«Gueule de bois» des agriculteurs devant un gel «historique»

Un vigneron à Chablis, en Bourgogne, tente de sauver ses vignes en utilisant des bougies antigel. (Photo, AFP)
Un vigneron à Chablis, en Bourgogne, tente de sauver ses vignes en utilisant des bougies antigel. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 10 avril 2021

«Gueule de bois» des agriculteurs devant un gel «historique»

  • Un désastre «quasiment jamais arrivé dans l'activité agricole moderne»
  • Les aides habituelles en cas de calamités agricoles ne sont pas à la hauteur des pertes

Le gel qui a couvert une large partie de la France cette semaine s'annonce comme l'un des pires des dernières décennies, de nombreuses cultures, vignes et vergers en particulier, ayant été frappées du nord au sud du pays.

«C'est une crise historique, parce que la dernière que l'on a connue, c'est 1991, et on est allé plus bas hier (jeudi) en température», a déclaré André Bernard, vice-président des chambres d'agriculture chargé du dossier gestion des risques.

Vignes, pommiers, pruniers, arbres à kiwi... Dans certaines régions, des agriculteurs disent avoir tout perdu après des températures qui sont descendues cette semaine à -5 ou -6 degrés. D'autres tentent encore d'évaluer l'ampleur des dégâts, d'autant qu'une nouvelle chute du thermomètre est anticipée en début de semaine prochaine.

Les professionnels ne sont pas encore en mesure de chiffrer les pertes, mais elles seront d'autant plus importantes que la floraison, stoppée net par le gel, était bien entamée.

Résultat: «gueule de bois» générale, selon les mots de Sébastien Prouteau, président du syndicat FNSEA en Indre-et-Loire.

Le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie s'est rendu dans l'après-midi dans ce département pour apporter son soutien à la filière viticole, avant un déplacement samedi dans la vallée du Rhône.

Il a déjà annoncé vouloir déclencher le fonds des calamités agricoles. Toutefois, les grandes cultures (céréales, colza) et les vignobles, incités à s'assurer, ne se sont pas éligibles.

Sur place, il a évoqué un «événement climatique exceptionnel», qui a touché 10 régions sur 13, et assuré que «la pression dans le tube» serait maximale pour que l'aide arrive rapidement, évoquant une réunion lundi à ce sujet.

«Malheureusement, trop peu d'hectares de vignes sont protégés. Sur 800 000 hectares en France, seuls 200 000 sont assurés», dit Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA et viticulteur dans l'Hérault.

«Très faible récolte»

Du nord au sud, les constats accablants s'enchaînent. 

«On sait déjà qu'on va avoir une très faible récolte en 2021», a déclaré Jean-Marie Barillère, président du CNIV, qui rassemble les professionnels du vin sous appellation.

Aussi président de l'Union des Maisons de Champagne, M. Barillère «pense qu'il y a beaucoup de dégâts dans le vignoble champenois, notamment dans le cépage chardonnay où les bourgeons étaient sortis».

Dans le Bordelais, Dominique Guignard écrase des feuilles de vigne dans ses mains. «Cela casse comme du verre parce qu'il n'y a plus d'eau, ça s'est desséché complétement, il n'y a plus de vie», constate le président du syndicat viticole des Graves.

Dans le Tarn-et-Garonne, un des principaux vergers de France, «c'est une véritable catastrophe», relate aussi Françoise Roch, présidente de la Fédération nationale des producteurs de fruits. «J'espère que l'Etat va être à la hauteur de la catastrophe sinon on ne se relèvera pas de cette année blanche. Dans six mois, les gars déposent le bilan si des moyens extraordinaires ne sont pas mis en place».  

En plaines, les céréaliers s'inquiètent aussi, sans pouvoir mesurer précisément l'étendue des dégâts.

Environ 40 000 hectares de betteraves ont été touchés, selon le syndicat spécialisé CGB, qui estime que les surfaces à resemer dépendront du «taux de mortalité» des racines.

Aides d'urgence réclamées

«A situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles indispensables», a tweeté la présidente de la FNSEA Christiane Lambert.

«Si le ministre a déclenché la procédure de calamité agricole, la gravité de la situation exige aussi des mesures d'urgence plus simples, plus rapides et accessibles à toutes et tous, notamment en termes d'avance de trésorerie», plaide la Confédération paysanne. 

Des élus appellent aussi l'Etat à débloquer des fonds. 

«Nous demandons au ministre de l'Agriculture (...) d'activer tous les outils collectifs qui existent permettant de diminuer l'impact d'une perte de production, mais aussi de réfléchir à des aides supplémentaires, afin d'éviter que des domaines disparaissent», écrivent une soixantaine de députés dans une tribune.

Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez, qui a débloqué 15 millions d'euros en urgence au profit des agriculteurs locaux, juge que les aides habituelles en cas de calamités agricoles ne sont pas à la hauteur des pertes.

Il demande un mécanisme d'indemnisation «comparable à celui qui a été mis en place pour la Covid», qui couvrirait les charges et les salaires des agriculteurs touchés, tout en leur assurant un minimum de revenus.

Face au retour annoncé du gel la semaine prochaine, fini de lutter pour Maxime Michallet qui exploite principalement des cerisiers et des pommiers dans la Drôme: «On a déjà fait sept nuits d'antigel avec des bougies et des copeaux de bois, on est épuisé, on arrête les frais vu le peu de récoltes qui restent». 


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.