Lassitude et démission ne sont pas les seules alternatives pour le conflit israélo-palestinien

L’intérieur du territoire israélien est hanté par le spectre de la guerre civile, et Gaza par une offensive terrestre. (Photo, AFP)
L’intérieur du territoire israélien est hanté par le spectre de la guerre civile, et Gaza par une offensive terrestre. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 19 mai 2021

Lassitude et démission ne sont pas les seules alternatives pour le conflit israélo-palestinien

  • Côté palestinien, la toile de fond de cette escalade est l’impasse au niveau politique après le report de l’élection présidentielle. Le mouvement Hamas a saisi la colère palestinienne pour supplanter le leadership du Fatah
  • Avec le déclenchement des hostilités à Gaza, la guerre ouvre de nouveaux horizons à Netanyahou, qui était un homme poussé dans ses retranchements par son incapacité à former un gouvernement

PARIS: Les scènes des accrochages à Jérusalem entre Israéliens et Palestiniens deviennent chroniques, d’un ramadan à l’autre. Cette année, elles ont provoqué une escalade militaire, entre Israël et le Hamas. À un rythme soutenu, l’armée israélienne poursuit sa campagne de bombardements aériens sur Gaza, en réponse à une «pluie de roquettes et de missiles» de la part du Hamas et du Jihad islamique.  

Le lourd bilan (le 17 mai) de 200 Palestiniens et 10 Israéliens tués depuis le 10 mai souligne la gravité de la situation. L’intérieur du territoire israélien est hanté par le spectre de la guerre civile, et Gaza par une offensive terrestre. Alors que l’administration Biden hésite à intervenir pour contenir les hostilités, les risques politiques et militaires de cette escalade favorisent l’instabilité dans une zone conflictuelle par excellence, et démontrent la nécessité d’un règlement du conflit israélo-palestinien, l’un des les plus anciens et insolubles de la planète. 

En effet, le monde assiste impuissant à un nouveau tournant d’un conflit que l’on voulait ignorer entre Israéliens et Palestiniens. L’étincelle de cette flambée de violence inédite a eu lieu à Jérusalem en plein mois de ramadan. Mais cette fois, la répression disproportionnée côté israélien contre les contestataires qui voulaient accéder à la mosquée Al-Aqsa, et le projet d’expulsions de familles palestiniennes dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem-Est, ont conduit à un mini-soulèvement palestinien.  

L’intérieur du territoire israélien est hanté par le spectre de la guerre civile, et Gaza par une offensive terrestre.

Côté palestinien, la toile de fond de cette escalade est l’impasse au niveau politique après le report de l’élection présidentielle. Le prétexte évoqué est l’impossible tenue du scrutin à Jérusalem, mais la vraie cause est le déchirement au sein du Fatah, et le recul de la popularité de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne. D’autres facteurs sont venus s’ajouter, parmi lesquels le désespoir d’une nouvelle génération abîmée par la pandémie de Covid-19, les pratiques de colons et la situation sociale.

Dans ce contexte, le mouvement Hamas a saisi cette colère palestinienne pour supplanter le leadership du Fatah. Il a joué la mobilisation en Cisjordanie, l’intérieur israélien, et l’escalade militaire à partir de Gaza. Côté israélien, le blocage politique bat son plein avec la possible organisation de nouvelles élections législatives, pour la cinquième fois en deux ans.

Netanyahou joue sa survie politique

Le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, qui joue sa survie politique, trouve-t-il ce moment opportun pour renforcer sa popularité, en jouant la carte de l’unité nationale contre la menace domestique, ou celle de la surenchère vis-à-vis des ultras au sein de son camp?

Ces éléments, côté palestinien et israélien, interviennent dans un contexte régional dominé par l’arrivée de l’administration Biden, et sa priorité de revenir à l’accord nucléaire iranien. Cela conforte Téhéran et met Netanyahou (l’ami de Trump) en position délicate, en raison de divergences avec Washington. L’Iran craint une réaction israélienne en cas d’aboutissement d’un compromis entre les États-Unis et Téhéran. La direction iranienne aurait pu encourager en coulisses un conflit de basse intensité pour embarrasser la partie israélienne, et Netanyahou n’apaise pas non plus la situation pour marquer des points sur le plan interne, et tester l’administration Biden et ses choix régionaux. 

Les Palestiniens espéraient un tournant favorable

Au début de l'affrontement à Jérusalem, plutôt «pacifique», les observateurs commençaient à évoquer la possibilité d'un troisième soulèvement (après la première Intifada en 1987 et la deuxième en 2000) plutôt dans les pas de la première Intifada non violente. À cause de la forte répression et de pratiques d’expulsion du quartier de Sheikh Jarrah, l’opinion publique mondiale a condamné à priori Israël comme force occupante. Mais, l’entrée en jeu du Hamas, et de ses tirs de missiles contre le territoire israélien et Jérusalem, ont changé la donne.

Avant que la mécanique militaire ne s’enchaîne, c’était pourtant la première fois que les Palestiniens de 1948 (à l’intérieur de la Ligne verte) s'unissaient aux habitants de Jérusalem et au peuple de Cisjordanie. Ils ont afflué vers la mosquée Al-Aqsa, défiant Israël, et sont même parvenus à bloquer la route vers Tel Aviv. Confronté à ces développements, le gouvernement israélien s’est retrouvé coincé par ce sursaut populaire, et les légitimes réclamations contre les colons et le système judiciaire israélien.

La lassitude ou la démission ne sont pas les seules alternatives pour la communauté internationale face à un conflit comme celui entre Israël et la Palestine. Si, en apparence, il est insoluble, il n’est pas pour autant impossible à régler.

Ces affrontements ont été un moment opportun pour les Palestiniens, qui ont enduré une longue tragédie, et une série d’échecs causés parfois par leurs propres représentants. Pour eux, l’oppression et l'arbitraire d'Israël sont devenus monnaie courante, visibles aux yeux de tous. Ainsi, pour les défenseurs de la cause palestinienne, les affrontements de 2021 auraient prouvé que les Palestiniens étaient des victimes, sans ambiguïté, et que leurs griefs étaient indiscutablement équitables. Ainsi, après tant de déconvenues, les Palestiniens espéraient un tournant favorable.

Mais, dans la mêlée, le mouvement Hamas a décidé de transformer la nature de ce mouvement palestinien, alors focalisé sur Jérusalem-Est. Ce mouvement soutenu par l'Iran, et partie intégrante des Frères musulmans, a déplacé la confrontation de Jérusalem à Gaza. À la place d'un soulèvement civil contre une autorité d'occupation, c’est une petite guerre qui se profile avec des missiles. En face, le gouvernement israélien s'est félicité de ce changement de dynamique, car il a détourné l’attention des maux de l’occupation et des colons. 

Ainsi, après tant de déconvenues, les Palestiniens espéraient un tournant favorable.

Avec cette flambée de violence, et ce nouveau cycle d’épreuves de force, Benjamin Netanyahou donne l’impression d’attendre un «cadeau de Gaza». Il était un homme poussé dans ses retranchements par son incapacité à former un gouvernement, la guerre lui ouvre désormais des horizons. Mais tout dépendra en réalité de la fin de ce nouveau round entre Israël et Gaza. 

En conclusion, l’engrenage en cours au Proche-Orient constitue un test majeur pour l’administration Biden, et tous ceux qui voulaient ignorer la dure réalité dans cette région du monde, où conflits historiques, injustices, extrémisme et pauvreté forment les ingrédients d’un cocktail explosif. La lassitude ou la démission ne sont pas les seules alternatives pour la communauté internationale face à un conflit comme celui entre Israël et la Palestine. Si, en apparence, il est insoluble, il n’est pas pour autant impossible à régler.


Les États-Unis affirment bénéficier d'un soutien régional pour la résolution de paix sur Gaza

Des bâtiments détruits par l'armée israélienne  dans le quartier de Shijaiya de la ville de Gaza, lors d'une visite organisée par l'armée pour les journalistes, le 5 novembre 2025. (AP Photo)
Des bâtiments détruits par l'armée israélienne  dans le quartier de Shijaiya de la ville de Gaza, lors d'une visite organisée par l'armée pour les journalistes, le 5 novembre 2025. (AP Photo)
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  • Selon le projet de résolution, la gouvernance de Gaza serait transférée au Hamas et la démilitarisation serait imposée au groupe
  • Une copie du projet de résolution a été distribuée mercredi soir pour examen formel par le Conseil de sécurité

NEW YORK : La mission américaine auprès de l'ONU a déclaré mercredi que des partenaires régionaux clés, notamment l'Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis, ont apporté leur soutien à son projet de résolution pour Gaza.

Cette évolution est le signe d'une avancée diplomatique au sein du Conseil de sécurité de l'ONU en faveur d'un mandat transitoire de deux ans pour l'enclave déchirée par la guerre et du déploiement d'une force internationale de stabilisation.

Au cours d'une réunion convoquée par l'ambassadeur américain aux Nations unies, Mike Waltz, les dix membres élus et non permanents du Conseil (Algérie, Danemark, Grèce, Guyane, Pakistan, Panama, Corée du Sud, Sierra Leone, Slovénie et Somalie), rejoints par des États régionaux tels que l'Arabie saoudite, l'Égypte, le Qatar, la Turquie et les Émirats arabes unis, ont exprimé leur soutien à l'initiative menée par Washington, a déclaré un porte-parole de la mission américaine.

Le projet de résolution soutient la création d'un organe de gouvernance transitoire, appelé "Conseil de la paix". Le contrôle de la bande de Gaza serait ainsi transféré des mains du Hamas et la démilitarisation serait imposée au groupe.

Le projet de résolution autorise également le déploiement d'une "Force internationale de stabilisation" à Gaza, qui opérerait dans le cadre d'un mandat de deux ans de l'ONU. Elle aurait le pouvoir d'utiliser "toutes les mesures nécessaires" pour protéger les civils, superviser les flux d'aide humanitaire, sécuriser les zones le long des frontières avec Israël et l'Égypte, démilitariser les acteurs non étatiques et former une nouvelle force de police palestinienne.

Une copie du projet de résolution a été distribuée mercredi soir pour examen formel par les 15 membres du Conseil de sécurité.

L'adhésion régionale au projet reflète "l'opportunité historique" de mettre fin à des décennies d'effusion de sang au Moyen-Orient et de transformer Gaza en un territoire plus sûr et plus prospère, a poursuivi le porte-parole, et souligne l'intention des États-Unis de traduire la résolution en résultats plutôt qu'en "discours sans fin".

Le soutien des principaux acteurs régionaux est important car leur participation est largement considérée comme une condition préalable à l'autorisation de toute force multinationale de stabilisation d'opérer à Gaza et d'obtenir une légitimité internationale.

Le porte-parole américain a souligné qu'aucune troupe américaine ne serait déployée à Gaza. En revanche, Washington a engagé des pourparlers avec des États tels que l'Indonésie, les Émirats arabes unis, l'Égypte, le Qatar, la Turquie et l'Azerbaïdjan en vue de fournir des troupes à une force internationale de stabilisation.

Le projet de texte stipulerait qu'une telle force opérerait sous un commandement unifié, comme convenu par le Conseil de paix, l'Égypte et Israël une fois que des accords sur le statut de la mission auront été conclus.

Il décrit également une séquence d'événements au cours desquels la force stabilisera la situation sécuritaire à Gaza, démilitarisera les groupes armés non étatiques, mettra les armes hors service et supervisera la formation et le soutien de la force de police palestinienne nouvellement approuvée.


Turquie: le chef kurde Öcalan veut agir avec «sérieux et responsabilité»

 Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs. (AFP)
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  • "Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités"
  • Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul

ISTANBUL: Le chef emprisonné de la guérilla kurde Abdullah Öcalan appelle à agir avec "sérieux et sens des responsabilités" pour mener le processus de paix en cours avec la Turquie à son terme, dans un message publié mardi par des députés turcs.

"Pour passer à une phase positive, il est essentiel que chacun agisse avec sensibilité, sérieux et sens des responsabilités", écrit le leader historique du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), auquel une délégation du parti prokurde DEM a rendu visite lundi.

Abdullah Öcalan, qui a appelé en février son mouvement à se dissoudre, est détenu à l'isolement depuis 1999 sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul.

Le PKK a annoncé le 26 octobre le retrait vers le nord de l'Irak de ses derniers combattants présents en Turquie, complétant ainsi la première phase du processus de paix initié un an auparavant par Ankara.

Lors d'une cérémonie en juillet, une trentaine de combattants en treillis avaient symboliquement brûlé leurs armes.

Le parti prokurde, troisième force au Parlement, a appelé à "passer à la deuxième phase, à savoir les étapes juridiques et politiques".

"Nous nous efforçons de développer une phase positive, et non une phase destructrice et négative", poursuit M. Öcalan. "L'intégration du phénomène kurde dans toutes ses dimensions dans le cadre légal de la République et un processus de transition solide doivent en constituer le fondement", écrit-il.

Une commission parlementaire transpartisane planche depuis août sur une traduction légale et encadrée de cette transition vers la paix.

Elle doit notamment décider du sort d'Abdullah Öcalan et de possibles garanties de sécurité pour ses combattants.

La libération du leader kurde âgé de 76 ans est au cœur des demandes du PKK. Il a été autorisé en septembre à rencontrer ses avocats pour la première fois en six ans.

Selon des analystes, le PKK est affaibli par des décennies de guérilla qui ont fait au moins 50.000 morts, selon un bilan officiel. Et la communauté kurde, qui représente selon des estimations 20% de la population turque sur 86 millions d'habitants, est épuisée par un long conflit.


Un hôpital de Gaza déclare avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens

L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël. (AFP)
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  • Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles
  • Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens

KHAN YOUNES: L'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza, a annoncé mercredi avoir reçu les corps de 15 prisonniers palestiniens dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu avec Israël.

"La dixième série de dépouilles de martyrs palestiniens, soit 15 martyrs", est arrivée "dans le cadre de l'échange de dépouilles entre la partie palestinienne et l'occupation israélienne", a déclaré l'hôpital en précisant que 285 dépouilles ont été reçues dans la bande de Gaza depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre.

Sur les 28 otages décédés que le Hamas avait accepté de remettre à Israël dans le cadre de l'accord, 21 ont été restitués à ce jour. Israël exige toujours la restitution des sept dernières dépouilles.

Le mouvement islamiste palestinien a également libéré le 13 octobre les 20 derniers otages vivants retenus dans la bande de Gaza, en échange de la libération de près de 2.000 prisonniers palestiniens.

Mardi, la branche armée du Hamas a fait parvenir aux autorités israéliennes la dépouille d'une personne, identifiée mercredi comme Itay Chen, un soldat israélo-américain tué à l'âge de 19 ans.

Dans la bande de Gaza, des proches de personnes arrêtées par Israël et qui attendent leur retour ont dit lors de plusieurs remises de dépouilles par Israël que les corps étaient très difficiles à identifier.

Le service de presse du gouvernement du Hamas à Gaza a de nouveau accusé mercredi les autorités israéliennes de refuser de transmettre des listes de noms des personnes dont les dépouilles arrivent dans le territoire palestinien.