La France face au risque de l’effondrement du Liban

Le président français Emmanuel Macron (à droite) s'entretient avec Arnaud Tranchant, capitaine de vaisseau Arnaud Tranchant, au large du port de Beyrouth le 1er septembre 2020. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (à droite) s'entretient avec Arnaud Tranchant, capitaine de vaisseau Arnaud Tranchant, au large du port de Beyrouth le 1er septembre 2020. (AFP)
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Publié le Mercredi 04 août 2021

La France face au risque de l’effondrement du Liban

  • L’année 2020, qui a marqué le centenaire du «Grand Liban», fut aussi celle de l’explosion du port de Beyrouth et celle de la pire crise socio-économique de l’histoire du pays
  • Les relations entre la France et le Liban ne sauraient s’analyser seulement en termes de passions et d’intérêts directs

L’année 2020, qui a marqué le centenaire du «Grand Liban», fondé à l’époque du mandat français, fut aussi celle de l’explosion du port de Beyrouth et celle de la pire crise socio-économique de l’histoire du Liban. Au fil des ans, la France est restée très attachée au destin du pays du Cèdre. Ce vif intérêt s’est manifesté à de nombreuses reprises, notamment avec l’initiative du président français, Emmanuel Macron, dont l’objectif était de prévenir l’effondrement de l’État libanais et d’atténuer les souffrances de son peuple.

Même si, pour l’heure, ces efforts n’ont pas abouti, la France semble déterminée à poursuivre coûte que coûte son engagement en dépit de différents ratés, d’un certain nombre de manquements et de l’ampleur de la tâche. Le succès de la diplomatie française sera évalué à l’aune de cet objectif: assurer le sauvetage du Liban.

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Une jeune Libanaise serre dans ses bras le président français Emmanuel Macron lors d'une visite dans le quartier de Gemmayzeh, qui a subi d'importants dégâts en raison d'une explosion massive dans la capitale libanaise, le 6 août 2020. (AFP)

Les raisons et les dessous du grand intérêt français 

Du 4 août 2020, date fatidique de l’explosion du port de Beyrouth, jusqu’au 4 août 2021, jour où une conférence internationale sur le Liban est organisée à Paris, la présidence française a maintenu le cap, continuant à multiplier les contacts et les démarches afin qu’une sortie de crise puisse être entrevue. Toutefois, l’initiative du président Macron a subi plusieurs revers, comme l’échec de la tentative entreprise par l’ambassadeur Moustapha Adib, l’impasse constatée par le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, lors de sa visite au Liban, au mois d’avril 2021, et le renoncement de Saad Hariri. 

Cet entêtement trouve également sa source dans l’histoire commune des deux pays et dans les intérêts français, avec pour toile de fond la compétition géopolitique autour du Liban comme porte de l’Orient.

Face à ces revers, l’équipe française chargée de ce dossier a tenté d’utiliser d’autres moyens dans le but de contourner les difficultés, se coordonnant avec Washington et établissant des contacts avec Riyad. La nomination du businessman Najib Mikati – déjà chef du gouvernement libanais à deux reprises – comme Premier ministre va dans le même sens. La diplomatie française s’est alors engagée dans une course contre la montre pour aider à la formation de ce «gouvernement de mission» qu’elle avait prévu au départ et qu’elle a adapté en fonction des développements et des différentes prises de position.

Cet entêtement – ou cette obstination – de Paris ne s’explique pas seulement par le pari personnel et politique qu’a fait le président, Emmanuel Macron. Il trouve également sa source dans l’histoire commune des deux pays et dans les intérêts français, avec pour toile de fond la compétition géopolitique autour du Liban comme porte de l’Orient.

L’attitude de Macron prouve que la relation entre le Liban et la France reposent avant tout sur des liens humains et émotionnels

Deux jours après la catastrophe du port, Emmanuel Macron découvre une ville meurtrie. Il visite le quartier sinistré de Gemmayzeh au milieu des cris d’une population en deuil, profondément choquée par l’impact de l’explosion, et qui se sent abandonnée par le pouvoir libanais. L’attitude de Macron prouve que la relation entre le Liban et la France reposent avant tout sur des liens humains et émotionnels. Toutefois, la France est aussitôt critiquée dans la mesure où «cette visite avait pour interlocutrice la classe politique dominante, et non la jeunesse révolutionnaire, qui redoute le classement de l’enquête sur l’explosion du port».

La thèse de l'«héritage colonial» ne suffit pas à expliquer les relations particulières entre ces deux pays, qui se sont amorcées dès le xvie siècle pour les chrétiens d'Orient et ont toujours résisté à diverses perturbations géopolitiques et aux remous de l’histoire.

Les relations entre la France et le Liban sont donc liées à des considérations diplomatiques, stratégiques, économiques et politiques. Elles ne sauraient s’analyser seulement en termes de passions et d’intérêts directs. C’est un ensemble de liens soigneusement tissés qui incite Macron à adopter cette attitude pleine de respect envers les habitants de Beyrouth et à réunir les représentants des communautés et des factions libanaises, à l’occasion d’une scène rare, autour d'une même table.

Cependant, le grand intérêt que manifeste la France au sujet de la question libanaise et la dynamique affichée par le président Macron depuis le 4 août 2020 risquent de figurer au rang des vœux pieux si le Liban ne se libère pas de son assujettissement vis-à-vis de l’axe régional de l’Iran et si une équipe neutre, efficace et compétente n’est pas mise en place pour former ce «gouvernement de mission» indispensable au lancement des réformes.

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Le président français Emmanuel Macron s'adresse à la foule lors d'une visite dans le quartier de Gemmayzeh, qui a subi d'importants dégâts en raison d'une explosion massive dans la capitale libanaise, le 6 août 2020. (AFP)

 

L’initiative française à l’épreuve de la complexité du problème libanais 

En dépit de débuts prometteurs, l’initiative française rencontre par ailleurs un certain nombre de difficultés.

Ainsi la présidence française a-t-elle été véritablement «bernée» par une classe politique libanaise qui ne respecte pas ses engagements. Elle a en outre dû faire face à la non-coopération de certains acteurs extérieurs comme l’Iran, force tutrice du Hezbollah libanais.

De fait, en réhabilitant un système politique confessionnel basé sur les quotas, la formation d’un gouvernement de spécialistes indépendants agréé par les forces dominantes du système s’est trouvée presque aussitôt stoppée par des litiges qui sont apparus avec la nomination de l’ambassadeur Adib et ont redoublé d’intensité avec le retour de Saad Hariri.

Le levier européen n’a pas constitué un élément décisif; les menaces de sanctions européennes contre les auteurs du blocage, pas davantage.

Ce manquement interne a été nourri par un blocage régional. Dès le mois de septembre 2020, lors d’une visite à Moscou, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammed Djavad Zarif, aurait confié à son homologue russe, Sergueï Lavrov, que «l’Iran ne soutenait pas l’initiative française à Beyrouth», glissant à ses interlocuteurs que «Téhéran gelait la question libanaise en attendant ses négociations avec Washington».

De son côté, l’Arabie saoudite, partenaire régional de l’Occident au Liban, a décidé de se désintéresser provisoirement de la question libanaise. Elle reproche à Washington et à Paris d’admettre, dans les faits, «l’expansion et le diktat» de l’Iran. Ainsi la France, qui voyait dans ses liens avec l’Iran et dans sa capacité à «dialoguer» avec le Hezbollah autant d’atouts diplomatiques, constate-t-elle, non sans amertume, combien sa marge de manœuvre est limitée et voit son initiative s’essouffler sérieusement. Plus grave encore, le levier européen n’a pas constitué un élément décisif; les menaces de sanctions européennes contre les auteurs du blocage, pas davantage.

Après avoir tenté de jouer la carte de l’opposition et de la force du changement lors de la visite de Le Drian au mois d’avril dernier, la France renoue avec d’anciennes cartes issues de son catalogue classique en soutenant l’arrivée de Najib Mikati. Apparemment, la diplomatie française caresse l’espoir que le dépassement du «cas Gebran Bassil» (le dirigeant du Courant patriotique libre, qui est en conflit ouvert avec Hariri) serait en mesure d’ouvrir la voie à un Mikati à la fois agréé par le Hezbollah et accepté par les Américains.

Le fait que la France mise désormais sur Mikati représente un pari risqué. Paris veut croire dans la réussite tardive d’une initiative qui, onze mois durant, aura connu bien des déboires.


Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.


Cisjordanie: 25 immeubles d'habitation menacés de destruction dans un camp de réfugiés

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  • "Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre"
  • "Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie

TULKAREM: L'armée israélienne va démolir 25 immeubles d'habitation du camp de réfugiés de Nour Chams, dans le nord de la Cisjordanie, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables locaux.

Abdallah Kamil, le gouverneur de Tulkarem où se situe le camp, a déclaré à l'AFP avoir été informé par le Cogat --l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens-- que les démolitions interviendraient d'ici la fin de la semaine.

"Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre", a indiqué à l'AFP Faisal Salama, responsable du comité populaire du camp de Tulkarem, proche de celui de Nour Chams, précisant qu'une centaine de familles seraient affectées.

Le Cogat n'a pas répondu dans l'immédiat aux sollicitations de l'AFP, l'armée israélienne indiquant se renseigner.

"Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie.

Il estime qu'elles s'inscrivent "dans une stratégie plus large visant à modifier la géographie sur le terrain", qualifiant la situation de "tout simplement inacceptable".

"Crise" 

La Cisjordanie est occupée par Israël depuis 1967.

Début 2025, l'armée israélienne y a lancé une vaste opération militaire visant selon elle à éradiquer des groupes armés palestiniens, en particulier dans les camps de réfugiés du nord, comme ceux de Jénine, Tulkarem et Nour Chams.

Au cours de cette opération, l'armée a détruit des centaines de maisons dans les camps, officiellement pour faciliter le passage des troupes.

Selon M. Friedrich, environ 1.600 habitations ont été totalement ou partiellement détruites dans les camps de la région de Tulkarem, entraînant "la crise de déplacement la plus grave que la Cisjordanie ait connue depuis 1967".

Lundi, une vingtaine de résidents de Nour Chams, tous déplacés, ont manifesté devant des véhicules militaires blindés bloquant l'accès au camp, dénonçant les ordres de démolition et réclamant le droit de rentrer chez eux.

"Toutes les maisons de mes frères doivent être détruites, toutes! Et mes frères sont déjà à la rue", a témoigné Siham Hamayed, une habitante.

"Personne n'est venu nous voir ni ne s'est inquiété de notre sort", a déclaré à l'AFP Aïcha Dama, une autre résidente dont la maison familiale de quatre étages, abritant environ 30 personnes, figure parmi les bâtiments menacés.

Disparaître 

Fin novembre, l'ONG Human Rights Watch a indiqué qu'au moins 32.000 personnes étaient toujours déplacées de chez elles dans le cadre de cette opération.

Comme des dizaines d'autres, le camp de Nour Chams a été établi au début des années 1950, peu après la création d'Israël en 1948, lorsque des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou été expulsés de leurs foyers.

Avec le temps, ces camps se sont transformés en quartiers densément peuplés, où le statut de réfugié se transmet de génération en génération.

De nombreux habitants ont affirmé à l'AFP ces derniers mois qu'Israël cherchait à faire disparaître les camps, en les transformant en quartiers des villes qu'ils jouxtent, afin d'éliminer la question des réfugiés.

Nour Chams a longtemps été un lieu relativement paisible où vivaient dans des maisons parfois coquettes des familles soudées entre elles.

Mais depuis quelques années, des mouvements armés s'y sont implantés sur fond de flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens et de précarité économique.