A Chypre, des villageois sous le choc devant leur montagne carbonisée

Des machines couvertes de cendres et de gravats dans un atelier du village chypriote d'Agioi Vavatsinias, le 4 juin 2021 (Photo, AFP)
Des machines couvertes de cendres et de gravats dans un atelier du village chypriote d'Agioi Vavatsinias, le 4 juin 2021 (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 04 juillet 2021

A Chypre, des villageois sous le choc devant leur montagne carbonisée

Des machines couvertes de cendres et de gravats dans un atelier du village chypriote d'Agioi Vavatsinias, le 4 juin 2021 (Photo, AFP)
  • «Vingt minutes plus tard, j'ai vu les flammes. Mon mari m'a dit (par téléphone) ‘Prends notre fille, la voiture et pars’», raconte Vaso Christosol avec émotion
  • A cinq kilomètres de là, à Arakapas, le village où s'est déclaré l'incendie, les habitants sont revenus constater l'état de leur foyer

ARAKAPAS: « Prends notre fille, la voiture et pars »: samedi, Vaso Christosol a fui dans la précipitation son village d'ordinaire paisible d'Odos, cerné par les flammes d'un incendie sans précédent dans le sud de Chypre. 

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«C'est le pire incendie de ma vie, je n'ai jamais vu ça, c'est terrible», affirme de son côté Giorgou Herculis, avant de fondre en larmes (Photo, AFP)

Alors que quatre personnes ont perdu la vie dans l'incendie, la cinquantenaire, les yeux dans le vide et sous une âpre odeur de brûlé, scrute les flancs noircis des montagnes sur lesquels donne sa maison.  

De ce secteur du massif du Troodos, le principal poumon vert de l'île méditerranéenne, il ne reste que des cendres brûlantes et des arbres calcinés. 

Lorsqu'elle a appris qu'un incendie s'était déclaré dans le village voisin, Vaso Christosol raconte s'être aussitôt mise sur ses gardes. 

« Vingt minutes plus tard, j'ai vu les flammes. Mon mari m'a dit (par téléphone) ‘Prends notre fille, la voiture et pars’ », raconte-t-elle avec émotion. « On a averti les autorités et on a pris la route, mais malheureusement les secours sont arrivés tard. » 

A quelques centaines de mètres de chez elle, quatre Egyptiens ont été retrouvés morts. Leur voiture calcinée a plongé dans un ravin le long d'un chemin de terre. 

Les victimes, prises au piège, avaient quitté leur véhicule juste avant pour fuir à pied, mais sont parties dans le sens du vent et ont été rattrapées par les flammes 600 mètres plus loin sur les hauteurs, explique un policier sur place. 

Les quatre travailleurs, dont la nationalité a été confirmée par Le Caire et Nicosie, ont été retrouvés par hasard par les sapeurs-pompiers qui tentaient de maîtriser l'incendie, ajoute le policier. 

Jamais-vu  

Plus bas sur ce chemin difficilement praticable, cinq jeunes Indiens observent, hébétés, l'étendue des dégâts.  

« On a vu les flammes et on est partis vers Nicosie » raconte Aman, 22 ans. Résident d'Odos depuis deux ans, il est revenu sur place dimanche. 

« C'est extrêmement triste », ajoute-t-il, tout en se disant rassuré que sa maison et celles de ses proches n'aient pas été endommagées.  

A cinq kilomètres de là, à Arakapas, le village où s'est déclaré l'incendie, les habitants sont revenus constater l'état de leur foyer. 

« J'ai pleuré tout le long de la route en découvrant les paysages », explique Andria, 30 ans, originaire du village.  

Sur le trajet, le noir couleur charbon a remplacé le jaune des herbes sèches. De nombreux oliviers, emblématiques de l'île méditerranéenne, ne sont plus que des squelettes. 

« J'ai eu très peur et je suis toujours sous le choc », poursuit Andria, les mains tremblantes en buvant un café. 

Le président Nikos Anastasiades a déclaré sur place que l'incendie était le « plus vaste » observé sur l'île depuis des décennies. Plus de 55 kilomètres carrés ont été ravagés. 

« Des vies, des propriétés, des terres et des forêts ont été perdues. Le gouvernement va aider immédiatement les victimes et leurs proches », a promis le président, ajoutant qu'une estimation des dégâts était en cours. 

Quelque 25 maisons ont été endommagées, dont neuf à Arakapas, a indiqué un policier. 

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Sur le trajet, le noir couleur charbon a remplacé le jaune des herbes sèches. De nombreux oliviers, emblématiques de l'île méditerranéenne, ne sont plus que des squelettes (Photo, AFP)

« Pire incendie »  

« C'est le pire incendie de ma vie, je n'ai jamais vu ça, c'est terrible », affirme de son côté Giorgou Herculis, avant de fondre en larmes.  

Assis au café du village, ce Chypriote de 80 ans qui a passé sa vie à Arakapas ne lève les yeux que pour observer les hélicoptères et les Canadairs qui survolent encore la zone. 

Comme lui, des dizaines de personnes attendent des nouvelles de la situation près de la place du village, où sapeurs-pompiers et policiers reprennent des forces après avoir combattu le feu des heures durant. 

Si l'incendie était partiellement maîtrisé dimanche en début d'après-midi, selon les autorités, le retour du vent dans la soirée faisait craindre une reprise, des braises toujours fumantes clairsemant la montagne tandis que les températures avoisinaient toujours les 35 degrés. 

Des renforts venus notamment de Grèce et d'Israël se sont joints aux efforts. 

En milieu d'après-midi, un policier a confirmé que la situation était toujours sous contrôle, et il se voulait optimiste sur la capacité des pompiers à maîtriser complètement les flammes d'ici la fin de soirée. 

Akis Giorgiou, 45 ans, « resté au village pour protéger (sa) propriété », se dit aussi « soulagé ». « C'était un cauchemar, un enfer. Les flammes cernaient tout Arakapas ». 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.