La Grande Mosquée de La Mecque, une histoire en perpétuelle évolution

La Grande Mosquée est le lieu vers lequel les musulmans du monde entier tournent leurs visages lorsqu'ils commencent leurs prières (Photo, AFP).
La Grande Mosquée est le lieu vers lequel les musulmans du monde entier tournent leurs visages lorsqu'ils commencent leurs prières (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 14 août 2020

La Grande Mosquée de La Mecque, une histoire en perpétuelle évolution

  • « Dans le passé, les dirigeants ont ordonné de creuser des puits et de paver les routes pour faciliter le voyage des pèlerins vers les lieux saints »
  • Le 14 septembre 1988, le roi Fahd posa la première pierre de ce qui allait devenir la plus grande extension de toute l’histoire de la Grande Mosquée

DJEDDAH : Tout au long de l’histoire, les califes musulmans et les dirigeants responsables de La Mecque, la ville la plus sainte de l’islam, se sont efforcés de protéger, d’agrandir et d’entretenir la Grande Mosquée.
« La Grande Mosquée est le lieu vers lequel les musulmans du monde entier tournent leurs visages lorsqu'ils commencent leurs prières, c’est pourquoi elle a toujours constitué le centre d'intérêt des sultans, des rois, des princes, des dirigeants et même des riches musulmans, déclare Dr Aminah Jalal, professeure d'histoire à l'université Umm Al-Qura. C’est grâce à leur soutien financier que la mosquée a pu être constamment restaurée et rénovée. Traversant les époques, leur foi les a incités à envoyer des dons ainsi qu'à fournir les ouvriers et les matériaux de construction nécessaires à l’entretien de cette Sainte Mosquée. » 
Elle ajoute que « dans le passé, les dirigeants ont également ordonné de creuser des puits et de paver les routes pour faciliter le voyage des pèlerins vers les Lieux saints, mais à l'époque, leurs efforts n’étaient pas aussi importants qu’aujourd’hui. Les contributions des dirigeants saoudiens à l'expansion et à l’entretien de la mosquée sont au-delà de toute comparaison. »
Califat de Rashidun
Selon un rapport de la Présidence générale des affaires des deux Saintes Mosquées, la Grande Mosquée était entourée de maisons à l'époque du prophète Ibrahim, et ce jusqu’au règne du deuxième calife musulman, Omar ibn Al-Khattab. Il a acheté les propriétés voisines pour élargir la circumambulation ; il a également ordonné la construction d'un mur de près de deux mètres de hauteur autour du site. 
Avec le nombre croissant de fidèles, il fallait plus d'espace et la mosquée a connu une première expansion sous le règne d'Uthman ibn Affan, le troisième calife musulman, en 647. Le nombre de personnes fréquentant la mosquée augmentant toujours, elle fut de nouveau agrandie 38 ans plus tard par le calife Abdellah ibn Al-Zubayr, qui fit également reconstruire la Kaaba après que celle-ci eut été endommagée. 
Califat omeyyade
Deux autres extensions furent décidées sous le règne du cinquième calife omeyyade, Abdel-Malik ben Marwan et celui de son fils Al-Waleed ben Abdel-Malik.
Califat abbasside
Selon le rapport de la Présidence générale : « La mosquée a également subi des extensions à l’époque du califat abbasside, car le vingtième calife des musulmans, Abu Jaafar Al-Mansour, a ordonné un petit agrandissement vers le nord. Un minaret sur le côté est de la mosquée a également été construit ». Le plus grand projet d'expansion de cette époque a été commandé aux environs de l'an 783 par le troisième calife abbasside, Mohammed Al-Mahdi, qui a agrandi la Grande Mosquée en utilisant l’espace occupé par des maisons voisines. 
Ce calife mourut en 785, avant que le projet ne soit achevé, de sorte que son fils et successeur, Musa, prit la direction du projet et augmenta la taille de la mosquée de 12 512 m². Pendant les 810 années suivantes, la Grande Mosquée ne changea pratiquement pas, seuls des travaux de restauration eurent lieu.
Règne ottoman
Au début des années 1570, les califes ottomans, le sultan Selim Khan et son fils, Murad Khan, supervisèrent les travaux de rénovation et de restauration. Ceux-ci comprenaient le remplacement du toit plat de la mosquée, en bois, par des dômes. Ils firent également construire des colonnes pour soutenir le toit ainsi qu’une arcade en pierre. La taille de la mosquée passa alors à 28 003 m².
Ère saoudienne
Malgré le travail impressionnant des dirigeants à travers l'histoire pour agrandir et prendre soin de la Grande Mosquée, les incroyables réalisations des rois saoudiens ont atteint un niveau sans précédent. Lorsque le roi Abdel Aziz a uni le pays et fondé l'Arabie saoudite, il a fait des deux Saintes Mosquées une priorité absolue et a veillé à ce qu'elles reçoivent une attention particulière.
En 1926, il ordonna une rénovation complète de la Grande Mosquée, notamment en prenant une directive visant à recouvrir tout le sol de marbre. Un an plus tard, selon la Présidence générale, il ordonna que des chapiteaux soient érigés au mataf (espace de circumambulation) pour protéger les fidèles de la chaleur du soleil. Il entreprit aussi de faire paver la masa pour la première fois (l’espace entre les rochers Safa et Marwah, que les pèlerins doivent parcourir à sept reprises).
En 1928, il ordonna la création d'une usine pour fabriquer le tissu kiswa, destiné à recouvrir la Kaaba. Il a même fait inclure une disposition dans son testament pour que ses fils continuent à être sollicités pour agrandir la Grande Mosquée, en prévision du nombre croissant de pèlerins. Lorsque son fils, le roi Saoud, devint monarque, la Grande Mosquée s’étendait environ sur 28 000 m². En 1955, il lança un projet d'expansion à long terme qui se poursuivit pendant près de dix ans. La taille de la masa fut augmentée, une zone souterraine et un étage ajoutés.
Le successeur de Saoud, le roi Faisal, poursuivit le travail d’extension et de développement. Le bâtiment entourant le Maqam Ibrahim fut détruit pour offrir plus d'espace aux fidèles faisant le tour de la Kaaba.
Après la prise de fonction du roi Khalid en 1975, la zone de mataf fut agrandie et les pavés de pierre de la masa remplacés par du marbre grec résistant à la chaleur, afin que les fidèles puissent faire le tour de la Kaaba plus confortablement, en particulier à midi.
Le 14 septembre 1988, le roi Fahd posa la première pierre de ce qui allait devenir la plus grande extension de toute l’histoire de la Grande Mosquée. Le projet permit de porter sa taille à 356 000 m², couvrant ainsi suffisamment d'espace pour qu’1,5 million de fidèles puissent accomplir confortablement le rituel du Hajj.  En outre, deux minarets ont été ajoutés aux sept existants.
Le sixième dirigeant saoudien, le roi Abdallah, qui accéda au trône en 2005, a lancé un autre projet d'expansion majeur comprenant des innovations architecturales et techniques. L’agrandissement du secteur du mataf permit d’accueillir plus de 130 000 personnes par heure au lieu de 50 000, afin de faire face au nombre croissant de pèlerins du Hajj et de l’Omra.
L'espace total couvert par la Grande Mosquée, en incluant ses zones ouvertes et ses installations, est passé à 750 000 m². Le coût de ces travaux a atteint plus de 80 milliards de riyals saoudiens (soit environ 18 milliards d’euros).
En 2015, le roi Salman a lancé cinq grands projets destinés à permettre à la mosquée d'accueillir près de 2 millions de fidèles dans un site comptant 1,5 million de m². Des propriétés voisines, qui valaient des milliards de dollars, ont été acquises afin de fournir le terrain nécessaire.
Les projets comprenaient des agrandissements du bâtiment principal, des places, des tunnels piétonniers, une station-service centrale et le premier périphérique. Des directives ont également été données pour tirer parti de tous les étages afin d’accueillir toujours plus de fidèles à la Grande Mosquée et de leur permettre d'effectuer le tawaf (circumambulation) de manière confortable. Les toilettes et des lieux d'ablution ont pu accueillir jusqu’à 16 300 personnes.
Les améliorations technologiques apportées à la Grande Mosquée comprennent des escaliers roulants et des ascenseurs qui fonctionnent 24 h/24, la climatisation, des innovations en matière d’éclairage et de son, ou encore l’instauration de systèmes de vidéosurveillance et de contrôle des incendies.
Un rapport du ministère des Finances a révélé que les projets de la troisième extension saoudienne de la Grande Mosquée, qui a débuté en 2008, comprenaient le développement de ce qui suit : le bâtiment principal, masa et mataf, les places extérieures, les ponts, les terrasses, les services centraux, les tunnels de service, les tunnels hospitaliers et piétonniers, les stations de transport en commun et les ponts, le périphérique qui entoure la mosquée, et les infrastructures telles que les centrales électriques et les réservoirs d'eau.
En août 2019, l'agence de presse saoudienne a rapporté qu'un projet visant à agrandir la cour située près de la Grande Mosquée de plus de 3 000 m² était en voie d'achèvement. Il facilitera le contrôle des foules et assurera la sécurité des visiteurs, permettant ainsi d’offrir aux pèlerins du Hajj et de l’Omra le meilleur accueil possible. 
 


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com