Megan Rapinoe à la Maison Blanche pour défendre l'égalité salariale

Le président américain Joe Biden prend la parole sous le regard de la joueuse de football américaine Megan Rapinoe lors d'un événement organisé dans le cadre de la Journée de l'égalité des salaires dans l'auditorium South Court de la Maison Blanche à Washington DC, le 24 mars 2021. (JIM WATSON / AFP)
Le président américain Joe Biden prend la parole sous le regard de la joueuse de football américaine Megan Rapinoe lors d'un événement organisé dans le cadre de la Journée de l'égalité des salaires dans l'auditorium South Court de la Maison Blanche à Washington DC, le 24 mars 2021. (JIM WATSON / AFP)
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Publié le Jeudi 25 mars 2021

Megan Rapinoe à la Maison Blanche pour défendre l'égalité salariale

  • Deux fois championne du monde avec les Etats-Unis, l'attaquante réclame avec toute l'équipe féminine de football d'être payées autant que leurs homologues masculins
  • En 2019, les joueuses internationales ont attaqué leur fédération pour obtenir la parité, sans succès jusqu'ici

WASHINGTON : La star américaine du football féminin Megan Rapinoe a témoigné mercredi, devant le Congrès puis à la Maison Blanche, sur les inégalités salariales entre hommes et femmes, appelant à agir sans attendre pour combler les différences encore criantes à tous les niveaux de revenus.

"J’ai été dévaluée parce que je suis femme", a lancé la joueuse après avoir rencontré le président Joe Biden, un "allié" avec lequel elle a affiché sa complicité.

"Cette présidence est évidemment bien plus accueillante que la précédente", a ajouté dans un grand sourire celle qui avait promis qu'elle ne se rendrait pas à la Maison Blanche lorsque Donald Trump en était le locataire.

"Il s'agit de justice, il s'agit d'être fidèle à nos valeurs", a souligné de son côté Joe Biden. "Je vous remercie car vous êtes un exemple."

Deux fois championne du monde avec les Etats-Unis, l'attaquante réclame avec toute l'équipe féminine de football d'être payées autant que leurs homologues masculins, largement mieux rémunérés malgré des résultats sportifs inférieurs.

En 2019, les joueuses internationales ont attaqué leur fédération pour obtenir la parité, sans succès jusqu'ici. 

"Il est tout simplement inacceptable que nous nous battions encore pour l'égalité salariale", avait lancé plus tôt la footballeuse de 35 ans devant une commission parlementaire de la Chambre des représentants. 

"Si cela nous arrive à nous, si cela m'arrive à moi, alors que nous sommes sous les projecteurs tout le temps, cela arrive bien entendu" à toutes les femmes, a poursuivi Megan Rapinoe, qui a documenté sa visite sur Instagram. 

Trois mois pour un salaire égal 

Elle était à Washington pour le "jour de l'égalité salariale", qui marque le temps supplémentaire qu'il faut aux Américaines pour rattraper le salaire empoché par leurs collègues masculins l'année précédente: près de trois mois.

Pour chaque dollar gagné par un homme américain, une femme gagne 82 cents. Et les différences se creusent encore plus brutalement pour les femmes afro-américaines (60 cents) et les femmes hispaniques (55 cents), selon les organisations de défense de la parité salariale. 

La situation se répète "pour pratiquement tous les emplois sur lesquels nous avons des données", a précisé Nicole Mason, présidente du centre "Institute for Women's Policy Research". 

Cela ne vient pas "des choix individuels des femmes" mais "de la sous-évaluation systématique du talent, des capacité et de ce qu'apportent les femmes au monde du travail", a-t-elle insisté. 

"Si nous ne faisons rien, les femmes n'atteindront pas la parité économique avec les hommes avant 2059. Et pour les femmes de couleur, cela prendra plus d'un siècle", a-t-elle souligné.

"Mais nous n'avons pas à attendre", a déclaré Megan Rapinoe. "Nous pouvons changer cela dès maintenant, il faut juste en avoir la volonté."

Pandémie aux effets "dévastateurs" 

Pourtant, le Congrès devrait tarder à agir, sous le coup des divisions profondes entre républicains et démocrates.

La présidente démocrate de la Chambre Nancy Pelosi a promis jeudi qu'un nouveau texte pour "renforcer et moderniser" la loi sur l'égalité des salaires de 1963 serait adopté à la chambre basse en avril.

Malgré leur très courte majorité, les démocrates ne disposeront toutefois probablement pas d'assez de voix pour faire ensuite avancer l'examen de ce texte vers un vote au Sénat.

Les arguments des républicains de la Chambre contre ce texte ont varié au cours de l'audition.

Pour l'élue Nancy Mace, première femme diplômée de l'école militaire The Citadel, les différences salariales ne s'expliquent pas par une "discrimination généralisée" mais par le fait que les "femmes en général sont prêtes à échanger un plus haut salaire contre plus de flexibilité". 

"Nous parlons du libre marché et de la liberté", a lancé un autre républicain, Pat Fallon, en se demandant pourquoi, si de telles différences existaient, les entreprises n'employaient-elles pas que des femmes.

"Cela ne marche pas comme ça", a répondu Nicole Mason, soulignant qu'il n'existait "pas un secteur dominé par les femmes où elles gagnent plus que les hommes".

En attendant une avancée des parlementaires, le vaste plan de relance de Joe Biden, adopté en mars au Congrès, cible particulièrement les femmes.

Car si les inégalités étaient déjà profondes, la pandémie a encore accentué les différences. 

Avec des effets dévastateurs, a déploré Nancy Pelosi dans un communiqué: "Des millions de femmes qui ont perdu leurs emplois et plus de deux millions qui ont été forcées de quitter tout simplement le marché du travail, dont plus d'un million de mères, faute d'un accès abordable à la garde d'enfants."


Vaste partenariat entre Washington et Kiev, attaque russe à Odessa

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky rencontre le président américain Donald Trump en marge des funérailles du pape François à la basilique Saint-Pierre au Vatican, le 26 avril 2025. (AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky rencontre le président américain Donald Trump en marge des funérailles du pape François à la basilique Saint-Pierre au Vatican, le 26 avril 2025. (AFP)
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  • Cet accord américano-ukrainien intervient en parallèle à de multiples tractations diplomatiques en cours pour trouver une issue au conflit, trois ans après son déclenchement par la Russie
  • La ministre ukrainienne de l'Economie, Ioulia Svyrydenko, qui a fait le déplacement à Washington pour signer le document, a estimé mercredi que le fonds créé avec les Etats-Unis "attirera des investissements mondiaux dans notre pays"

WASHINGTON: Les Etats-Unis et l'Ukraine ont signé à Washington un vaste partenariat mettant en place un fonds d'investissement pour la reconstruction de ce pays ravagé par la guerre et donnant aux Américains un accès à ses ressources naturelles, un accord qui a été suivi jeudi par une frappe russe meurtrière dans la ville méridionale d'Odessa.

Cet accord américano-ukrainien intervient en parallèle à de multiples tractations diplomatiques en cours pour trouver une issue au conflit, trois ans après son déclenchement par la Russie.

La ministre ukrainienne de l'Economie, Ioulia Svyrydenko, qui a fait le déplacement à Washington pour signer le document, a estimé mercredi que le fonds créé avec les Etats-Unis "attirera des investissements mondiaux dans notre pays".

L'accord avec Washington financera des "projets d'extraction de minerais, de pétrole et de gaz", a-t-elle précisé sur Facebook. Mais l'Ukraine "conserve l'entière propriété et le contrôle de ces ressources" y compris le sous-sol, et ce sera "l'Etat ukrainien qui détermine où et quoi extraire", a assuré la ministre.

Selon le Trésor américain, cet accord "reconnaît l'importante aide financière et matérielle que le peuple américain a fournie à la défense de l'Ukraine depuis l'invasion à grande échelle de la Russie" -- une expression très rarement utilisée par Washington depuis le retour au pouvoir de Donald Trump.

"Très bonne chose" 

Les Etats-Unis ont fourni, sous le précédent gouvernement de Joe Biden, des dizaines de milliards de dollars d'aide à l'Ukraine.

Donald Trump "veut que les deux parties s'assoient à la table, maintenant, en montrant que les États-Unis ont un intérêt économique en Ukraine", a souligné le secrétaire au Trésor américain Scott Bessent sur Fox News.

"C'est un signal pour les dirigeants russes. C'est aussi un signal pour le peuple américain que nous avons une chance de participer, d'obtenir (...) une compensation" pour les financements et armes fournies à l'Ukraine, a-t-il poursuivi.

Le projet d'accord a été depuis des semaines au coeur de tensions entre Kiev et Washington, dont le soutien est crucial pour l'Ukraine.

Une précédente mouture de ce texte aurait dû être signée lors de la visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky à la Maison Blanche fin février, mais son altercation inédite avec son homologue américain, sous les caméras, avait précipité son départ et annulé la signature de l'accord.

Une nouvelle version, proposée par Washington en mars, avait été jugée très défavorable par des députés ukrainiens et des médias.

Au fil des négociations, ce document a pu être transformé en une version plus acceptable pour Kiev, selon des responsables ukrainiens.

Un démocrate américain du Congrès, Gregory Meeks, a cependant dénoncé mercredi soir une "extorsion" de Donald Trump.

"Bel accord" 

"C'est vraiment un bel accord international équitable entre les gouvernements américain et ukrainien concernant des investissements communs dans le développement et la reconstruction de l'Ukraine", s'était félicité à la télévision nationale le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal avant l'annonce de la signature du texte.

"Aucune dette, aucune aide" accordée avant la signature "ne fait partie de cet accord", avait assuré Denys Chmygal.

Le document doit encore être ratifié par le Parlement ukrainien après sa signature.

Il ne semble pas comporter de garanties de sécurité américaines face à la Russie, pourtant demandées par l'Ukraine, un point sur lequel insistait Volodymyr Zelensky.

"Cet accord montre clairement à la Russie que l'administration Trump est engagée à un processus de paix centré sur une Ukraine libre, souveraine et prospère sur le long terme", écrit le secrétaire au Trésor Scott Bessent dans le communiqué.

Le texte met en place un "fonds d'investissement pour investir dans la reconstruction" de l'Ukraine, lequel fonds sera financé et géré à parts égales par Ukrainiens et Américains.

La quantité de richesses minières que renferme le sol ukrainien reste peu claire, la plupart de ces ressources étant inexploitées, difficiles à extraire ou de facto sous contrôle russe, car se trouvant dans des territoires occupés par l'armée russe.

"Désir de tuer" 

Cette dernière a tiré un drone sur une zone résidentielle à Odessa, dans le sud de l'Ukraine, tuant deux personnes et blessant cinq autres, a annoncé tôt jeudi le gouverneur de la région sur Telegram. Les services d'urgence ukrainiens ont dénoncé une "attaque russe massive".

Simultanément, des explosions ont été entendues dans un quartier de la ville de Soumy et des alertes anti-aériennes déclenchées, entre autres, dans les régions de Kiev, Kharkiv, Tcherniguiv, Soumy, Donetsk, Dnipropetrovsk, Zaporijjia.

A Odessa, une "attaque ennemie a endommagé, des immeubles résidentiels, des maisons, un supermarché, une école et des voitures", a annoncé sur son compte Telegram le gouverneur local Oleg Kiper, mentionnant deux personnes tuées et cinq autres blessées par une frappe de drone russe.

Le chef de l'administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermark, a appelé sur Telegram à pousser avec les Etats-Unis "pour un cessez-le-feu complet".

Le président russe Vladimir Poutine "aura constamment le désir de tuer, jusqu'à la fin de ses jours, mais la diplomatie couplée à des moyens économiques énergiques d'influence contraindront la Russie à arrêter la guerre", a écrit M. Iermark.


CIJ: l'impartialité de l'UNRWA suscite de «sérieux doutes» selon les Etats-Unis

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
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  • La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre
  • Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ

LA HAYE: Un représentant des Etats-Unis a fait part mercredi à la Cour internationale de Justice de "sérieux doutes" concernant l'impartialité de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) lors d'audiences consacrées aux obligations humanitaires d'Israël envers les Palestiniens.

"L'impartialité de l'UNRWA suscite de sérieux doutes, du fait d'informations selon lesquelles le Hamas a utilisé les installations de l'UNRWA et que le personnel de l'UNRWA a participé à l'attentat terroriste du 7 octobre contre Israël", a déclaré Josh Simmons, de l'équipe juridique du département d'État américain.

La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre.

Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ.

M. Simmons a déclaré aux juges qu'Israël avait "de nombreuses raisons" de mettre en doute l'impartialité de l'UNRWA.

"Il est clair qu'Israël n'a aucune obligation d'autoriser l'UNRWA à fournir une assistance humanitaire", a-t-il déclaré.

Israël a promulgué une loi interdisant à l'UNRWA, d'opérer sur le sol israélien, après avoir accusé certains membres du personnel d'avoir participé aux attaques du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché le conflit.

Une série d'enquêtes, dont l'une menée par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, a révélé des "problèmes de neutralité" à l'UNRWA, mais a souligné qu'Israël n'avait pas fourni de preuves de son allégation principale.

Philippe Lazzarini, directeur de l'UNRWA, a déclaré mardi que plus de 50 membres de son personnel à Gaza avaient été maltraités et utilisés comme boucliers humains alors qu'ils étaient détenus par l'armée israélienne.

Lors de sa déposition face à la Cour, Diégo Colas, représentant la France, a appelé Israël à lever "sans délai" son blocage de l'aide vers la bande de Gaza".

"L'ensemble des points de passage doivent être ouverts, le travail des acteurs humanitaires doit être facilité, et le personnel doit être protégé conformément aux droits internationaux", a-t-il déclaré .

"Conséquences mortelles" 

Israël contrôle tous les flux d'aide internationale, vitale pour les 2,4 millions de Palestiniens de la bande de Gaza frappés par une crise humanitaire sans précédent, et les a interrompus le 2 mars dernier, quelques jours avant l'effondrement d'un fragile cessez-le-feu après 15 mois de combats incessants.

"L'interdiction totale de l'aide et des fournitures humanitaires décrétée par les autorités israéliennes depuis le 2 mars a des conséquences mortelles pour les civils de Gaza", a déclaré dans un communiqué Claire Nicolet, responsable de la réponse d'urgence de l'ONG Médecins sans Frontières dans la bande de Gaza.

"Les autorités israéliennes utilisent l'aide non seulement comme une monnaie d'échange, mais aussi comme une arme de guerre et un moyen de punition collective pour plus de 2 millions de personnes vivant dans la bande de Gaza," a-t-elle ajouté.

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence".

La résolution demande à la CIJ de clarifier les obligations d'Israël concernant la présence de l'ONU, de ses agences, d'organisations internationales ou d'États tiers pour "assurer et faciliter l'acheminement sans entrave des fournitures urgentes essentielles à la survie de la population civile palestinienne".

Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas juridiquement contraignants, mais celui-ci devrait accroître la pression diplomatique sur Israël.

En juillet dernier, la CIJ avait aussi rendu un avis consultatif jugeant "illégale" l'occupation israélienne des Territoires palestiniens, exigeant qu'elle cesse dès que possible.


Après la panne géante, les énergies renouvelables sur le banc des accusés en Espagne

Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
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  • Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne.
  • Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez.

MADRID : L'essor des énergies renouvelables a-t-il fragilisé le réseau électrique espagnol ? Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne, malgré les messages rassurants des autorités.

« Le manque de centrales nucléaires et la multiplication par dix des énergies renouvelables ont mis à terre le réseau électrique », assure en une le quotidien conservateur ABC mercredi matin. « Les alertes sur les renouvelables depuis cinq ans » ont été « ignorées », regrette de son côté El Mundo, également classé à droite.

Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, qui a fait de l'Espagne l'un des champions européens de la transition verte.

Selon le gestionnaire du réseau électrique espagnol REE, le solaire et l'éolien ont représenté en 2024 près de 40 % du mix électrique espagnol. C'est près de deux fois plus qu'en 2014, et près du double également de la part du nucléaire, tombée l'an dernier à 20 %. 

Cette évolution est défendue par l'exécutif, qui s'est engagé à fermer toutes les centrales nucléaires d'ici dix ans, mais elle est source de tensions dans le pays, plusieurs rapports ayant pointé ces derniers mois de possibles risques en l'absence de mesures fortes pour adapter le réseau.

- Une énergie « sûre » ?

Dans son document financier annuel publié fin février, Redeia, la maison-mère de REE, avait ainsi mis en garde contre « la forte pénétration de la production renouvelable sans les capacités techniques nécessaires à un comportement adéquat face aux perturbations ».

Cela pourrait « provoquer des coupures de production », qui « pourraient devenir sévères, allant jusqu'à entraîner un déséquilibre entre la production et la demande, ce qui affecterait significativement l'approvisionnement en électricité » de l'Espagne, avait-elle écrit. 

Un message relayé par l'organisme espagnol de la concurrence (CNMC) dans un rapport de janvier. « À certains moments, les tensions du réseau de transport d'électricité ont atteint des valeurs maximales proches des seuils autorisés, dépassant même ces seuils à certains moments », avait écrit l'organisme.

Après la coupure de lundi, certains experts du secteur se sont interrogés sur un éventuel déséquilibre entre production et demande (difficile à corriger dans un réseau où l'éolien et le solaire ont une place prépondérante) qui aurait pu contribuer à l'effondrement du système électrique espagnol.

Dans un entretien accordé mercredi matin à la radio Cadena Ser, Beatriz Corredor, la présidente de Redeia et REE (l'ex-députée socialiste) a cependant assuré que la production d'énergies renouvelables était « sûre ».

« Relier l'incident si grave de lundi à une pénétration des énergies renouvelables n'est pas vrai, ce n'est pas correct », a-t-elle insisté, en assurant que le rapport de février ne faisait que dresser la liste de risques potentiels, comme l'y oblige la législation. 

- « Ignorance » -

Mardi déjà, Pedro Sánchez avait lui aussi défendu le modèle énergétique mis en œuvre par son gouvernement, rappelant que la cause précise de la panne qui a provoqué le chaos au Portugal et en Espagne durant de longues heures lundi n'était toujours pas connue à ce stade.

« Ceux qui lient cet incident au manque de nucléaire mentent franchement ou démontrent leur ignorance », a assuré le dirigeant socialiste.

« Les centrales nucléaires, loin d'être une solution, ont été un problème » durant la panne, car « il a été nécessaire de rediriger vers elles de grandes quantités d'énergie pour maintenir leurs réacteurs stables », a insisté le chef du gouvernement. 

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la panne depuis deux jours, dont celle d'une cyberattaque. Mardi, la justice espagnole a ouvert une enquête pour déterminer si la panne avait été provoquée par un « sabotage informatique » susceptible d'être qualifié de « délit terroriste ».

REE estime cependant que cette hypothèse est peu crédible. « Au vu des analyses que nous avons pu réaliser avec l'aide notamment du Centre national du renseignement espagnol (CNI), nous pouvons écarter un incident de cybersécurité », a ainsi assuré le gestionnaire.

D'après REE, l'équivalent de 60 % de la consommation électrique de l'Espagne, soit 15 gigawatts, a disparu en l'espace de cinq secondes seulement lors de la panne survenue lundi à 12 h 33 (11 h 33 GMT), un phénomène qualifié d'« inédit » et « totalement extraordinaire ».