Prête à tout en Afghanistan, la Chine ménage les talibans

Les dirigeants du mouvement taliban et négociateurs Abdul Latif Mansoor (D), Shahabuddin Delawar (C) et Suhail Shaheen (G) se dirigent vers la conférence de presse à Moscou le 9 juillet 2021.
Les dirigeants du mouvement taliban et négociateurs Abdul Latif Mansoor (D), Shahabuddin Delawar (C) et Suhail Shaheen (G) se dirigent vers la conférence de presse à Moscou le 9 juillet 2021.
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Publié le Jeudi 15 juillet 2021

Prête à tout en Afghanistan, la Chine ménage les talibans

  • Face au risque de chaos afghan, Pékin a ouvert des discussions avec les talibans, dont une délégation a été reçue à Pékin dès septembre 2019
  • Collaboration contre les séparatistes ouïghours en échange d'investissements? Les talibans semblent prêts à accepter le marché

PEKIN : Elle combat l'islamisme sur son sol mais ménage les talibans. La Chine se tient prête à un retour au pouvoir des "étudiants en religion" en Afghanistan, dont elle redoute l'influence potentielle sur les musulmans chinois.

Le départ des troupes américaines, fixé par le président Joe Biden au 31 août, est lourd de menaces pour l'Afghanistan, où les talibans affirment contrôler désormais 85% des districts du pays.

Pékin, qui a qualifié "d'irresponsable" le retrait américain, craint par dessus tout une guerre civile à outrance chez son voisin, quitte à préférer le retour à la stabilité qu'apporterait une victoire talibane.

"Pour la Chine, le risque ne vient pas de qui détient le pouvoir en Afghanistan, mais du risque d'instabilité persistante dans ce pays", reconnaît Fan Hongda, spécialiste du Moyen-Orient à l'Université d'études internationales de Shanghai.

A près de 5.000 m d'altitude, la Chine dispose d'une petite frontière de 76 km avec l'Afghanistan, sans point de passage routier. 

Le pouvoir chinois n'en redoute pas moins ce point de contact qui aboutit au Xinjiang, sa vaste région du nord-ouest à majorité musulmane, où un million de Ouïghours auraient été placés dans des camps de rééducation anti-islamiste.

"L'instabilité en Afghanistan constitue naturellement une menace pour la sécurité de certaines régions frontalières de la Chine", souligne M. Fan.

"Si l'Afghanistan entre dans un conflit interne violent, cela renforcera l'extrémisme", redoute-t-il. 

Les Ouïghours dans le viseur

Face au risque de chaos afghan, Pékin a ouvert des discussions avec les talibans, dont une délégation a été reçue à Pékin dès septembre 2019.

En juin dernier, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, a même proposé d'accueillir un dialogue inter-afghan. 

Il faut "ramener les talibans dans le jeu politique normal", a-t-il déclaré lors d'une rencontre avec ses homologues afghan et pakistanais.

A une condition: "éviter le retour des terroristes" et "intensifier le combat contre le Mouvement islamiste du Turkestan oriental" (Mito), une organisation séparatiste ouïghoure considérée par l'ONU comme terroriste.

Le régime communiste semble espérer qu'un éventuel pouvoir taliban ne laisserait pas le Mito utiliser l'Afghanistan comme base arrière pour des opérations au Xinjiang. 

Collaboration contre les séparatistes ouïghours en échange d'investissements? Les talibans semblent prêts à accepter le marché.

"Si un pays veut exploiter nos mines, il est le bienvenu", assure depuis le Qatar le porte-parole des insurgés, Suhail Shaheen, interrogé par l'AFP sur la position chinoise.

Dans un entretien la semaine dernière au South China Morning Post, un quotidien de Hong Kong, il avait assuré que les talibans interdiraient à quiconque d'utiliser l'Afghanistan comme base pour attaquer "quelque pays que ce soit, y compris la Chine".

Organisation religieuse radicale

Si les islamistes afghans ont hébergé le chef d'Al-Qaïda Oussama ben Laden avant les attentats du 11 septembre 2001, "la Chine n'a jamais considéré les talibans comme une organisation terroriste mais comme une organisation religieuse radicale", relève le professeur Qian Feng, de l'Institut de stratégie nationale à l'Université Tsinghua de Pékin.

Problème: jusqu'où Pékin peut-il faire confiance aux rebelles afghans?

"La Chine peut négocier avec les talibans et même tomber d'accord avec eux comme elle l'a fait depuis plus de deux décennies", relève Andrew Small, auteur de "The China-Pakistan Axis" ("L'axe Chine-Pakistan").

"Mais leurs motivations religieuses restent profondément dérangeantes aux yeux des Chinois, qui ne savent pas jusqu'où les talibans seraient prêts à aller, notamment en cas d'accord sur la question des militants ouïghours" exilés en Afghanistan. 

Cuivre et soie

Si la Chine se rapproche des islamistes afghans, c'est aussi parce qu'elle entend sécuriser ses liens économiques avec les Afghans.

"La Chine ne veut pas d'une présence militaire sur place mais souhaite s'impliquer économiquement afin de profiter des vastes ressources minières de l'Afghanistan. Mais pour ça, elle a besoin de sécurité", observe à Kaboul le politologue Atta Noori.

Alors que le gouvernement actuel n'a pas su la garantir, "ça ne coûte rien de miser sur les talibans et de leur donner une chance de ramener la sécurité".

Via son allié pakistanais, Pékin est parvenu à établir "des liens de longue date" avec les talibans, rappelle Thierry Kellner, professeur au département de science politique de l'Université libre de Bruxelles.

Ces liens "ont permis à la Chine d'éviter toute attaque terroriste majeure sur ses projets en Afghanistan", notamment contre la mine de cuivre géante d'Aynak, près de Kaboul, dont elle a obtenu la concession en 2007 pour 3 milliards de dollars.

Le cimetière des empires

La Chine a aussi rallié en 2016 l'Afghanistan à son grand projet d'infrastructures des "Nouvelles routes de la soie". Mais faute de sécurité, les investissements chinois restent modestes: 4,4 millions de dollars en 2020, selon le ministère chinois du Commerce.

Le "joyau" des routes de la soie n'est autre que le "Corridor économique Chine-Pakistan" (CECP), auquel Pékin souhaiterait connecter l'Afghanistan, reliant ainsi ce pays tant à la Chine qu'à l'océan Indien.

"Afin de gagner la coopération des talibans, la Chine proposerait de construire des routes dans les territoires qu'ils contrôlent ainsi qu'un certain nombre de projets énergétiques", rapporte M. Kellner.

Mais la pérennité de ces projets est pour le moins aléatoire.

"La Chine a jusqu'à présent hésité à jeter des milliards en Afghanistan", note Ayesha Siddiqa, experte du complexe militaro-économique pakistanais.

"Tant qu'il n'y aura pas de pouvoir fort qui contrôle entièrement le pays et le consolide, je ne vois pas d'avenir ni pour les Nouvelles routes de la soie ni pour le CECP".

Si la situation devenait incontrôlable, Pékin ne prendrait pas pour autant la place de Washington en Afghanistan, un pays surnommé le "cimetière des empires" pour sa capacité à résister aux envahisseurs.

"Je ne pense pas que la Chine interviendra militairement de façon unilatérale", déclare à l'AFP Yun Sun, directrice du programme Chine au Centre Stimson à Washington.

"La Chine ne s'engagera pas dans une mission de stabilisation, à moins que ce soit dans le cadre d'une mission de maintien de la paix de l'ONU".

En attendant, le pouvoir chinois a commencé à évacuer ses ressortissants. Début juillet, un avion affrété par Pékin a rapatrié 210 personnes de Kaboul.

L'UE "très inquiète" examine les mesures à prendre pour ses personnels

BRUXELLES : L'UE est "très inquiète" de la situation sécuritaire causée par les talibans en Afghanistan et examine les mesures à prendre pour ses personnels dans le pays, a annoncé jeudi une porte-parole du chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.

"Les talibans sont responsables des violences (...) qui sont un obstacle au processus de paix et contraires aux engagements souscrits dans l'accord conclu (à Doha) avec les Etats-Unis en février 2020", a déclaré cette porte-parole, Nabila Massrali, dénonçant une situation "inacceptable".

"Nous travaillons aux mesures de sécurité pour les Européens présents dans le pays", a-t-elle assuré sans plus de précisions. "L'évacuation des personnels impliqués dans l'aide européenne au développement n'est pas nécessaire à ce stade, ni à Kaboul, ni ailleurs", avait soutenu mardi un autre collaborateur de Josep Borrell.

Mais les décisions prises par les Etats membres pourraient modifier la donne. La France et l'Allemagne ont demandé à leurs ressortissants de quitter l'Afghanistan. 

Un vol spécial du gouvernement français partira de Kaboul le 17 juillet et "aucun vol spécial supplémentaire ne pourra être affrété", a annoncé l'ambassade de France en Afghanistan en recommandant "formellement à tous les Français d'emprunter ce vol spécial ou de quitter le pays immédiatement par leurs propres moyens".

L'ambassade a averti les Français qui veulent rester en Afghanistan qu'elle "ne sera plus en mesure d'assurer la sécurité" de leur départ après le 17. Moins d'une centaine de Français présents en Afghanistan sont enregistrés auprès de l'ambassade.

L'Allemagne a également "prié" ses ressortissants de quitter le pays. "Nous nous demandons comment gérer notre présence", avait confié Josep Borrell à l'AFP le 26 mai. "Il faut assurer le fonctionnement d'un hôpital et d'un aéroport si on veut maintenir un minimum de présence européenne. Il faut continuer à être présents, mais pas avec des moyens militaires. Ca c'est exclu", avait-il précisé.

Or les Américains n'ont à ce jour donné aucune indication à leurs alliés de l'Otan sur la force de protection à mettre en place pour "sécuriser" l'aéroport et les ambassades à Kaboul, selon des diplomates de l'Alliance. Cette force conditionne la présence de missions civiles de l'Otan et de l'UE. L'ancien président américain George W. Bush a critiqué mercredi le retrait d'Afghanistan des troupes de l'Otan, une "erreur" dont, selon lui, vont pâtir "les femmes et les filles afghanes".

Environ 2.500 soldats américains - et 7.000 d'autres pays - étaient présents en Afghanistan dans le cadre de la mission de l'Otan Resolute Support lorsqu'ils ont entamé début mai leur retrait. 

                


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.


Australie: la communauté juive, bouleversée et en colère, enterre «le Rabbin de Bondi»

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
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  • Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies
  • Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé

SYDNEY: Dans une synagogue bondée, emplie de cris et de larmes, la communauté juive de Sydney traumatisée a rendu hommage mercredi au rabbin Eli Schlanger, première victime de l'attentat antisémite de la plage de Bondi a être mise en terre.

Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies.

Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé.

David Deitz, homme d'affaires de 69 ans, qui connaissait M. Schlanger "depuis très, très longtemps", explique à l'AFP que le rabbin a eu "une influence positive sur beaucoup de gens".

"C'est un choc pour l'Australie de voir un tel événement se produire ici. Ce n'est pas dans la nature des Australiens", poursuit-il.

Une forte présence sécuritaire a été mobilisée lors des obsèques, avec des policiers alignés dans la rue fermée au public.

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme.

En 2021, le nombre de juifs australiens était estimé à 117.000.

"Ils auraient pu nous écouter" 

Jillian Segal, la responsable de la lutte contre l'antisémitisme en Australie, a fustigé cette semaine des préjugés antijuifs "qui s’insinuent dans la société depuis de nombreuses années et contre lesquels nous ne nous sommes pas suffisamment élevés".

Mme Segal a été la première nommée à ce poste après une série d'attaques antisémites à Melbourne et à Sydney, au début de la guerre d'Israël dans la bande de Gaza.

Au cours des 12 mois suivant l’attaque du Hamas en Israel du 7 octobre 2023 qui a déclenché cette guerre, les incidents de nature antisémite en Australie ont augmenté de 316%, dépassant les 2.000, dit-elle.

"Nous devrions pouvoir être qui nous sommes sans avoir peur", a déclaré Brett Ackerman, un analyste de données âgé de 37 ans.

La colère gagne certains membres de la communauté qui estiment que leur cri d'alarme face à la montée de l'antisémitisme depuis le 7-Octobre n'a pas été pris en compte.

"Ils auraient pu nous écouter" se désole M. Ackerman. Pour lui, l'attaque n'était "pas une surprise".

A côté de lui, le rabbin Yossi Friedman acquiesce. "Le message était clair depuis un peu plus de deux ans", soutient-il. "Est-ce que nous nous sentons en sécurité? Pour être honnête, pas vraiment."

"Nous pensions être en sécurité. Nos grands-parents et arrière-grands-parents étaient des survivants de la Shoah, et beaucoup d’entre eux sont venus ici pour échapper à la haine et au sang versé, aux pogroms, à la persécution (...) et c'est ce qu'on retrouve ici", observe-t-il.

"Problème de société"

Le Premier ministre Anthony Albanese a dénoncé l'attaque de Bondi comme un acte terroriste antisémite de "pure méchanceté" perpétré par des hommes inspirés par l’idéologie jihadiste du groupe État islamique.

Mais il a rejeté les critiques selon lesquelles son gouvernement n'avait pas réagi suffisamment à l'appel de Mme Segal.

Le Premier ministre a souligné que son gouvernement avait pénalisé les discours de haine et interdit le salut nazi et les symboles haineux, entre autres.

Depuis la fusillade, M. Albanese mène une initiative conjointe entre le gouvernement central et les Etats d'Australie en faveur d’un contrôle plus strict des armes à feu. L'assaillant le plus âgé possédait six armes dûment enregistrées.

Mais pour l'écrivain Danny Gingef, 66 ans, "la réforme des armes à feu est une diversion totale par rapport au vrai problème, qui est la haine, il faut identifier la haine là où elle commence".

Au départ du cercueil, les spectateurs ont entonné des chants en hébreu. Submergés par l’émotion, certains se sont effondrés dans les bras de leurs proches, à peine capables de tenir debout.

"Je sens que ces dernières années, les Juifs ont été en état d’alerte maximale", dit M. Gingef. Il se sent triste et en colère, et fait référence aux "marches de la haine" où il a vu des manifestants porter des drapeaux du Hezbollah.

Pour lui, il n’y a pas "beaucoup plus que nous puissions faire" sans le soutien des autorités et d’autres groupes.

"L’antisémitisme n’est pas un problème que les Juifs doivent résoudre, c’est un problème de société".

lec-oho/mjw/lgo/alh/pt

 


La BBC va "se défendre" face à la plainte en diffamation à 10 milliards de dollars de Trump

Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump poursuit la BBC pour diffamation et pratiques trompeuses, réclamant jusqu’à 10 milliards $ après un montage contesté de son discours du 6 janvier 2021
  • L’affaire secoue l’audiovisuel public britannique : démissions à la tête de la BBC, lettre d’excuses envoyée à Trump, et réexamen annoncé de la charte royale

LONDRES: La BBC a assuré mardi qu'elle allait "se défendre" contre la plainte en diffamation du président américain Donald Trump, qui réclame 10 milliards de dollars au groupe audiovisuel public britannique pour un montage vidéo contesté de l'un de ses discours.

La plainte, déposée lundi devant un tribunal fédéral à Miami par le président américain et consultée par l'AFP, demande "des dommages et intérêts d'un montant minimum de 5 milliards de dollars" pour chacun des deux chefs d'accusation: diffamation et violation d'une loi de Floride sur les pratiques commerciales trompeuses et déloyales.

"Ils ont littéralement mis des mots dans ma bouche", s'est plaint le milliardaire de 79 ans, lundi devant la presse.

"Nous allons nous défendre dans cette affaire", a répondu un porte-parole de la BBC mardi matin, sans faire davantage de commentaire sur la procédure.

Le groupe audiovisuel britannique, dont l'audience et la réputation dépassent les frontières du Royaume-Uni, est dans la tourmente depuis des révélations sur son magazine phare d'information "Panorama".

Ce dernier a diffusé, juste avant la présidentielle américaine de 2024, des extraits distincts d'un discours de Donald Trump du 6 janvier 2021, montés de telle façon que le républicain semble appeler explicitement ses partisans à attaquer le Capitole à Washington.

Des centaines de ses partisans, chauffés à blanc par ses accusations sans fondement de fraude électorale, avaient pris d'assaut ce jour-là le sanctuaire de la démocratie américaine, pour tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden.

"La BBC, autrefois respectée et aujourd'hui discréditée, a diffamé le président Trump en modifiant intentionnellement, malicieusement et de manière trompeuse son discours dans le but flagrant d'interférer dans l'élection présidentielle de 2024", a dénoncé lundi un porte-parole des avocats du républicain contacté par l'AFP.

"La BBC a depuis longtemps l'habitude de tromper son public dans sa couverture du président Trump, au service de son programme politique de gauche", a-t-il ajouté.

- Lettre d'excuses -

Au Royaume-Uni, la controverse a relancé le brûlant débat sur le fonctionnement de l'audiovisuel public et son impartialité, alors que le groupe a déjà été bousculé ces dernières années par plusieurs polémiques et scandales.

L'affaire a poussé à la démission son directeur général Tim Davie et la patronne de BBC News Deborah Turness.

Le président de la BBC Samir Shah a pour sa part envoyé une lettre d'excuses à Donald Trump et la BBC a indiqué "regretter sincèrement la façon dont les images ont été montées" mais contesté "fermement qu'il y ait une base légale pour une plainte en diffamation".

Le groupe audiovisuel a "été très clair sur le fait qu'il n'y a pas matière à répondre à l'accusation de M. Trump en ce qui concerne la diffamation. Je pense qu'il est juste que la BBC reste ferme sur ce point", a soutenu mardi matin le secrétaire d'Etat britannique à la Santé Stephen Kinnock, sur Sky News.

Le gouvernement a également annoncé mardi le début du réexamen de la charte royale de la BBC, un processus qui a lieu tous les dix ans, pour éventuellement faire évoluer sa gouvernance, son financement ou ses obligations envers le public britannique.

La plainte de Donald Trump estime que, malgré ses excuses, la BBC "n'a manifesté ni véritables remords pour ses agissements ni entrepris de réformes institutionnelles significatives afin d'empêcher de futurs abus journalistiques".

Le président américain a lancé ou menacé de lancer des plaintes contre plusieurs groupes de médias aux Etats-Unis, dont certains ont dû verser d'importantes sommes pour mettre fin aux poursuites.

Depuis son retour au pouvoir, il a fait entrer à la Maison Blanche de nombreux créateurs de contenus et influenceurs qui lui sont favorables, tout en multipliant les insultes contre des journalistes issus de médias traditionnels.

L'un de ces nouveaux venus invités par le gouvernement Trump est la chaîne conservatrice britannique GB News, proche du chef du parti anti-immigration Reform UK, Nigel Farage.