Des architectes palestiniens défendent de nouvelles méthodes de construction à la Biennale de Venise

Les architectes palestiniens Elias et Yousef Anastas, fondateurs du cabinet d'architectes AAU ANASTAS, ont présenté leur dernière œuvre “All Purpose“ à l'exposition principale de la Biennale d'architecture de Venise (Photo, Antonio Ottomanelli).
Les architectes palestiniens Elias et Yousef Anastas, fondateurs du cabinet d'architectes AAU ANASTAS, ont présenté leur dernière œuvre “All Purpose“ à l'exposition principale de la Biennale d'architecture de Venise (Photo, Antonio Ottomanelli).
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Publié le Samedi 03 juillet 2021

Des architectes palestiniens défendent de nouvelles méthodes de construction à la Biennale de Venise

  • Présenté dans le cadre de l'exposition principale, le travail des frères Anastas se penche sur de nouvelles méthodes pour utiliser la pierre dans le design contemporain.
  • L'utilisation de la pierre a longtemps été instrumentalisée comme un outil politique dans la conquête du territoire palestinien, au début du 20e siècle à l'époque du mandat britannique.

DUBAΪ: Elias et Yousef Anastas, architectes palestiniens basés à Bethléem, fondateurs du cabinet d'architectes AAU ANASTAS, ont présenté leur dernière œuvre “All Purpose“ lors de l'exposition principale de la Biennale d'architecture de Venise le 22 mai. Alors que c'était la soirée inaugurale de la biennale, dans la patrie des architectes plusieurs familles palestiniennes du quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est se faisaient expulser de leurs maisons. Ce fut un double exploit pour les architectes : d’abord la biennale avait enfin lieu après un long report à cause du coronavirus, et ensuite l'exposition a servi de manière inattendue à relayer un message sur la Palestine, son architecture et matériaux, dans une période de tension et d'incertitude.

Pour les frères Anastas, fondateurs du cabinet d'architectes AAU ANASTAS, l'exposition a servi de manière inattendue à relayer un message sur leur patrie, son architecture et ses matériaux, dans une période de tension et d'incertitude.

Située dans les Giardini, au sein de l'exposition principale de la Biennale d'architecture de Venise, All Purpose, créée par AAU ANASTAS en collaboration avec le professeur Maurizio Brocato de l'Ensa Paris Malaquais, est une installation qui examine la place de la pierre dans l'architecture contemporaine en Palestine.

Les architectes palestiniens Elias et Yousef Anastas, fondateurs du cabinet d'architectes AAU ANASTAS, ont présenté leur dernière œuvre “All Purpose“ à l'exposition principale de la Biennale d'architecture de Venise. (Anotnion Ottomanelli)

Les frères Anastas, fondateurs de Local Industries, une plateforme de design qui travaille avec des artisans palestiniens, ont toujours défendu la préservation des techniques artisanales locales à travers un design contemporain fonctionnel.

L'exposition est le reflet de l'utilisation de la pierre et de son potentiel dans l'architecture contemporaine. Son titre, All Purpose, fait référence à la polyvalence de la pierre ainsi qu'à ses nombreuses significations pour la Palestine.

Leur installation à la Biennale d'architecture de Venise présente un toit fait de formes en forme de patch qui sont « aussi peu incurvées que possible » pour réduire les déchets dans la sculpture de la pierre ainsi que le temps de fabrication de la machine. Le toit est soutenu par une quinzaine de colonnes élancées.

« La forme générale du toit est incurvée tandis que chaque pièce qui le compose est aussi peu incurvée que possible par rapport au nombre total de voussoirs en pierre », déclare Elias Anastas à Arab News. « La seule partie sophistiquée est l'interface entre les pierres, qui sont toutes des surfaces congruentes doublement incurvées ».

Photo digitale de « All Purpose » (Fournie).

« Nous faisons de la recherche sur la construction en pierre depuis huit ans maintenant, expérimentant divers prototypes et constructions à l'échelle 1:1 », déclarent Elias et Yousef à Arab News. « Nous contestons l'utilisation abusive locale de la pierre comme unique matériau de revêtement, les répercussions d'une loi que nous avons héritée du mandat britannique en Palestine qui a eu des implications désastreuses sur l'architecture, l'urbanisme, la politique, la culture et l'environnement. »

L'utilisation de la pierre a longtemps été instrumentalisée comme un outil politique dans la conquête du territoire palestinien, au début du 20e siècle à l'époque du mandat britannique. Les carrières de pierre représentent la plus grande exportation de la Palestine – bien que les carrières en Palestine fonctionnent sous diverses restrictions israéliennes.

« À l'échelle mondiale, nous contestons l'absence de pierre dans l'architecture contemporaine ainsi que la façon dont les techniques particulières ont été historiquement présentées comme un savoir importé », soulignent les frères Anastas. « Une partie de nos recherches vise à désacraliser l'usage de la pierre. Une fois que vous commencez à gratter la surface, vous réalisez que non seulement les techniques ont toujours été un mélange de connaissances de différentes civilisations, mais aussi qu'en Palestine, par exemple, la pierre a été une partie importante de l'architecture locale courante ».

Par leur travail, les architectes remettent en question ce qu'ils appellent « l'idée impériale de transmission du savoir ». À cette fin, ils ont lancé un sous-projet dans le cadre de leur recherche appelé Analogies, dont l'objectif principal est d’établir des parallèles entre des éléments architecturaux à travers le temps et l'espace. Quelques exemples, selon les deux frères, comprennent les détails autour de l'entrée en pierre de l'église Sainte-Anne construite par les croisés à Jérusalem, qui ont en fait été trouvés au Caire, en Égypte et datent de la période mamelouke.

« Nous luttons en général pour une multipolarisation des connaissances », disent les architectes.       « Dans l'architecture en pierre, par exemple, la stéréotomie est souvent associée aux croisés qui en sont les maîtres. Cependant, suivre les traces des techniques de la pierre et des formes architecturales conduit souvent à des origines beaucoup plus diverses. »

Comme son nom l’indique, bien qu'il soit le fruit du hasard, All Purpose a également eu un autre rôle pendant les semaines d'ouverture de la Biennale d'architecture de Venise qui ont coïncidé avec le conflit qui s’est déroulé dans la patrie des frères Anastas.

Alors que les combats faisaient rage entre le Hamas et Israël en mai, ils se sont demandé que faire de la populaire Radio Alhara, une station de radio en ligne lancée en Palestine au début des confinements mondiaux en mars 2020. Au cours de la dernière année, elle a fourni une plate-forme de discussion, d'écoute et de développement communautaire. Son nom, qui signifie “la radio de quartier“, fait écho à la nature même de la station, une communauté intime  qui est ouverte et accessible au monde et dont la mission  est de bâtir des ponts culturels.

« Nous avons fermé la radio pour avoir le temps de réfléchir à ce qu'il fallait faire et très rapidement nous avons décidé de transformer la radio en une plate-forme appelée Sonic Liberation Front », dit Elias Anastas. « Elle s’adresse à tous ceux qui souhaitent contribuer à toute forme de contenu sonore qui traduit une forme de solidarité avec ce qui se passe ou relaie d'autres formes d'injustice ou d'oppression qui se produisent dans d'autres parties du monde. »

Lors de la semaine d'ouverture, All Purpose est devenu la scène du Sonic Liberation Front lancé par Radio Alhara lors de la Biennale de Venise. L'espace sous la voûte a été utilisé pour créer des performances in-situ par les artistes Moe Choucair et Lawrence Abu Hamdan. Les deux artistes ont basé leur travail sur des enregistrements de sons ambiants de Gaza et de Jérusalem.

« Grâce à Radio Alhara, nous avons compris que la planète formait une entité, surtout après ce que nous avons vécu pendant la pandémie », racontent les architectes. « Le Sonic Liberation Front vise à créer un espace pour discuter, à travers l'art et le son, des formes d'oppression, des injustices et du racisme qui se produisent dans le monde. »

Bien qu'enracinés en Palestine, All Purpose et The Sonic Liberation Front partagent la mission de renforcer les solidarités mondiales qui découlent de divers contextes dans une tentative de lutter comme les architectes l’affirment « une lecture impériale de nos cultures »

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com