Les universités grecques redoutent une police des campus

Dans cette photo de fichier prise le 10 mars 2021, des policiers anti-émeute grecs surveillent une manifestation d’étudiants grecs criant des slogans contre la brutalité policière et contre un projet de création d'une nouvelle police pour les universités. (Sakis Mitrolidis/AFP)
Dans cette photo de fichier prise le 10 mars 2021, des policiers anti-émeute grecs surveillent une manifestation d’étudiants grecs criant des slogans contre la brutalité policière et contre un projet de création d'une nouvelle police pour les universités. (Sakis Mitrolidis/AFP)
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Publié le Vendredi 19 mars 2021

Les universités grecques redoutent une police des campus

  • Des milliers d'étudiants manifestent régulièrement depuis des semaines tandis que recteurs et professeurs d'universités s'inquiètent de la présence future de patrouilles de police sur leurs campus
  • Pour le Premier ministre conservateur Kyriakos Mitsotakis, la nouvelle police des universités est nécessaire pour apporter "un air frais de liberté, jusqu'ici étouffé par la fumée des bombes incendiaires"

ATHÈNES : Les universités grecques redoutent l'instauration prochaine d'une police spéciale sur les campus, qui au lieu d'apaiser les violences ne ferait, selon elles, que les attiser dans un pays où les souvenirs de la répression policière sous la dictature des colonels sont toujours vifs.

Des milliers d'étudiants manifestent régulièrement depuis des semaines tandis que recteurs et professeurs d'universités s'inquiètent de la présence future de patrouilles de police sur leurs campus.

Pour le Premier ministre conservateur Kyriakos Mitsotakis, la nouvelle police des universités est nécessaire pour apporter "un air frais de liberté, jusqu'ici étouffé par la fumée des bombes incendiaires".

En vertu du projet de loi, adopté le 11 février, un millier de policiers spécialement entraînés seront déployés à partir de septembre dans les principales universités, a indiqué une source policière à l'AFP.

Les forces de l'ordre ne porteront pas d'armes mais seront équipées de matraques, de gaz lacrymogènes et anesthésiants.

Dès le mois prochain, des patrouilles seront déployées dans quelques grandes universités, a annoncé le ministère de l'Ordre public.

Depuis des décennies, les universités grecques sont le théâtre de grèves, manifestations, violences et échauffourées contre le personnel, de sit-ins contre les réformes, mais aussi d'une délinquance régulière.

Récemment, la police anti-émeutes est intervenue dans l'université Aristotelio de Thessalonique pour mettre fin à l'occupation des locaux administratifs.

"Des édifices historiques sont vandalisés, des infrastructures pillées, des gens menacés, des jeunes filles violées et de la drogue vendue" sur les campus, a fustigé le Premier ministre devant les députés.

Mais, à l'Université polytechnique d'Athènes, le vice-recteur Evangelos Sapountzakis, qui en est lui-même diplômé, a confié à l'AFP ses "doutes" sur l'efficacité de cette police et "la provocation" qu'elle pourrait constituer aux yeux des étudiants.

Sous l'actuel gouvernement conservateur, plusieurs interventions musclées de la police contre des manifestants ont été rapportées par les médias, mais rares ont été les enquêtes jusqu'ici.

Vandalisme, cambriolage, drogue

Parlant sous couvert de l'anonymat, un professeur de Polytechnique a expliqué à l'AFP que le commissariat de quartier a souvent "trop peur" d'intervenir sur les récents cas de vandalisme, de vol et de trafic de drogue qu'a connu le campus du quartier athénien de Zografou, couvert de graffitis.

"Pire", le vol d'équipements "qu'il faudra un an pour remplacer", a-t-il dit, précisant que le "laboratoire a été cambriolé six fois".

Historiquement, les universités de Grèce ont toujours cherché à garder la police à distance après son rôle dans la répression sanglante d'un soulèvement étudiant de l'Université Polytechnique d'Athènes contre la dictature des colonels, en 1973.

Une pétition en ligne contre la nouvelle police des campus a recueilli des centaines de signatures d'universitaires.

M. Sapountzakis estime que l'université pourrait gérer sa propre sécurité si les fonds publics n'avaient pas subi des coupes drastiques pendant une décennie de crise.

"En 2009, notre budget était de 9,36 millions d'euros. Cette année, il est de 3,8 millions d'euros", dit-il. "La facture d'électricité seule coûte environ 2 millions d'euros", ajoute-t-il dans son bureau, le regard sur son campus mal entretenu.

"Peur de parler"

En décembre, la conférence des recteurs d'universités a "reconnu la nécessité" d'une initiative "réaliste" pour la sécurité des campus et réclamé plus de détails sur le projet gouvernemental.

Elle a été critiquée pour sa position insuffisamment ferme contre les violences agitant les campus grecs.

En octobre, le recteur de l'Université des sciences économiques d'Athènes (AUEB) a été agressé dans son bureau par des jeunes cagoulés qui ont enroulé autour de son cou une banderole qui proclamait "Solidarité avec les sit-ins".

"Notre université a des problèmes majeurs de criminalité, insignifiante ou pas, perpétrée en majorité par des non-étudiants", a déclaré à l'AFP un membre de la faculté.

Selon lui, le personnel et les étudiants "ont peur de parler ouvertement car ils pourraient être pris pour cibles".

Sur un mur de l'Université Polytechnique, un immense tag d'un cochon porte un manteau de policier.

Mais pour le professeur d'ingéniérie Xenofon Lignos, qui a passé toute sa carrière à Polytechnique après y avoir fait ses études, les images de dysfonctionnement dissimulent des travaux de recherche solides accomplis par ses étudiants, en grande partie financés par des entreprises européennes.

"Je suis fier de ces jeunes", dit-il.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.