La Chine enlisée malgré elle dans la crise politique en Birmanie

Le président chinois Xi Jinping (Photo, AFP).
Le président chinois Xi Jinping (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 17 mars 2021

La Chine enlisée malgré elle dans la crise politique en Birmanie

  • Alors qu'il réfute toute implication dans le coup d'Etat du 1er février, le régime du président Xi Jinping est confronté à une montée du sentiment anti-chinois dans ce pays allié
  • Lors d'une visite en Birmanie en janvier 2020, le dirigeant élevait son voisin au rang de «pays au destin partagé», une haute distinction diplomatique dans l'esprit de Pékin

BANGKOK: Des usines qui brûlent et des ouvriers chinois qui se terrent : Pékin est enlisé dans la crise qui paralyse la Birmanie, où des manifestants l'accusent de collusion avec la junte.

Alors qu'il réfute toute implication dans le coup d'Etat du 1er février, le régime du président Xi Jinping est confronté à une montée du sentiment anti-chinois dans ce pays allié.

Lors d'une visite en Birmanie en janvier 2020, Xi Jinping élevait son voisin au rang de « pays au destin partagé », une haute distinction diplomatique dans l'esprit de Pékin. 

Un an plus tard, le pays du sud-est asiatique est plongé dans un chaos sanglant après le putsch qui a entraîné la chute du gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi.

Depuis, les militants pro-démocratie qui manifestent quotidiennement contre le coup de force accusent la Chine d'avoir œuvré en coulisse en faveur des militaires.

Alors que la répression s'abat sur l'opposition - plus de 200 morts d'après un bilan provisoire - Pékin est face à un dilemme : soutenir l'armée ou se ranger du côté d'une population de plus en plus anti-chinoise.

« Peu importe qui est au gouvernement, la Chine veut un Etat qui protège ses intérêts et ses projets », observe le politologue Richard Horsey

Mais « Pékin ne pense pas que l'armée puisse apporter cette stabilité... et plus la Chine tentera de tisser un lien avec ce régime, plus la population sera mise à l'écart », poursuit-il.

« Environnement hostile »

Au moins 32 usines à capitaux chinois ont été incendiées dimanche à Rangoun, la capitale économique birmane, pour des dégâts estimés à 31 millions d'euros, selon le quotidien nationaliste chinois Global Times. 

Le régime communiste a réclamé justice et une protection immédiate des « établissements chinois et de leur personnel ».

Les entreprises chinoises étaient fermées mardi dans les zones sensibles, laissant leurs employés face à un « environnement hostile », selon un représentant d'une usine textile de Rangoun. 

« Tous les salariés chinois restent à l'intérieur (...) quelques policiers sont aussi stationnés ici », a-t-il ajouté sous couvert d'anonymat. 

Des médias chinois ont depuis publié des commentaires menaçants, dont un indiquant que Pékin pourrait être amené à « prendre des mesures drastiques (...) si les autorités ne peuvent mettre un terme au chaos. »

Appels au boycott

La montée du sentiment anti-chinois en Birmanie pourrait faire des vagues dans le reste de l'Asie du sud-est, où Pékin étend son influence à coup d'investissements.

« Tout soulèvement populaire de grand échelle contre les intérêts chinois peut être contagieux et se propager au Cambodge, au Laos ou ailleurs », affirme le politologue Thitinan Pongsudhirak, de l'Université de Chulalongkorn en Thaïlande.

Dans les rues birmanes, les pancartes anti-chinoises sont courantes dans les cortèges, qui bruissent de rumeurs sur des vols chinois qui livreraient des armes à la junte. Sur internet, les appels au boycott de produits chinois se multiplient, des jeux vidéos aux téléphones Huawei, en passant par l'application TikTok. 

« La Chine est derrière l'armée birmane, c'est la raison principale des troubles dans notre pays », accuse un manifestant qui requiert l'anonymat.

Outre la défense de ses intérêts économiques, la Chine cherche à asseoir sa légitimé sur la scène internationale et « ne peut pas fermer les yeux sur une dictature féroce » à ses portes, estime Thitinan.

Pékin jouit d'une influence exceptionnelle sur la Birmanie et a, jusqu'ici, refusé de qualifier l'action des militaires de « coup d'Etat ».

La Chine fait partie des principaux investisseurs en Birmanie et fournit l'armée en matériel, tout en jouant un double jeu avec les milices de minorités ethniques stationnées le long de la frontière chinoise et opposées à l'armée depuis des décennies. 

Officiellement, Pékin - traditionnellement partisan de la non-ingérence dans les affaires internes d'un pays - appelle à une « désescalade ». 

Le 11 mars, la Chine a fini par approuver une condamnation par l'ONU de la junte, un geste rare de Pékin qui a protégé la Birmanie au sujet de la répression des Rohingyas. 

« La Chine peut jouer un rôle direct ou indirect de médiatrice dans la négociation d'un compromis », avance Soe Myint Aung, politologue au Yangon Center for Independent Research à Rangoun.


L'Ukraine va annoncer des mesures pour faire rentrer ses hommes de l'étranger

Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • Selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front
  • Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion

KIEV: Le chef de la diplomatie ukrainienne a indiqué mardi des "mesures" imminentes visant à faire rentrer en Ukraine les hommes en l'âge de combattre se trouvant à l'étranger.

L'Ukraine, qui combat depuis deux ans l'invasion russe, a cruellement besoin de soldats, d'autant que Kiev s'attend à ce que la Russie lance une nouvelle offensive dans les semaines ou mois à venir.

"Le fait de séjourner à l'étranger ne dispense pas un citoyen de ses devoirs envers sa patrie", a déclaré Dmytro Kouleba sur X, annonçant avoir ordonné des "mesures pour rétablir l'équité entre les hommes en âge d'être mobilisés en Ukraine et ceux à l'étranger".

Il n'a pas précisé la nature de ces mesures se bornant à dire que le ministère allait "prochainement fournir des éclaircissements" sur de nouvelles procédures à suivre pour "accéder aux services consulaires".

L'Ukraine interdit aux hommes en âge de combattre de voyager à l'étranger à quelques exceptions près.

Déserteurs 

Mais, selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front.

Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion.

La déclaration du ministre intervient alors qu'un influent site d'information ukrainien ZN.UA a publié lundi soir ce qu'il affirme être une lettre officielle signée par un adjoint de M. Kouleba et préconisant aux consulats ukrainiens de suspendre à partir de mardi tout service consulaire pour les hommes âgés de 18 à 60 ans.

Selon des médias ukrainiens, plusieurs consulats ukrainiens ont cessé d'accepter ces dossiers.

La compagnie d'Etat Dokument qui facilite la délivrance de documents ukrainiens a annoncé mardi sur son site qu'elle "suspendait" les procédures à l'étranger pour des "raisons techniques".

L'Ukraine, dont l'armée est en difficulté face aux troupes russes, a adopté une loi sur la mobilisation visant à durcir les punitions pour les récalcitrants.

Elle a aussi baissé l'âge de mobilisation de 27 à 25 ans.


Début des discussions entre Washington et Niamey sur le retrait des troupes américaines du Niger

Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
Short Url
  • Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis
  • Washington a accepté de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait

WASHINGTON: Washington a entamé les discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des troupes américaines qui y étaient déployées dans le cadre de la lutte antidjihadiste au Sahel, a déclaré lundi le Pentagone.

Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a finalement accepté la semaine dernière de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait.

"Nous pouvons confirmer le début des discussions entre les Etats-Unis et le Niger sur le retrait ordonné des forces américaines du pays", a déclaré le porte-parole du Pentagone Pat Ryder.

Une "petite délégation du Pentagone et du commandement militaire américain pour l'Afrique" participe aux discussions, a-t-il précisé.

Les Etats-Unis vont "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", a-t-il encore dit.

A Niamey, le ministre nigérien des Affaires étrangères, Bakari Yaou Sangaré, a indiqué dans un communiqué avoir eu lundi "des discussions" avec l’ambassadrice des États-Unis à Niamey, Kathleen Fitzgibbon, portant "sur la question du départ des troupes militaires américaines du Niger".

L’entretien s’est déroulé en présence de Maria Barron, directrice de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) à Niamey, qui a assuré que l'agence allait "poursuivre sa coopération bilatérale" avec le Niger, annonçant "un nouvel accord devant remplacer celui en cours qui expire en septembre 2024", selon le communiqué.

Au Niger, les Etats-Unis disposent notamment d'une base de drone importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Après le coup d'Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum fin juillet, le nouveau régime militaire a rapidement exigé le départ des soldats de l'ancienne puissance coloniale française et s'est rapproché de la Russie, comme le Mali et le Burkina Faso voisins, également dirigés par des régimes militaires et confrontés à la violence de groupes jihadistes.


L'Ukraine s'attend à une détérioration sur le front vers la mi-mai

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
Short Url
  • L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine
  • La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar

KIEV: La situation sur le front ukrainien va empirer autour de la mi-mai et début juin, qui sera une "période difficile", a prévenu lundi le chef du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov, sur fond de craintes d'une nouvelle offensive russe.

La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar, localité à la jonction des fronts Est et Sud, dont elle cherche à s'emparer depuis deux ans.

"N'allons pas trop dans les détails, mais il y aura une période difficile, à la mi-mai et début juin", a prévenu M. Boudanov, interrogé sur l'état du front, dans une interview au service ukrainien de la BBC.

L'armée russe "mène une opération complexe", a-t-il dit.

"Nous pensons qu'une situation plutôt difficile nous attend dans un futur proche. Mais il faut comprendre que ce ne sera pas catastrophique", a estimé Kyrylo Boudanov.

"Armageddon ne se produira pas, contrairement à ce que beaucoup disent en ce moment. Mais il y aura des problèmes à partir de la mi-mai", a-t-il ajouté.

L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine.

En face, les troupes russes, bien plus nombreuses et mieux armées, ne cessent de pousser à l'Est et revendiquent régulièrement la prise de petits villages dans le Donbass.

En février, Moscou s'est emparé d'Avdiïvka, une ville forteresse, et vise désormais la cité  stratégique de Tchassiv Iar.

Cette cité, perchée sur une hauteur, s'étend à moins de 30 kilomètres au sud-est de Kramatorsk, la principale ville de la région sous contrôle ukrainien, qui est un important nœud ferroviaire et logistique pour l'armée ukrainienne.

Offensive estivale? 

Lundi, le ministère russe de la Défense a affirmé avoir "libéré" Novomykhaïlivka, à une trentaine de kilomètres de Donetsk.

Ce village est proche de Vougledar, une cité minière à la jonction des fronts Sud et Est. Début 2023, l'Ukraine était parvenue à y repousser un assaut de l'armée russe, infligeant des pertes humaines importantes.

Kiev craint désormais une offensive estivale russe encore plus puissante.

Fin mars, le commandant des forces terrestres ukrainiennes Oleksandre Pavliouk avait jugé "possible" un tel scénario, impliquant un groupe de 100.000 soldats russes.

Le commandant en chef des forces ukrainiennes, Oleksandre Syrsky, a déjà admis mi-avril que la situation sur le front Est s'était "considérablement détériorée" récemment.

Il a affirmé voir une "intensification significative" de l'offensive russe depuis mars, aboutissant à des "succès tactiques".

La grande contre-offensive ukrainienne de l'été 2023 s'était heurtée à de puissantes lignes de défense russes qui ont épuisé les ressources de l'armée ukrainienne, sans permettre de libérer les régions occupées par la Russie.

L'Ukraine fait désormais face aux hésitations de ses alliés occidentaux, même si une aide militaire américaine de 61 milliards, longtemps bloquée, a finalement été votée par la Chambre des représentants des Etats-Unis samedi. Le texte doit encore être adopté par le Sénat puis promulgué par le président Joe Biden.

Kiev espère désormais que l'aide des Etats-Unis pourra atteindre le front très rapidement. Le Kremlin a, lui, jugé que qu'elle ne changerait "rien"