Impôt mondial ou pas, les EAU comptent bien rester un aimant à entreprises

«L'environnement commercial des Émirats bénéficie d'une excellente connectivité avec les principaux marchés mondiaux, d'un niveau de vie élevé et d'un marché du travail dynamique». (Photo, AFP)
«L'environnement commercial des Émirats bénéficie d'une excellente connectivité avec les principaux marchés mondiaux, d'un niveau de vie élevé et d'un marché du travail dynamique». (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 14 juin 2021

Impôt mondial ou pas, les EAU comptent bien rester un aimant à entreprises

  • Depuis le 1er juin, les étrangers peuvent créer une entreprise aux Emirats arabes unis et en détenir la totalité du capital, contre 49% auparavant
  • Le mode de vie attire les cadres expatriés à Abou Dhabi et surtout à Dubaï, carrefour aéroportuaire et ville ultraconnectée

DUBAÏ : Gigantesques gratte-ciel flambant neufs et promesses d'une vie de luxe attirent expatriés et multinationales aux Émirats arabes unis. Qu'il se range ou non à un possible consensus sur l'impôt sur les sociétés, ce clinquant paradis fiscal du Golfe gardera son attractivité, estiment des experts.

Le 5 juin, les ministres des Finances des sept plus grandes puissances (G7) ont annoncé à Londres un accord "sans précédent" sur un impôt mondial minimum et une meilleure répartition des recettes fiscales provenant des multinationales, géants du numérique en tête.

Objectif: un taux d'imposition mondial sur les sociétés d'"au moins 15%". Dans le collimateur du G7, les paradis fiscaux qui attirent particulièrement les fameux Gafa américains (Google, Amazon, Facebook, Apple). 

Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui réunit les pays les plus développés, un paradis fiscal se caractérise par des "impôts inexistants ou insignifiants". C'est le cas des Émirats mais aussi de Jersey, des Bahamas, des îles Caïman ou de Bahreïn. 

Abou Dhabi, capitale des Émirats, et surtout Dubaï, plus prisée des six autres principautés formant cette fédération, accueillent ainsi les bureaux régionaux de milliers d'entreprises. Les autorités émiraties n'ont pas officiellement réagi à l'accord du G7 ni répondu aux sollicitations de l'AFP.

Mais cette semaine, le gouvernement de Dubaï a annoncé une série de directives "visant à réduire le coût des affaires et à stimuler la croissance économique".

Ces mesures, qui seront mises en place "au cours des trois prochains mois", sont destinées à "consolider le statut de Dubaï en tant que destination mondiale pour les investissements et les affaires", ont souligné les dirigeants de l'émirat sans plus de précisions.

«Avantages limités»

En pleine pandémie de Covid-19, les Émirats avaient déjà lancé des réformes. Depuis le 1er juin, les étrangers peuvent ainsi créer une entreprise et en détenir la totalité du capital (contre 49% auparavant), ce qui n'était jadis possible que dans certaines zones franches.

Cette réforme "vise à renforcer l'avantage concurrentiel" et à "faciliter la pratique des affaires", selon Abdallah ben Touq Al-Mari, ministre de l'Économie de la fédération, déjà placée 16e au classement de la Banque mondiale sur la facilité à faire des affaires.

Mais cet État, qui mise sur son image de marque internationale, cherchera certainement à "être considéré comme faisant partie du système mondial plutôt que comme un paradis fiscal", estime Scott Livermore, économiste en chef d'Oxford Economics Middle East, basé à Dubaï.

"Rester en dehors de l'accord présentera des avantages limités, surtout s'il est approuvé par le G20 et l'OCDE", explique-t-il.

Et selon lui, même en cas d'augmentation de la charge fiscale des entreprises, le gouvernement compensera, à l'instar du Luxembourg et de Malte où l'impôt sur les sociétés est assorti de multiples exemptions.

"Les autorités ont déjà compris l'importance d'avoir un environnement commercial et social plus ouvert pour attirer et retenir les investissements et les talents étrangers", insiste Scott Livermore, évoquant notamment l'assouplissement de diverses procédures administratives, notamment pour les visas.

«Créativité»

Le mode de vie attire les cadres expatriés à Abou Dhabi et surtout à Dubaï, carrefour aéroportuaire et ville ultraconnectée où une légion de travailleurs pauvres du sous-continent indien s'attèlent à offrir tous les services possibles.

La fiscalité maigre, voire nulle, aux Émirats a certes été "une importante carotte agitée devant les investisseurs étrangers" mais "même avec l'impact possible d'un impôt mondial minimum sur les sociétés, ils resteront un environnement relativement peu taxé", estime également Robert Mogielnicki du centre de réflexion Arab Gulf States Institute, à Washington.

"Les décideurs politiques émiratis devront faire preuve de créativité et envisager la restructuration de divers frais liés aux affaires", prédit le chercheur, estimant que le pays restera un "centre d'affaires compétitif".

"L'environnement commercial des Émirats bénéficie d'une excellente connectivité avec les principaux marchés mondiaux, d'un niveau de vie élevé et d'un marché du travail dynamique avec une main d'œuvre expatriée qualifiée et rentable", explique-t-il.

Et face à la chute des revenus du pétrole, "la tendance fiscale générale de ces dernières années dans le Golfe a été d'augmenter les impôts et non de les réduire".

"Sur le long terme, le gouvernement des Émirats et ses citoyens ne regretteront pas vraiment les entreprises ou les investisseurs qui ne s'intéressent qu'à un traitement fiscal préférentiel", fait remarquer le chercheur.


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".