Trafic d'antiquités: le Louvre sonne l'alarme avec une exposition inédite

Retracer l'historique des antiquités s'avère toutefois souvent plus difficile, comme en attestent les deux bas-reliefs également présentés dans cette exposition. (Photo, AFP)
Retracer l'historique des antiquités s'avère toutefois souvent plus difficile, comme en attestent les deux bas-reliefs également présentés dans cette exposition. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 25 mai 2021

Trafic d'antiquités: le Louvre sonne l'alarme avec une exposition inédite

  • Montrer de telles œuvres, «c'est une grande première» en France, souligne le conservateur du musée, Ludovic Laugier
  • Objectif: alerter sur les méfaits du commerce illicite de biens culturels, un trafic qui génère près de 10 milliards de dollars par an

PARIS: Dans l'aile des antiquités du Louvre, une poignée de bustes et de bas-reliefs venus du Proche-Orient détonnent: avec leurs scellés judiciaires frappés de cire, ils font l'objet d'une exposition exceptionnelle du musée parisien destinée à souligner les ravages mondiaux du trafic de biens culturels.

L'allure mystérieuse de la déesse Perséphone interpelle les visiteurs. Drapée dans son voile de marbre, la reine des Enfers est représentée par quatre sculptures antiques.

Derrière ces bustes, saisis en 2012 à l'aéroport parisien de Roissy, le mur est recouvert d'une vue aérienne de la nécropole de Cyrène, l'une des plus vastes cités antiques d'Afrique du Nord. Les statues veillaient très probablement sur ces tombeaux en ruine de Libye orientale depuis plus de 2 000 ans, avant que l'avidité des trafiquants ne les arrache à leur sanctuaire.

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Un bas-relief en marbre sculpté saisi par les autorités douanières françaises à l'aéroport de Roissy en 2016 en transit entre le Liban et la Thaïlande est exposé au musée du Louvre à Paris le 21 mai 2021. (Photo / AFP)

Montrer de telles œuvres, "c'est une grande première" en France, souligne auprès de l'AFP le conservateur du musée, Ludovic Laugier.

Grâce à une loi de 2016 révisant le code du patrimoine, des juges d'instruction ont donné leur autorisation pour les exposer, pendant que leur enquête se poursuit pour remonter les réseaux responsables de leur pillage.

Objectif: alerter sur les méfaits du commerce illicite de biens culturels, un trafic qui génère près de 10 milliards de dollars par an, selon l'Unesco.

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Des statues funéraires de Cyrénaïque saisies en 2012 et placées sous scellés par le ministère de la Justice et le service des douanes sont exposées au musée du Louvre à paris le 21 mai 2021.(Photo / AFP)

«Antiquités du sang»

Le Proche-Orient, en proie à de nombreux conflits, compte parmi les premières victimes de cette criminalité peu risquée et lucrative. Au-delà des destructions des cités antiques de Palmyre et Amapée en Syrie, ou de Hatra et Nimrud en Irak, le groupe jihadiste Etat islamique s'est par exemple largement financé grâce à la revente de ce que les experts appellent les "antiquités du sang".

Face à ce fléau, sensibiliser le grand public permet "de jouer sur la demande", espère M. Laugier. "Plus les gens doutent, vérifient la provenance, moins il y a de demande d'antiquités volées et moins il y a d'offre."

"Il faut montrer ces œuvres pour les rendre invendables, de la même manière que la Joconde est invendable car tout le monde la connaît", insiste Vincent Michel, archéologue spécialiste de l'Orient classique, engagé dans la lutte contre le trafic. 

Les bustes de Perséphone exposés sont "faciles à reconnaître", poursuit le chef de la mission archéologique française en Libye. Ces statues funéraires ont été produites par milliers entre le VIe et le Ier siècle avant Jésus-Christ, uniquement à Cyrène et ses environs. Leur marbre parsemé de traces rougeâtres est typique de la "terra rossa" de la région.

Pour aiguiser leur œil, les visiteurs peuvent scanner des QR codes disséminés sur les murs, leur permettant d'accéder à diverses "listes rouges" comme celles d'Interpol ou du Conseil international des musées (ICOM), qui répertorient des biens volés ou des catégories d'œuvres très prisées des trafiquants.

Trafic mondialisé

Retracer l'historique des antiquités s'avère toutefois souvent plus difficile, comme en attestent les deux bas-reliefs également présentés dans cette exposition.

Recouverts de croix chrétiennes et d'entrelacs de vigne, ils viennent probablement de Syrie, mais le trafic les a rendus "muets", regrette M. Laugier: impossible de les dater ou de les recontextualiser précisément.

Saisis en 2016 à l'aéroport de Roissy, ils avaient été enregistrés au Liban comme des "ornements de jardin" à destination de la Thaïlande. De quoi illustrer la complexité d'un trafic mondialisé, traqué par deux services en France: l'Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) et les douanes.

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Une femme regarde un relief en marbre sculpté saisi par les autorités douanières françaises à l'aéroport de Roissy en 2016 en transit entre le Liban et la Thaïlande est exposé au musée du Louvre à Paris le 21 mai 2021. (Photo / AFP)

Avant de restituer les biens à leur pays d'origine, "les enquêtes peuvent être longues car nous devons faire appel à la coopération internationale et souvent remonter une chaîne de multiples intermédiaires", explique Corinne Cléostrate, sous-directrice des douanes chargée des affaires juridiques et de la lutte contre la fraude.

Outre ces réseaux organisés, le trafic s'aggrave également avec la pandémie de Covid-19.

"On assiste à une sorte d'industrialisation du pillage", s'inquiète M. Michel. Dans des pays en conflit où le coronavirus a encore appauvri la population, les sites archéologiques mal gardés, dont les antiquités peuvent désormais se revendre en quelques clics sur les réseaux sociaux, représentent une manne financière tentante. 

"Il faut vraiment prendre conscience que derrière une antiquité, il y a peut-être une infraction", conclut l'archéologue.

L'exposition se déroule jusqu'au 13 décembre.


Le 87ème prix Albert Londres sera remis le 25 octobre à Beyrouth

Le journaliste français et président du Prix Albert Londres, Hervé Brusini, s'exprime lors du dévoilement d'une plaque commémorative en hommage au caméraman de l'AFP Arman Soldin, tué en Ukraine, sur l'esplanade du Centre universitaire de Vichy, dans le centre de la France, le 7 mai. (AFP)
Le journaliste français et président du Prix Albert Londres, Hervé Brusini, s'exprime lors du dévoilement d'une plaque commémorative en hommage au caméraman de l'AFP Arman Soldin, tué en Ukraine, sur l'esplanade du Centre universitaire de Vichy, dans le centre de la France, le 7 mai. (AFP)
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  • La capitale libanaise devait l'an dernier accueillir les délibérations de la plus prestigieuse récompense de la presse francophone, mais les bombardements israéliens sur plusieurs régions du Liban ont obligé le jury à rapatrier ses travaux sur Paris
  • "Il y a d'abord Beyrouth, Beyrouth est une ville heureuse", écrit Albert Londres en novembre 1919, cité par le communiqué de l'association

PARIS: Le 87ème prix Albert Londres, qui récompense le meilleur reportage écrit et audiovisuel francophone de l'année, sera remis le 25 octobre à Beyrouth, a annoncé mercredi l'association.

La capitale libanaise devait l'an dernier accueillir les délibérations de la plus prestigieuse récompense de la presse francophone, mais les bombardements israéliens sur plusieurs régions du Liban ont obligé le jury à rapatrier ses travaux sur Paris.

"Il y a d'abord Beyrouth, Beyrouth est une ville heureuse", écrit Albert Londres en novembre 1919, cité par le communiqué de l'association.

"Mais l'histoire en décida autrement. Quand le journaliste est revenu dans la région dix ans plus tard, les mots massacres et assassinats se sont imposés sous sa plume. Le conflit israélo-palestinien voyait ses premières victimes", poursuit le texte.

"Déjà ! Près de cent ans plus tard, la tragédie est massive. Informer est un enjeu vital malgré les bombes, malgré les murs. Le Prix Albert Londres se devait d'aller y voir. Le propre du reportage, en somme".

L'association Albert Londres a dévoilé la liste des articles, films et livres pré-sélectionnés pour l'édition 2025, sur 134 candidatures.

Pour le 87ème prix de la presse écrite, ont été choisis : Eliott Brachet (Le Monde), Julie Brafman (Libération) , Emmanuel Haddad (L'Orient-Le Jour), Iris Lambert (Society, Libération), Ariane Lavrilleux (Disclose), Célian Macé (Libération), Matteo Maillard (Libération, Jeune Afrique) et Arthur Sarradin (Libération, Paris Match).

Pour le 41ème prix audiovisuel, ont été retenus : Solène Chalvon-Fioriti pour "Fragments de guerre" (France 5), Marianne Getti et Agnès Nabat pour "Tigré : viols, l'arme silencieuse" (Arte), Jules Giraudat et Arthur Bouvart pour "Le Syndrome de La Havane" (Canal+), Julien Goudichaud pour "Calais-Douvres, l'exil sans fin" (LCP), Louis Milano-Dupont et Elodie Delevoye pour "Rachida Dati, la conquête à tout prix" (France 2) et Solène Oeino pour "Le Prix du papier" (M6).

Pour le 9ème prix du livre, ont été désignés Charlotte Belaich et Olivier Pérou pour "La Meute" (Flammarion), Siam Spencer pour "La Laverie" (Robert Laffont), Quentin Müller pour "L'Arbre et la tempête" (Marchialy) et Elena Volochine pour "Propagande : l'arme de guerre de Vladimir Poutine" (Autrement).

L'an dernier, la journaliste du Monde Lorraine de Foucher avait remporté le prix pour l'écrit pour ses reportages et enquêtes sur les viols de Mazan, les migrantes violées et encore les victimes de l'industrie du porno.

Le prix de l'audiovisuel avait été décerné à Antoine Védeilhé et Germain Baslé pour leur film "Philippines: les petits forçats de l'or" (Arte) et le prix du livre avait couronné Martin Untersinger pour "Espionner, mentir, détruire" (Grasset), une enquête sur les attaques dans le cyberespace.

Créé en 1933 en hommage au journaliste français Albert Londres (1884-1932), père du grand reportage moderne, le prix est doté de 5.000 euros pour chacun des candidats, qui doivent avoir moins de 41 ans.


Des projets architecturaux saoudiens parmi les 15 finalistes du nouveau prix RIBA

Le Wadi Safar Experience Center est une porte d'entrée vers le développement plus large de Wadi Safar et s'inspire du style vernaculaire Najdi. (Fourni)
Le Wadi Safar Experience Center est une porte d'entrée vers le développement plus large de Wadi Safar et s'inspire du style vernaculaire Najdi. (Fourni)
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  • Deux projets innovants situés à Riyad – le parc King Salman et le centre d’expérience de Wadi Safar – ont été sélectionnés parmi les 15 finalistes du nouveau prix RIBA
  • Ce prix célèbre des projets ayant un impact social fort et une vision durable

DUBAÏ : Riyad s'impose comme un centre du design de pointe, alors que le Royal Institute of British Architects (RIBA) a dévoilé les 15 finalistes de son tout premier prix des bâtiments les plus transformateurs du Moyen-Orient.

Cette nouvelle distinction récompense les projets architecturaux récents ayant le plus d’impact social et de transformation à travers le Golfe, et deux des candidats les plus remarquables se trouvent dans la capitale saoudienne.

Au cœur de la contribution de Riyad figure le parc King Salman, une vaste opération de réhabilitation de l’ancien aéroport de la ville, réalisée par Gerber Architekten, Buro Happold et Setec. Ce projet ambitieux transforme une relique de l’ère aérienne en une oasis urbaine immense, offrant aux habitants et visiteurs un réseau de jardins, de plans d’eau et d’espaces de loisirs. Il met en œuvre des techniques novatrices de régénération des sols désertiques, d’utilisation durable de l’eau et de plantation résistante au climat.

Non loin de là, le centre d’expérience de Wadi Safar sert de porte d’entrée au développement plus large de Wadi Safar. Conçu par Dar Al Omran – Rasem Badran, il s’inspire du style vernaculaire najdi, avec des cours intérieures et un aménagement paysager en bermes de terre créant une atmosphère fraîche et contemplative tout en valorisant le patrimoine régional.

La liste des finalistes met également en lumière l’excellence dans tout le Moyen-Orient. Aux Émirats arabes unis, le sanctuaire des tortues et de la faune de Khor Kalba (Hopkins Architects) soutient la réhabilitation des tortues et oiseaux en danger dans la mangrove ancestrale de Sharjah, avec des pavillons arrondis se fondant dans le paysage côtier. À Dubaï, le centre Jafar du Dubai College (Godwin Austen Johnson) offre un espace STEM flexible, baigné de lumière naturelle, où l’acoustique et l’efficacité énergétique sont prioritaires.

À Doha, le centre Al-Mujadilah et sa mosquée pour femmes (Diller Scofidio + Renfro) réinterprètent de manière contemporaine un espace sacré, avec un toit percé de plus de 5 000 puits de lumière diffusant une lumière naturelle apaisante dans les salles de prière et les espaces communautaires.

Plusieurs projets revisitent les formes patrimoniales dans un contexte contemporain. À Sharjah, The Serai Wing, Bait Khalid Bin Ibrahim (ANARCHITECT) transforme deux maisons familiales des années 1950, autrefois propriétés d’un marchand de perles, en un hôtel boutique alliant préservation du patrimoine et design contemporain.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Cate Blanchett sera à l’honneur au Festival du film d’El Gouna

Cate Blanchett sera l'invitée d'honneur de cette année et recevra le prix Champion de l'humanité. (Getty Images)
Cate Blanchett sera l'invitée d'honneur de cette année et recevra le prix Champion de l'humanité. (Getty Images)
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  • L’actrice australienne sera l’invitée d’honneur du festival égyptien et recevra le Champion of Humanity Award pour son engagement humanitaire auprès des réfugiés en tant qu’ambassadrice du HCR
  • Reconnue pour ses rôles marquants au cinéma et son implication sur scène, Blanchett est aussi saluée pour son action sur le terrain dans des camps de réfugiés, incarnant la vision du festival : le cinéma au service de l’humanité

DUBAÏ : L’actrice et productrice australienne Cate Blanchett sera mise à l’honneur lors de la 8e édition du Festival du film d’El Gouna, en Égypte, qui se tiendra du 16 au 24 octobre.

Elle sera l’invitée d’honneur de cette édition et recevra le Champion of Humanity Award (Prix de la Championne de l’Humanité).

« De ses rôles emblématiques dans Elizabeth, Blue Jasmine et TÁR, à ses collaborations remarquables avec les plus grands réalisateurs, Cate Blanchett a laissé une empreinte indélébile sur le cinéma mondial », a publié le festival sur Instagram.

« Au-delà de son art, elle continue de défendre des causes humanitaires urgentes en tant qu’ambassadrice de bonne volonté mondiale pour le HCR, reflétant ainsi la vision du festival : le cinéma au service de l’humanité », ajoute le communiqué. « Pour saluer son engagement en faveur des réfugiés et des personnes déplacées de force, Cate Blanchett recevra le Champion of Humanity Award du Festival du film d’El Gouna. »

Cate Blanchett est également connue pour son travail sur scène, ayant été co-directrice artistique de la Sydney Theatre Company. Elle est aussi cofondatrice de Dirty Films, une société de production à l’origine de nombreux films et séries récompensés.

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Depuis 2016, elle occupe le rôle d’ambassadrice de bonne volonté pour le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés. À ce titre, elle utilise sa notoriété pour sensibiliser à la cause des réfugiés et encourager le soutien international. Elle a visité des camps de réfugiés et des communautés hôtes dans des pays comme la Jordanie, le Liban, le Bangladesh, le Soudan du Sud, le Niger et le Brésil.

En 2018, elle a reçu le Crystal Award lors du Forum économique mondial en reconnaissance de son engagement humanitaire.

Amr Mansi, fondateur et directeur exécutif du Festival d’El Gouna, a déclaré : « C’est un immense honneur d’accueillir une artiste du calibre de Cate Blanchett. Son talent exceptionnel fascine le public depuis des décennies, et son engagement humanitaire à travers le HCR est véritablement inspirant.

Ce partenariat avec le HCR et la Fondation Sawiris, ainsi que sa venue, illustrent parfaitement la mission essentielle de notre festival : utiliser la force du cinéma pour promouvoir un changement positif et soutenir l’humanité. »

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com