Afghanistan: des métiers sous la menace d'un retour des talibans au pouvoir

La breakdancer Manizha Talash pose pour une photo à Kaboul. Les talibans ont interdit des dizaines d'activités et de passe-temps apparemment inoffensifs en Afghanistan au cours de leur règne de 1996 à 2001 (AFP)
La breakdancer Manizha Talash pose pour une photo à Kaboul. Les talibans ont interdit des dizaines d'activités et de passe-temps apparemment inoffensifs en Afghanistan au cours de leur règne de 1996 à 2001 (AFP)
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Publié le Lundi 05 juillet 2021

Afghanistan: des métiers sous la menace d'un retour des talibans au pouvoir

  • Ces activités sont redevenues populaires après la chute de leur régime fondamentaliste. Mais elles pourraient être en danger si les talibans revenaient au pouvoir
  • «Il n'y a aucun plaisir dans la vie si nous vivons dans la peur et la restriction», estime ce père de huit enfants

KANDAHAR : Quand les talibans étaient au pouvoir en Afghanistan, entre 1996 et 2001, plusieurs passe-temps préférés des Afghans, comme le cerf-volant, les séries télévisées, les courses de pigeon ou même la musique étaient interdits car considérés contraires aux préceptes de l'islam.

Ces activités sont redevenues populaires après la chute de leur régime fondamentaliste. Mais elles pourraient être en danger si les talibans revenaient au pouvoir.

Les insurgés, qui ont bien l'intention de rétablir leur émirat islamique, ont multiplié les succès militaires depuis que les Etats-Unis ont commencé le 1er mai le retrait final de leurs troupes.

L'AFP évoque ces activités menacées par les talibans et la peur gagnant ceux qui s'y prêtent.

Le joueur de japani

Sayed Mohammad est un musicien professionnel qui joue du japani, un instrument traditionnel à cordes d'Asie centrale, auquel il fut initié quand il était jeune.

Il se souvient encore du soir où, il y a 20 ans, des talibans sont entrés de force dans la maison dans laquelle ses amis et lui jouaient de la musique et chantaient.

L'interprétation stricte de la charia à laquelle se réfèrent les talibans suppose que seule la voix humaine devrait produire de la musique et uniquement pour faire l'éloge de Dieu.

"J'étais jeune, alors j'ai été moins battu que mes amis", raconte Sayed, 40 ans, habitant de la province de Kandahar (Sud). "Mais j'ai quand même été incapable de tenir debout pendant trois jours."

L'un de ses amis a été moins chanceux et a eu les doigts coupés.

Quand les talibans ont été chassés du pouvoir par une coalition étrangère menée par les États-Unis en 2001, il a fêté l'événement en assistant à un concert avec des amis.

"Quand la musique était jouée, je sentais comme un frisson me passer dans le corps, tellement j'étais content", se rappelle-t-il. "Ce concert était une expression de joie (...), joie car notre pays était libre et que les gens étaient libres de commencer une nouvelle vie."

Depuis, de nombreux Afghans comme Sayed sont devenus musiciens et chanteurs professionnels.

"Il n'y a aucun plaisir dans la vie si nous vivons dans la peur et la restriction", estime ce père de huit enfants.

Il reste déterminé à vivre sa passion jusqu'au bout, même si les talibans reviennent au pouvoir. "C'est comme une drogue. Même s'ils nous coupent les doigts, nous continuerons à jouer de la musique", prévient-il.

L'esthéticienne

Au premier étage du salon Henna, l'un des plus prisés de Kaboul, ouvert en 2015 dans le quartier moderne de Shar-e-Now, Farida ourle de nacre les paupières d'une mariée aux faux-cils démesurés et ses lèvres d'un carmin sombre et épais.

Les fards blanc, puis beige, puis ocre ont redessiné les contours et le relief du visage. Une ultime trace de poudre dorée et elle passe au chignon, échafaudage complexe de boucles laquées.

Les femmes viennent ici à l'abri des regards masculins - strictement interdits d'entrée - se faire pomponner dans les effluves de cire à épiler, d'onguents et de vernis à ongles.

Des extravagances facturées de 20.000 à 50.000 afghanis (210 à 525 euros), que les talibans, généralement issus des campagnes, exècrent.

Du temps des talibans, les salons de beauté étaient interdits et les femmes ne pouvaient sortir sans être accompagnées d'un homme, ce qui limitait fortement leurs déplacements.

"Sous les talibans, ces salons étaient fermés. S'ils reviennent, nous n'aurons plus jamais la liberté que nous avons maintenant", craint Farida, 27 ans, s'abritant derrière son masque anti-Covid pour dissimuler son visage.

"Ils ne veulent pas que les femmes travaillent. Une fois les Américains partis, qui va nous soutenir?", se demande la jeune esthéticienne qui s'est formée toute seule en s'exerçant sur sa sœur.

"Chacun a droit à sa liberté, surtout les femmes. Nous ne voulons pas être renvoyées dans le passé", plaide-t-elle.

Le fabricant de cerf-volant

Dans un marché animé de Kaboul, entouré de centaines de cerfs-volants de toutes tailles, Zelgai se dit déterminé à ne pas abandonner le commerce tenu par sa famille depuis des générations.

Les talibans avaient interdit la pratique du cerf-volant au prétexte qu'elle détournait les jeunes hommes de leurs obligations religieuses comme la prière.

Mais Zelgai et sa famille avaient continué leur activité. "Bien entendu nous le faisions en secret", raconte-il dans son magasin du marché de Shor dans la capitale.

Sa boutique, haute en couleurs, propose des centaines de cerfs-volants prêts à voler. Il répond aussi à des commandes spéciales avec des design plus élaborés. Les affaires ont bien marché après le départ des talibans.

"C'est la liberté (...) Nous sommes en mesure d'exposer et vendre nos cerfs-volants ouvertement, sans aucune crainte", apprécie Zelgai, 59 ans.

Cette passion afghane est connue à l'étranger depuis la parution en 2003 du livre - devenu un film - "Les cerfs-volants de Kaboul", de l'auteur afghan Khaled Hosseini.

Quand le vent le permet, on peut voir des milliers de cerfs-volants flotter dans le ciel bleu d'Afghanistan.

Certains prennent part à des combats de cerfs-volants, où les pilotes tentent de se montrer les plus habiles et n'hésitent pas à utiliser des ficelles incrustées de morceaux de verre pour faire perdre à l'adversaire le contrôle de l'appareil.

"Des gens souffriraient si c'était (à nouveau) interdit. Des milliers de familles en dépendent pour survivre", s'inquiète Zelgai.

La breakdancer

Le jour où elle s'est mise au breakdance, Manizha Talash a su qu'elle devenait une cible pour les talibans.

Elle est la seule femme d'un groupe de danseurs majoritairement d'ethnie hazara, qui pratiquent le breakdance à Kaboul, la plupart du temps en secret.

La jeune femme, âgée de 18 ans, bénéficie du soutien de sa mère qui doit cumuler plusieurs emplois pour faire vivre sa famille depuis que son mari a disparu il y a quelques années.

Manizha rêve de représenter son pays aux jeux Olympiques, mais les risques sont nombreux.

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Le jour où elle s'est mise au breakdance, Manizha Talash a su qu'elle devenait une cible pour les talibans (AFP)

Non seulement est-elle est une fille pratiquant une activité interdite aux yeux des talibans, mais aussi appartient-elle à la minorité chiite Hazara, considérée comme hérétique par certains radicaux musulmans.

"Si les talibans n'ont pas changé, qu'ils enferment les femmes chez elles et piétinent leurs droits, alors la vie n'aura aucun sens pour moi et pour des millions d'autres femmes en Afghanistan", estime Manizha.

Malgré les risques - sa petite troupe a dû changer de lieu d'entraînement après avoir été menacée - elle tient à poursuivre sa passion.

Beaucoup de femmes ont été des pionnières en Afghanistan et Manizha se voit comme l'une d'elles.

"Auparavant, nous n'avions pas de femmes policières. Maintenant vous en voyez partout", confie-t-elle, vêtue d'un tee-shirt, d'une casquette et de leggings noirs, une tenue qui horripilerait les talibans.

"J'ai pris le risque de devenir une cible. La peur est présente dans mon cœur, mais je n'abandonnerai pas (...) Désormais, même si les talibans viennent, je continuerai le breakdance", promet-elle.

Le fumeur de chicha

Sur les berges d'une rivière traversant la ville de Jalalabad (Est), Mohammad Salem et ses amis sont rassemblés autour d'une chicha, un vieux passe-temps redevenu à la mode dans plusieurs endroits du monde.

"Fumer la chicha, c'est très normal en ce moment en Afghanistan", confie Mohammad, en tirant d'un narguilé bouillonnant des bouffées de tabac parfumé aux fruits.

Les talibans y voient un produit stupéfiant, interdit par l'islam.

Depuis la chute des talibans, les bars à chicha se sont multipliés dans le pays. Ils servent du thé au safran à leurs clients fumant le narguilé.

Propriétaire d'un de ces bars, Bakhtya Ahmad pense que la chicha est un bon moyen de garder les jeunes hors des rues ou hors de portée de la drogue.

"Il y a la paix ici. Nous servons la chicha et jouons de la musique dans le café", observe Bakhtya. "Si les talibans reviennent avec leurs vieilles idées, alors ils nous en empêcheront."

Ses clients sont du même avis. "On ne pourra plus aller pique-niquer ou fumer la chicha au bord d'une rivière comme aujourd'hui", regrette Mohammad.

Le coiffeur

Le salon de coiffure de Mohammad Ghaderi, dans la ville d'Hérat (Ouest), tourne à plein. Les jeunes hommes viennent pour un rasage ou une coiffure à la mode qui rappellera leurs acteurs préférés de Bollywood ou d'Hollywood.

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«Une nouvelle fois, les femmes devront porter la burqa et les jeunes hommes ne seront pas libres de faire ce qu'ils veulent»

"L'Afghanistan est entré dans un nouveau monde", clame Mohammad, coiffeur depuis près de dix ans, "il y a plus de coiffeurs maintenant, plus de jeunes gens qui se mettent à la mode (...) Le gouvernement n'y est pas opposé de la manière dont les talibans l'étaient".

Si dans les campagnes, les hommes s'en tiennent à un style islamique classique - une barbe plus longue que le poing d'un homme et remontant jusqu'aux cheveux -, les citadins se laissent tenter par les dernières modes.

Mais Mohammad et ses clients redoutent que tout cela ne prenne fin si les talibans reviennent au pouvoir.

"Nous craignons que si les talibans entrent dans la ville et le marché, ils pourraient bien être les mêmes qu'il y a 20 ans", dit-il.

"Une nouvelle fois, les femmes devront porter la burqa et les jeunes hommes ne seront pas libres de faire ce qu'ils veulent", acquiesce Sanaullah Amin, l'un de ses habitués.

 

       


TotalEnergies: accord de production sur une zone au large du Nigeria

Photo prise le 14 septembre 2023, montrant le siège et le logo de Total Energy dans le quartier de La Défense, près de Paris. (AFP)
Photo prise le 14 septembre 2023, montrant le siège et le logo de Total Energy dans le quartier de La Défense, près de Paris. (AFP)
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  • TotalEnergies obtient deux permis d’exploration dans le bassin du West Delta
  • L’opération s’inscrit dans la stratégie du groupe visant à développer un portefeuille d’exploration axé sur des projets à faibles coûts techniques et à faibles émissions, tout en poursuivant la croissance de sa production

PARIS: TotalEnergies, en partenariat avec South Atlantic Petroleum, a signé un contrat de partage de production pour deux permis d'exploration au large du Nigeria, qui couvrent une superficie de 2.000 kilomètres carrés, a indiqué le géant pétrolier français mardi.

Ces permis d'exploitation, PPL 2000 et PPL 2001, se situent dans le "bassin prolifique du West Delta", précise le groupe. Le programme comprend le forage d'un puits d'exploration.

TotalEnergies se dit "honorée d'être la première compagnie internationale à se voir attribuer des licences d'exploration lors d'un appel d'offres au Nigeria depuis plus d'une décennie, marquant une nouvelle étape dans notre partenariat de long terme avec le pays", a déclaré Kevin McLachlan, directeur exploitation au sein du groupe pétrolier.

"L'entrée dans ces deux blocs prometteurs" correspond à "notre stratégie qui vise à enrichir notre portefeuille d'exploration de +prospects+ à fort potentiel et prêts à explorer, en vue de générer des développements à faible coût et à faibles émissions (...)", ajoute-t-il.

TotalEnergies est partenaire à 80% et South Atlantic Petroleum à 20%.

Lundi, le groupe français avait annoncé avoir reçu un nouveau permis d'exploration offshore en République du Congo (Congo-Brazzaville), étendant ainsi de 1.000 kilomètres carrés sa zone d'opération au large du pays.

Au Nigeria, TotalEnergies avait annoncé en mai la prochaine cession, au britannique Shell, de sa participation dans un important champ pétrolier en eaux profondes, le champ de Bonga.

TotalEnergies avait alors justifié cette vente par la volonté de "se concentrer sur des actifs à coûts techniques bas et à faibles émissions" et de "baisser le point mort cash", autrement dit réduire ses coûts pour améliorer sa rentabilité.

TotalEnergies prévoit une hausse de sa production d'hydrocarbures d’environ 3% par an jusqu'en 2030.


EDF prolonge la durée de vie de deux centrales nucléaires au Royaume-Uni

Un logo d'EDF est affiché lors de la 8e édition du salon Vivatech des startups et de l'innovation technologique, au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 23 mai 2024. (AFP)
Un logo d'EDF est affiché lors de la 8e édition du salon Vivatech des startups et de l'innovation technologique, au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 23 mai 2024. (AFP)
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  • EDF a annoncé la prolongation jusqu’en 2028 de deux centrales nucléaires au Royaume-Uni après des inspections de sécurité satisfaisantes
  • Ces prolongations visent à garantir l’approvisionnement en électricité bas carbone et à soutenir les objectifs climatiques du Royaume-Uni

LONDRES: L'énergéticien français EDF, qui exploite les cinq centrales nucléaires actuellement en activité au Royaume-Uni, a annoncé mardi prolonger la durée de vie de deux d'entre elles, assurant que cela "contribuera à la sécurité énergétique" du pays.

"Prolonger la durée de vie de ces centrales (...) permettra de garantir l'emploi plus longtemps à plus de 1.000 personnes qui y travaillent et de soutenir les ambitions du Royaume-Uni de disposer d'un approvisionnement en électricité propre et sûr", a fait valoir dans un communiqué le directeur des opérations nucléaires d'EDF au Royaume-Uni, Mark Hartley.

Heysham 1 (nord-ouest de l'Angleterre) et Hartlepool (nord-est) verront leurs durées de vie étendues d'un an, jusqu'en mars 2028, après une prolongation similaire annoncée en décembre dernier, suite à des inspections et évaluations de sécurité satisfaisantes.

EDF avait aussi prolongé en décembre la vie de deux autres centrales nucléaires, Heysham 2 et Torness, qui produiront de l'électricité jusqu'en mars 2030.

La cinquième centrale d'EDF en activité dans le pays, Sizewell B, utilise une technologie différente et "sa durée de vie n'a pas été évaluée dans le cadre de ce processus" mais EDF estime dans son communiqué qu'il existe "de bonnes chances" de prolonger aussi sa durée de vie de 20 ans, jusqu'en 2055.

L'énergéticien français est depuis 2009 l'opérateur du vieillissant parc nucléaire outre-Manche.

Il est parallèlement en charge de la construction de deux autres centrales nucléaires de nouvelle génération de type EPR au Royaume-Uni, Hinkley Point C et Sizewell C. L'entreprise est régulièrement pointée du doigt pour les délais et dérapages de budget de ces projets pharamineux.

Hinkley Point C est en construction et le gouvernement britannique a donné son feu vert en juillet à Sizewell C -- dont le coût avait alors enflé à 38 milliards de livres (44 milliards d'euros).

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités. Une façon aussi d'atteindre ses ambitions climatiques, en complément des immenses champs d'éoliennes construits en mer.

Le gouvernement a promis en juin d'injecter plus de 30 milliards de livres (35 milliards d'euros) pour relancer l'énergie nucléaire dans le pays, pour Sizewell C, mais aussi des petits réacteurs et la recherche sur la technologie prometteuse de la fusion.


Les ministres saoudien et syrien se rencontrent à Riyad pour stimuler la coopération numérique

Le ministre saoudien des communications et des technologies de l'information, Abdullah Al-Swaha, a reçu son homologue syrien, Abdulsalam Haykal, à Riyad. (SPA)
Le ministre saoudien des communications et des technologies de l'information, Abdullah Al-Swaha, a reçu son homologue syrien, Abdulsalam Haykal, à Riyad. (SPA)
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  • Haykal est en visite au Royaume avec une délégation de haut niveau pour participer au Symposium mondial des régulateurs
  • Les discussions ont porté sur le renforcement des partenariats techniques stratégiques et sur l'avancement des initiatives conjointes dans les domaines de l'infrastructure numérique, de l'innovation et de l'entrepreneuriat

RIYADH : Le ministre saoudien des communications et des technologies de l'information, Abdullah Al-Swaha, a reçu son homologue syrien, Abdulsalam Haykal, à Riyad.

Haykal est en visite dans le Royaume avec une délégation de haut niveau pour participer au Symposium mondial des régulateurs, qui se tient à Riyad jusqu'au 3 septembre.

Les discussions ont porté sur le renforcement des partenariats techniques stratégiques et sur l'avancement des initiatives conjointes dans les domaines de l'infrastructure numérique, de l'innovation et de l'entrepreneuriat, a rapporté l'agence de presse saoudienne.

Les deux ministres ont également insisté sur la nécessité de donner aux jeunes les moyens de contribuer à la construction d'une économie numérique prospère qui soutienne le développement durable.

Mohammed Abu Nayan, président du Conseil d'affaires saoudo-syrien, ainsi que des hauts fonctionnaires et des cadres de l'économie numérique, de l'espace et de l'écosystème de l'innovation de l'Arabie saoudite, ont assisté à la réunion.