Le «leader du monde libre» doit passer à l'action et prouver qu'il mérite son titre

Le président américain Joe Biden. AFP/archives
Le président américain Joe Biden. AFP/archives
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Publié le Lundi 26 juillet 2021

Le «leader du monde libre» doit passer à l'action et prouver qu'il mérite son titre

Le «leader du monde libre» doit passer à l'action et prouver qu'il mérite son titre
  • Les exactions du régime iranien dans son pays comme en Irak, en Syrie, au Yémen et au Liban ne doivent pas passer inaperçus et rester impunis
  • Combien de personnes doivent encore perdre la vie pour inciter la communauté internationale à réagir?

Alors que les États-Unis discutent avec l'Irak de l'avenir de leur partenariat et de leur coopération dans la lutte mondiale contre le terrorisme, et tandis que Washington poursuit ses négociations avec l'Iran pour relancer le Plan d'action global conjoint (PAGC) de 2015, cette région agitée traverse une série d'événements importants.

Ce mois a été marqué par la visite en Irak de Hossein Taeb, chef des services de renseignement au sein du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI), à la tête d'une délégation. À défaut de rencontrer des représentants du gouvernement, ils se sont entretenus avec les chefs des factions armées pro-iraniennes. M. Taeb a clairement ordonné aux Irakiens de poursuivre leurs attaques contre les cibles américaines en Irak en attendant que les derniers soldats américains quittent le pays.

Pendant ce temps, ces factions continuent de massacrer les militants irakiens. À Bagdad , ainsi que dans d'autres provinces du sud de l'Irak, les manifestants parcourent les rues pour revendiquer la fin de l'impunité et condamner les organismes qui ont donné l'ordre d'enlever et de supprimer plus de soixante-dix militants et des centaines de personnes qui manifestaient pacifiquement depuis octobre 2019, date à laquelle le vent de la démocratie et de la lutte contre la corruption a soufflé sur l'Irak.

Malgré ces appels, la communauté internationale, dans sa grande majorité, a préféré fermer les yeux sur leurs souffrances.

En attendant, de l’autre côté de la frontière, et plus précisément dans la province du Khouzistan, dans le sud-ouest de l'Iran, des manifestations ont éclaté sur fond de grave pénurie d'eau. Les revendications relatives à l'eau ont rapidement fait place à des revendications d'ordre politique de plus grande ampleur; elles se sont étendues à plusieurs régions, dont la capitale, Téhéran.

La province du Khouzistan, riche en pétrole, abrite des minorités arabes iraniennes victimes d'oppression et de discrimination de la part du régime de Téhéran. Celui-ci n'a pas hésité à utiliser la violence contre les manifestants; dix personnes ont été tuées et plus de cent emprisonnées. Les responsables iraniens et les médias officiels font allusion à une «ingérence étrangère».

Le Guide suprême de l'Iran, l'ayatollah Ali Khamenei, a en effet appelé son peuple à faire preuve de prudence. «L'ennemi utilisera n'importe quel moyen contre la révolution, la nation et les intérêts du peuple, nous devons donc veiller à ne lui fournir aucun prétexte», déclare-t-il.

Là encore, la communauté internationale n'a pas émis la moindre réponse sérieuse.

Les exactions du régime iranien dans son pays comme en Irak, en Syrie, au Yémen et au Liban ne doivent pas passer inaperçus et rester impunis.

Dalia al-Aqidi

Les Iraniens ont tenté, à maintes reprises, de montrer au monde la brutalité de leur régime. Toutefois, les pays hostiles à l'oppression et aux violations des droits de l'homme les ont abandonnés à leur triste sort, à commencer par les États-Unis, dont la Constitution commence pourtant par ces trois mots simples: «Nous, le peuple...»

Combien de personnes doivent encore perdre la vie pour inciter la communauté internationale à réagir? Combien d'enfants doivent se retrouver sans parents pour que le monde se mobilise? Que peuvent faire les opprimés pour faire entendre leur voix? Mourir ne suffit-il pas?

Au lieu de supplier le régime iranien et d'attendre sa bénédiction pour revenir à la table des négociations, les États-Unis devraient prendre des mesures fermes pour mettre fin aux atrocités iraniennes sur leur propre sol et ailleurs. Les exactions du régime iranien dans son pays comme en Irak, en Syrie, au Yémen et au Liban ne doivent pas passer inaperçus et rester impunis. Sur le plan humanitaire, la souffrance des gens ne peut passer inaperçue.

La Maison-Blanche ne cesse de reprendre la déclaration faite par le Premier ministre britannique, Boris Johnson, lors de la conférence sur la sécurité de Munich en février. Ce dernier a en effet affirmé que le président, Joe Biden, avait ramené les États-Unis à la tête du monde libre et favorisé la réunification de l'Occident. Un peu plus tard, au terme du sommet du Groupe des sept (G7) en Angleterre, le conseiller américain à la sécurité nationale, Jake Sullivan, a fièrement affirmé: «Je ne crois vraiment pas que ce soit une hyperbole de dire que le président des États-Unis revient de ce voyage en tant que leader clair et consensuel du monde libre.»

Si tel est le cas, comment expliquer que le président n'entende pas les cris de ces innocents et ne cherche pas à leur tendre la main. Pourquoi le «leader du monde libre» ne peut-il pas expliquer au Premier ministre irakien, Moustafa al-Kazimi, que permettre à des milices étrangères de malmener son propre peuple est un acte inacceptable et qu'il n'est donc pas le bienvenu à la Maison-Blanche?

Pourquoi n'impose-t-il pas de nouvelles sanctions au régime iranien afin de contrer ses activités criminelles et sournoises et pour faire comprendre aux Iraniens qu'ils ne sont pas laissés pour compte? Pourquoi garde-t-il le silence alors que 30 % des enfants au Liban dorment le ventre vide?

Pour mériter le titre de leader, il faut passer à l'action. Ou alors, le moment est sans doute venu de donner une nouvelle définition du «monde libre».

Dalia al-Aqidi est chercheuse principale au Center for Security Policy de Washington.

Twitter: @DaliaAlAqidi

NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com