Déracinés, les enfants syriens ne veulent pas rentrer au pays

 Dans son étude intitulée «Anywhere but Syria» (N'importe où sauf en Syrie), Save the Children a constaté qu'une écrasante majorité d'enfants réfugiés ne se voyait pas rentrer dans un proche avenir. (AFP/Fichier Photo)
Dans son étude intitulée «Anywhere but Syria» (N'importe où sauf en Syrie), Save the Children a constaté qu'une écrasante majorité d'enfants réfugiés ne se voyait pas rentrer dans un proche avenir. (AFP/Fichier Photo)
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Publié le Mercredi 10 mars 2021

Déracinés, les enfants syriens ne veulent pas rentrer au pays

  • Save the Children a mené des recherches dans différents pays où les Syriens ont trouvé refuge après le déclenchement de la guerre en 2011
  • Près de 80% ont affirmé qu'ils s'attendaient à se retrouver ailleurs qu'en Syrie pour deux années encore

LONDRES: Dix ans après le début du violent conflit en Syrie, il manque une génération entière de Syriens. Des enfants qui ont grandi au cours des violences, et ont fui vers des rivages plus sûrs, ont affirmé dans un récent rapport à une grande organisation caritative qu'ils ne voulaient pas retourner dans leur pays d'origine.

Dans son étude intitulée «Anywhere but Syria», Save the Children a constaté qu'une écrasante majorité d'enfants réfugiés ne se voyait pas rentrer dans un proche avenir.

Entre novembre et décembre 2020, l'organisation de bienfaisance s'est entretenue avec plus de 1 900 enfants syriens âgés de 13 à 17 ans, en Syrie (dans les zones contrôlées par le régime de Bashar Assad), en Turquie, au Liban, en Jordanie et aux Pays-Bas.

Les résultats sont bouleversants: environ 79% des enfants ont déclaré qu'ils s'attendaient à se retrouver ailleurs qu'en Syrie pour les deux années à venir.

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Un enfant syrien fuyant la guerre est soulevé au-dessus des barrières frontalières pour entrer illégalement en territoire turc, près du poste frontière turc à Akcakale, dans la province de Sanliurfa. (Photo, AFP)

Parmi les enfants réfugiés aux Pays-Bas et dans les pays voisins de la Syrie, seuls 14% prévoient de retourner dans leur pays d'origine. Quelque 64% des enfants interrogés dans ces pays espèrent s'intégrer là où ils résident actuellement.

En Syrie, les résultats est clairs: les enfants ne veulent pas rester dans leur pays. Ils étaient beaucoup moins portés que ceux des autres pays concernés par l’étude à dire qu'ils aimeraient vivre en Syrie dans deux ans.

Le pessimisme est de mise en Syrie, les enfants étant moins susceptibles de croire qu'ils pourront vivre dans l’avenir là où ils le souhaitent.

Seuls 42% des enfants syriens déplacés à l'intérieur du pays ont déclaré qu'ils pensaient pouvoir réaliser leur souhait, bien moins que ceux vivant dans tout autre pays.

La situation est tout aussi désastreuse au Liban, pays qui accueille environ 1,5 million de réfugiés syriens et qui se trouve sous l’énorme pression de sa pire récession économique.

Dr Nana Ndeda, directrice des plaidoyers et de la communication de Save the Children pour le Liban, a déclaré à Arab News: «Le Liban présente un contexte particulier pour les réfugiés syriens. Nous sommes maintenant dans une situation où nous sommes extrêmement préoccupés par le sort des réfugiés au milieu d’une population entière qui connaît un fort recul dans l'accès aux services de base, dans une fragilité accrue.

«Le Liban traverse sa pire crise économique, et nous assistons à une augmentation des actes de violence et des pénuries de nourriture, de médicaments et d'autres produits de base. Cela aggrave encore la situation des réfugiés. Au cours des deux dernières semaines, la situation s'est rapidement détériorée, avec une augmentation du niveau de pauvreté”.

Ndeda a ajouté: «Les réfugiés au Liban sont maintenant deux fois plus pauvres qu'ils ne l'étaient il y a un an. La pandémie du coronavirus n'a pas arrangé les choses. Il y a eu plus d'un an de perturbation dans les services éducatifs, ce qui entraîne une augmentation des problèmes de protection, tels que le mariage des enfants, ainsi que d'autres abus, de même que l'augmentation du travail des enfants».

«La plupart des enfants prennent pour prétexte les difficultés de leur famille comme une motivation pour entrer sur le marché du travail plus tôt que prévu».

EN CHIFFRES

Enquête de Save the Children

* 26% - Enfants dont le plus grand souhait est de mettre fin à la violence en Syrie.

* 58% - Enfants en Syrie qui ont déclaré avoir été victimes de discrimination.

* 29% - Enfants au Liban qui veulent retourner en Syrie.

Save the Children indique que la liberté d'expression et l’auto-détermination des enfants au sujet de leur avenir sont parmi les thèmes soulevés lors des entretiens.

De nombreux enfants interrogés souhaitaient faire entendre leur voix hors de chez eux et de la société. L'équipe qui menait l’étude a constaté que les enfants au Liban étaient particulièrement désireux de signaler la valeur du travail conjoint pour influer de façon positive sur le changement.

Oben Coban, conseiller en relations gouvernementales auprès de Save the Children Turquie, a déclaré à Arab News: «Quels que soient les choix de ces enfants, retourner en Syrie ou rester, nous voulons qu'ils aient la sécurité de choisir un avenir sûr. Les enfants doivent avoir leur mot à dire sur leur avenir».

Comme au Liban, la Turquie a connu ses propres difficultés particulières pour les enfants réfugiés syriens. Coban de préciser: «Cette période de dix ans a été très cruelle pour ces enfants. Ils ont dû quitter leurs maisons et s'installer dans une nouvelle culture et un nouveau pays, avec une nouvelle langue.

«La Turquie n'est pas comme le Liban ou la Jordanie. Ici, c'est totalement différent. Plus de 3,5 millions de Syriens ont fui, et l'intégration avec la communauté d'accueil a été difficile».

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Une décennie de guerre a ravagé son pays, mais le président syrien Bashar Assad s’accroche quand même au pouvoir, avec l'aide d'alliés tels que le président russe Vladimir Poutine, et semble déterminé à se sortir du conflit. (Photos, AFP/Fichier)

Mais malgré ces barrières culturelles et ces différences linguistiques, les enfants syriens n'ont pas exprimé le désir de quitter la Turquie immédiatement. Oban a affirmé que «seuls 3% de tous les enfants syriens en Turquie voulaient rentrer, soit un nombre très limité. 88% veulent rester en Turquie. Seulement 9% veulent aller dans un autre pays”.

L'expérience turque des réfugiés syriens a apporté quelques points positifs: «Les filles sont plus susceptibles d'aller à l'école que dans de nombreux autres pays d'accueil, et la différence de langue, contrairement à nos attentes, n'a pas fait en sorte que les enfants en Turquie se sentent «différents» des autres enfants. Ce que ces enfants souhaitent le plus est de s'intégrer dans la société turque et de comprendre sa culture.

Aux Pays-Bas, dans le nord de l'Europe et aussi loin de la vie syrienne qu'on pourrait l'imaginer, des résultats similaires ont été observés, avec des enfants exprimant l'espoir de rester dans leur pays d'accueil.

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Des enfants jouent dans une flaque d'eau de pluie dans le camp inondé de Mukhayyam Al-Khair près du village de Kafr Uruq, dans le nord de la province d'Idlib, le 17 décembre 2020 (Photos, AFP/Fichier)

Juliette Verhoeven, responsable du lobbying et des plaidoyers auprès de Save the Children Pays-Bas, a expliqué à Arab News: «La plupart des enfants perçoivent le fait d'être aux Pays-Bas comme quelque chose de positif dans leur vie. Plus de 90% des enfants syriens aux Pays-Bas veulent y rester; environ 5% ont dit qu'ils iraient peut-être dans un pays tiers. Cela est nettement observable.

Il existe des différences importantes entre les Pays-Bas et les autres pays d'accueil qui ont été étudiés, en ce qui concerne l'accueil des réfugiés. En Turquie, vous ne pouvez pas être sûr que vous obtiendrez votre statut de réfugié, qui doit être régulièrement renouvelé.

Avec des barrières linguistiques et culturelles, les réfugiés doivent également faire face aux réglementations gouvernementales inflexibles d’Ankara, qui changent régulièrement en ce qui concerne les réfugiés syriens.

En revanche, a déclaré Verhoeven, aux Pays-Bas «ils ne sont jamais renvoyés en Syrie, qui est qualifiée de pays dangereux par le gouvernement néerlandais, de sorte que chaque réfugié obtient ce statut à moins que cette personne ne soit déjà enregistrée dans un autre pays de l'UE. Une fois que vous avez le statut de réfugié, vous avez un permis de cinq ans. La chance que vous obteniez la citoyenneté après cinq ans est tout à fait possible”.

Les enfants réfugiés de Syrie s'adaptent, à bien des égards, à leur pays d'accueil plus rapidement que leurs parents. Chaque réfugié aux Pays-Bas a la possibilité d'apprendre une langue, sachant que les enfants syriens apprennent la langue beaucoup plus rapidement que leurs parents, à mesure qu'ils grandissent dans la culture du pays.

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La fille syrienne déplacée Tayma, 4 ans, vend du jus de datte connu sous le nom de Jallab, au bord de la route, pendant le Ramadan, dans un camp près du poste frontière de Bab Al-Hawa avec la Turquie, pour aider son père blessé à subvenir à leurs besoins. (Photos, AFP/Fichier)

Verhoeven a expliqué que cela a contribué à «une disparité dans les connaissances entre les parents et les enfants syriens, qui ont tous indiqué qu'ils se sentaient davantage connectés avec la société néerlandaise qu'avec la société syrienne, du fait que leurs parents vivent à un rythme de processus d'intégration différent du leur”.

Avec toutes ces expériences différentes en Turquie, au Liban, et aux Pays-Bas, certains courants de pensées et de sentiments similaires se retrouvent systématiquement parmi les enfants réfugiés syriens. Au sommet de leurs priorités se trouve le désir universel de mettre fin à la violence.

Ils sont conscients, selon les chercheurs auteurs du rapport, que leur vie normale ne pourra jamais reprendre tant qu’un cessez-le-feu durable et qu’un quelconque règlement politique ne seront pas établis en Syrie. Avec les changements réguliers des acteurs politiques et militaires dans la région, on ignore quand ce moment viendra.

En attendant, la génération manquante de Syrie devrait souhaiter rester dans les foyers plus sûrs et éloignés qu’elle est en train de recréer.

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Twitter: @ CDP1882

 Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com 


Israël rejette une enquête de l'ONU l'accusant de «génocide» à Gaza

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien. (AFP)
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  • "Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué
  • Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens

JERUSALEM: Israël a "rejeté catégoriquement" mardi le rapport d'une commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies qui l'accuse de commettre un "génocide" dans la bande de Gaza depuis octobre 2023.

"Israël rejette catégoriquement ce rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate de cette commission d'enquête", a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre Benjamin Netanyahu et d'autres responsables israéliens.

En riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive dans la bande de Gaza qui a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste palestinien a pris le pouvoir en 2007.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU et est vivement critiquée par Israël, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produit à Gaza et continue de (s'y) produire", a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

Elle a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, Benjamin Netanyahu et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

Le ministère des Affaires étrangères israélien a accusé les auteurs du rapport de "servir de relais au Hamas", affirmant qu'ils étaient "connus pour leurs positions ouvertement antisémites — et dont les déclarations horribles à l'égard des Juifs ont été condamnées dans le monde entier."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts dans la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire palestinien.

L'ONU y a déclaré la famine, ce qu'Israël dément.


«Gaza brûle», déclare le ministre israélien de la Défense après des frappes intenses

Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza. (AFP)
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  • "Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas"
  • "Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée"

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense Israël Katz a affirmé la détermination d'Israël à poursuivre son offensive dans la bande de Gaza après des frappes nocturnes intenses de l'armée israélienne aux abords et dans la ville de Gaza.

"Gaza brûle. Tsahal frappe d'une main de fer les infrastructures terroristes, et les soldats de Tsahal se battent vaillamment pour créer les conditions nécessaires à la libération des otages et à la défaite du Hamas", a déclaré M. Katz sur X.

"Nous ne céderons pas et ne reculerons pas jusqu'à ce que la mission soit achevée", a-t-il ajouté.

 


Le Qatar est le seul pays capable d'être un médiateur concernant Gaza, souligne Rubio

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  • Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza
  • "Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar"

TEL-AVIV: Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a estimé mardi que le Qatar était le seul pays capable de jouer le rôle de médiateur pour Gaza, malgré une frappe israélienne ciblant des dirigeants du Hamas dans l'émirat.

"Evidemment, ils doivent décider s'ils veulent le faire après la semaine dernière ou non, mais nous voulons qu'ils sachent que, s'il existe un pays dans le monde qui pourrait aider à mettre fin à cela par une négociation, c'est le Qatar," a déclaré M. Rubio aux journalistes alors qu'il se rendait à Doha depuis Israël.