Biden, l'offensive de charme, le jeu des contrastes avec Trump

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Publié le Samedi 12 juin 2021

Biden, l'offensive de charme, le jeu des contrastes avec Trump

Il faudra à Joe Biden plus que des bons mots et des promesses sur «America is back» pour effacer une forme de défiance vis-à-vis de la première puissance mondiale et les interrogations tenaces sur le devenir de la démocratie américaine. (Photo, AFP)
  • Au-delà du G7, le vrai rendez-vous de ce voyage, le plus difficile, n'a pas encore eu lieu
  • Pour l'heure, Joe Biden peut se vanter d'avoir, au moins temporairement, redoré le blason de son pays à l'étranger

CARBIS BAY: "Tout le monde à l'eau!" La remarque amusée de Joe Biden au moment de la traditionnelle photo de famille du sommet du G7 - mise en scène cette année sur la plage - donne le ton.

Pour son premier déplacement à l'étranger, le président américain joue, dans un registre qu'il affectionne, une partition classique qu'il connaît sur le bout des doigts.

Moins imprévisible, moins agressif, moins obnubilé par les tapis rouges que son prédécesseur Donald Trump, "Joe" rassure. Après quatre ans d'invectives, il offre "une grande bouffée d'air frais", selon les termes du Premier ministre britannique Boris Johnson.

Le 46e président des Etats-Unis le sait: les alliés sont échaudés. Et il lui faudra plus que des bons mots et des promesses sur "America is back" pour effacer une forme de défiance vis-à-vis de la première puissance mondiale et les interrogations tenaces sur le devenir de la démocratie américaine.

Mais pour l'heure, dans les paysages enchanteurs des Cornouailles, au début d'une tournée de huit jours qui le mènera aussi à Bruxelles et Genève, le président de 78 ans joue sur du velours.

Peu à l'aise dans les conférences virtuelles via Zoom qui étaient retransmises à la Maison Blanche, le "vieux lion" de la politique américaine prend un plaisir évident à retrouver les interactions personnelles.

S'il apparaît parfois frêle, le président américain le plus âgé de l'histoire, affublé du surnom moqueur de "Joe l'endormi" par Donald Trump, a jusqu'ici fait taire les critiques sur son manque de vivacité et les interrogations sur son état de santé.

Il affiche une forme de décontraction qui est sa marque de fabrique: à la veille du sommet, il a été photographié en baskets blanches, assis en terrasse face à la mer avec sa femme Jill.

Sa longue carrière politique s'est bâtie sur le sens du contact, à Washington bien sûr (il a siégé au Congrès pendant 36 ans) mais aussi sur la scène internationale (il a sillonné le monde comme vice-président de Barack Obama).

"Il se prépare depuis 50 ans", avait plaisanté sa porte-parole Jen Psaki avant son départ pour le Royaume-Uni.

De ses années au Sénat, il a gardé le goût pour les apartés avec les journalistes, comme celui des blagues (certaines répétées en boucle) et des formules singulières connues à Washington sous le nom de "Bidénismes".

En déplacement, il ne change pas de registre. "C'est magnifique! Je ne veux plus rentrer chez moi!", lance-t-il face face à l'impressionnante Baie de St Ives.

L'image de l'Amérique

Au G7, Joe Biden est en terrain favorable.

Angela Merkel, Justin Trudeau, Emmanuel Macron: nombre de dirigeants qu'il y côtoie on été été pris à partie ou moqués par son tempétueux prédécesseur républicain.

Et chacun de ses mots, de ses gestes, offre un contraste saisissant avec le premier déplacement de Donald Trump en Europe, en mai 2017 (sommet de l'Otan à Bruxelles puis du G7 en Sicile).

L'image du président de la première puissance mondiale poussant sans ménagement le Premier ministre du petit Montenegro pour s'imposer au premier rang parmi ses pairs a laissé des traces indélébiles. 

"Bien sûr, le G7 préfère 'L'Amérique est de retour', et 'La démocratie est chargée de promesses' aux tirades et aux menaces de Trump", souligne Steve Pomper, de l'International Crisis Group.

"Mais in fine, Biden ne sera pas jugé par rapport aux errements de son prédécesseur", ajoute-t-il. "La question est de savoir si ce genre de sommets peut générer le type d'unité que Washington appelle de ses voeux".

Au-delà du G7, le vrai rendez-vous de ce voyage, le plus difficile, n'a pas encore eu lieu. Il est prévu mercredi, à Genève, dans une villa avec vue sur le lac Léman, avec son homologue russe Vladimir Poutine. Le face-à-face s'annonce tendu, son issue incertaine.

Pour l'heure, Joe Biden peut se vanter d'avoir, au moins temporairement, redoré le blason de son pays à l'étranger.

Selon une étude réalisée dans 16 pays par le centre de recherche Pew, 62% des personnes interrogées ont désormais une "image favorable" de la première puissance mondiale, contre seulement 34% en 2020.

L'étude apporte cependant un bémol, de taille, au moment où Joe Biden appelle les démocraties à démontrer leur supériorité face aux autocraties: la majorité des sondés ne voient plus l'Amérique comme un modèle démocratique.


Pourparlers sur l'Ukraine: Kiev et l'Europe voient des avancées mais encore beaucoup de travail

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre". (AFP)
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  • Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou
  • Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine

KIEV: Le chancelier allemand a insisté lundi pour que la Russie rejoigne la table des négociations sur un plan de paix pour l'Ukraine, au lendemain de pourparlers à Genève ayant donné lieu à un "nouvel élan", mais qui nécessitent encore "du travail" selon Kiev et l'UE.

Les discussions entre Ukrainiens, Américains et Européens, convoquées dimanche dans l'urgence, se sont tenues sur la base du projet de plan en 28 points de Donald Trump, considéré comme largement favorable à Moscou. Américains et Ukrainiens ont affirmé qu'un "futur accord" de paix devrait respecter la souveraineté de l'Ukraine.

L'Ukraine, qui lutte depuis près de quatre ans contre l'invasion de la Russie, est de nouveau au coeur d'échanges lundi à Luanda en marge d'un sommet entre l'UE et l'Union africaine. Et la "Coalition des volontaires", qui réunit les alliés de l'Ukraine, se réunira mardi en visioconférence.

"La Russie doit être présente à la table (des négociations)", a affirmé le chancelier allemand Friedrich Merz, jugeant néanmoins improbable "une percée" diplomatique cette semaine.

Le président américain avait initialement donné jusqu'au 27 novembre au président ukrainien Volodymyr Zelensky pour répondre à son plan, comprenant notamment la cession de territoires ukrainiens et s'apparentant à une capitulation de Kiev. Il a ensuite précisé que ce n'était pas sa "dernière offre".

Salué par le président russe Vladimir Poutine, le texte initial du plan Trump reprenait plusieurs exigences cruciales pour Moscou. Le Kremlin a dit lundi n'avoir aucune information à l'issue des pourparlers de Génève, mais savoir que des "modifications" avaient été apportées.

Si M. Zelensky a salué lundi des avancées, il a estimé qu'il fallait "beaucoup plus" pour parvenir à une "paix réelle" avec la Russie et mettre fin au conflit le plus meurtrier en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Atmosphère "constructive"

Le dirigeant ukrainien s'est néanmoins félicité de l'inclusion d'éléments "extrêmement sensibles": la libération totale des prisonniers ukrainiens selon la formule de "tous-contre-tous" et des civils, et le retour des "enfants ukrainiens enlevés par la Russie".

Un haut responsable ukrainien a indiqué à l'AFP que l'hypothèse d'une visite de Volodymyr Zelensky à Washington était "au stade de la discussion", sans date fixée.

L'atmosphère à Genève était "parfois tendue, parfois plus légère mais dans l'ensemble constructive", a-t-il décrit, évoquant une ambiance "typique des négociations extrêmement importantes".

Depuis Luanda, les alliés européens de Kiev se sont dit prudemment optimistes.

"Il reste encore du travail à faire mais il y a une base solide pour avancer", a dit la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Le président du Conseil européen, Antonio Costa, a lui salué un "nouvel élan".

Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a aussi noté les "progrès significatifs" réalisés à Genève.

Aucune nouvelle version du texte n'a pour l'heure été publiée.

"Nous continuons tous à travailler avec nos partenaires, en particulier les États-Unis, et à rechercher des compromis qui nous renforcent et ne nous affaiblissent pas", a dit M. Zelensky lors d'une conférence virtuelle en Suède, ajoutant que son pays se trouve à un "moment critique".

Le président américain a semblé se réjouir de l'issue de la rencontre à Genève. "Est-ce vraiment possible que de grands progrès soient réalisés dans les pourparlers de paix entre la Russie et l'Ukraine??? Ne croyez que ce que vous voyez, mais quelque chose de bon pourrait bien se produire", a-t-il écrit sur son réseau Truth Social.

A Genève, son secrétaire d'Etat Marco Rubio s'était dit dimanche "très optimiste" sur la possibilité de conclure "très vite" un accord, estimant que "les points qui restent en suspens ne sont pas insurmontables".

Les Russes auront "leur mot à dire", avait-il aussi assuré.

Lors d'un entretien téléphonique lundi entre Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, le dirigeant russe a réitéré son opinion selon laquelle le plan initial des États-Unis pourrait "servir de base à un règlement de paix final".

La poussée lente, mais progressive, des troupes russes accentue la pression sur Kiev.

Moscou a revendiqué lundi la prise d'un village dans la région de Zaporijjia (sud), tandis que des frappes aériennes russes ont fait au moins quatre morts à Kharkiv.

La Russie cible quasi quotidiennement le pays au moyen de drones ou de missiles. Les infrastructures énergétiques sont particulièrement visées, faisant craindre un hiver difficile en Ukraine. Kiev vise de son côté régulièrement des dépôts et raffineries de pétrole et d'autres installations côté russe.

 


L'IA générative, un potentiel «Frankenstein des temps modernes», prévient le chef des droits humains de l'ONU

Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes. (AFP)
Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes. (AFP)
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  • "Le modèle économique actuel des plateformes de médias sociaux alimente déjà la polarisation, l'extrémisme et l'exclusion. De nombreux pays peinent à endiguer ce phénomène", a souligné M. Türk
  • Et si l'IA générative est porteuse d'"immenses promesses", les droits humains peuvent en "être les premières victimes", a-t-il estimé

GENEVE: Les droits humains risquent d'être les premières victimes du déploiement de l'intelligence artificielle (IA) générative par les géants de la tech, a déclaré le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme lundi, mettant en garde contre le potentiel "monstrueux" de tels systèmes.

"L'IA générative recèle un immense potentiel, mais son exploitation à des fins purement politiques ou économiques peut manipuler, déformer et détourner l'attention", a déclaré le Haut Commissaire Volker Türk lors d'une réunion à Genève (Suisse), soulignant que "sans garanties et réglementations adéquates, les systèmes d'IA pourraient se transformer en un monstre de Frankenstein des temps modernes".

"Le modèle économique actuel des plateformes de médias sociaux alimente déjà la polarisation, l'extrémisme et l'exclusion. De nombreux pays peinent à endiguer ce phénomène", a souligné M. Türk lors d'un forum sur les entreprises et les droits humains.

Et si l'IA générative est porteuse d'"immenses promesses", les droits humains peuvent en "être les premières victimes", a-t-il estimé.

L'exploitation de cette technologie "à des fins purement politiques ou économiques" fait peser une menace "sur plusieurs droits humains, notamment le droit à la vie privée, la participation politique, la liberté d'expression et le droit au travail".

Le Haut Commissaire a averti que ces menaces "pourraient se concrétiser en préjudices qui compromettent les promesses des technologies émergentes et pourraient engendrer des conséquences imprévisibles".

"Il est de la responsabilité des gouvernements de s'unir pour éviter un tel scénario", a insisté M. Türk.

Par ailleurs, le chef des droits humains de l'ONU a mis en évidence une autre menace représentée par la concentration croissante du pouvoir des entreprises et l'"accumulation massive de richesses personnelles et d'entreprises entre les mains d'une poignée d'acteurs".

"Dans certains cas, cela dépasse le poids économique de pays entiers", a-t-il déclaré, insistant sur le fait que lorsque "le pouvoir n'est pas encadré par la loi, il peut mener à des abus et à l'asservissement".

 


L'UE promet 88 millions d'euros en faveur de l'Autorité palestinienne

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  • "Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica
  • Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël

BRUXELLES: Les pays de l'Union européenne vont verser quelque 88 millions d'euros pour aider l'Autorité palestinienne, pressée de se réformer par les Européens, soucieux de son rôle futur dans le cadre du plan Trump pour la région.

"Nous avons signé plus de 82 millions d'euros", qui viennent s'ajouter aux six millions d'euros déjà annoncés, s'est félicitée devant la presse la commissaire européenne chargée de la Méditerranée, Dubravka Suica, à l'issue d'une conférence des donateurs à Bruxelles.

Quelque soixante délégations rassemblant les 27 de l'UE, les pays arabes et plusieurs organisations internationales se sont retrouvées jeudi à Bruxelles, sans la présence d'Israël.

"Aujourd'hui, nous avons présenté les progrès réalisés dans le cadre de notre programme de réforme nationale, qui est mis en œuvre, pas seulement promis, mais mis en œuvre et en avance sur le calendrier, ce qui a été reconnu par nos partenaires", a indiqué de son côté le Premier ministre palestinien Mohammed Mustafa.

Et cela "en dépit d'un environnement défavorable", a-t-il ajouté, accusant Israël de chercher "à affaiblir l'Autorité palestinienne ainsi que sa capacité à fonctionner".

Mme Suica a réitéré sur ce point les appels lancés par l'Union européenne pour qu'Israël accepte de libérer les recettes fiscales dues à l'Autorité palestinienne, indispensables à son fonctionnement.

"Cela a été dit par tous les participants", a-t-elle assuré.

Concernant Gaza, M. Mustafa a assuré que l'Autorité palestinienne avait un plan, soutenu par les pays arabes pour sa reconstruction. "Nous gouvernerons, nous réformerons et nous dirigerons la reconstruction de Gaza", a-t-il assuré.

L'Union européenne est le principal soutien financier de l'Autorité palestinienne. Elle conditionne toutefois le versement futur de cette aide à des réformes, qu'elle juge indispensables pour que cette Autorité soit en mesure de jouer pleinement son rôle dans le cadre de la solution à deux États, israélien et palestinien, que les Européens défendent depuis des années.

"Tout notre soutien à l'Autorité palestinienne est lié aux efforts pour poursuivre l'agenda des réformes", a rappelé Mme Suica.