Lutte entre Ankara et Washington pour l'extradition d'un homme d'affaires sulfureux

Après avoir fui la Turquie en décembre, il a été arrêté le 19 juin en Autriche à la demande des Etats-Unis et doit comparaître lundi devant un tribunal autrichien qui se prononcera sur la demande d'extradition déposée par Washington, a indiqué son avocat. (Photo, AFP)
Après avoir fui la Turquie en décembre, il a été arrêté le 19 juin en Autriche à la demande des Etats-Unis et doit comparaître lundi devant un tribunal autrichien qui se prononcera sur la demande d'extradition déposée par Washington, a indiqué son avocat. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 04 juillet 2021

Lutte entre Ankara et Washington pour l'extradition d'un homme d'affaires sulfureux

  • L'acte d'accusation américain rédigé à l'encontre de M. Korkmaz inclue les chefs d'inculpation de «complot pour commettre un blanchiment d'argent», d'«entrave à une enquête judiciaire» et de«fraude électronique»
  • Selon l'agence de presse turque DHA, Ankara a transmis à Vienne une demande officielle d'extradition

ANKARA :Un homme d'affaires turc détenu en Autriche fait l'objet d'un bras de fer entre la Turquie et les Etats-Unis qui souhaitent tous deux son extradition, un dossier potentiellement explosif qui risque de raviver les tensions entre Ankara et Washington.

Homme d'affaires touche-à-tout, Sezgin Baran Korkmaz est au coeur de plusieurs scandales financiers qui ont déjà coûté sa place à un présentateur vedette de la télévision turque et plongé un puissant ministre du président Recep Tayyip Erdogan dans la tourmente.

Après avoir fui la Turquie en décembre, il a été arrêté le 19 juin en Autriche à la demande des Etats-Unis et doit comparaître lundi devant un tribunal autrichien qui se prononcera sur la demande d'extradition déposée par Washington, a indiqué son avocat.

Les procureurs américains reprochent à M. Korkmaz et des complices aux Etats-Unis d'avoir blanchi plus de 112 millions d'euros frauduleusement obtenus par le biais de comptes bancaires en Turquie et au Luxembourg.

Ils accusent l'homme d'affaires d'avoir utilisé cet argent pour acheter la compagnie aérienne turque Borajet, des hôtels en Turquie et en Suisse, un yacht baptisé le Queen Anne, ainsi qu'une villa et un appartement à Istanbul surplombant le Bosphore.

Rendu public le mois dernier, l'acte d'accusation américain rédigé à l'encontre de M. Korkmaz inclue les chefs d'inculpation de "complot pour commettre un blanchiment d'argent", d'"entrave à une enquête judiciaire" et de "fraude électronique".

Lobbying

Mais dans une interview accordée depuis sa prison à un journaliste turc, M. Korkmaz, qui rejette ces accusations, a indiqué qu'il souhaitait être renvoyé en Turquie où il est aussi recherché.

Un responsable turc de l'ambassade à Vienne, qui a requis l'anonymat, a dit à l'AFP qu'Ankara voulait juger M. Korkmaz pour "blanchiment d'argent".

Selon l'agence de presse turque DHA, Ankara a transmis à Vienne une demande officielle d'extradition.

Si M. Korkmaz était renvoyé en Turquie, l'éventualité d'une extradition future aux Etats-Unis s'évaporerait en raison de différends judiciaires opposants les deux pays, notamment le refus de Washington de livrer à Ankara le prédicateur Fethullah Gülen, ennemi de M. Erdogan.

Et une éventuelle bataille juridique au sujet de M. Korkmaz compliquerait davantage les relations turco-américaines qui sont déjà empoisonnées par de nombreux dossiers.

Autre point sensible, le nom de M. Korkmaz apparaît aussi dans la liste des personnalités mobilisées par Ankara pour gagner les faveurs de Donald Trump après son élection à la présidence américaine en 2016, selon l'Organised Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), un consortium des journalistes d'investigation.

D'après l'OCCRP, M. Korkmaz a notamment facilité en 2018 la venue en Turquie de personnalités américaines liées à M. Trump pour obtenir la libération d'un pasteur américain, Andrew Brunson, qui était alors détenu en Turquie.

Mauvais moment

L'arrestation de M. Korkmaz tombe mal pour M. Erdogan, qui s'efforce d'apaiser les tensions avec les Etats-Unis et l'Europe pour attirer des investisseurs étrangers et redresser l'économie turque.

Les relations turco-américaines sont déjà minées par de nombreux dossiers, notamment le procès aux Etats-Unis d'une banque turque accusée d'avoir violé les sanctions contre l'Iran et l'achat par Ankara de missiles russes.

"Erdogan est dans une phase de réconciliation avec les Etats-Unis et tente de calmer les choses pour avoir un répit sur le plan économique", souligne Max Hoffman du Center for American Progress, un think tank.

"Je doute qu'il désire un nouveau point de désaccord dans les relations bilatérales", ajoute-t-il.

Si le cas de M. Korkmaz ne semble pas pour l'instant être une priorité dans les relations entre ces deux pays membres de l'Otan, il a cependant déjà fait des vagues dans la vie politique turque.

Un présentateur vedette de la chaîne Habertürk, Veyis Ates, a ainsi été accusé d'avoir participé à une tentative d'extorsion de M. Korkmaz en échange de la fin de ses ennuis judiciaires en Turquie.

M. Ates a démissionné, tout en rejetant ces allégations.

Un chef mafieux turc en fuite, Sedat Peker, dont les allégations contre de hauts responsables embarrassent le pouvoir depuis plusieurs semaines, a en outre accusé le puissant ministre de l'Intérieur Süleyman Soylu d'avoir prévenu M. Korkmaz que son arrestation était imminente pour lui permettre de fuir à temps le pays.

M. Soylu a rejeté les accusations de M. Peker.

 

 


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.