En plein G7, Washington et Pékin étalent à nouveau leurs divergences

Entre Joe Biden et Xi Jinping, plus qu'une rivalité entre deux puissances mondiales, un fossé idéologique profond. (Photo, Archives/AFP)
Entre Joe Biden et Xi Jinping, plus qu'une rivalité entre deux puissances mondiales, un fossé idéologique profond. (Photo, Archives/AFP)
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Publié le Samedi 12 juin 2021

En plein G7, Washington et Pékin étalent à nouveau leurs divergences

  • Le président US fait de la défense des démocraties contre les « autocraties » une priorité stratégique de son mandat
  • Taïwan, Ouïghours, Hong Kong ou bien véritable origine du Covid: Biden tente d'unir ses alliés face à Pékin sur de nombreux dossiers

WASHINGTON : Les Etats-Unis et la Chine ont de nouveau étalé au grand jour leurs divergences vendredi, au moment où le président américain Joe Biden rencontre ses plus proches alliés lors d'une série de sommets dénoncés par Pékin comme du "pseudo-multilatéralisme" profitant à des "cliques".

Près de trois mois après leur grand déballage en Alaska où, devant les caméras du monde entier, ils avaient donné l'impression qu'un fossé impossible à combler séparait les deux puissances rivales, les chefs de la diplomatie américaine et chinoise, Antony Blinken et Yang Jiechi, ont eu une conversation téléphonique visiblement tout aussi tendue.

Le moment choisi pour ce premier échange depuis la rencontre de mars à Anchorage n'est pas anodin: Antony Blinken se trouve avec Joe Biden en Europe pour un sommet du G7 suivi de réunions des dirigeants de l'Otan et de l'Union européenne.

Le président des Etats-Unis tente d'unir ses alliés occidentaux face à Pékin sur de nombreux dossiers, du commerce aux droits humains en passant par les technologies, dans ce qu'il considère être une priorité stratégique de son mandat: la confrontation des démocraties contre les "autocraties".

Le secrétaire d'Etat américain a ainsi une nouvelle fois énuméré les griefs de Washington, d'après un communiqué de ses services.

Il a appelé la Chine à la "coopération" et à la "transparence" au sujet de l'origine du Covid-19, soulignant "la nécessité" d'un approfondissement de l'enquête d'experts de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) après les critiques qui ont visé la première mission.

G7, Otan, UE: la Chine dénonce les «cliques» à Biden

L'homme fort de la diplomatie chinoise a dénoncé vendredi, jour de l'ouverture du sommet du G7, la volonté des Etats-Unis de constituer des "cliques", au cours d'un appel téléphonique avec le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken.

"Le seul authentique multilatéralisme, c'est celui fondé sur les buts et principes de la Charte des Nations Unies et du droit international", a indiqué à son interlocuteur Yang Jiechi, le plus haut responsable diplomatique du Parti communiste chinois (PCC).

"C'est celui qui traite tout le monde d'égal à égal et promeut une coopération mutuellement bénéfique. Pas le pseudo-multilatéralisme basé sur les intérêts de cliques et sur une politique des blocs", a-t-il déclaré selon la télévision chinoise CCTV.

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Yang Jiechi, le plus haut responsable diplomatique du Parti communiste chinois (PCC). (Photo, AFP)

"Les États-Unis devraient résoudre leurs propres graves violations des droits de l'homme et ne pas utiliser les soi-disant problèmes des droits de l'homme comme prétexte pour s'ingérer arbitrairement dans les affaires intérieures d'autres pays", a déclaré vendredi Yang Jiechi.

Sur une note plus positive, le haut responsable chinois a toutefois appelé les Etats-Unis "à travailler avec la Chine" afin "de remettre sur les rails les relations sino-américaines" qui "restent dominées par le dialogue et la coopération".

Taïwan, Ouïghours et Hong Kong

Joe Biden a donné fin mai 90 jours au renseignement américain pour fournir un rapport sur le sujet, afin de trancher entre la thèse d'une origine animale et celle, récemment relancée, d'une fuite accidentelle au laboratoire chinois de Wuhan. 

Yang Jiechi, le plus haut responsable diplomatique du Parti communiste chinois, a une nouvelle fois dénoncé cette dernière piste comme "absurde", exhortant les Américains à ne "pas politiser" cette question sensible, selon la télévision chinoise d'Etat CGTN.

Antony Blinken a aussi appelé Pékin "à cesser sa campagne de pression contre Taïwan".

Là aussi, riposte immédiate du responsable chinois, qui a demandé à son homologue de faire preuve de "prudence" lorsqu'il s'agit de l'île, que la Chine considère toujours comme une de ses provinces, mais avec laquelle l'administration Biden souhaite engager des discussions commerciales.

Le secrétaire d'Etat a renchéri en évoquant la "préoccupation" des Etats-Unis au sujet "du génocide et des crimes contre l'humanité en cours" visant selon le gouvernement américain les musulmans ouïghours du Xinjiang. Mais également au sujet de "la détérioration des normes démocratiques à Hong Kong".

"Les États-Unis devraient résoudre leurs propres graves violations des droits de l'homme et ne pas utiliser les soi-disant problèmes des droits de l'homme comme prétexte pour s'ingérer arbitrairement dans les affaires intérieures d'autres pays", a répondu sèchement Yang Jiechi.

Surtout, il a attaqué la stratégie du président Biden qui, tout en vantant le "retour" de l'Amérique sur la scène multilatérale après quatre années de désengagement sous son prédécesseur Donald Trump, veut former un front uni des démocraties face à la Chine.

Comme Donald Trump, Joe Biden se veut ferme avec Pékin. Mais le démocrate a promis d'explorer toutes les voies diplomatiques pour coopérer avec le puissant adversaire sur les sujets où les deux pays ont des intérêts partagés.

Antony Blinken a ainsi évoqué, selon le département d'Etat, la Corée du Nord et "la nécessité pour les Etats-Unis et la République populaire de Chine de travailler ensemble à la dénucléarisation de la péninsule coréenne", mais aussi l'Iran, la Birmanie et la crise climatique.

Yang Jiechi a aussi plaidé pour des relations sino-américaines qui "restent dominées par le dialogue et la coopération".


Pourparlers sur l'Ukraine: Kiev et l'Europe voient des avancées mais encore beaucoup de travail

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
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  • Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou
  • Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine

KIEV: Le chancelier allemand a insisté lundi pour que la Russie rejoigne la table des négociations sur un plan de paix pour l'Ukraine, au lendemain de pourparlers à Genève ayant donné lieu à un "nouvel élan", mais qui nécessitent encore "du travail" selon Kiev et l'UE.

Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou. Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine.

L'Ukraine, qui lutte depuis près de quatre ans contre l'invasion de la Russie, est de nouveau au coeur d'échanges lundi à Luanda en marge d'un sommet entre l'UE et l'Union africaine. Et la "Coalition des volontaires", qui réunit les alliés de l'Ukraine, se réunira mardi en visioconférence.

"La Russie doit être présente à la table (des négociations)", a affirmé le chancelier allemand Friedrich Merz, jugeant néanmoins improbable "une percée" diplomatique cette semaine.

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre".

Salué par le président russe Vladimir Poutine, le texte initial du plan Trump reprenait plusieurs exigences cruciales pour Moscou. Le Kremlin a dit lundi n'avoir aucune information à l'issue des pourparlers de Génève, mais savoir que des "modifications" avaient été apportées.

Si M. Zelensky a salué lundi des avancées, il a estimé qu'il fallait "beaucoup plus" pour parvenir à une "paix réelle" avec la Russie et mettre fin au conflit le plus meurtrier en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Atmosphère "constructive"

Le dirigeant ukrainien s'est néanmoins félicité de l'inclusion d'éléments "extrêmement sensibles": la libération totale des prisonniers ukrainiens selon la formule de "tous-contre-tous" et des civils, et le retour des "enfants ukrainiens enlevés par la Russie".

Un haut responsable ukrainien a indiqué à l'AFP que l'hypothèse d'une visite de Volodymyr Zelensky à Washington était "au stade de la discussion", sans date fixée.

L'atmosphère à Genève était "parfois tendue, parfois plus légère mais dans l'ensemble constructive", a-t-il décrit, évoquant une ambiance "typique des négociations extrêmement importantes".

Depuis Luanda, les alliés européens de Kiev se sont dit prudemment optimistes.

"Il reste encore du travail à faire mais il y a une base solide pour avancer", a dit la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Le président du Conseil européen, Antonio Costa, a lui salué un "nouvel élan".

Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a aussi noté les "progrès significatifs" réalisés à Genève.

Aucune nouvelle version du texte n'a pour l'heure été publiée.

"Nous continuons tous à travailler avec nos partenaires, en particulier les États-Unis, et à rechercher des compromis qui nous renforcent et ne nous affaiblissent pas", a dit M. Zelensky lors d'une conférence virtuelle en Suède, ajoutant que son pays se trouve à un "moment critique".

Le président américain a semblé se réjouir de l'issue de la rencontre à Genève. "Est-ce vraiment possible que de grands progrès soient réalisés dans les pourparlers de paix entre la Russie et l'Ukraine??? Ne croyez que ce que vous voyez, mais quelque chose de bon pourrait bien se produire", a-t-il écrit sur son réseau Truth Social.

A Genève, son secrétaire d'Etat Marco Rubio s'était dit dimanche "très optimiste" sur la possibilité de conclure "très vite" un accord, estimant que "les points qui restent en suspens ne sont pas insurmontables".

Les Russes auront "leur mot à dire", avait-il aussi assuré.

Lors d'un entretien téléphonique lundi entre Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, le dirigeant russe a réitéré son opinion selon laquelle le plan initial des États-Unis pourrait "servir de base à un règlement de paix final".

La poussée lente, mais progressive, des troupes russes accentue la pression sur Kiev.

Moscou a revendiqué lundi la prise d'un village dans la région de Zaporijjia (sud), tandis que des frappes aériennes russes ont fait au moins quatre morts à Kharkiv.

La Russie cible quasi quotidiennement le pays au moyen de drones ou de missiles. Les infrastructures énergétiques sont particulièrement visées, faisant craindre un hiver difficile en Ukraine. Kiev vise de son côté régulièrement des dépôts et raffineries de pétrole et d'autres installations côté russe.

 


L'IA générative, un potentiel «Frankenstein des temps modernes», prévient le chef des droits humains de l'ONU

Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes. (AFP)
Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes. (AFP)
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  • "Le modèle économique actuel des plateformes de médias sociaux alimente déjà la polarisation, l'extrémisme et l'exclusion. De nombreux pays peinent à endiguer ce phénomène", a souligné M. Türk
  • Et si l'IA générative est porteuse d'"immenses promesses", les droits humains peuvent en "être les premières victimes", a-t-il estimé

GENEVE: Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes.

"L'IA générative recèle un immense potentiel, mais son exploitation à des fins purement politiques ou économiques peut manipuler, déformer et détourner l'attention", a déclaré le Haut Commissaire Volker Türk lors d'une réunion à Genève (Suisse), soulignant que "sans garanties et réglementations adéquates, les systèmes d'IA pourraient se transformer en un monstre de Frankenstein des temps modernes".

"Le modèle économique actuel des plateformes de médias sociaux alimente déjà la polarisation, l'extrémisme et l'exclusion. De nombreux pays peinent à endiguer ce phénomène", a souligné M. Türk lors d'un forum sur les entreprises et les droits humains.

Et si l'IA générative est porteuse d'"immenses promesses", les droits humains peuvent en "être les premières victimes", a-t-il estimé.

L'exploitation de cette technologie "à des fins purement politiques ou économiques" fait peser une menace "sur plusieurs droits humains, notamment le droit à la vie privée, la participation politique, la liberté d'expression et le droit au travail".

Le Haut Commissaire a averti que ces menaces "pourraient se concrétiser en préjudices qui compromettent les promesses des technologies émergentes et pourraient engendrer des conséquences imprévisibles".

"Il est de la responsabilité des gouvernements de s'unir pour éviter un tel scénario", a insisté M. Türk.

Par ailleurs, le chef des droits humains de l'ONU a mis en évidence une autre menace représentée par la concentration croissante du pouvoir des entreprises et l'"accumulation massive de richesses personnelles et d'entreprises entre les mains d'une poignée d'acteurs".

"Dans certains cas, cela dépasse le poids économique de pays entiers", a-t-il déclaré, insistant sur le fait que lorsque "le pouvoir n'est pas encadré par la loi, il peut mener à des abus et à l'asservissement".

 


L'UE promet 88 millions d'euros en faveur de l'Autorité palestinienne

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  • "Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica
  • Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël

BRUXELLES: Les pays de l'Union européenne vont verser quelque 88 millions d'euros pour aider l'Autorité palestinienne, pressée de se réformer par les Européens, soucieux de son rôle futur dans le cadre du plan Trump pour la région.

"Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica, à l'issue d'une conférence des donateurs à Bruxelles.

Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël.

"Aujourd'hui, nous avons présenté les progrès réalisés dans le cadre de notre programme de réforme nationale, qui est mis en œuvre, pas seulement promis, mais mis en œuvre et en avance sur le calendrier, ce qui a été reconnu par nos partenaires", a indiqué de son côté le Premier ministre palestinien Mohammed Mustafa.

Et cela "en dépit d'un environnement défavorable", a-t-il ajouté, accusant Israël de chercher "à affaiblir l'Autorité palestinienne ainsi que sa capacité à fonctionner".

Mme Suica a réitéré sur ce point les appels lancés par l'Union européenne pour qu'Israël accepte de libérer les recettes fiscales dues à l'Autorité palestinienne, indispensables à son fonctionnement.

"Cela a été dit par tous les participants", a-t-elle assuré.

Concernant Gaza, M. Mustafa a assuré que l'Autorité palestinienne avait un plan, soutenu par les pays arabes pour sa reconstruction. "Nous gouvernerons, nous réformerons et nous dirigerons la reconstruction de Gaza", a-t-il assuré.

L'Union européenne est le principal soutien financier de l'Autorité palestinienne. Elle conditionne toutefois le versement futur de cette aide à des réformes, qu'elle juge indispensables pour que cette Autorité soit en mesure de jouer pleinement son rôle dans le cadre de la solution à deux États, israélien et palestinien, que les Européens défendent depuis des années.

"Tout notre soutien à l'Autorité palestinienne est lié aux efforts pour poursuivre l'agenda des réformes", a rappelé Mme Suica.