Le devenir de l'Observatoire de la laïcité au cœur d'une âpre bataille politique

Marlène Schiappa, la ministre chargée de la Citoyenneté (Photo, AFP).
Marlène Schiappa, la ministre chargée de la Citoyenneté (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 11 avril 2021

Le devenir de l'Observatoire de la laïcité au cœur d'une âpre bataille politique

  • Marlène Schiappa, la ministre chargée de la Citoyenneté l'a confirmé ces derniers jours devant le Sénat : le gouvernement veut faire «évoluer le portage de la laïcité»
  • Le clivage existe entre les tenants d'une limitation plus poussée de la liberté religieuse notamment du port de signes religieux comme le voile et les partisans du respect de la liberté religieuse tant qu'elle ne trouble pas l'ordre public

PARIS: La question sensible de la laïcité est à nouveau au centre d'enjeux politiques : Matignon doit trancher dans les prochaines semaines sur le devenir de l'Observatoire de la laïcité, sous le feu des critiques de certains politiques qui lui reprochent de ne pas faire assez contre l'islamisme.

Le Premier ministre l'avait laissé entendre à l'automne. Marlène Schiappa, la ministre chargée de la Citoyenneté l'a confirmé ces derniers jours devant le Sénat : le gouvernement veut faire « évoluer le portage de la laïcité ». 

Et cela ne passera « pas nécessairement par le maintien de l'Observatoire », dont le mandat du président et ex-ministre socialiste Jean-Louis Bianco vient d'expirer, a-t-elle précisé. 

Cette instance consultative installée en 2013 est chargée, sur le terrain (école, entreprises, administrations), de faire de la pédagogie sur les principes de la laïcité (neutralité de l'Etat, liberté de conscience et de religion dans le respect des lois de la République...) ou de conseiller le gouvernement à travers avis et rapports.

La ministre a plaidé pour un nouveau système, à double étage : « une instance de type ‘haut conseil à la laïcité’ » et « un renfort au niveau de l'administration ».

Depuis plusieurs années, l'Observatoire - une vingtaine d'experts et parlementaires - a été accusé par certains responsables politiques, ou des membres du Printemps républicain, mouvement proche de l'ancien Premier ministre Manuel Valls, d'être trop laxiste et de ne pas en faire assez contre l'islamisme. 

« Le problème », c'est « sa complaisance invraisemblable envers des mouvements qui (...) mettent en danger » la loi de 1905 séparant les Eglises et l'Etat, affirme ainsi l'essayiste Caroline Fourest dans Le Point vendredi.

Des accusations que l'Observatoire n'a cessé de réfuter, plusieurs acteurs de terrain venant ces derniers jours saluer son action.

 « Outil répressif »

Le clivage n'est pas nouveau, mais il ressurgit, opposant deux camps aux conceptions différentes de la laïcité à la française ; les tenants d'une limitation plus poussée de la liberté religieuse notamment du port de signes religieux comme le voile, d'un côté. Et les partisans du respect de la liberté religieuse tant qu'elle ne trouble pas l'ordre public, de l'autre.

Craignant une politisation du sujet, un collectif de 119 universitaires a mis en garde, dans une tribune dans Le Monde mercredi, contre la tendance à vouloir « élargir, sous prétexte de laïcité, le domaine d'application de la neutralité du seul Etat à la société en son entier ». 

Cela reviendrait à faire de la laïcité « un outil répressif, de contrôle et d'interdiction, en contradiction totale (...) avec la loi de 1905 », selon ces chercheurs et sociologues, dont Olivier Roy, Philippe Portier, ou encore Jean Baubérot.

Vendredi, dans Libération, un autre collectif de professeurs d'universités américaines, canadiennes ou européennes avertissent qu'avec l'éventuel non-renouvellement de l'Observatoire, « la peur prend le pas sur le respect des principes essentiels des droits humains ».

 Querelles de territoire

A quoi ressemblera ce processus de refonte de la laïcité ? A Matignon, on espère aboutir d'ici à la fin du mois. Mais la question est « complexe, source d'embarras, pour ne pas dire de division », indique une source proche du dossier.

Il y a notamment des « querelles de territoires entre plusieurs ministres », affirme une autre source préférant garder l'anonymat. D'un côté, Marlène Schiappa, qui aspire à être ‘Mme Laïcité’ et s'active en « mobilisant » des « référents laïcité » dans les départements. De l'autre, Gérald Darmanin, qui est depuis l'automne, très à l'offensive dans la lutte contre le « séparatisme » islamique. 

Et enfin Jean-Michel Blanquer, qui, entre son Conseil des sages de la laïcité (côté Education nationale), et le lancement d'un think tank sur la laïcité, « entend montrer que c'est son pré-carré », ajoute cette source.

Quelle ligne défendrait un futur haut conseil ? « Si on se contente de changer des noms, ce sera cosmétique. Il faut tout revoir de fond en comble », observe Amine El Khatmi, cofondateur du Printemps républicain. « Notamment la question des moyens, 60 000 euros (budget de fonctionnement annuel de l'Observatoire, ndlr) étant bien insuffisants ».

En attendant, Bianco et son rapporteur général Nicolas Cadène défendent leur bilan : 350 000 fonctionnaires, associatifs, ou entreprises formés en huit ans et des demandes d'intervention « qui n'ont jamais été aussi importantes ».


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.