de change de 3 900 LBP pour un dollar.

Le taux de change officiel du dollar est d'environ 1 500 LBP.

Les patients dialysés, par exemple, doivent désormais payer 100 000 LBP pour chaque séance, afin de couvrir leur part de la facture.

Le chef de la commission parlementaire en matière de la santé, Issam Araji, s'est dit attristé par la situation.

«Aujourd'hui, le père d'un nouveau-né a pleuré avant moi car il n'avait pas les moyens d'acheter une prothèse auditive pour son fils, qui souffre d'une perte d’audition, car son prix dépasse les 142 millions de livres libanaises», a-t-il déclaré à Arab News.

Araji, qui est médecin spécialiste dans les maladies cardiovasculaires, ajoute que le chaos règne dans le secteur médical à cause de la crise financière, économique et politique du pays.

«Les patients paient leur matériel médical selon des prix fixés au marché noir, il y a une pénurie de médicaments, et cent médecins chevronnés de l'Hôpital universitaire américain ont quitté le pays».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Reconnaître l'État palestinien et mettre fin à l'effusion de sang, demande l'ancien l'ambassadeur saoudien aux États-Unis

 La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington. (AFP)
La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington. (AFP)
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  • Le prince Turki Al-Faisal appelle Washington à "tenir compte des voix de ses amis et alliés dans la région"
  • Au Moyen-Orient, les guerres deviennent "presque normales dans cette région assoiffée de conflits", a-t-il déclaré

RIYAD: La paix et la stabilité au Moyen-Orient reposent sur une solution juste à la question palestinienne, a déclaré le prince Turki Al-Faisal, ancien ambassadeur saoudien au Royaume-Uni et aux États-Unis, lors d'un important forum de politique étrangère organisé à Washington.

S'adressant à la conférence annuelle des décideurs arabes et américains organisée par le Conseil national des relations américano-arabes, l'ancien chef des services de renseignement a déclaré que les troubles récurrents avaient plongé la région dans un "état de confusion stratégique".

Au Moyen-Orient, les guerres deviennent "presque normales dans cette région assoiffée de conflits", a-t-il déclaré.

Soulignant la "réponse implacable et destructrice" d'Israël aux attaques du Hamas du 7 octobre, le prince Turki a déclaré que la guerre qui en a résulté "représente un échec politique découlant de l'arrogance et de convictions infondées qui ont conduit à ignorer les souffrances endurées par la population assiégée de Gaza".

Ces "illusions" ont également conduit Israël à mal interpréter les ouvertures arabes en faveur de la paix, a-t-il ajouté.

"Cependant, le Moyen-Orient n'est pas le seul à connaître des troubles et des incertitudes", a déclaré l'ancien diplomate. "Où que nous regardions aujourd'hui sur la carte du monde, nous constatons qu'il y a une crise dans chaque coin, et sans un horizon clair pour trouver des solutions appropriées qui résolvent les problèmes."

Cet état de confusion stratégique contribue énormément à la poursuite et à l'escalade de la violence, a-t-il ajouté.

"Il crée également de nouveaux conflits qui compliquent la situation dans une région où chaque crise engendre une autre crise et où chaque problème est lié à un autre problème. La fatigue et la confusion au Moyen-Orient sont synonymes d'une forte polarisation, d'une multiplicité de questions conflictuelles et d'une multiplicité d'acteurs concurrents qui gèrent la situation au cas par cas.

Le prince Turki a souligné l'absence d'une orientation ou d'une stratégie claire visant à mettre fin aux conflits de manière pacifique et à créer les conditions nécessaires à la paix, à la stabilité et à la sécurité.

Il a salué les mesures prises par des pays tels que la France et la Norvège pour reconnaître l'État palestinien et "convaincre ceux qui ne le sont pas que la paix au Moyen-Orient passe par une solution juste de cette question en suspens".

Appelant les États-Unis à poursuivre leurs efforts pour mettre fin à la guerre de Gaza, le prince Turki a déclaré que Washington devrait "faire le pas le plus important en prenant en compte les voix de ses amis et alliés dans la région" en soutenant les principes de l'initiative de paix arabe et en faisant pression pour mettre fin au conflit.

Les dirigeants qui font des pas supplémentaires pour la paix sont considérés comme de grands dirigeants", a-t-il déclaré lors de la conférence, ajoutant : "Président Trump, c'est à votre tour de faire un pas en avant : "Président Trump, c'est à votre tour d'être ce leader. Menez votre proposition de cessez-le-feu en 20 points jusqu'à l'inévitable 21e point."

Le prince Turki a exhorté le dirigeant américain à profiter de la visite officielle du prince héritier Mohammed bin Salman pour reconnaître l'État palestinien et "mettre fin à jamais à l'effusion de sang des Palestiniens et des Israéliens."


Le président libanais juge le monopole des armes à l'Etat "nécessaire et inévitable"

le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
le président libanais Joseph Aoun s'adressant à la nation à la veille de la fête de l'indépendance dans un discours télévisé depuis le quartier général du commandement du secteur sud du Litani de l'armée libanaise à Tyr, le 21 novembre 2025. (AFP)
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  • Le président libanais Joseph Aoun affirme que le monopole des armes par l’État est “nécessaire et inévitable”, alors que l’armée prévoit de démanteler la présence militaire du Hezbollah au sud du Liban conformément au cessez-le-feu
  • Ce message intervient dans un contexte de fortes pressions américaines, de frappes israéliennes récurrentes et d’appels libanais à un soutien et un encadrement international pour sécuriser la mise en œuvre de ces engagements

BEYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun, sous forte pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, a jugé dans un discours prononcé vendredi dans le sud du Liban "nécessaire et inévitable" le monopole des armes à l'Etat.

Depuis le cessez-le-feu qui a mis fin il y a un an à une guerre meurtrière entre Israël et le mouvement pro-iranien, le Liban est sous forte pression de Washington pour qu'il pousse le Hezbollah à remettre ses armes à l'armée libanaise.

Conformément à l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres plus au nord.

L'armée a ainsi soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque d'ici la fin de l'année, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais.

Dans son discours, prononcé à la veille de la fête nationale, le président libanais a jugé le monopole de l'Etat sur les armes "nécessaire et inévitable" tout en appelant le comité chargé de surveiller la trêve regroupant Etats-Unis, France, ONU, Liban et Israël, à "s'assurer que les forces armées libanaises contrôlent seules" le sud du pays.

Il a répété que le Liban était prêt à négocier, sous parrainage américain ou international, "tout accord qui mettra fin à ces agressions transfrontalières".

Joseph Aoun a enfin exhorté "les amis du Liban et les pays frères à superviser l'ensemble de ce processus en établissant un calendrier clair et en mettant en place un mécanisme international de soutien à l'armée libanaise".

Au cours des dernières semaines, l'armée israélienne a multiplié les frappes sur le sud du Liban, accusant le Hezbollah de chercher à y reconstruire les infrastructures militaires détruites lors de sa guerre contre ce mouvement soutenu pro-iranien et allié au Hamas palestinien.

Selon le ministère de la Santé, une personne a été tuée lors d'une frappe vendredi dans le sud du Liban. Plus de 330 personnes ont été tuées au Liban et 945 blessées depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, selon la même source.

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a dénoncé vendredi dans un communiqué le "schéma répété de meurtres illégaux et de violations du cessez-le-feu par Israël".


L'armée israélienne affirme que l'attaque au Liban a tué 13 militants du Hamas

Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
Des personnes en deuil portent les cercueils des victimes de la frappe aérienne israélienne de mardi, lors d'un cortège funèbre dans le camp de réfugiés palestiniens d'Ein El-Hilweh, dans la ville portuaire de Sidon, au sud du Liban, jeudi. (AP)
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  • L’armée israélienne affirme avoir tué 13 membres du Hamas, dont Jihad Saïdaoui, dans une frappe sur le camp d’Aïn el-Héloué, tandis que le Hamas dénonce un « massacre » visant des civils
  • Le lieu de la frappe est au cœur d’un récit contradictoire : Israël parle d’un camp d’entraînement, tandis que des témoins et le Hamas évoquent un terrain de sport fréquenté par des jeunes du camp

JERUSALEM: L'armée israélienne a affirmé vendredi avoir tué "13 terroristes du Hamas" dans sa frappe menée mardi soir sur le camp de réfugiés palestiniens d'Aïn el-Héloué au Liban, dans laquelle les autorités libanaises ont annoncé 13 morts, sans préciser leur identité.

"Treize terroristes du Hamas ont été éliminés" dans cette frappe, "dont Jihad Saïdaoui, impliqué dans la formation de terroristes destinés à mener des attaques" contre Israël et ses soldats à partir territoire libanais, écrit dans un communiqué en hébreu l'armée qui avait aussi utilisé la graphie de "Jaouad Sidaoui".

A l'AFP qui lui demandait de lui fournir la liste nominative des douze autres personnes qu'elle dit avoir éliminées dans la frappe, l'armée israélienne a répondu n'avoir rien à ajouter à ce qui a été publié dans son communiqué.

Dans un avis de décès ayant circulé mercredi au Liban, le Hamas a publié la liste des noms des treize morts, en commençant par celui de Jihad Saïdaoui, avant de publier le lendemain sur Telegram, un message avec les photos de treize hommes d'apparence jeune, voire juvénile, accompagné d'un texte qualifiant la frappe "d'horrible massacre" ayant causé la mort de "plusieurs civils innocents".

Mardi, peu de temps après la frappe, l'armée israélienne avait annoncé avoir visé "des terroristes en opération dans un camp d'entraînement du Hamas".

"Les allégations (d'Israël) selon lesquelles le lieu ciblé serait un complexe d'entraînement appartenant au mouvement ne sont que pure calomnie (et visent) à justifier son agression criminelle et à inciter à la haine contre les camps et notre peuple palestinien", avait répliqué le Hamas, affirmant n'avoir "aucune installation militaire dans les camps palestiniens au Liban".

- "Terrain de sport" -

L'armée israélienne a diffusé ce qu'elle a présenté comme une vidéo de sa frappe montrant une attaque sur un bâtiment.

Mais le mouvement islamiste palestinien affirme que "ce qui a été pris pour cible est un terrain de sport ouvert fréquenté par les jeunes du camp (...) et que ceux qui ont été visés étaient un groupe de jeunes présents sur le terrain au moment de l'attaque".

"On a entendu trois explosions, nos maisons ont vacillé et les enfants tremblaient de peur", a déclaré à l'AFP au lendemain de l'attaque Mohammad Moustafa, habitant d'Aïn al-Heloué, le plus grand des camps de réfugiés palestiniens du Liban, près de la ville de Saïda, dans le sud du pays.

Agé de 67 ans, M. Moustafa a assuré que les morts étaient en majorité "des jeunes du camp qui jouaient au foot dans un terrain à l'intérieur du hangar" visé, dans lequel un correspondant de l'AFP a vu mercredi matin des taches de sang maculant le sol et des secouristes rassemblant des restes humains.

Lors des funérailles organisées à l'intérieur du camp pour 11 des 13 personnes tuées, un correspondant de l'AFP a vu des drapeaux aux couleurs du mouvement islamiste du Hamas, mais aussi des drapeaux palestiniens, sur les cercueils.

Les deux autres, dont une personne identifiée comme étant Jihad Saïdaoui, ont été enterrées dans un cimetière à l'extérieur du camp.

Le Liban "s'est engagé à désarmer les factions armées dans les camps palestiniens, mais les organisations terroristes continuent d'exploiter cyniquement la population et les infrastructures civiles" à leurs fins, écrit vendredi l'armée israélienne.

La frappe sur Aïn el-Héloué est survenue sur fond de trêve entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza et alors que l'armée israélienne intensifie ses tirs sur le sud du Liban malgré un cessez-le-feu avec le Hezbollah, allié du Hamas, qu'elle accuse de chercher à se réarmer.