Nasser Kamel: «Je rêve d'un Erasmus méditerranéen»

Le secrétaire général de l'Union pour la Méditerranée, Nasser Kamel, à Madrid le 25 mai 2021.
Le secrétaire général de l'Union pour la Méditerranée, Nasser Kamel, à Madrid le 25 mai 2021.
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Publié le Vendredi 11 juin 2021

Nasser Kamel: «Je rêve d'un Erasmus méditerranéen»

  • Seulement 1,5% des entreprises dans notre espace Mena sont capables de faire du e-commerce
  • Pour un Erasmus méditerranéen, il faut des fonds et de la mobilité, du Sud vers le Nord, pour nos jeunes étudiants. Il est également nécessaire d’accroître une internationalisation des diplômes

NICE: Organisation intergouvernementale, lancée en 2008 à l’initiative de Nicolas Sarkozy, l’Union pour la Méditerranée réunit 42 pays, dont les 27 membres de l’Union européenne (UE). Depuis sa création, l’UPM s’est donnée pour objectif de favoriser la coopération régionale. Vingt-cinq ans après la Déclaration de Barcelone, si de nombreux projets ont pu voir le jour, le bilan d’intégration reste mitigé, les disparités se creusent entre les pays du Nord et du Sud, et le manque de coopération Sud-Sud est criant. C’est ce qui ressort du premier rapport d’étape sur l’intégration régionale dans l’UPM. Arab News en Français a rencontré son secrétaire général, Nasser Kamel. Ancien ambassadeur d’Égypte à Paris, puis à Londres, il nous livre sa lecture de ce rapport, mais aussi ses recommandations pour une intégration régionale réussie.

Après plusieurs années à se chercher, à s’organiser, l’UPM est parvenue à se doter d’une feuille de route. L’institution semble s’être remise sur les rails, mais elle peine encore à se faire connaître du grand public. En quoi se distingue-t-elle des autres outils de coopération Nord-Sud? 

Nous faisons partie d’un écosystème, nous travaillons ensemble, que ce soit en faveur du climat, de l’environnement, des énergies renouvelables, de l’économie bleue, de l’éducation,  de la recherche scientifique, ou encore de l’emploi. Nous avons d’ailleurs été les premiers à étudier les défis et les problématiques de la zone, à proposer des pistes aux décideurs politiques et à agir pour faire avancer la cause de l’intégration régionale.

L’UPM se distingue aussi par son mode de travail. Nous sommes une organisation internationale, ce qui nous donne le pouvoir de réunir 42 pays à la même table, et à tous les niveaux, qu’il s’agisse de ministres, de membres de la société civile, d’acteurs de terrain. Nous sommes pleinement ouverts à collaborer avec tous les partenaires, comme ceux du Dialogue 5+5 , via le Sommet des deux rives, Forum de la Méditerranée… Il y a donc une très grande complémentarité des outils existants.

Une complémentarité mais aussi une grande disparité. C’est ce qui ressort de votre rapport sur l’intégration régionale des pays de la zone, réalisé avec l’OCDE. Une conclusion qui n’est pas vraiment une surprise… Pourquoi, dès lors, avoir réalisé cette étude?

Ce rapport a été commandé par nos décideurs politiques, nos ministres des Affaires étrangères il y a trois ans. Son but était de réaliser un état des lieux de l’intégration régionale au sens large, et sur la disparité et les manques. Il a permis de présenter des recommandations aux décideurs. Mais à ma grande surprise, le rapport pointe les progrès réalisés. La région a en effet pu diversifier sa production. Elle n’exporte plus seulement des matières premières. Elle joue maintenant un rôle plus important dans la chaîne de production à l’échelle régionale. Le Maroc en constitue un exemple, avec son industrie automobile, acteur important sur le marché au sud et au nord du pays. D’autres États comme l’Égypte ont également pu diversifier leur base de production. Mais la réalité est là. Oui, 75% des échanges dans la zone euro-méditerranéenne se font entre les pays de l’UE, 15% entre la zone Europe et les pays du Sud…et 5% seulement entre les pays du Sud de la Méditerranée. C’est un véritable problème.

Pour produire ce rapport, nous avons choisi cinq critères bien déterminés: le commerce, les infrastructures, les finances, la mobilité, la coopération scientifique. Pour chacun de ces indicateurs, nous avons réalisé des études approfondies, pays par pays, sous-région par sous-région, et nous avons fait des recommandations très concrètes avec l’OCDE, à destination des décideurs politiques. Ce rapport n’est pas destiné à rester dans les tiroirs. Il fait partie d’une série de rapports, et sera mis à jour tous les deux ans.

Parmi les thèmes principaux abordés: la transformation digitale. La crise sanitaire a révélé l’importance du numérique. Quelles sont vos recommandations pour permettre à certains pays de rattraper leur retard?

Il y a des chiffres vraiment choquants. Seulement 1,5% des entreprises dans notre espace Mena sont capables de faire du e-commerce. Quand on voit que 8% à peine des PME ont une présence digitale, il reste énormément à faire. Dans ce sens, la transformation digitale est une priorité de l’UPM pour les trois à cinq prochaines années. Elle devient une priorité nationale pour la majorité de nos pays, et c’est une véritable source de satisfaction, mais il y a encore beaucoup à faire à propos de cette quatrième Révolution industrielle. Il faut miser sur l’éducation et la formation et nous avons mis en place des programmes. Au Maroc, par exemple, nous aidons des jeunes femmes en leur apprenant à commercialiser leurs produits de beauté à travers des plates-formes digitales, et donc à les commercialiser en Europe et au-delà.

En parlant justement d’éducation et de formation, peut-on rêver d’un Erasmus méditerranéen?

Je rêve tout autant que vous d'un Erasmus méditerranéen ! Nous avons déjà un programme, mais qui a nettement moins de moyens que le programme Erasmus de l’UE. On a vu comment Erasmus a changé la nature même de la jeunesse européenne. Il n’y a pas un jeune Européen qui n’a pas passé un an ou plus dans un autre pays de l’UE, ce qui a renforcé l’identité européenne de chacun d’eux. Nous avons un programme dans la région mais qui reste très limité. Pour avoir un Erasmus avec un certain impact, il faut des fonds. Il faut aussi de la mobilité, surtout du Sud vers le Nord, pour nos jeunes étudiants. Enfin, il est nécessaire d’accroître (et nous y travaillons) une internationalisation des diplômes, une reconnaissance des enseignements entre les pays. Il faudrait que les enseignants-chercheurs et professeurs puissent circuler librement dans la région. C’est désirable, mais nous n’en sommes pas encore là.

La pandémie de Covid-19 est aussi une occasion de repenser la manière de travailler ensemble, en particulier en ce qui concerne le défi environnemental, particulièrement en Méditerranée. Comment peut-on, selon vous, limiter les effets du changement climatique sur les pays du pourtour méditerranéen?

Nous avons été les premiers à sonner l’alarme par rapport à la spécificité de la région, doublement plus en danger que le reste du monde. Nous sommes la 22e région du monde (la première étant l’Antarctique) à être touchée. Dix villes de Méditerranée sont en danger à cause du réchauffement climatique, dans une zone où 70% de la population va vivre dans des grandes villes, pour la plupart côtières, ce n’est donc pas un débat intellectuel, mais une question existentielle. C’est le message que nous passons à la jeunesse de la région, aux décideurs politiques. Il y aura une rencontre ministérielle sur l’action climatique en Égypte les 4 et 5 octobre prochain. J’espère que l’on adoptera une vision commune et ambitieuse que l’on pourra présenter, ensemble, au sommet de la Terre, ou à la Cop 26, à Glasgow, l’objectif étant de présenter un front uni autour de ce défi planétaire. 

L’eau constitue l’un des grands défis du XXIᵉ siècle. Le pourtour méditerranéen est une des zones les plus pauvres en eau dans le monde. Son accès y est très inégalement réparti, et pourtant il n’y a pas véritablement de stratégie commune liée à l’eau. On parle surtout de projets au cas par cas. L’un de ces projets phares prévoit d’ailleurs la mise en place d’une installation de dessalement des eaux à Gaza. Où en est ce projet aujourd’hui?  

Ce projet a pris du retard, mais deux dernières années on a pu résoudre les trois principaux obstacles: tout d’abord celui de la mobilisation des fonds. Ils sont sécurisés auprès de tous les pays membres de l’UE, des pays du Golfe, de la Banque de développement islamique. Le deuxième défi était de garantir l’approvisionnement en énergie, problème qui a été résolu. Enfin, il fallait des garanties de certains pays voisins pour faciliter la construction de ce projet, et nous les avons obtenues. L’appel d’offre est lancé, et dans quelques mois, les contrats initiaux seront accordés. Le travail va donc commencer. Sur ce projet spécifique, nous sommes arrivés au stade de mise en œuvre.

Cela dit, nous travaillons sur la problématique de l’eau à l’échelle régionale. Le plus important à mon avis est la gestion de cette ressource, déjà très limitée dans notre région et qui, selon les prévisions, diminuera encore de 20 à 25% au cours des prochaines années, à cause de l’impact du changement climatique. Nous travaillons sur plusieurs axes. Nous regardons d’abord comment mieux gérer cette ressource: actuellement, il y a beaucoup de pertes en raison d’une mauvaise gestion notamment dans la conduite de nos activités agricoles. Toutefois, nous avons avancé. Nous avons pu instaurer auprès des responsables du secteur de la région des bonnes conduites à adopter en matière de gestion de cette ressource précieuse. 

Par ailleurs, nous nous sommes penchés sur la finance: comment encourager le privé à investir davantage dans ce secteur, à créer des partenariats entre le public et privé? Il reste énormément à faire, mais je crois qu’il existe quand même une vision commune. Ce n’est pas vraiment un secteur où l’on parle de coopération entre États mais plus d’une gestion pays par pays.

Les ambitions de l’UPM ne sont-elles pas freinées par les différents conflits politiques? Par exemple le conflit israélo-palestinien?

Certains secteurs sont impactés par le contexte géopolitique existant dans une sous-région ou une autre. Mais hormis la problématique du dessalement d’eau, donc du projet très spécifique de Gaza, nous n’avons pas constaté un impact important sur notre capacité à travailler. Gaza n’est pas un exemple valable pour l’ensemble de la région. Mais il est vrai qu’on ne peut nier que les conflits ont un impact sur beaucoup de choses. De plus en plus de pays membres, lors des rencontres sur des thématiques comme la préservation de l’environnement ou l’autonomisation des femmes, parviennent à laisser de côté les problématiques géopolitiques. Ils partagent tous le désir d’avancer sur ces thématiques. Des thématiques qui ne divisent pas, mais qui au contraire réunissent.

Cela ne paraît pas toujours être le cas. Certains conflits ralentissent le développement de projets. Celui du Sahara, par exemple, empoisonne les relations entre le Maroc et l’Algérie, et entrave la mise en œuvre d’une véritable Union du Maghreb arabe, de projets et donc du renforcement du processus régional d’intégration. N’est-ce pas problématique lorsqu’on sait que le Maghreb est l’une des régions les moins intégrées d’Afrique et du monde? 

Je ne suis pas aussi pessimiste que certains concernant une intégration régionale au Maghreb plus renforcée. Certes, les différends entre les pays de la région ont un impact et cela continuera d’en avoir sur certaines questions. Mais on voit que ces pays, lors de rencontres par exemple autour de l’agriculture, du climat sont coopératifs, ils s’engagent, participent à des projets, et ont généralement une attitude positive. Toutefois, je suis d’accord avec vous, sans ces problématiques, on aurait avancé beaucoup plus rapidement.

En 2019, vous avez rencontré le secrétaire général de l’Union du Maghreb arabe. Il s’agissait de la première visite officielle de l’UMA à l’UPM…

Toutes les initiatives sous-régionales font partie du projet. Si les sous-régions s’intègrent mieux, la région entière s’intégrera mieux. J’avais assuré au secrétaire général M. Baccouche notre disponibilité à mettre tous nos moyens au service à l’Union du Maghreb arabe. Cela fait partie de mon ADN d’appuyer toute initiative sous-régionale, pour parvenir à réaliser nos objectifs communs de bâtir une région en paix, en sécurité et prospère. 


L'organisation humanitaire controversée GHF, dit avoir terminé sa mission à Gaza

L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas. (AFP)
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  • L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale
  • Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU

JERUSALEM: L'organisation humanitaire GHF, soutenue par Israël et les Etats-Unis et vivement critiquée par l'ONU, a annoncé lundi avoir terminé sa mission à Gaza, se prévalant d'y avoir fourni des dizaines de millions de repas gratuits "sans détournement" de l'aide par le Hamas.

La Gaza Humanitaran Foundation (GHF) a annoncé dans un communiqué "la fin réussie de sa mission d'urgence à Gaza après avoir distribué plus de 187 millions de repas gratuits directement aux civils dans le cadre d'une opération humanitaire record qui a permis de garantir que l'aide alimentaire parvienne aux familles palestiniennes en toute sécurité et sans détournement par le Hamas ou d'autres entités".

L'organisme au financement opaque, déployé en mai dans le territoire palestinien en guerre, après deux mois de blocus humanitaire total imposé par Israël, a été vivement critiquée par la communauté humanitaire internationale.

Ses distributions de nourriture ont été entachées par des violences qui ont tué plus de 1.000 personnes à proximité de ses sites, selon le bureau des droits de l'Homme de l'ONU.

L'ONG a rejeté les critiques et sa responsabilité dans ces violences.

"A un moment critique, nous sommes fiers d’avoir été la seule opération d'aide capable de fournir de manière fiable et sûre des repas gratuits directement au peuple palestinien de Gaza, à grande échelle et sans détournement, s'est félicité son directeur John Acree, cité par le communiqué.

"Le modèle de la GHF, dans lequel le Hamas ne pouvait plus piller et tirer profit du détournement de l'aide, a joué un rôle majeur pour amener le Hamas à la table des négociations et parvenir à un cessez-le-feu. Nous les remercions pour tout ce qu’ils ont apporté aux Gazaouis", a salué sur X le porte-parole du département d'Etat, Tommy Pigott.

 

 


Israël: des généraux limogés, d'autres sanctionnés, en lien avec le 7-Octobre

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  • Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz
  • Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé le limogeage de trois généraux à des postes clés le 7 octobre 2023 et des sanctions disciplinaires contre plusieurs autres à cause de leur échec à empêcher ce jour-là l'attaque la plus meurtrière qu'ait connue Israël.

Ces mesures prises par le chef d'état-major Eyal Zamir ont provoqué un regain de tension avec le ministre israélien de la Défense Israël Katz, qui a annoncé lundi avoir demandé un "examen approfondi" du rapport, commandité par l'armée, qui leur a servi de base pour prendre ces mesures.

Le limogeage de généraux de premier plan le 7-Octobre met en exergue la façon dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a réussi jusque-là à esquiver ses torts dans le fiasco du 7-Octobre, malgré les appels de l'opinion publique et de l'opposition à la formation d'une commission d'enquête nationale.

M. Netanyahu a répété que les fautes de la direction politique ayant mené au 7-Octobre ne pourraient être examinées qu'après la fin de la guerre.

Le général de division Aharon Haliva, à l'époque chef des renseignements militaires, le général de division Oded Basyuk, alors chef des opérations, et le général de division Yaron Finkelman, qui commandait ce jour-là depuis peu la région militaire sud d'Israël, vont être déchargés "du cadre de réserve et ne (feront) plus partie" de l'armée, indique un communiqué de l'armée publié dimanche soir.

Le général Haliva a été le premier responsable militaire à démissionner, en 2024, en invoquant sa responsabilité pour le drame du 7-Octobre. Le général Finkelman a lui aussi démissionné en invoquant les mêmes motifs. Quant au général Basyuk, il a pris sa retraite après la guerre de 12 jours lancée par Israël contre l'Iran en juin.

Selon le communiqué de l'armée, les trois hommes portent chacun une responsabilité personnelle dans l'échec de l'institution militaire à anticiper et à repousser l'attaque lancée par le mouvement islamiste palestinien Hamas à partir de la bande de Gaza sur le sud d'Israël.

"Défaillance systémique" 

Ces mesures, prises par Eyal Zamir, font suite à la publication au début du mois du rapport d'un comité d'experts qu'il avait mandaté et qui a marqué la fin des enquêtes au sein de l'armée sur les défaillances ayant mené au drame du 7-Octobre.

Le rapport concluait à une "défaillance systémique et organisationnelle de longue date" au sein de l'appareil militaire.

Déplorant des "processus de prise de décision et de déploiement des forces déficients dans la nuit du 7 octobre 2023", le comité pointait des échecs au niveau de l'état-major général, de la direction des opérations, de la direction du renseignement militaire, du Commandement Sud, mais aussi de l'armée de l'Air et de la Marine.

Israël Katz, dont l'inimitié avec le chef d'état-major est connue, a réagi lundi à l'annonce des limogeages et mesures disciplinaires  en annonçant "un examen en profondeur" de ce rapport.

"A la suite des mesures annoncées hier par le chef d'état-major concernant la responsabilité des commandants dans les événements du 7 octobre, j'ai décidé de charger le contrôleur de l'établissement de la Défense, le général de division (à la retraite) Yaïr Wolansky, d'examiner en profondeur le rapport présenté par l'équipe dirigée par le général de division (à la retraite) Sami Turgeman", a annoncé le ministre de la Défense dans un communiqué.

Joute 

Il a précisé que le "contrôleur sera également invité à formuler une recommandation concernant des critères équitables pour l'élaboration de conclusions personnelles", faisant allusion aux limogeages et mesures disciplinaires annoncés par Eyal Zamir.

Selon les médias israéliens, il s'agit d'une énième joute dans le bras de fer qui oppose les deux hommes, M. Katz ayant cette fois-ci été ulcéré de ne pas avoir été prévenu directement des mesures qu'il a apprises par les médias.

En outre, le chef d'état-major s'est publiquement dissocié du gouvernement, notamment en appelant le 10 novembre à une "enquête systémique" sur le 7-Octobre.

Malgré les pressions de l'opinion publique et les demandes de l'opposition, le gouvernement israélien refuse l'établissement d'une commission nationale d'enquête dans l'échec des autorités à prévenir l'attaque.

Outre les trois généraux limogés, l'armée a annoncé des sanctions disciplinaires contre le général de division aérienne Tomer Bar et le vice-amiral David Saar Salma, respectivement à la tête de l'armée de l'Air et de la Marine.

Sont également visés par des mesures disciplinaires quatre autres généraux et quatre officiers supérieurs.

Le général Herzi Halévy, qui était à la tête de l'armée le 7 octobre 2023, a annoncé sa démission en janvier et quitté ses fonctions en mars. Il n'est pas concerné par les mesures.

 


Le Hezbollah enterre son chef militaire tué dans un bombardement israélien

Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien. (AFP)
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  • A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader"
  • Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël

BEYROUTH: Le Hezbollah a porté en terre lundi son chef militaire Haitham Ali Tabatabai, tué la veille par Israël dans la banlieue sud de Beyrouth, une attaque qui accentue encore la pression sur le Liban pour désarmer le mouvement pro-iranien.

A l'appel de la formation chiite, des centaines de ses partisans sont descendus dans son fief de la banlieue sud de Beyrouth, pour les funérailles de celui que le mouvement a qualifié de "grand leader".

Jusque-là largement inconnu du grand public au Liban, il est le plus haut responsable du Hezbollah tué depuis la fin, il y a un an, de la dernière guerre qui a opposé le mouvement à Israël.

Dans cette banlieue densément peuplée de la capitale, des membres du Hezbollah en treillis ont porté son cercueil et ceux d'autres compagnons tués dans la frappe ciblée de dimanche, recouverts des drapeaux jaunes du groupe, au son de chants religieux, a rapporté un correspondant de l'AFP.

La foule, d'où émergeaient des portraits des dirigeants du Hezbollah et du guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a scandé des slogans contre Israël et les États-Unis.

Cet assassinat est intervenu alors qu'Israël a intensifié ces derniers temps ses frappes sur le territoire libanais malgré le cessez-le-feu, disant viser des membres ou infrastructures du Hezbollah qu'il accuse de se réarmer, ce que le mouvement dément.

"Voie diplomatique" 

Le gouvernement libanais est sous forte pression de Washington pour contraindre le Hezbollah à rendre ses armes conformément à l'accord de cessez-le-feu du 27 novembre 2024, ce que le mouvement islamiste refuse jusqu'à présent.

Après l'assassinat de Haitham Ali Tabatabai, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a réaffirmé qu'Israël "ne permettra(it) pas au Hezbollah de reconstruire son pouvoir" et appelé Beyrouth  à "respecter son engagement" à le désarmer.

A Paris, la diplomatie française a appelé à la "retenue" après la frappe israélienne qui fait "peser un risque d'escalade dans un contexte déjà marqué par de fortes tensions".

Les options du Hezbollah apparaissent désormais limitées: le mouvement est sorti très affaibli du conflit qu'il avait enclenché avec Israël après le début de la guerre à Gaza, et a perdu sa voie d'approvisionnement via la Syrie depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre dernier.

Washington presse également Beyrouth de lui couper les financements iraniens. Téhéran, principal allié du Hezbollah, a dénoncé lundi un "lâche assassinat".

Il existe aujourd'hui "deux tendances au sein du groupe", explique à l'AFP une source proche du Hezbollah, sous couvert d'anonymat. "Ceux qui veulent répondre à l'assassinat et ceux qui préfèrent s'abstenir, et pour l'instant, la direction du groupe préfère la voie diplomatique".

"Les options du Hezbollah sont très limitées", affirme à l'AFP Nicholas Blanford, analyste à l'Atlantic Council. "Sa base réclame vengeance, mais si le Hezbollah répond directement (...) Israël ripostera très durement et personne au Liban ne remerciera le Hezbollah pour ça".

Selon lui, la frappe sur le chef militaire du Hezbollah "montre qu'Israël peut toujours localiser et cibler les hauts responsables (du mouvement) malgré toutes les mesures de protection".

"Rejeter les pressions" 

L'assassinat de Haitham Ali Tabatabai visait à "effrayer et affaiblir" le Hezbollah pour qu'il "se rende et se soumette, mais cet objectif ne sera jamais atteint", a lancé lors des funérailles un haut responsable du mouvement, Ali Damuch.

Israël était "inquiet de la réponse possible du Hezbollah, et doit le rester", a-t-il ajouté, exhortant les autorités libanaises à "affronter l'agression par tous les moyens (...) et à rejeter les pressions (...) à se conformer aux diktats américains et aux conditions israéliennes".

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kms entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.

Un responsable militaire libanais a affirmé à l'AFP la semaine dernière que les demandes américaines et israéliennes d'un désarmement d'ici fin 2025 étaient "impossibles" à satisfaire, faute de personnel et d'équipement, et au vu du risque de confrontations avec les communautés locales soutenant le Hezbollah.