Feuille de route d'experts pour l’avenir de l’Otan dans la région Mena

Siège de l'Otan à Bruxelles. (Shutterstock)
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Publié le Mardi 11 mai 2021

Feuille de route d'experts pour l’avenir de l’Otan dans la région Mena

  • « L’Otan ne peut ignorer la région Mena, bien qu’elle ne fasse pas partie de sa zone de compétence au sens strict terme »
  • L’organisation a désormais noué des liens dans la région sous l'égide du Dialogue méditerranéen et de l'Initiative de coopération d'Istanbul

DUBAÏ : Au cours des trente ans qui ont suivi l'effondrement de l'Union soviétique, et qui marque le début de l’ère post-guerre froide, beaucoup de discussions ont évoqué le rôle que l'Otan (Organisation du traité de l’Atlantique nord) devrait jouer dans le monde: comment allait-elle s'adapter aux défis nouveaux et en constante évolution des régions situées au-delà de ses compétences géographiques traditionnelles, en particulier le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (Mena)?

L’article 6 du traité de l'Atlantique nord de 1949, le document fondateur de l'organisation, définit sa zone de compétence comme «la région de l'Atlantique nord au nord du tropique du Cancer». Toutefois, un récent rapport publié par le département de recherches et d’études d’Arab News met en avant les raisons pour lesquelles la région Mena est importante pour l'Otan, montre quels sont leurs intérêts communs, et évoque par quels moyens l'organisation pourrait s’impliquer de manière plus efficace dans cette partie du monde.

«L’Otan ne peut ignorer la région Mena, bien qu’elle ne fasse pas partie de sa zone de compétence au sens strict terme», écrit l’auteur du rapport, Luke Coffey, qui est directeur du Centre Douglas et Sarah Allison pour la politique étrangère à la Heritage Foundation [think thank américain situé à Washington, NDLR]. «L’histoire ancienne comme récente montre que ce qui s'y passe peut rapidement se propager en Europe», précise-t-il dans l’introduction du document.

Coffey identifie plusieurs sources d'instabilité dans cette région qui s'étend de l'océan Atlantique oriental à l'Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Parmi elles figurent les pressions démographiques, la hausse du prix des produits de base, les conflits interétatiques et intra-étatiques et les politiques tribales.

«Une décennie après le début de ce que l’on a appelé le “Printemps arabe”, de nombreux défis géopolitiques demeurent dans la région, de la montée du terrorisme transnational à la menace nucléaire en passant par le terrorisme d'État en Iran. De nombreux membres de l'Otan ont donc décidé, à juste titre, de mettre l’accent sur la collaboration avec les partenaires régionaux de la périphérie sud de l'organisation.»

La compétition pour obtenir de l'eau et d'autres ressources naturelles, les tensions religieuses, les aspirations révolutionnaires, le terrorisme, la prolifération nucléaire ainsi que les guerres par procuration qui impliquent des acteurs régionaux et mondiaux constituent également une source de préoccupation au siège de l'Otan.

De plus, la région possède les voies de navigation, les ressources énergétiques et les centres commerciaux les plus importants du monde, et il a été démontré que des catastrophes ou des conflits même mineurs en apparence peuvent entraîner des répercussions considérables sur le commerce mondial, les prix du pétrole et les marchés éloignés.

«L'Otan a traversé de nombreux débats de ce genre afin d’identifier son objectif», rappelle M. Coffey lors du webinaire qui lançait son rapport, organisé lundi dernier par la salle de presse du département de recherches et d’études à Arab News.

«Il a été question, entre autres, du fait que l’Otan se consacre à la lutte contre le terrorisme, de la Chine, de la Russie – qui reste la plus grande menace. Personnellement, je me définis plutôt comme un traditionaliste sur ce sujet», confie-t-il. «J’estime en effet que l'Otan a été créée et conçue pour, le cas échéant, vaincre la Russie et la dissuader de commettre une agression. Cependant, je conçois que l’organisation doive également faire face à d’autres défis.»

Pourtant, comme le souligne Coffey, le concept stratégique 2010 de l’Otan, qui sert de guide pour faire face aux futurs défis, ne mentionne pratiquement pas la région Mena et ces enjeux communs.

Coffey juge le document épouvantablement caduc compte tenu des événements sismiques de la dernière décennie. Il cite par exemple la montée en puissance de la Chine, l’affirmation accrue de la Russie, le Printemps arabe, la lutte contre Daech, la guerre en cours en Syrie, la crise des migrants en Europe, et, plus récemment, la pandémie de coronavirus.

Alors que l'Otan est sur le point d’établir un nouveau concept stratégique, Coffey soutient l’organisation devrait s'appuyer sur les partenariats qui existent avec les États de la région Mena et se mettre en quête de nouveaux moyens de coopération.

Si l’Otan décidait de suivre les conseils de Coffey, elle n’aurait aucun mal à trouver un public réceptif. Selon lui, les gouvernements de la région Mena partagent un grand nombre des préoccupations sécuritaires des États membres de l’organisation; certains d'entre eux manifestent leur volonté de collaborer et ont même fourni des troupes aux missions dirigées par l'Otan au Kosovo, en Afghanistan et en Libye.

Coffey évoque également les formations de l’Otan en Irak, l’opération Ocean Shield dirigée par l’organisation pour lutter contre la piraterie au large de la Corne de l’Afrique, et la zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye, dans le cadre de son opération Unified Protector, en 2011.

L'Otan a désormais noué des liens dans la région sous l'égide du Dialogue méditerranéen et de l'Initiative de coopération d'Istanbul (ICI).

Initié en 1994, le Dialogue méditerranéen constitue le fondement des relations de l'Otan avec ses partenaires méditerranéens que sont l'Algérie, l'Égypte, Israël, la Jordanie, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie.

L'Initiative de coopération d'Istanbul, lancée en 2004, représente quant à elle la base des relations de l'Otan avec les pays du Golfe. Si les six membres du Conseil de coopération du Golfe ont été invités à y adhérer, seuls Bahreïn, le Koweït, le Qatar et les Émirats arabes unis y ont répondu favorablement. Quant à l'Arabie saoudite et à Oman, ils se sont montrés plutôt timides à l’idée d’adhérer à cette initiative.

«À mon avis, cela met en évidence la nouveauté et le caractère fragile des relations entre l'Otan et les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord», explique Iulia-Sabina Joja, chercheuse principale à la Frontier Europe Initiative et professeure adjointe à l'université de Georgetown, dans le cadre du séminaire en ligne organisé lundi dernier par le département de recherches et d’études d’Arab News.

En dépit du fait que certaines institutions se montrent réticentes à participer aux initiatives de l'Otan – pensons notamment au rejet de la Tunisie, en 2018, d'une proposition faite par l’organisation qui visait à placer des effectifs dans un centre d'opérations militaires à Gabès –, Mme Joja fait état de plusieurs engagements positifs concrets qui laissent espérer de futures coopérations.

«La réticence ou la volonté des États membres individuels de l'Otan, leurs visions pour la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, la multitude d'acteurs ainsi que les domaines de coopération et d'évaluation de menaces de plus en plus communes prouvent qu'il n'est plus forcément justifié de séparer artificiellement les problèmes auxquels sont confrontées l'Europe et la communauté transatlantique de ceux que rencontrent les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Il existe de nombreux points communs entre ces régions», explique-t-elle.

Selon Mme Joja, la relation entre l'Otan et la région Mena ne doit pas se limiter à la sécurité et à la défense, mais s'articuler autour d'une «coopération par paliers» qui porterait sur des questions spécifiques telles que le commerce, l'économie et l'intervention humanitaire.

Le rapport de M. Coffey présente certaines mesures pratiques que peut prendre l'Otan en vue d'améliorer ses relations avec la région; parmi elles figure la nomination d'un représentant spécial pour la région Mena – une mesure de poids dans cette partie du monde «où les relations personnelles sont primordiales».

Par ailleurs, l'Otan se doit de militer pour étendre l'adhésion au Dialogue méditerranéen et à l'Initiative de coopération d'Istanbul, affirme-t-il. Pour y parvenir, il incombe à l’organisation de créer un centre régional pour le dialogue méditerranéen, inspiré du centre régional de l'Initiative de coopération d'Istanbul au Koweït.

En outre, afin de créer un climat de confiance et de susciter un sentiment de partage, l'Otan est tenue de faire valoir l'importance géopolitique de la région Mena en organisant des réunions de haut niveau pour les deux groupes lors du prochain sommet de l’organisation.

En effet, la réticence que continuent de manifester quelques États sceptiques à l'égard des objectifs de l'Otan constitue l'un des principaux obstacles qui empêchent de voir les liens entre les parties concernées se resserrer.

«On ne demande pas à l'Otan d'étendre son empire, ni de planifier sa prochaine intervention militaire où que ce soit», prévient M. Coffey au cours du webinaire. «Il s’agit plutôt de cibler une région essentielle à la stabilité et à la sécurité de l'Otan, et de trouver des partenaires disposés à coopérer et à travailler de concert afin d’atteindre les mêmes objectifs et les mêmes résultats.»

«À mesure que l'Otan approfondit ses relations avec certains pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient, elle doit tenir compte des points sensibles. Elle doit également avancer au rythme souhaité par le pays concerné», précise-t-il encore.

«L'interopérabilité engendre la confiance, et la confiance construit à son tour les relations. Voilà qui apportera davantage de sécurité à chacun d'entre nous», conclut-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza: le Hamas rencontre les médiateurs au Caire

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023. (AFP)
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  • Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté
  • La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza"

LE CAIRE: Une délégation du Hamas, conduite par Khalil al-Hayya, rencontre lundi au Caire des responsables égyptiens et qataris pour évoquer le cessez-le-feu fragile et l'après-guerre à Gaza, a indiqué à l'AFP une source proche des négociations.

Cette rencontre intervient au lendemain de frappes israéliennes sur Gaza, Israël ayant accusé le Hamas de violations du cessez-le-feu en vigueur depuis le 10 octobre, ce que le mouvement islamiste a réfuté.

La source a précisé que la rencontre avec les médiateurs au Caire devrait porter notamment sur "les dizaines de frappes aériennes israéliennes" ayant fait la veille "des dizaines de morts dans la bande de Gaza".

L'Egypte et le Qatar sont des médiateurs de longue date dans les pourparlers indirects avec Israël et le Hamas pour mettre un terme à la guerre à Gaza, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas sur Israël le 7 octobre 2023.

"Unifier" les mouvements 

Par ailleurs, "la délégation, aux côtés de plusieurs dirigeants du mouvement, tiendra des réunions avec des responsables égyptiens au sujet du dialogue interpalestinien que l'Egypte doit prochainement parrainer", a précisé la source familière des négociations.

L'Egypte a déjà accueilli plusieurs rencontres entre les mouvements politiques palestiniens, notamment les deux principaux groupes politiques palestiniens, le Hamas et le Fatah de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.

Ces deux mouvements sont opposés depuis des décennies.

"Ce dialogue vise à unifier le corps politique palestinien et à aborder les grandes questions, notamment l'avenir de la bande de Gaza et la formation d'un comité d'experts indépendants chargé de la gestion du territoire", a déclaré la source, faisant écho à la mise en place d'une autorité de transition formée de technocrates chapeautée par un comité dirigé par le président américain Donald Trump, et proposée par ce dernier.

Le Hamas a déjà fait savoir qu'il ne tenait pas à gouverner la bande de Gaza, ravagée par deux ans de guerre.

Plusieurs responsables politiques palestiniens ont également évoqué ces derniers mois la création d'un groupe de gestionnaires palestiniens, non affiliés, en charge d'administrer le territoire où le Hamas avait pris le pouvoir par la force en 2007.

Une autre source informée a affirmé que "les contacts et efforts des médiateurs ont permis hier soir de rétablir le calme et de réactiver le cessez-le-feu à Gaza", ajoutant que "les médiateurs continueront de suivre et de surveiller les violations israéliennes".


Gaza: la Défense civile annonce un nouveau bilan de 45 morts dans des frappes israéliennes dimanche

La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts. (AFP)
La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts. (AFP)
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  • Quatre hôpitaux du territoire palestinien ont confirmé ce bilan de 45 décès à l'AFP, disant avoir reçu morts et blessés
  • L'armée israélienne a déclaré avoir frappé dans la journée des dizaines de cibles du Hamas à travers le territoire palestinien, Israël et le Hamas s'accusant mutuellement de violer un cessez-le-feu parrainé par le président américain Donald Trump

GAZA: La Défense civile de la bande de Gaza a fait état d'au moins 45 personnes tuées dimanche au cours de frappes aériennes israéliennes dans le territoire palestinien, révisant à la hausse un précédent bilan de 33 morts.

L'armée israélienne a déclaré avoir frappé dans la journée des dizaines de cibles du Hamas à travers le territoire palestinien, Israël et le Hamas s'accusant mutuellement de violer un cessez-le-feu parrainé par le président américain Donald Trump, en vigueur depuis le 10 octobre.

"Au moins 45 personnes ont été tuées du fait de frappes aériennes israéliennes sur plusieurs endroits de la bande de Gaza", a indiqué Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile, service de secours opérant sous l'autorité du Hamas.

Quatre hôpitaux du territoire palestinien ont confirmé ce bilan de 45 décès à l'AFP, disant avoir reçu morts et blessés.

L'hôpital Al-Awda à Nuseirat a recensé 24 morts, l'hôpital Al-Aqsa à Deir al-Balah 12, l'hôpital Nasser à Khan Younès cinq et celui d'Al-Shifa à Gaza-ville  quatre.

Des dizaines de blessés ont également été pris en charge par ces hôpitaux. L'armée israélienne a déclaré à l'AFP qu'elle vérifiait les informations concernant les frappes.

Parmi les victimes figure, selon M. Bassal, six personnes tuées quand une frappe israélienne a ciblé "un groupe de civils" dans la ville de Zuwaida (centre).

Il a également fait état de deux autres Gazaouis, dont un journaliste, tués dans la partie ouest de cette ville.

Deux frappes distinctes ont par ailleurs tué six personnes, dont des enfants, près de Nuseirat (centre) et blessé 13 autres, a-t-il indiqué.

Il a aussi fait état d'une femme et deux enfants tués dans une frappe de drone sur une tente abritant des personnes déplacées au nord de Khan Younès (sud).

Dans la soirée, l'armée israélienne a annoncé cesser ses frappes et reprendre l'application du cessez-le-feu.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

 


Mohammed ben Salmane et Emmanuel Macron discutent de l'évolution de la situation à Gaza

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  • Les entretiens ont porté sur la situation dans la bande de Gaza et sur les efforts en cours pour mettre fin au conflit et rétablir la stabilité au Moyen-Orient
  • Le prince Mohammed et M. Macron ont souligné l'importance d'alléger immédiatement les souffrances humanitaires du peuple palestinien et de parvenir à un retrait israélien complet

RIYADH : Le prince héritier Mohammed bin Salman a reçu dimanche un appel téléphonique du président français Emmanuel Macron, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

Les deux dirigeants ont passé en revue la coopération dans divers domaines et ont discuté des développements régionaux et internationaux d'intérêt commun.

Les entretiens ont porté sur la situation dans la bande de Gaza et sur les efforts en cours pour mettre fin au conflit et rétablir la stabilité au Moyen-Orient.

Le prince Mohammed et M. Macron ont souligné l'importance d'alléger immédiatement les souffrances humanitaires du peuple palestinien et de parvenir à un retrait israélien complet.

Ils ont également souligné la nécessité de prendre des mesures concrètes en vue d'une paix juste et durable fondée sur la solution des deux États.