Spoliées, les maisons des chrétiens symbole des tensions irakiennes

Des gens assistent à une célébration sur une place publique près de l'Église syriaque catholique de l'Immaculée Conception (al-Tahira-l-Kubra) dans la ville à prédominance chrétienne de Qaraqosh (Baghdeda), dans la province de Ninive, avant la visite du pape dans la ville. (Zaid AL-OBEIDI / AFP)
Des gens assistent à une célébration sur une place publique près de l'Église syriaque catholique de l'Immaculée Conception (al-Tahira-l-Kubra) dans la ville à prédominance chrétienne de Qaraqosh (Baghdeda), dans la province de Ninive, avant la visite du pape dans la ville. (Zaid AL-OBEIDI / AFP)
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Publié le Samedi 06 mars 2021

Spoliées, les maisons des chrétiens symbole des tensions irakiennes

  • Les propriétaires ou des proches qui gardaient leur maison après leur départ ont vu débarquer à l'improviste des hommes menaçants -souvent armés- qui les ont expulsés sur le champ
  • Dans l'un des pays les plus corrompus au monde, chrétiens et musulmans répètent à l'envi qu'il ne sert à rien de porter plainte, particulièrement contre des miliciens

BAGDAD : Personnellement menacés ou redoutant de l'être par la guerre, la grande majorité des chrétiens ont fui l'Irak, laissant souvent derrière eux des maisons aussitôt spoliées par des miliciens ou voisins peu scrupuleux. Et, pour beaucoup, les récupérer relève d'un combat perdu d'avance.

"J'ai fini par vendre au prix qu'ils réclamaient", lâche Fawzi Boulos, à propos de sa maison de près de 350 m2 sur une avenue cossue de Bagdad où il n'a plus mis les pieds depuis 2007.

A l'époque, alors que les violences confessionnelles ensanglantent la capitale, ce vétérinaire se résout au départ. Une fois au Kurdistan, raconte-t-il à l'AFP, il apprend que des hommes se sont déjà installés.

Durant les années qui ont suivi, revenu dans la capitale irakienne, des menaces de mort ont fusé à chaque fois qu'il a tenté de s'approcher de son domicile.

Il a engagé un avocat pour 15.000 dollars, s'est tourné vers le commandement militaire et a même interpellé le Premier ministre de l'époque. Mais rien n'y a fait.

Entre frais de justice et pots-de-vin versés à de supposés intercesseurs, il estime avoir quasiment dépensé la totalité de ce que ces hommes ont finalement consenti à payer pour sa maison: 400.000 dollars, bien en-dessous du marché à Bagdad où des maisons se vendent pour plus du double.

Ni parti ni tribu

Des cas comme celui-ci, William Warda, qui a créé l'ONG Hammourabi de défense des minorités, en a porté une dizaine devant la justice. Des dossiers que l'AFP a pu consulter.

A chaque fois, la même histoire: les propriétaires ou des proches qui gardaient leur maison après leur départ ont vu débarquer à l'improviste des hommes menaçants -souvent armés- qui les ont expulsés sur le champ.

A mots couverts, de nombreux propriétaires -qu'ils soient membres de la minorité chrétienne ou musulmans ayant fait les frais de la guerre civile ou des purges des membres du régime déchu de Saddam Hussein- accusent les groupes armés ayant pignon sur rue.

Ces factions sont aujourd'hui de puissants bataillons chiites, souvent pro-Iran, qui tiennent le Parlement et plusieurs ministères.

Face à eux, les chrétiens en particulier se sentent désarmés.

"Les musulmans peuvent se tourner vers des partis politiques ou des tribus pour les défendre, pas nous", affirme le prêtre grec-orthodoxe Younan al-Farid.

Au Parlement, un système de quota impose la présence de cinq députés chrétiens. Mais, dans un système de listes, ils défendent plus des intérêts partisans que communautaires.

Hectares volés

En 2008, l'État a bien créé une Commission chargée d'expulser les squatteurs. A l'époque, le pays tentait de sortir de la guerre civile et de nombreux contentieux entre chiites et sunnites ont été réglés par ce biais.

Au total, la Commission de quatre membres en charge de Bagdad et de ses 10 millions d'habitants a rendu à leurs propriétaires plus de 26.500 maisons.

Mais, dans le cas précis des chrétiens, moins enclins à saisir la justice et souvent partis à l'étranger, seules 50 maisons ont été effectivement vidées de leurs occupants, affirme la Commission qui ne communique pas le nombre de saisines reçues.

Dans la province de Ninive (nord), où le groupe État islamique (EI) avait pris ses quartiers en 2014, des hectares de terres agricoles sont désormais interdits d'accès à leurs propriétaires chrétiens par une myriade de factions armées nées de la lutte antijihadistes.

Plusieurs chefs miliciens -dont un chrétien- ont même été sanctionnés par Washington pour avoir saisi les terres de villages entiers.

Combien de maisons de chrétiens ont été accaparées au total ?

"Plein de gens ont forcé les portes ou trafiqué des actes de propriété mais aucun chiffre exact n'est disponible", assure à l'AFP le père Farid. 

Lui, qui voit régulièrement des familles, se risque à un pronostic: seulement "20% des cas ont été résolus".

Il faut que les propriétaires se manifestent, plaide le chef de la Commission anti-squatteurs, le général Mudhir al-Moula.

A la merci du prince

Aux familles de rassembler leurs documents propres, lui se charge de débusquer les faux papiers établis par les squatteurs puis de mobiliser soldats et policiers pour les expulser.

Mais c'est le serpent qui se mord la queue, soupire M. Warda de l'ONG Hammourabi. "Les juges ne peuvent agir que s'ils sont saisis."

Or, dans l'un des pays les plus corrompus au monde, chrétiens et musulmans répètent à l'envi qu'il ne sert à rien de porter plainte, particulièrement contre des miliciens.

La preuve, selon eux ? Des familles chrétiennes "ont obtenu des décisions de justice mais les forces de l'ordre ne les ont jamais appliquées", rapporte M. Warda, qui porte régulièrement la cause des chrétiens d'Irak à l'étranger.

Un homme a récemment appelé à faire bouger les choses: l'ex-chef de milice Moqtada Sadr, terreur des Américains et des minorités durant les années 2000.

A l'annonce de la venue du pape, début mars, le leader du premier bloc parlementaire  --et de milliers de paramilitaires-- a appelé publiquement à rendre les maisons des chrétiens.

Mais, rétorquent amèrement chrétiens et responsables unanimes, une bonne part des squatteurs sont justement... des sadristes.

"Il n'a qu'à ordonner à ses hommes de sortir de nos maisons au lieu de faire de telles annonces (...)  purement opportunistes avec la visite du pape", lance un chrétien excédé.

"Nous n'avons ni loi ni institution garantissant la citoyenneté de tous", assène pour sa part M. Warda. "Et tant que ce sera le cas, les chrétiens dépendront du bon vouloir du prince."

 

 

 

               


Israël dit «  avancer » dans les préparatifs de son opération militaire sur Rafah

Poussés par les combats et les destructions dans le reste de la bande de Gaza, plus d'un million de Palestiniens ont trouvé refuge à Rafah - ville de quelque 250.000 habitants - et s'entassent dans des tentes et des bâtiments publics. (AFP).
Poussés par les combats et les destructions dans le reste de la bande de Gaza, plus d'un million de Palestiniens ont trouvé refuge à Rafah - ville de quelque 250.000 habitants - et s'entassent dans des tentes et des bâtiments publics. (AFP).
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  • "Israël avance vers son opération ciblant le Hamas à Rafah", a déclaré mercredi un porte-parole du gouvernement, David Mencer
  • Depuis le début de l'offensive terrestre dans le territoire palestinien, le 27 octobre, "au moins 18 ou 19 des 24 bataillons" du Hamas ont été défaits, a-t-il poursuivi

JERUSALEM: Le gouvernement israélien dit "avancer" dans les préparatifs de son opération militaire prévue sur Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, où selon lui quatre bataillons de combattants du mouvement islamiste palestinien Hamas sont regroupés.

"Israël avance vers son opération ciblant le Hamas à Rafah", a déclaré mercredi un porte-parole du gouvernement, David Mencer, lors d'un point presse. "Les quatre bataillons qui restent à Rafah ne peuvent pas échapper à Israël, ils seront attaqués".

M. Mencer a ajouté que "deux brigades de réservistes" avaient été mobilisées pour des "missions défensives et tactiques dans Gaza".

Depuis le début de l'offensive terrestre dans le territoire palestinien, le 27 octobre, "au moins 18 ou 19 des 24 bataillons" du Hamas ont été défaits, a-t-il poursuivi.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré à plusieurs reprises qu'Israël entendait mener un assaut contre Rafah, ville où sont réfugiés des centaines de milliers de Gazaouis, déplacés par la guerre.

M. Netanyahu insiste sur le fait que l'anéantissement des derniers bataillons du Hamas à Rafah est cruciale dans la poursuite des objectifs de la guerre contre le Hamas, mouvement islamiste qui a pris le pouvoir dans le territoire côtier depuis 2007.

Poussés par les combats et les destructions dans le reste de la bande de Gaza, plus d'un million de Palestiniens ont trouvé refuge à Rafah - ville de quelque 250.000 habitants - et s'entassent dans des tentes et des bâtiments publics.

Mais les ONG et un nombre croissant de pays - et même l'allié historique américain - s'opposent à cette opération, craignant qu'elle ne fasse de nombreuses victimes civiles.

Le Hamas de son côté a répété sa demande de cessez-le-feu permanent dans la bande de Gaza, ce qui à ce stade de la guerre est inacceptable pour M. Netanyahu et son gouvernement qui ont juré d'"anéantir" le mouvement.

"Au moins 26.000 terroristes ont été tués, appréhendés, ou blessés dans les combats", a avancé M. Mencer.

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

En riposte, Israël a promis d'anéantir le Hamas et lancé une offensive massive qui a fait jusqu'à présent 34.262 morts, majoritairement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.


L'armée israélienne annonce mener une offensive sur le sud du Liban

Cette photo prise depuis une position israélienne le long de la frontière avec le sud du Liban montre de la fumée s'échappant du village libanais d'Odaisseh lors du bombardement israélien le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
Cette photo prise depuis une position israélienne le long de la frontière avec le sud du Liban montre de la fumée s'échappant du village libanais d'Odaisseh lors du bombardement israélien le 22 avril 2024. (Photo, AFP)
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  • "Des troupes sont déployées en nombre à la frontière et les forces armées mènent actuellement des actions offensives dans tout le sud du Liban", a indiqué le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant
  • Un porte-parole de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) a indiqué à l'AFP que celle-ci "n'avait détecté aucun franchissement terrestre" de la frontière mercredi

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé mercredi mener une "action offensive" sur le sud du Liban, où elle affirme que son aviation et son artillerie ont frappé 40 cibles du Hezbollah libanais et tué la moitié de ses commandants dans ce secteur.

"Des troupes sont déployées en nombre à la frontière et les forces armées mènent actuellement des actions offensives dans tout le sud du Liban", a indiqué le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant dans un communiqué.

"La moitié des commandants du Hezbollah dans le sud du Liban ont été éliminés, l'autre moitié se cache et laisse le champ libre aux opérations" militaires israéliennes.

Un porte-parole de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) a indiqué à l'AFP que celle-ci "n'avait détecté aucun franchissement terrestre" de la frontière mercredi.

Le mouvement libanais pro-iranien n'a pas réagi dans l'immédiat aux déclarations israéliennes.

Depuis le début de la guerre dans la bande de Gaza entre Israël et le Hamas le 7 octobre, le Hezbollah mène des attaques quasi-quotidiennes contre Israël pour soutenir le mouvement islamiste palestinien, son allié.

L'armée israélienne riposte en bombardant de plus en plus en profondeur le territoire libanais et en menant des attaques ciblées contre des responsables du Hezbollah.

"Il y a peu de temps, les avions de combat et l'artillerie israélienne ont frappé environ 40 cibles terroristes du Hezbollah" autour d'Aïta el-Chaab dans le sud du Liban, y compris des sites de stockage d'armes, a affirmé plus tôt l'armée israélienne dans un communiqué.

Le Hezbollah "a mis en place des dizaines de moyens et d'infrastructures terroristes dans la région" pour attaquer Israël, a-t-elle ajouté.

L'agence officielle libanaise ANI a fait état de son côté de 13 frappes israéliennes près d'Aïta el-Chaab.

"Des avions militaires israéliens ont effectué plus de 13 frappes aériennes ciblant la périphérie des villes d'Aïta el-Chaab, Ramya, Jabal Balat et Khallet Warda", a déclaré l'agence.

Le Hezbollah avait annoncé mardi avoir tiré des dizaines de roquettes sur le nord d'Israël, en représailles à la mort de deux civils dans le sud du Liban dans une frappe imputée à Israël.

Ces violences entre Hezbollah et Israël ont fait depuis le 7 octobre 380 morts du côté libanais, en majorité des combattants du mouvement libanais ainsi que 72 civils, selon un décompte de l'AFP.

Dans le nord d'Israël, onze soldats et huit civils ont été tués d'après l'armée.

 

 


L'Égypte nie avoir discuté avec Israël d’une offensive à Rafah

Un vendeur de pain pousse son chariot devant les décombres d’un bâtiment effondré à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 23 avril 2024. (AFP)
Un vendeur de pain pousse son chariot devant les décombres d’un bâtiment effondré à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 23 avril 2024. (AFP)
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  • Diaa Rashwan, chef du service d’information de l’État égyptien, a réfuté ce qui a été affirmé dans l’un des principaux journaux américains
  • L’Égypte s’est opposée à plusieurs reprises au déplacement des Palestiniens de Gaza et met en garde contre toute opération militaire à Rafah

LE CAIRE: L’Égypte nie avoir tenu des discussions avec Israël au sujet d’une offensive dans la ville palestinienne de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

Diaa Rashwan, chef du service d’information de l’État égyptien, a réfuté ce qui a été affirmé dans l’un des principaux journaux américains, selon lequel l’Égypte a discuté avec Israël de ses projets d’offensive à Rafah.

M. Rashwan a réaffirmé l’opposition totale de l’Égypte à cette opération, position annoncée à plusieurs reprises par les responsables politiques du pays, qui estiment que cette opération conduira à de nouveaux massacres, à des pertes humaines massives et à une destruction généralisée.

Il a ajouté que les avertissements répétés de l’Égypte sont parvenus à la partie israélienne par tous les moyens depuis qu’Israël a proposé de mener une opération militaire à Rafah. Ces avertissements mentionnent les pertes attendues et les répercussions négatives sur la stabilité de l’ensemble de la région.

Alors qu’Israël envisage de mener cette opération à laquelle l’Égypte, la plupart des pays du monde et leurs institutions internationales s’opposent, les efforts de l’Égypte depuis le début de l’agression israélienne se focalisent sur la conclusion d’un accord de cessez-le-feu et sur l’échange de prisonniers et de détenus, a précisé M. Rashwan.

Ce dernier a indiqué que l’Égypte cherchait à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, en particulier dans le nord et dans la ville de Gaza, ainsi que l’évacuation des blessés et des malades pour qu’ils soient soignés en dehors de cette région.

L’Égypte s’est opposée à plusieurs reprises au déplacement des Palestiniens de Gaza et met en garde contre toute opération militaire à Rafah.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com