Les Houthis lancent le procès de la mannequin yéménite enlevée

Entesar Al-Hammadi. (Photo, Twitter)
Entesar Al-Hammadi. (Photo, Twitter)
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Publié le Mardi 08 juin 2021

Les Houthis lancent le procès de la mannequin yéménite enlevée

  • La milice n'a pas fait de commentaires officiels sur cette affaire
  • Furieux face à l'intense couverture médiatique de l'enlèvement, les Houthis ont démis de ses fonctions un procureur qui avait ordonné la libération d'Al-Hammadi

ALEXANDRIE: Un tribunal contrôlé par les Houthis à Sanaa a ouvert le procès d'une mannequin yéménite qui a été enlevée par la milice soutenue par l'Iran.

Entesar Al-Hammadi a été arrêtée par les Houthis le 20 février avec deux de ses collègues. Leur capture et leur emprisonnement ont déclenché une condamnation locale et internationale.

Le militant pour les droits de l’homme Abdel Wahab Qatran précise que le tribunal a refusé de fournir à son avocat les documents relatifs au dossier, et notamment les charges retenues contre elle.

Son avocat, Khaled Mohammed Al-Kamal, a refusé les demandes d'Arab News de commenter l’affaire, rappelant que le tribunal interdit la médiatisation du procès.

Les Houthis n'ont pas officiellement commenté l'affaire ou les accusations, mais des médias affiliés aux miliciens rapportent qu'elle a été détenue en raison d'informations sur son implication dans un réseau de drogue et de prostitution.

Des groupes de défense des droits de l’homme locaux et internationaux affirment que les Houthis ont forcé Al-Hammadi à faire des aveux, et que l'enlèvement fait partie d'une répression des Houthis contre les voix libérales qui contestent leurs opinions radicales.

Al-Hammadi se vantait de son rêve de devenir une mannequin internationale, et avait publié des images d'elle en tenue traditionnelle yéménite.

Furieux face à l'intense couverture médiatique de l'enlèvement, les Houthis ont démis de ses fonctions un procureur qui avait ordonné la libération d'Al-Hammadi après l'avoir interrogée, ont placé la mannequin en isolement cellulaire et l'ont agressée verbalement et physiquement.

Ils ont également intensifié l'intimidation et le harcèlement des militants locaux, des avocats et des juges qui ont demandé la libération des femmes.

La semaine dernière, les Houthis ont licencié Al-Kamal de son poste au Secrétariat de la capitale, un complexe abritant des bureaux gouvernementaux, où il travaille depuis 20 ans, pour le forcer à abandonner l'affaire. Al-Kamal a déclaré sur les réseaux sociaux que son patron lui avait dit qu'il était licencié, sans lui donner d'explication.

Qatran, ainsi qu’Ahmed Hashed, membre du parlement contrôlé par les Houthis et critique virulent de la milice, ont déclaré avoir reçu des menaces de mort.

Des militants yéménites des droits humains ont accusé les Houthis d'utiliser les instances judiciaires dans les zones sous leur contrôle pour dépénaliser leur enlèvement d'activistes, d'artistes et de critiques du groupe.

Huda Al-Sarari, avocate et directrice de l'Organisation de défense des droits et libertés, suit le dossier d’Entesar Al-Hammadi depuis le début. Elle estime que les mesures des Houthis contre la mannequin montrent qu'elle ne serait pas libérée de sitôt.

«À la lumière de la répression, de la confiscation des droits et libertés, et de l'utilisation de la justice pour légitimer leurs crimes, il est difficile pour les autorités Houthis de libérer leurs victimes avec les mécanismes de pression locaux actuels», déclare-t-elle à Arab News.

Elle a exhorté les organisations internationales de femmes à coopérer avec leurs homologues yéménites pour des campagnes plus agressives afin de garantir la libération des femmes enlevées.

La milice n'a pas respecté les lois internationales relatives aux droits des hommes, a-t-elle ajouté, appelant la communauté internationale à imposer davantage de sanctions aux Houthis qui ont enlevé et maltraité des Yéménites.

«Malheureusement, les retards dans la garantie de la libération de la mannequin ne sont pas dus à la faiblesse de la mobilisation. L'autorité Houthi n'est soumise à aucune pression et reste intransigeante sur ces questions. C’est d’abord et avant tout une milice qui ne respecte pas les accords internationaux, les résolutions ou les mouvements de mobilisation».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Soudan: l'ONU alerte sur un «nouveau front» au Darfour

Une femme et son bébé dans le camp de déplacés de Zamzam, près d'El Fasher au Darfour du Nord, au Soudan. (Reuters)
Une femme et son bébé dans le camp de déplacés de Zamzam, près d'El Fasher au Darfour du Nord, au Soudan. (Reuters)
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  • Le pays vit «une crise gigantesque, entièrement créée par l'Homme», a dénoncé la sous-secrétaire générale de l'ONU pour les Affaires politiques Rosemary DiCarlo
  • «Des combats à el-Facher pourraient entraîner un conflit intercommunautaire sanglant à travers le Darfour» et freiner encore plus la distribution de l'aide humanitaire dans une région «déjà au bord de la famine», a-t-elle renchéri

NATIONS UNIES : De hauts responsables de l'ONU ont alerté vendredi devant le Conseil de sécurité sur les risques d'un nouveau front au Soudan, autour du contrôle de la ville d'el-Facher, au Darfour, où la population est déjà au bord de la famine.

Après un an de guerre entre les forces armées (FAS) du général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), sous le commandement du général Mohamed Hamdane Daglo, le pays vit «une crise gigantesque, entièrement créée par l'Homme», a dénoncé la sous-secrétaire générale de l'ONU pour les Affaires politiques Rosemary DiCarlo.

«Les parties en conflit ont ignoré de façon répétée les appels à cesser les hostilités, y compris de ce Conseil. A la place, ils ont accéléré leurs préparatifs pour plus de combats, les FAS et les FSR continuant tous les deux leurs campagnes pour recruter des civils», a-t-elle déploré.

Elle s'est en particulier inquiétée des informations sur une possible attaque «imminente» des FSR contre el-Facher, seule capitale des cinq Etats du Darfour qu'elles ne contrôlent pas, «soulevant le spectre d'un nouveau front dans le conflit».

El-Facher fait office de hub humanitaire pour le Darfour, région où vivent environ un quart des 48 millions d'habitants du Soudan. La ville avait jusque là été relativement épargnée par les combats, accueillant de nombreux réfugiés.

Mais depuis mi-avril, des bombardements et des affrontements ont été rapportés dans les villages environnants.

«Depuis, il y a des informations continues sur des combats dans les parties Est et Nord de la ville, provoquant le déplacement de plus de 36.000 personnes», a indiqué Edem Wosornu, directrice des opérations pour le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha), notant que Médecins sans frontières a traité plus de 100 victimes à el-Facher ces derniers jours.

«Le nombre total de victimes civiles est probablement beaucoup plus élevé».

«Ces violences posent un danger extrême et immédiat pour les 800.000 civils vivant à el-Facher. Cela risque de déclencher plus de violences dans d'autres parties du Darfour», a-t-elle mis en garde.

«Des combats à el-Facher pourraient entraîner un conflit intercommunautaire sanglant à travers le Darfour» et freiner encore plus la distribution de l'aide humanitaire dans une région «déjà au bord de la famine», a renchéri Rosemary DiCarlo.

La région a déjà été ravagée il y a plus de 20 ans par la politique de la terre brûlée menée par les Janjawids --les miliciens arabes depuis enrôlés dans les FSR- pour le président de l'époque Omar el-Béchir.

Le nouveau conflit au Soudan, qui a débuté le 15 avril 2023 a déjà fait des milliers morts et provoqué le déplacement de plus de 8,5 millions de personnes, selon l'ONU.


Des mercenaires d'Europe de l'Est soupçonnés d'avoir attaqué le journaliste iranien Pouria Zeraati

Le chargé d'affaires iranien, Seyed Mehdi Hosseini Matin, a nié toute implication du gouvernement dans l'attaque contre Zeraati. (X/File)
Le chargé d'affaires iranien, Seyed Mehdi Hosseini Matin, a nié toute implication du gouvernement dans l'attaque contre Zeraati. (X/File)
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  • Les services de sécurité britanniques pensent que des criminels liés à Téhéran ont perpétré l'attentat au couteau de Londres
  • La police suit des pistes en Albanie dans le cadre de son enquête.

LONDRES : La police a déclaré vendredi qu'un groupe de mercenaires d'Europe de l'Est est soupçonné d'avoir perpétré l'attaque au couteau contre le journaliste iranien Pouria Zeraati à la fin du mois de mars.

M. Zeraati a été poignardé à plusieurs reprises par trois hommes lors d'une attaque devant son domicile dans le sud de Londres.

Le présentateur d'Iran International a perdu beaucoup de sang et a été hospitalisé pendant plusieurs jours. Il a depuis repris le travail, mais vit désormais dans un lieu sécurisé.

Iran International et son personnel ont fait l'objet de menaces répétées, qui seraient liées au régime iranien, lequel a désigné la chaîne comme organisation terroriste pour sa couverture des manifestations de 2022.

Le chargé d'affaires iranien, Seyed Mehdi Hosseini Matin, a nié toute implication du gouvernement dans l'attaque contre Zeraati.

Les enquêteurs ont révélé que les suspects avaient fui le Royaume-Uni immédiatement après l'incident, les rapports suggérant qu'ils s'étaient rendus à l'aéroport d'Heathrow avant d'embarquer sur des vols commerciaux vers différentes destinations.

La police suit des pistes en Albanie dans le cadre de son enquête.

Les unités antiterroristes et les services de sécurité britanniques qui mènent l'enquête estiment que cet attentat est un nouvel exemple de l'utilisation par le régime iranien d'intermédiaires criminels pour cibler ses détracteurs sur le sol étranger.

Cette méthode permet à Téhéran de maintenir un déni plausible et d'éviter d'éveiller les soupçons lorsque les suspects entrent dans le pays.

M. Zeraati a été attaqué le 29 mars alors qu'il quittait son domicile pour se rendre à son travail. Son émission hebdomadaire est une source d'informations impartiales et non censurées pour de nombreux Iraniens, dans leur pays et à l'étranger.

Dans une interview accordée cette semaine à l'émission "Today" de la BBC Radio 4, M. Zeraati a déclaré qu'il allait physiquement "beaucoup mieux", mais que son rétablissement mental après l'agression "prendrait du temps".

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

 


Le chef du Hamas Haniyeh à Istanbul pour rencontrer Erdogan

Ismail Haniyeh (à gauche), chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, s'adresse à la presse après une réunion avec le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian (à droite) à Téhéran le 26 mars 2024. (Photo par AFP)
Ismail Haniyeh (à gauche), chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, s'adresse à la presse après une réunion avec le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian (à droite) à Téhéran le 26 mars 2024. (Photo par AFP)
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  • M. Erdogan a confirmé vendredi ce premier tête-à-tête depuis juillet 2023, tout en restant extrêmement discret sur son objet: «Gardons l'ordre du jour pour nous et M. Haniyeh» a-t-il glissé aux journalistes
  • M. Haniyeh est arrivé en soirée à la tête d'une délégation de son mouvement dans la mégapole turque, l'un de ses lieux de résidence depuis 2011, mais où il ne s'est rendu officiellement qu'une seule fois, en janvier, depuis le début de la guerre à Gaza

ISTANBUL, Turquie : Le chef du Hamas Ismaïl Haniyeh est reçu samedi à Istanbul par l'un de ses plus fervents soutiens, le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui tentera d'imposer sa médiation entre Israël et le mouvement palestinien.

Pour cette première rencontre officielle depuis le début de la guerre le 7 octobre, les deux hommes se retrouveront au palais de Dolmabahce sur le Bosphore à 14H00 (1100 GMT), a indiqué une source officielle à l'AFP.

M. Erdogan a confirmé vendredi ce premier tête-à-tête depuis juillet 2023, tout en restant extrêmement discret sur son objet: «Gardons l'ordre du jour pour nous et M. Haniyeh» a-t-il glissé aux journalistes.

Le Hamas a pour sa part simplement indiqué que la guerre dans la bande de Gaza serait au menu des entretiens, dans un communiqué diffusé vendredi soir à l'arrivée de son chef.

M. Haniyeh est arrivé en soirée à la tête d'une délégation de son mouvement dans la mégapole turque, l'un de ses lieux de résidence depuis 2011, mais où il ne s'est rendu officiellement qu'une seule fois, en janvier, depuis le début de la guerre à Gaza.

Il avait alors rencontré le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan, avec lequel il s'est longuement entretenu mercredi à Doha.

M. Fidan recevait pour sa part samedi matin le ministre égyptien des affaires étrangères, Sameh Choukri et les deux responsables devaient s'exprimer à la mi-journée devant la presse.

- Frontières de 67 -

Lors de sa visite à Doha, a spécifié M. Fidan mercredi, les représentants du Hamas lui «ont répété qu'ils acceptent la création d'un État palestinien dans les frontières de 1967» donc, implicitement l'existence de l'Etat d'Israël, «et de renoncer à la lutte armée après la création de l'État palestinien».

«Le Hamas n'aura alors plus besoin d'avoir une branche armée et continuera d'exister en tant que parti politique», avait détaillé M. Fidan qui s'était dit «heureux de recevoir un tel message».

Le ministre turc disait également s'être fait l'écho auprès de ses interlocuteurs des «inquiétudes des Occidentaux» pour qui le Hamas est un mouvement terroriste «qu'ils comparent à Daech», acronyme arabe désignant le groupe Etat islamique.

La Turquie, qui se veut le fer de lance du soutien à la cause palestinienne, apporte un appui solide et constant aux responsables du Hamas, mais elle s'est trouvée écartée de la médiation entre Israël et le mouvement palestinien.

Cette visite de M. Haniyeh intervient au moment où le Qatar, qui assume un rôle pivot dans les négociations entre Israël et le Hamas, a dit vouloir «réévaluer» son rôle et alors que les négociations pour arracher une trêve et la libération des otages israéliens piétine.

Les négociateurs qataris ont été particulièrement froissés par les critiques israéliennes et celles de certains démocrates américains.

La Turquie pourrait donc en profiter pour tenter de reprendre la médiation au nom de ses bonnes relations avec le Hamas.

Cependant, Sinan Ciddi, chercheur associé à la Fondation pour la défense des démocraties (FDD), basée à Washington, se montre circonspect et ne prédit à M. Erdogan qu'un rôle «très limité», au côté d'autres médiateurs, en raison du rejet qu'il suscite de la part d'Israël.

M. Erdogan a encore estimé cette semaine que les Israéliens «ont surpassé Hitler» dans la bande de Gaza.

«Erdogan ne sera pas le bienvenu» affirme Sinan Ciddi en rappelant que le président turc a comparé Benjamin Netanyahu à «un nazi» et qualifié Israël «d'Etat terroriste»: «Tout au plus pourrait-il être appelé à passer des messages entre les négociateurs palestiniens et Israël», estime-t-il.

L'attaque du 7 octobre a entraîné la mort de 1.170 personnes en Israël et plus de 250 personnes ont été enlevées dont 139 se trouvent toujours dans la bande de Gaza. Depuis, les représailles israéliennes ont tué près de 34.000 personnes à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.