Beyrouth: tristesse et… résignation?

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Publié le Mercredi 04 août 2021

Beyrouth: tristesse et… résignation?

  • Le 4 août 2020 aura précipité le Liban, déjà miné par une faillite annoncée, vers l’abîme
  • Le traumatisme est palpable, et Ali préfère se contenter de hocher la tête quand on lui demande s’il a eu peur ce jour-là

BEYROUTH: «Nos clients se sont retrouvés à terre, il y avait du sang partout. La plupart d’entre eux étaient gravement blessés. Je m’en souviens encore, les images ne me quittent pas.» Ali, âgé d’une vingtaine d’années, a connu le 4 août 2020, l’horreur de la violence crue. «Je me tenais là et je me suis retrouvé... ici », raconte-t-il à Arab News en français tout en se dirigeant, dans le magasin de téléphonie mobile où il travaille, vers le lieu où le souffle de l’explosion l’a transporté.

Le traumatisme est palpable. Lorsqu’on lui demande comment il parvient à continuer de travailler à l’endroit même où le sang a coulé, il y a un an, il se contente de hocher la tête. À la caisse, une jeune femme masquée, résignée, passe le temps en jouant sur son téléphone portable.

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Des enfants jouent au milieu des ruines de Gemmayzeh, le 28 août 2020. (AFP). 

Malgré tout, Ali a eu de la chance: il ne fait pas partie de ceux qui ont perdu un proche, ou la vie.

Il n’est pas de Beyrouth.

Il marque une pause lorsqu’on lui demande s’il a eu peur, ce 4 août 2020. «J’ai vécu les trente-trois jours de la guerre de juillet [2016, menée par Israël, NDLR]. Je peux vous dire que c’étaient trente-trois jours d’horreur, pendant lesquels j’avais constamment peur de mourir. Mais l’explosion, c’est différent. Ce n’est pas arrivé en temps de guerre, et c’est ça qui est effrayant.»
Ce jeune homme chiite, originaire de Tyr, la principale ville du sud du pays, se sent tout d’un coup obligé de dire qu’il n’est pas un partisan du Hezbollah. «Personne dans ce magasin ne sympathise avec “le parti” [expression qui, au Liban, désigne implicitement la milice du Hezbollah, NDLR]. Nous ne sommes avec personne», affirme-t-il en désignant ses collègues.

 

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La colline d'Achrafieh au coucher du soleil, le 8 juillet 2021. (Photo Arab News en français)

La boutique de portables est située dans le centre commercial ABC qui, situé sur la colline d’Achrafieh, à quelques encablures du port, faisait l’orgueil du quartier.

Mais ça, c’était «avant». Avant la crise financière, avant l’explosion… L’ABC n’est plus que l’ombre de ce qu’il fut, et pour cause: la déflagration causée par le nitrate d’ammonium stocké illégalement dans le port de Beyrouth a détruit un grand nombre de ses boutiques. Ce qui n’aura fait qu’accélérer leur fin certaine, à cause de la faillite de l’économie libanaise. Les unes après les autres, les enseignes internationales ont mis la clé sous la porte.

Stigmates gommés, mais pas oubliés

Au-dehors, parmi les dédales d’Achrafieh, de Gemmayzeh et de Mar Mikhael, les stigmates de l’explosion ont été gommés tant bien que mal. Mais, au détour d’un trottoir, de petits amas de verre brisé oubliés dans un coin de rue viennent rappeler cette soirée maudite.

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Non loin du port, à Mar Mikhael, une peinture murale pour ne pas oublier. (AFP). 

Le 4 août 2020 aura précipité le Liban, déjà miné par une faillite annoncée, vers l’abîme. L’hyperinflation y est désormais galopante.

Antoine est producteur d’une émission télévisée proposée par une chaîne arabe située au Liban. Il vit à une vingtaine de kilomètres au nord de Beyrouth. Il a couvert l’explosion en free-lance pour un bon nombre de médias internationaux. Il a aussi passé un long moment juché sur un immeuble de Gemmayzeh à filmer une opération de secours qui aura duré plusieurs heures, plus d’un mois après la catastrophe, et qui s’avérera vaine.

Au sujet des événements du Liban, il ne se fait plus d’illusions. Son avenir personnel et celui de sa famille passeront désormais forcément par l’expatriation. «J’attends que les enfants grandissent un peu. Ensuite, nous partirons au Canada», nous confie-t-il sans détour ni états d’âme.

En attendant, il a troqué sa voiture pour un deux-roues, moins gourmand en essence. Surtout, «les conducteurs de mobylette n’attendent pas autant que les voitures» pour être servis aux stations d’essence. Antoine a deux enfants et son quotidien se révèle de plus en plus complexe. Ses parents, retraités tous deux, ont vu leur pension diminuer comme peau de chagrin. Désormais, il doit leur verser chaque mois une partie de son salaire. Les produits de première nécessité se font rares. «C’est comme si c’était de nouveau la guerre: on stocke de tout. Après chaque voyage, je reviens les bras chargés de médicaments», aujourd’hui quasiment introuvables au Liban.

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Le port de Beyrouth, le 9 juillet 2021. (Photo Arab News en français). 

En contrebas, les silos blancs et béants du port de Beyrouth, toujours debout, continuent de témoigner du désastre; mais seule la quantité de gravats amassée dans l’enceinte du port laisse deviner l’ampleur de la catastrophe. Une plaie béante qui vient s’ajouter à la longue liste des malheurs auxquels les Libanais sont maintenant confrontés tous les jours. Pénuries alimentaires, de médicaments et d’essence, coupures de courant de plus de vingt heures par jour: leur capitale n’est plus que l’ombre d’elle-même.


L'Égypte coordonne avec la Grèce le retour des victimes du bateau de migrants et met en garde contre les itinéraires irréguliers

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
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  • Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine
  • Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux

DUBAI: Les mesures prises par l'Égypte ont reçu le soutien de la communauté internationale, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières.
Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a demandé à l'ambassade égyptienne à Athènes de renforcer la coordination avec les autorités grecques, a rapporté Ahram Online mardi.

Cette mesure vise à soutenir les survivants et à accélérer le rapatriement des corps des victimes une fois les procédures légales achevées.

Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine.

Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux et réglementés.

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016, les responsables soulignant que le pays ne sera pas utilisé comme voie de transit vers l'Europe.

Les autorités affirment qu'aucun bateau de migrants n'a quitté les côtes égyptiennes depuis l'introduction de la stratégie, bien que l'Égypte accueille près de 10 millions de ressortissants étrangers, y compris des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants de 133 pays.

L'approche a continué à évoluer au fil des ans, tout récemment avec l'adoption du plan d'action national 2024-2026 par le Comité national pour la lutte et la prévention de la migration illégale et de la traite des personnes.

Des initiatives antérieures ont également soutenu ces efforts, notamment le programme "Lifeboats" de 2019, qui a alloué 250 millions EGP pour créer des opportunités d'emploi dans les villages considérés comme les plus vulnérables à la migration irrégulière.

Les mesures prises par l'Égypte ont bénéficié d'un soutien international, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières, les capacités de recherche et de sauvetage et les efforts de lutte contre le trafic de migrants.


Explosion du port de Beyrouth: un juge libanais en Bulgarie pour l'enquête

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  • Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort
  • Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban"

BEYROUTH: Le juge libanais Tarek Bitar s'est déplacé mercredi en Bulgarie pour interroger le propriétaire du navire lié à l'explosion meurtrière dans le port de Beyrouth en 2020, a indiqué un responsable judiciaire à l'AFP.

Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort.

M. Grechushkin est désigné par les autorités libanaises comme le propriétaire du Rhosus, le navire qui transportait le nitrate d'ammonium débarqué dans le port de Beyrouth dans un entrepôt, où il avait explosé suite à un incendie, faisant plus de 200 morts, des milliers de blessés et d'importants dégâts.

Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban, acte terroriste ayant entraîné la mort d'un grand nombre de personnes et désactivation de machines dans le but de faire couler un navire", selon le parquet bulgare.

"M. Bitar est parti pour Sofia mercredi" et doit interroger M. Grechushkin jeudi, a précisé sous couvert d'anonymat un responsable de la justice libanaise à l'AFP.

L'ambassade libanaise à Sofia s'est occupée de trouver un traducteur et un huissier chargé de prendre en note l'interrogatoire, qui se fera en présence d'autorités judiciaires bulgares, a précisé la même source.

La justice libanaise espère obtenir des informations sur la cargaison de nitrate d'ammonium et en particulier son commanditaire. Elle veut aussi savoir si Beyrouth était la destination finale du navire.

Le juge indépendant Tarek Bitar avait repris en début d'année l'enquête qu'il avait dû interrompre en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah qui l'accusait d'impartialité, avant d'être poursuivi pour insubordination.

Son enquête a pu reprendre après l'entrée en fonction du président Joseph Aoun et de son Premier ministre, qui ont promis de préserver l'indépendance de la justice, à la suite de la guerre entre Israël et le Hezbollah dont le mouvement chiite soutenu par l'Iran est sorti très affaibli à l'automne 2024.


«Des habitants meurent de froid»: Gaza frappé par de nouvelles intempéries

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
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  • "Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa)
  • "Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré

GAZA: De nouvelles pluies hivernales se sont abattues cette semaine sur la bande de Gaza, déjà ravagée par la guerre, faisant au moins 18 morts depuis le début des intempéries.

Des Palestiniens poussant une voiture dans une rue inondée, une charrette tirée par un âne progressant difficilement à travers les eaux, des tentes et des abris de fortune de déplacés inondés: la situation s'aggrave dans un territoire palestinien en ruines.

"Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa).

"Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre après deux années de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Nourrissons «en danger»

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs.

Trois enfants étaient décédés dans des conditions similaires la semaine dernière, d'après la Défense civile, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du mouvement islamiste.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Environ 1,3 million de personnes, sur une population de plus de deux millions d'habitants dans le territoire, ont actuellement besoin d'un hébergement d'urgence, selon les Nations unies, qui mettent en garde contre un risque croissant d'hypothermie.

Les nourrissons encourent particulièrement un "grand danger" avec les conditions hivernales, avertit l'organisation.

«Reconstruire le territoire»

La Défense civile de Gaza avait indiqué vendredi qu'au moins 16 personnes étaient mortes en 24 heures des suites de l'effondrement de bâtiments ou des effets du froid.

Outre le nourrisson, le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, a fait état mardi d'un autre décès après l'effondrement du toit d'un bâtiment à la suite de fortes pluies dans le nord-ouest de la ville de Gaza.

Il a précisé que la maison avait déjà été endommagée par des frappes aériennes pendant la guerre.

Des images de l'AFP montrent des secouristes extraire le corps d'un Palestinien des décombres d'un bâtiment. Non loin, des proches en deuil pleurent.

"Nous appelons le monde à résoudre nos problèmes et à reconstruire le territoire afin que nous puissions avoir des maisons au lieu (...) de vivre dans la rue", a déclaré Ahmed al-Hossari, qui a perdu un membre de sa famille.

La bande de Gaza connaît généralement un épisode de fortes pluies à la fin de l'automne et en hiver, mais l'état de dévastation du territoire, des conséquences de la guerre, a rendu ses habitants plus vulnérables.