Tollé aux Etats-Unis après l'espionnage d'élus démocrates sous Trump

Les parlementaires démocrates Adam Schiff et Eric Swalwell ont récemment été informés par Apple que le ministère de la Justice avait, en 2017 et 2018, exigé une partie de leurs données. (Photo, AFP)
Les parlementaires démocrates Adam Schiff et Eric Swalwell ont récemment été informés par Apple que le ministère de la Justice avait, en 2017 et 2018, exigé une partie de leurs données. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 12 juin 2021

Tollé aux Etats-Unis après l'espionnage d'élus démocrates sous Trump

  • Aux Etats-Unis, la fuite d'informations confidentielles est illégale et des procureurs fédéraux peuvent émettre des mandats de perquisition pour remonter à la source
  • Le ministère de la Justice avait imposé à Apple une consigne de non-divulgation, qui a expiré cette année

WASHINGTON : Démocrates et défenseurs des libertés ont vivement critiqué vendredi la saisie, par le gouvernement de Donald Trump, de données d'élus du Congrès des Etats-Unis, et ont appelé à réformer les "pouvoirs d'espionnage" de l'exécutif.

Les parlementaires démocrates Adam Schiff et Eric Swalwell ont récemment été informés par Apple que le ministère de la Justice avait, en 2017 et 2018, exigé une partie de leurs données dans le cadre d'une enquête sur des fuites d'informations classifiées.

Membres de la commission Renseignement de la Chambre des représentants, les deux hommes étaient soupçonnés d'avoir communiqué à des journalistes des informations liées à la très sensible enquête sur les soupçons de collusion entre Moscou et l'entourage de Donald Trump, qui a empoisonné tout le début du mandat du président républicain.

Aux Etats-Unis, la fuite d'informations confidentielles est illégale et des procureurs fédéraux peuvent émettre des mandats de perquisition pour remonter à la source, mais il ne semble pas que, jusque-là, des parlementaires aient jamais été visés par ce type d'enquête.

"C'est un abus de pouvoir grossier et une attaque contre la séparation des pouvoirs", a dénoncé le chef démocrate du Sénat Chuck Schumer, en convoquant les anciens ministres de la Justice Jeff Sessions et Bill Barr à s'expliquer devant la commission judiciaire de la chambre haute.

L'inspecteur général du ministère de la Justice a de son côté annoncé une enquête sur "l'utilisation par le ministère d'assignations et d'autres moyens légaux pour obtenir des informations sur les communications des membres du Congrès, de leurs proches et des médias".

«Une matraque»

L'affaire fait d'autant plus de bruit que les procureurs ont visé des collaborateurs et des membres de la famille des deux hommes, y compris un mineur, apparemment pour vérifier qu'ils ne leur avaient pas emprunté leurs téléphones pour contacter des journalistes.

Les données transmises n'ont finalement pas corroboré leurs soupçons mais l'enquête avait été relancée un an plus tard et n'a pris fin qu'à la fin de la présidence de Donald Trump, qui a régulièrement accusé Adam Schiff, un de ses plus féroces détracteurs, d'être l'auteur de fuites.

De plus, le ministère de la Justice avait imposé à Apple une consigne de non-divulgation, qui a expiré cette année, et les parlementaires n'étaient pas au courant des enquêtes jusqu'à ce que le groupe informatique ne leur en fasse part le mois dernier.

"Je ne serais pas surpris d'apprendre que c'est arrivé à d'autres", a commenté Eric Swalwell, en dénonçant des faits "inacceptables".

Donald Trump "a essayé d'utiliser le ministère comme une matraque contre ses opposants politiques et les membres des médias", a pour sa part réagi Adam Schiff.

Le New York Times, le Washington Post et la chaîne CNN ont révélé récemment que certains de leurs journalistes avaient eux aussi eu maille à partir avec le ministère de la Justice qui, sous Donald Trump, a bataillé en catimini pour obtenir leurs emails et comptes-rendus d'appels téléphoniques.

«Des limites au secret»

Ces affaires "prouvent que les pouvoirs de surveillance du ministère de la Justice peuvent faire l'objet d'abus et qu'il faut mettre des limites au secret qui empêche les personnes espionnées de le savoir", a commenté le sénateur démocrate Ron Wyden, qui veut déposer une proposition de loi pour "renforcer la transparence" en la matière.

"C'est ce qui se passe quand des pouvoirs d'espionnage importants et secrets sont laissés à la discrétion de l'exécutif: ils font inévitablement l'objet d'abus à des fins politiques", a renchéri Patrick Toomey, de la puissante organisation de défense des droits civiques ACLU. "Nos lois devraient l'empêcher."

Les gouvernements républicains et démocrates ont, dans le passé, tous émis des assignations contre des journalistes pour essayer de connaître leurs sources. Après un scandale en 2013, le gouvernement de Barack Obama avait créé de nouvelles règles et imposé d'obtenir un feu vert de hauts responsables du ministère de la Justice pour tout mandat contre des journalistes, sans renoncer à la pratique.

La semaine dernière, le gouvernement de Joe Biden s'y est engagé. "Citer à comparaître des journalistes dans le cadre d'enquêtes sur des fuites politiques n'est pas conforme à l'orientation politique du président", avait expliqué la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki.


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.