Paul Najjar a perdu sa fille, mais il se bat pour le Liban dont il a rêvé pour elle

Paul Najjar (à droite) parmi les manifestants et les familles des victimes de l'explosion de Beyrouth, porte un cercueil vide lors d’une manifestation qui a lieu devant la résidence du ministre libanais de l'Intérieur, à Beyrouth, le 13 juillet 2021. (AFP)
Paul Najjar (à droite) parmi les manifestants et les familles des victimes de l'explosion de Beyrouth, porte un cercueil vide lors d’une manifestation qui a lieu devant la résidence du ministre libanais de l'Intérieur, à Beyrouth, le 13 juillet 2021. (AFP)
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Publié le Mercredi 04 août 2021

Paul Najjar a perdu sa fille, mais il se bat pour le Liban dont il a rêvé pour elle

  • D’anciens ministres, des députés, des responsables sécuritaires, ont été préservés d’une levée de leur immunité
  • «On se sent obligés de tenir et de se battre pour notre fille et pour notre pays, c’est notre droit», revendique Paul Najjar

BEYROUTH: Le 13 juillet dernier, une foule en colère composée de familles endeuillées par la double explosion du port de Beyrouth et de nombreux citoyens qui ont décidé de les accompagner par solidarité marchait vers le domicile du ministre de l’Intérieur, Mohammed Fahmi. En tête du cortège, Paul Najjar, calme, déterminé, exprime ses exigences à l’aide d’un porte-voix: «Laissez-nous passer, aujourd’hui nous enterrons nos enfants et nos proches pour la seconde fois.»

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Colère

La veille, le ministre avait refusé d’approuver la comparution devant le juge en charge de l’enquête, Tarek Bitar, du directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim. D’autres personnalités, parmi lesquelles d’anciens ministres, des députés, des responsables sécuritaires, avaient également été préservées d’une levée de leur immunité. Cela a attisé la colère d’une grande partie des Libanais, persuadés que la classe politique se dérobe à la justice, se déchargeant de son implication à des degrés divers dans cette catastrophe qui a secoué le monde.

Paul Najjar avance. Lui-même et sa femme, Tracy, ne reculeront devant rien jusqu’à ce que justice soit rendue. Le 4 août 2020, tous deux se trouvaient à leur domicile, qui fait face au port de Beyrouth. Leur unique enfant, Alexandra – «Lexou» pour ses proches –, jouait tranquillement avec ses poupées, «ses princesses», précise Tracy, quand une première explosion secoue l’immeuble à la manière d’un tremblement de terre.

Tracy happe la fillette, mais la deuxième explosion, à 18h08, projette la mère et l’enfant dans le couloir. Tracy, couchée sur Lexou, est sérieusement blessée, mais elle croit avoir protégé l’enfant de son corps. Hélas, Alexandra, qui souffre d’un œdème cérébral, est déjà inconsciente. Tracy doit être hospitalisée. Paul, bien qu’atteint de multiples blessures, est le plus valide. Il se démène donc pour faire admettre l’une et l’autre dans deux hôpitaux différents – une gageure, alors que les hôpitaux du secteur sont détruits.

Alexandra est l’une des plus jeunes victimes de l’incommensurable drame qui a touché Beyrouth ce jour-là, avec Isaac, l’adorable petit garçon d’un couple australien, transpercé par un éclat de vitre alors que, assis sur sa chaise haute, il prenait son dîner. Des photos d’Alexandra circulent: on la voit avec son petit sac à dos en train d’agiter un drapeau libanais durant les manifestations de l’automne 2019. Elle devient une icône. Ses parents, aux côtés des autres familles des victimes, vont remuer ciel et terre pour que tous les coupables soient dûment jugés. Engagés avec la foule des non-partisans pour un Liban débarrassé de la corruption qui le ronge, ils se sentent doublement investis après le départ de leur fille.

Un cercueil vide 

«Laissez passer notre cortège», demande Paul. Avec Tracy, il porte un cercueil vide, un petit cercueil blanc qui va rejoindre la pile d’objets déposés devant le domicile du ministre, dont la décision inique a exacerbé la haine populaire, et qui prendra la fuite, se réfugiant dans une résidence secondaire. 

À l’approche de ce sinistre anniversaire, le couple vit des «journées impossibles», selon les mots de Paul. Ce dernier a conduit tambour battant la campagne des élections de l’ordre des ingénieurs, couronnées par le succès de la liste dite «civile», c’est-à-dire composée de non-partisans qui ont conduit la révolution souverainiste de l’automne 2019.

«Obligés de tenir»

Ce qui les aide à tenir? Paul répond à Arab News en français: «L’amour qu’on a l’un pour l’autre, principalement. Nous sommes encore jeunes. Si notre deuil est immense, nous gardons l’espoir de voir des jours meilleurs, où justice sera faite et où nous pourrons revivre normalement et aspirer au bonheur. C’était essentiel pour nous aussi de pouvoir faire des breaks, de sortir un peu du pays et de revenir. Nous sommes également très bien entourés par une famille et des amis qui nous soutiennent de manière inconditionnelle. Cela nous aide énormément, tout comme le fait de voir nos concitoyens se battre pour reconstruire Beyrouth. Des gens nous apportent leur soutien de partout. On se sent obligés de tenir et de se battre pour notre fille et pour notre pays, c’est notre droit.»

«On n’a pas le luxe d’offrir une alternative politique. C’est une question de résistance et survie», ajoute Paul Najjar, qui affirme par ailleurs: «La plus belle alternative que nous avons à proposer a encore mieux prouvé son efficacité le 4 août 2020, dès 18h08: les ONG, le corps médical, les avocats, les mouvements opposants du 17-octobre étaient tous sur le terrain. Voici un nouveau Liban solidaire, progressiste, sans lequel nous serions encore sous les décombres.»

«Que [le président français, Emmanuel] Macron, et les autres arrêtent de se vautrer derrière cette excuse du manque d’alternative. Nous avons besoin d’une alternative sociale de reconstruction, et elle est là», martèle le père d’Alexandra, qui poursuit: «Regardez l’Ukraine, la Serbie, la Slovaquie: ce n’était pas très compliqué.» 

«Il est vrai que nous avons mal joué», ajoute-t-il en référence à l’essoufflement du mouvement populaire du 17 octobre 2019, qui a permis à la classe politique de se remettre en selle. Au moment de notre échange de messages, Najjar avait contracté la Covid; sa convalescence se poursuit doucement.  

Mais Paul Najjar ne se résigne pas pour autant: «Il faut que les médias nous aident à changer le discours international à l’égard de la classe politique. Je ne sais pas trop par quel bout le prendre, c’est un effort commun, il me semble. Le message doit être très clair: que chaque politique, que chaque média des grandes puissances occidentales, que chaque citoyen du monde proche de nous le sache: la classe politique libanaise est infiltrée par des assassins mafieux qui ont failli à leurs tâches, et nous disposons d’une alternative.»


Le chef de la diplomatie libanaise décline une invitation de l'Iran

Le ministre libanais des Affaires étrangères, Youssef Rajji, s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien au siège du ministère des Affaires étrangères au Caire. (AFP)
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Youssef Rajji, s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien au siège du ministère des Affaires étrangères au Caire. (AFP)
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  • Le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Raggi a refusé une invitation à se rendre en Iran, évoquant des conditions inappropriées, et a proposé une rencontre dans un pays tiers neutre
  • Ce refus intervient sur fond de pressions américaines pour désarmer le Hezbollah, soutenu par l'Iran, alors que Beyrouth insiste sur la non-ingérence dans ses affaires internes

BEYROUTH: Le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Raggi a décliné mercredi une invitation de son homologue à se rendre en Iran, qui soutient le Hezbollah islamiste, et proposé une rencontre dans un pays tiers.

Le gouvernement libanais est soumis à une intense pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, affaibli par une guerre avec Israël, alors que l'Iran a affiché son opposition à cette mesure.

Début décembre, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi avait invité M. Raggi à se rendre à Téhéran pour évoquer "les relations bilatérales" ainsi que les "développements régionaux et internationaux", selon le ministère iranien des Affaires étrangères.

En réponse à M. Araghchi, "j'ai déclaré que je ne pouvais pas accepter son invitation à me rendre à Téhéran dans les circonstances actuelles", a annoncé mercredi M. Raggi sur X.

"Cela ne signifie pas un refus d'engager le dialogue, mais plutôt que les conditions ne sont pas propices à cette visite", a-t-il ajouté.

Il a proposé à son homologue de s'entendre pour se rencontrer "dans un pays tiers neutre", soulignant que les relations entre le Liban et l'Iran devaient être basées sur le principe de "non ingérence dans les affaires internes" de chaque pays.

L'Iran arme et finance le puissant Hezbollah, qu'une guerre a opposé à Israël d'octobre 2023 à novembre 2024.

En août, le Liban avait signifié à un haut responsable iranien, Ali Larijani, en visite à Beyrouth, son refus catégorique de "toute ingérence" dans ses affaires internes, après des critiques par Téhéran de la décision du gouvernement de désarmer le Hezbollah.

Téhéran dénonce régulièrement les frappes israéliennes qui le visent. Les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, avaient appelé en novembre à "venger" l'assassinat par Israël au Liban du chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.


L'Arabie saoudite et l'Iran réaffirment leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin

Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
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  • Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a participé mardi à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint

RIYAD : L’Arabie saoudite et l’Iran ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin lors d’une réunion tenue mardi à Téhéran.

Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a assisté à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint entre l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine.

Les parties saoudienne et iranienne « ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin dans son intégralité, ainsi que leur volonté de renforcer les relations de bon voisinage entre leurs pays, dans le respect de la Charte des Nations unies, de la Charte de l’Organisation de la coopération islamique et du droit international », a indiqué l’Agence de presse saoudienne dans un communiqué.

L’Arabie saoudite et l’Iran ont également salué le rôle positif continu joué par la Chine ainsi que son soutien constant à la mise en œuvre de l’Accord de Pékin.

De son côté, la Chine a réaffirmé sa disponibilité à poursuivre son soutien et à encourager les démarches entreprises par le Royaume et l’Iran pour développer leurs relations dans divers domaines.

Les trois pays ont salué les progrès continus dans les relations saoudo-iraniennes et les perspectives qu’ils offrent à tous les niveaux, a ajouté la SPA.

Les trois pays ont également appelé à une cessation immédiate des agressions israéliennes en Palestine, au Liban et en Syrie.

Ils ont en outre condamné tout acte portant atteinte à l’intégrité territoriale de l’Iran.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'armée israélienne dit avoir frappé des infrastructures du Hezbollah au Liban

Des véhicules de l'ONU passent devant des bâtiments détruits par l'offensive aérienne et terrestre menée par Israël contre le Hezbollah dans le sud du Liban, vue depuis la ville la plus septentrionale d'Israël, Metula, le dimanche 30 novembre 2025. (AP)
Des véhicules de l'ONU passent devant des bâtiments détruits par l'offensive aérienne et terrestre menée par Israël contre le Hezbollah dans le sud du Liban, vue depuis la ville la plus septentrionale d'Israël, Metula, le dimanche 30 novembre 2025. (AP)
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  • L’armée israélienne affirme avoir frappé plusieurs infrastructures du Hezbollah dans le sud du Liban, dont un site de lancement, un complexe d’entraînement et des installations militaires, malgré le cessez-le-feu de novembre 2024
  • Le contexte reste tendu depuis l’assassinat de Hassan Nasrallah en 2024, tandis que Washington presse Beyrouth de désarmer le Hezbollah, une demande rejetée par le groupe et ses alliés

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé tôt mardi avoir frappé des infrastructures du mouvement islamiste Hezbollah pro-iranien dans le sud du Liban.

Les forces armées israéliennes ont indiqué "avoir frappé des infrastructures appartenant à l'organisation terroriste Hezbollah dans plusieurs zones du sud du Liban", dont un site de lancement utilisé pour des attaques contre Israël, dans un communiqué publié sur plusieurs réseaux sociaux.

Elles disent avoir ciblé également un complexe d'entraînement de la force al-Radwan, une unité d'élite, des champs de tir, des zones d'entraînement aux armes pour divers types d'armes et des structures militaires appartenant au Hezbollah.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe chiite pro-iranien, Israël continue de mener des attaques régulières le visant dans ses bastions libanais, et d'occuper cinq points frontaliers dans le sud du Liban.

Israël avait menacé début novembre d'intensifier ses attaques au Liban, accusant le mouvement de se "réarmer".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, un plan auquel le Hezbollah et ses alliés s'opposent en invoquant notamment la poursuite d'une présence israélienne sur le territoire libanais.