Les câbles sous-marins, baromètre des puissances et de la géopolitique du net

Les câbles sous-marins de télécommunications symbolisent les luttes entre puissances pour s'assurer le contrôle d'infrastructures éminemment stratégiques (Photo, AFP).
Les câbles sous-marins de télécommunications symbolisent les luttes entre puissances pour s'assurer le contrôle d'infrastructures éminemment stratégiques (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 12 mai 2021

Les câbles sous-marins, baromètre des puissances et de la géopolitique du net

  • «Peace», «Amitié»... En surface, les noms de câbles sonnent comme une ode à la diplomatie et à la bonne entente commerciale entre les pays
  • En sous-marin, les quelque 420 câbles disséminés à travers le globe, qui font transiter 99% du trafic internet mondial, révèlent souvent des rivalités entre puissances étatiques concurrentes

PARIS: Une géopolitique des profondeurs : de l'appétit des géants américains de l'internet aux « nouvelles routes de la soie numériques » chinoises, les câbles sous-marins de télécommunications symbolisent les luttes entre puissances pour s'assurer le contrôle d'infrastructures éminemment stratégiques.

« Peace », « Amitié »... En surface, les noms de câbles sonnent comme une ode à la diplomatie et à la bonne entente commerciale entre les pays.

En sous-marin, les quelque 420 câbles disséminés à travers le globe, qui font transiter 99% du trafic internet mondial, révèlent souvent des rivalités entre puissances étatiques concurrentes. 

En la matière, ce sont les Etats-Unis qui en possèdent la plus grande « concentration », rappelle Camille Morel, chercheuse rattachée au centre lyonnais d'études de sécurité internationale et de défense (CLESID) de l'Université Lyon III.

Le nouveau vecteur principal de leur puissance ? L'appétit grandissant des géants américains du net -- connus sous l'acronyme « Gafam » -- pour les câbles depuis la fin des années 2010, en raison de l'explosion des flux de données transitant notamment entre l'Europe et les Etats-Unis. 

Si la pose et l'exploitation des câbles sous-marins ont longtemps été la chasse gardée de grands opérateurs télécoms souvent européens, ce sont désormais Google, Facebook et consorts qui deviennent les principaux bâtisseurs.

« Il y a quatre ans, les Gafam n'avaient aucune capacité en propre sur l'Atlantique, ils louaient à des opérateurs historiques. Il y a deux ans, ils en contrôlaient 50%. Aujourd'hui ils en sont à 80%, et d'ici deux ans ils en seront à 95% », explique Jean-Luc Vuillemin, directeur des réseaux internationaux d'Orange.

« Nouvelles routes de la soie numériques »

Si l'Europe se retrouve en position de « dépendance forte » en matière d'écosystèmes de transmission et de fonctionnement de l'internet par rapport aux Etats-Unis, ce n'est pas le cas de pays comme la Chine où cette dépendance est « nulle ».

« Si demain matin tous les câbles sous-marins qui relient la Chine au reste du monde sont coupés, pour 99% de la population chinoise, il ne se passera rien du tout », affirme Vuillemin.

Début mars, Facebook et Google ont par exemple dû interrompre en urgence la construction d'un câble sous-marin qui aurait dû relier la Californie à Hong Kong, à cause des fortes tensions diplomatiques entre les Etats-Unis et la Chine.

« Vous ne pouvez plus mettre un câble direct entre les deux pays. C'est un peu les mêmes discussions que l'on retrouve sur la 5G », confirme Alain Biston, PDG d'Alcatel Submarine Networks (ASN), leader mondial de la construction de câbles sous-marins.

Pour affirmer sa souveraineté dans ce domaine, la Chine tisse même sa propre toile au fond des océans à travers ses « Nouvelles routes de la soie numériques », le pendant technologique d'un vaste programme d'infrastructures destiné à projeter sa puissance économique en dehors de ses frontières.

Symbole marquant : le câble Peace, financé par des acteurs chinois, lancé en 2018. Il contourne l'Inde, grande rivale, pour connecter l'allié pakistanais au reste de l'Europe depuis Marseille, et dessert aussi le Kenya.

Si le français ASN, l'américain TE SubCom et le japonais NEC dominent un marché de construction de câbles estimé à 2 milliards d'euros, la Chine compte également faire monter en puissance son propre champion grâce au récent rapprochement entre Huawei Marine Networks et Hengtong Optic-Electric.

Navires russes et espionnage

Un nouvel acteur capable de bouleverser l'oligopole actuel ? « Quand on voit à quelle vitesse il intervient sur le marché, on peut se poser la question. Peut-être pas tout de suite mais dans cinq ans », estime Camille Morel.

Infrastructures sensibles sur le plan géostratégique, les câbles sous-marins n'échappent pas non plus aux risques d'espionnage et de sabotage.

Au point de voir leur protection inscrite à l'ordre du jour d'une réunion des ministres de la Défense de l'OTAN fin octobre, alors que les marines occidentales ont repéré un fort intérêt des navires russes pour les câbles des pays de l'alliance sans en connaître les raisons.

Fin mars dernier, le ministère de la Défense britannique a d'ores et déjà annoncé qu'un nouveau navire de surveillance destiné à protéger ses câbles sous-marins et d'autres infrastructures entrera en service d'ici 2024. 

Signe d'une réelle menace ? « En théorie, il est possible de brancher une bretelle d'espionnage sur une fibre optique en profondeur. Mais il y a tellement de ‘si’ pour y arriver que cela paraît quand même extraordinairement improbable », estime Jean-Luc Vuillemin, à l'unisson des experts sur le sujet.


L'Inde cherche à porter la voix du « Sud global » entre le G7 et le Brics

Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
Cette photographie prise et publiée par le Bureau d'information de la presse indienne (PIB) le 6 juin 2025 montre le Premier ministre indien Narendra Modi tenant le drapeau national lors de l'inauguration du pont ferroviaire de Chenab, qui fait partie de la liaison ferroviaire du Cachemire, à Reasi, dans l'État de Jammu-et-Cachemire. (PIB) / AFP)
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  • L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.
  • « Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

PARIS : Invitée du G7 qui débute dimanche, mais aussi membre fondateur des Brics, l'Inde souhaite porter la voix du « Sud global », se posant en « passerelle » entre les différents acteurs de la scène internationale, affirme son ministre des Affaires étrangères dans un entretien à l'AFP.

L'Inde n'est pas membre du Groupe des Sept (États-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie, Canada), mais elle est devenue une habituée de ses sommets, auxquels elle est régulièrement conviée depuis 2019.

« Nous avons été un pays invité depuis plusieurs années et je pense que ça a été bénéfique pour le G7 », déclare à l'AFP Subrahmanyam Jaishankar depuis Paris, où il a clos samedi une visite en France, se félicitant d'avoir « la capacité de travailler avec différents pays sans qu'aucune relation ne soit exclusive ». 

Avec une population en passe de devenir la quatrième économie mondiale, l'Inde est l'un des pays les plus peuplés du globe. Elle siège à la table de nombreuses organisations, avec les Occidentaux au G7 ou au sein du « Quad » (Dialogue quadrilatéral pour la sécurité, avec les États-Unis, le Japon, l'Australie), mais aussi avec la Chine, la Russie et l'Iran au sein des Brics et du Groupe de Coopération de Shangaï.

« Nous contribuons activement à la diplomatie internationale et si cela peut servir de passerelle, c'est un atout pour la diplomatie internationale dans une période de relations difficiles et de tensions accrues », fait valoir M. Jaishankar.

Ancienne colonie britannique, indépendante depuis 1947, l'Inde se pose, avec le Brésil, en héraut du « Sud global », qui réunit « des pays qui ont été victimes de l'ordre mondial ces dernières années, ces derniers siècles ». 

« Dans les pays du Sud, il existe un fort ressentiment face aux inégalités de l'ordre international, une volonté de le changer, et nous en faisons pleinement partie », explique le ministre en poste depuis 2019.

« Aujourd'hui, pour des pays comme les nôtres, il est important de nous exprimer, de mener, de faire sentir notre présence. »

Cette voix passe aussi par les BRICS, devenue « l'une des principales plateformes de rassemblement pour les pays non occidentaux », dont les chefs d'État se réuniront en juillet.

Partisan de « négociations directes » pour résoudre la guerre entre l'Ukraine et la Russie, qui a frappé durement les pays du Sud, M. Jaishankar affiche son scepticisme face aux politiques de sanctions occidentales : « Ça n'a pas vraiment marché jusqu'à présent, non ? » 

Partenaire commercial et allié politique de la Russie, l'Inde pourrait se retrouver exposée en cas de sanctions contre Moscou.

« L'économie mondiale est sous tension. Plus on ajoute des facteurs de tensions, plus les difficultés seront grandes. »

Dans l'ordre mondial actuel, l'Inde doit composer avec la « discontinuité » posée par Donald Trump.

Des négociations en cours sur le sujet ont « bien avancé ».L'Inde doit également chercher « un équilibre » avec la Chine. 

Pékin soutient Islamabad, que New Delhi accuse de soutenir les activités de « terroristes » islamistes sur son sol.

Le 22 avril, une attaque au Cachemire indien a déclenché une confrontation militaire de quatre jours entre les deux pays, la plus grave depuis 1999. Narendra Modi a promis une « riposte ferme » à toute nouvelle attaque « terroriste », renforçant le spectre d'une escalade entre les deux puissances nucléaires.

« En 2008, la ville de Mumbai a été attaquée (plusieurs attentats jihadistes ont fait 166 morts) et nous avons commis l'erreur de ne pas réagir avec fermeté. Nous sommes déterminés à ne pas répéter ces erreurs. Si des terroristes pénètrent en Inde depuis et grâce au soutien d'un pays voisin, nous les poursuivrons et nous les châtierons ».

Mais l'Inde n'a jamais envisagé de recourir à l'arme nucléaire, assure-t-il : « Ces inquiétudes émanaient de personnes mal informées ».

 


Israël appelle les Iraniens à évacuer les zones proches de sites militaires

Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
Des soldats et des membres d'une équipe de recherche et de sauvetage se rassemblent près de voitures endommagées dans la ville de Tamra, dans le nord d'Israël, à la suite d'une attaque à la roquette lancée par l'Iran dans la nuit du 15 juin 2025. (Photo par AHMAD GHARABLI / AFP)
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  • L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».
  • Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones.

JERUSALEM : Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré dimanche dans un communiqué de son bureau avoir ordonné à l'armée israélienne d'émettre des avis d'évacuation à l'intention des habitants de Téhéran vivant à proximité de sites militaires.

Après cet ordre, l'armée israélienne a appelé les Iraniens à évacuer les zones « à proximité d'installations militaires » dans un communiqué publié sur le réseau social X en persan et en arabe.

L'armée a « demandé à toutes les personnes se trouvant actuellement dans des installations militaires en Iran, ou à proximité, d'évacuer immédiatement les lieux, précisant que leur vie était en danger ».

Le communiqué ne précise pas de coordonnées géographiques et n'est accompagné d'aucune carte permettant de localiser ces zones, contrairement aux communiqués de l'armée israélienne adressés aux Palestiniens de la bande de Gaza, où elle est en guerre contre le mouvement islamiste Hamas.

Cette décision fait partie d'un plan « visant à faire pression sur le régime » en créant des déplacements de population, a déclaré à l'AFP une source sécuritaire israélienne.


La Russie s'apprête à construire la première centrale nucléaire du Kazakhstan

Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
Une vue aérienne montre le village d'Ulken (au premier plan) et le site proposé pour la centrale nucléaire près du village d'Ulken, situé sur les rives du lac Balkhash, à environ 400 kilomètres au nord d'Almaty, le 22 septembre 2024. (Photo de Ruslan PRYANIKOV / AFP)
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  • « Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.
  • Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne.

ALMATY, KAZAKHSTAN : Le géant russe du nucléaire Rosatom sera le principal constructeur de la première centrale nucléaire du Kazakhstan, ont annoncé samedi les autorités de ce pays d'Asie centrale, premier producteur mondial d'uranium, un chantier que convoitaient la France, la Chine et la Corée du Sud.

« Rosatom a été désigné chef de file du consortium international pour la construction de la première centrale nucléaire au Kazakhstan », a indiqué l'agence kazakhe pour l'énergie atomique.

Le Kazakhstan, immense ex-république soviétique et allié de Moscou, est le premier producteur mondial d'uranium (43 %) et le troisième fournisseur d'uranium naturel de l'Union européenne, mais souffre d'un manque cruel d'électricité pour sa consommation intérieure.

L'agence kazakhe dit désormais « étudier la question de l'obtention de financements publics à l'exportation aux dépens de la Fédération de Russie, conformément aux propositions de Rosatom ». 

Rosatom a salué la décision kazakhe dans un communiqué et promis « la construction d'une centrale nucléaire selon le projet le plus avancé et le plus efficace au monde, basé sur des technologies russes ».

« Les réacteurs VVER-1200 de troisième génération combinent des solutions techniques éprouvées avec les systèmes de protection active et passive les plus récents. Ces derniers ont été développés en stricte conformité avec les normes internationales de sécurité », a ajouté la société.

Rosatom (Russie), China National Nuclear Corporation (Chine), EDF (France) et Korea Hydro & Nuclear Power (Corée du Sud) faisaient partie des quatre entreprises pressenties.

L'agence ajoute qu'elle « continuera à travailler avec des partenaires étrangers pour former un consortium international efficace », sans donner plus de précisions. 

Ce projet de consortium international, qui n'a jamais été spécifié, s'inscrit dans la volonté du dirigeant kazakh Kassym-Jomart Tokaïev de maintenir de bonnes relations avec les grandes puissances.

Moscou, puissance historique en Asie centrale, a ainsi remporté cet appel d'offres aux dépens de la Chine, désormais incontournable dans la région. Cette annonce intervient quelques jours avant la venue du président chinois Xi Jinping au Kazakhstan pour un sommet « Asie centrale-Chine ».

La centrale, dont la construction a été validée lors d'un référendum sans surprise à l'automne, doit être bâtie près du village abandonné d'Ulken, dans le sud du pays, sur les bords du lac Balkhach, le deuxième plus grand d'Asie centrale.

En Ouzbékistan voisin, le géant russe Rosatom va construire une petite centrale nucléaire et a proposé au Kirghizistan un projet similaire.