Au Bélarus, un opposant se poignarde avec un stylo en plein tribunal

Des membres de la diaspora biélorusse en Ukraine participent à un rassemblement de soutien au prisonnier Stepan Latypov à Kiev le 1er juin 2021. (Photo / AFP)
Des membres de la diaspora biélorusse en Ukraine participent à un rassemblement de soutien au prisonnier Stepan Latypov à Kiev le 1er juin 2021. (Photo / AFP)
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Publié le Mercredi 02 juin 2021

Au Bélarus, un opposant se poignarde avec un stylo en plein tribunal

  • Stepan Latypov avait été arrêté le 15 septembre près de chez lui, un bloc d'habitations connu à Minsk pour être particulièrement actif dans la contestation contre le président Alexandre Loukachenko
  • Le journaliste indépendant biélorusse Alexandre Bourakov, qui travaille pour le média allemand Deutsche Welle, a été libéré après 20 jours de prison

MOSCOU/BERLIN: Un militant d'opposition bélarusse jugé mardi pour de nombreux chefs d'inculpation s'est planté un stylo dans le cou en pleine audience avant d'être évacué inconscient, a annoncé l'ONG Viasna de défense des droits humains.

Selon Viasna, Stepan Latypov a grimpé sur un banc dans la cage réservée à l'accusé "pour empêcher les gardes de l'atteindre" puis "s'est poignardé la gorge avec un objet ressemblant à un stylo".

"Stepan est devenu bleu et s'est allongé sur le banc, une ambulance a été appelée", a ajouté l'ONG.

Dans un communiqué, le ministère bélarusse de la Santé a indiqué mardi soir que la vie de l'opposant de 41 ans n'était pas en danger.

"Toutes les mesures médicales nécessaires ont été prises (...) Le patient est dans un état stable, il n'y a pas de danger de mort. Il a repris connaissance après l'anesthésie", a précisé le ministère sur sa page Telegram.

Selon Viasna, juste avant de passer à l'acte, l'opposant avait averti son père, qui venait de témoigner, qu'on l'avait menacé de poursuivre ses proches et sa famille en justice s'il ne reconnaissait pas sa culpabilité.

Stepan Latypov avait été arrêté le 15 septembre près de chez lui, un bloc d'habitations connu à Minsk pour être particulièrement actif dans la contestation contre le président Alexandre Loukachenko.

Il est jugé pour fraude dans le cadre de ses activités professionnelles, pour avoir coordonné la protestation via un groupe sur la messagerie Telegram, créé un atelier de production de symboles de l'opposition et résisté aux policiers lors de son arrestation.

L'opposant et ancien candidat à l'élection présidentielle Andreï Sannikov, en exil en Pologne, a évoqué sur Twitter "un acte de désespoir" et affirmé que Stepan Latypov était "battu et torturé depuis longtemps".

"Encore une preuve de la nature meurtrière du régime de Loukachenko", a-t-il ajouté. 

Alexandre Loukachenko a fait face à des manifestations inédites et extrêmement massives après sa réélection à un cinquième mandat en août 2020, qu'il assure avoir gagné avec 80% des voix.

Refusant toute concession, il a fait arrêter ou envoyé en exil la plupart de ses opposants et dénonce des manifestations pilotées par l'Occident pour le renverser. La répression parfois très violente du mouvement de contestation a fait plusieurs morts et des milliers d'arrestations.

Fin mai, un avion de ligne effectuant la liaison Athènes-Vilnius a été dérouté sur Minsk, escorté par un avion de chasse, après une alerte à la bombe qui s'est révélée fausse. Un opposant qui se trouvait à bord et sa compagne ont été arrêtés, causant l'indignation des Européens.

Selon Viasna, 449 prisonniers politiques sont actuellement détenus au Bélarus.

 

Libération d'un journaliste de la Deutsche Welle

Le journaliste indépendant biélorusse Alexandre Bourakov, qui travaille pour le média allemand Deutsche Welle, a été libéré après 20 jours de prison dans la ville de Moguilev (est), a annoncé mardi DW.

"Je suis très soulagé que notre collègue sorte plus ou moins indemne de son emprisonnement illégal, mais la spirale de la violence d'État contre les journalistes est de plus en plus préoccupante", a réagi le directeur de la DW, Peter Limbourg, dans un communiqué.

"Il est de plus en plus évident que le régime du Bélarus souhaite réduire au silence les dernières voix indépendantes du pays, par tous les moyens nécessaires", a-t-il dénoncé.

Arrêté le 12 mai alors qu'il couvrait le procès de Pavel Sevyarynets, un opposant, et de plusieurs autres personnalités, M. Bourakov avait été condamné trois jours plus tard pour participation à un "évènement non autorisé".

M. Bourakov, comme un autre journaliste arrêté en même temps que lui, avait affirmé le 15 mai devant le tribunal de Moguilev avoir fait l'objet lors de sa détention de "tortures et traitements inhumains", avoir été réveillé plusieurs fois par nuit et forcé par des gardes à se déshabiller.

Le journaliste "a été libéré de prison mardi après 20 jours de détention", a annoncé dans un communiqué la Deutsche Welle.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.