Pourquoi l'Algérie a-t-elle rompu ses relations avec le Maroc ?

Un Algérien lit le journal du jour, dont la Une traite de la rupture entre l’Algérie et le Maroc (Photo, AFP).
Un Algérien lit le journal du jour, dont la Une traite de la rupture entre l’Algérie et le Maroc (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 25 août 2021

Pourquoi l'Algérie a-t-elle rompu ses relations avec le Maroc ?

  • Les relations entre l'Algérie et son voisin marocain sont traditionnellement difficiles, en raison principalement du contentieux du Sahara Occidental
  • Cette rupture «permet à Alger de se repositionner sur le nationalisme arabe (...): vis-à-vis de la France, d’Israël, de la question kabyle, des islamistes»

TUNIS: Après des mois de tensions croissantes, l'Algérie a annoncé mardi la rupture de ses relations diplomatiques avec le Maroc voisin, invoquant des "actes hostiles incessants perpétrés par le Maroc contre l'Algérie".

Pourquoi cette décision, prévisible, intervient-elle maintenant ? 

Les relations entre l'Algérie et son voisin marocain sont traditionnellement difficiles, en raison principalement du contentieux du Sahara Occidental.

Ainsi, la longue frontière entre les deux pays est officiellement fermée depuis plus de 25 ans (1994).

"Au fond, les deux pays ont des relations exécrables depuis très longtemps, ils ont déjà été en guerre, mais là, l'étape d’après c’est un conflit frontalier au Sahara", explique à l'AFP Pierre Vermeren, professeur d'histoire à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et spécialiste du Maghreb, qui parle d'"un acte très violent".

La récente normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël -- en contrepartie d'une reconnaissance américaine de la "souveraineté" marocaine sur ce territoire -- a encore avivé les tensions avec l'Algérie, fervent soutien de la cause palestinienne.

"C’est la réponse différée aux accords d’Abraham (entre Israël et certains pays arabes sous les auspices des Etats-Unis) et au rapprochement du Maroc avec Israël", estime M. Vermeren.

Cette rupture "permet à Alger de se repositionner sur le nationalisme arabe (...): vis-à-vis de la France, d’Israël, de la question kabyle, des islamistes. En soutien à l’Unité arabe, à l’Union du Maghreb, aux Palestiniens", juge l'expert selon lequel ce message est avant tout à "usage interne".

En quoi Israël est-il concerné ?

Alger a très mal pris les propos du chef de la diplomatie israélienne, Yaïr Lapid, qui a exprimé lors d'une récente visite officielle au Maroc ses "inquiétudes au sujet du rôle joué par l'Algérie dans la région" ou encore "son rapprochement avec l'Iran".

Aux yeux du ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, "sur le plan de la sécurité régionale, le fait pour les autorités marocaines d’introduire une puissance militaire étrangère dans le champ maghrébin et d’inciter son représentant à tenir des propos fallacieux et malveillants à l’encontre d’un pays voisin constituent un acte grave et irresponsable".

L'Etat hébreu a dénoncé mercredi des accusations "infondées".

"Ce qui compte, ce sont les très bonnes relations entre Israël et le Maroc (...). L'Algérie devrait se focaliser" sur ses "problèmes", a dit à l'AFP une source diplomatique israélienne, qui a invité Alger à "se focaliser sur l'ensemble des problèmes auxquels elle est confrontée, en particulier les problèmes économiques sérieux".

Que vient faire la question kabyle dans cette crise ?

Le Haut conseil de sécurité algérien a accusé --sans preuve -- le Maroc et Israël de soutenir le MAK (Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie), une organisation indépendantiste, ainsi que l'organisation islamo-conservatrice Rachad. Ces deux mouvements sont basés à l'étranger.    

Alger impute notamment au MAK des incendies meurtriers (90 morts) ayant ravagé le pays et le lynchage le 11 août d'un jeune homme accusé à tort de pyromanie en Kabylie.

"Ca paraît surréaliste", nuance M. Vermeren. "Au Maghreb, (...) dès qu’il y a un problème, il y a un complot. Ca permet de se décharger" de toute responsabilité, relève l'historien.

"Il s'agit d'une réaction algérienne à un acte marocain", objecte Smaïl Maaref, professeur de relations internationales à l'Université d'Alger. Il décrit le récent soutien de Rabat "au mouvement indépendantiste en Kabylie" comme une riposte au traditionnel appui d'Alger aux indépendantistes sahraouis.

Or, il s'agit là d'une ligne rouge pour Alger qui s'oppose à toute velléité indépendantiste de la Kabylie, région berbérophone du nord-est de l'Algérie.

Comment a réagi le Maroc ? Et la France ?

Le ministère marocain des Affaires étrangères a regretté la décision "complétement injustifiée" de l'Algérie, en rejetant des "prétextes fallacieux, voire absurdes".

Les motifs avancés par Alger "ne sont pas sérieux", opine Tajeddine El Housseini, professeur de relations internationales à l'Université Mohammed-V de Rabat.

"Inutile de rappeler qu'accuser le Maroc d'avoir mis le feu dans les forêts algériennes n'est qu'une farce!", juge M. Housseini.

Par ailleurs, a-t-il tempéré, la rupture des relations "n'aura pas d’impact dans l’immédiat puisqu’elles sont déjà rompues dans les faits".

De son côté, Paris a appelé au "dialogue". Pour Pierre Vermeren, la France, qui garde des liens forts mais sensibles avec les protagonistes, est "condamnée à ne pas choisir. On ne peut se fâcher avec l’un des deux pays (...). La France va prendre acte d’une situation sur laquelle elle n’a strictement aucun pouvoir".


Liban: deux morts dans une frappe israélienne à Baalbeck 

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien. (AFP)
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  • L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco
  • Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes

BEYROUTH: Au moins deux personnes ont été tuées mercredi dans une frappe israélienne contre une voiture dans la ville de Baalbeck, dans l'est du Liban, a indiqué le ministère libanais de la Santé.

L'agence nationale d'information ANI a rapporté que la frappe avait été menée par un "drone israélien" dans la ville millénaire qui abrite un ensemble de temples romains classés au patrimoine mondial de l'Unesco.

Ni ANI ni le ministère n'ont fourni d'autres précisions sur ce raid ou sur l'identité des victimes.

Israël mène régulièrement des attaques au Liban, affirmant cibler le Hezbollah, malgré un accord de cessez-le-feu qui a mis fin en novembre 2024 à plus d'un an de conflit, dont deux mois de guerre ouverte, entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien.

Sous pression américaine et craignant une intensification des frappes israéliennes, le gouvernement libanais a ordonné le mois dernier à l'armée d'élaborer un plan visant à désarmer le Hezbollah, sorti très affaibli par la guerre.

Selon Beyrouth, l'armée libanaise doit achever ce désarmement d'ici trois mois en ce qui concerne le sud du pays, proche de la frontière avec Israël.

 


Attaques israéliennes à Doha: le Qatar s'entretient avec la présidente de la CPI

L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
L'émir du Qatar, Cheikh Tamim bin Hamad Al Thani, préside le sommet sur l'urgence arabo-islamique 2025 à Doha, au Qatar. (QNA/AFP)
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  • Le Qatar explore des recours légaux contre Israël après une frappe à Doha ayant tué plusieurs membres du Hamas et un agent de sécurité qatari
  • Bien que simple observateur à la CPI, Doha intensifie ses démarches diplomatiques et judiciaires pour demander des comptes à Israël

DOHA: Un haut représentant du Qatar a rencontré mercredi la présidente de la Cour pénale internationale (CPI) alors que Doha cherche à engager des poursuites contre Israël après des frappes sans précédent sur son territoire, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères qatari.

Mohammed Al-Khulaifi, qui a été chargé d'entreprendre d'éventuelles démarches légales après l'attaque israélienne, s'est entretenu avec la juge Tomoko Akane à La Haye, a indiqué le ministère.

Le pays du Golfe explore "toutes les voies juridiques et diplomatiques disponibles pour s'assurer que les responsables de l'attaque israélienne contre le Qatar rendent des comptes", a précisé jeudi auprès de l'AFP un responsable qatari, s'exprimant sous couvert d'anonymat en raison de la sensibilité des discussions.

Le Qatar, en tant qu'État observateur à la CPI, ne peut pas saisir directement la cour.

La frappe meurtrière menée la semaine dernière à Doha, visant des dirigeants du mouvement islamiste palestinien Hamas, a déclenché une vague de critiques à l'international, les Nations unies condamnant une "violation choquante du droit international". Elle a aussi valu à Israël une rare réprobation du président américain Donald Trump.

Israël et le Qatar, pays médiateur dans les négociations en vue d'une trêve à Gaza, sont tous deux alliés des États-Unis.

Le Hamas a affirmé que ses principaux dirigeants politiques, installés au Qatar avec l'aval de Washington depuis 2012, avaient survécu à l'attaque qui a tué cinq de ses membres, ainsi qu'un membre des forces de sécurité qataries.

À l'issue d'un sommet extraordinaire lundi à Doha, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique ont appelé "tous les Etats (...) à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël et à engager des poursuites à son encontre".

En 2024, la CPI a émis des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, pour crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza.

L'offensive israélienne, qui a fait plus de 65.000 morts dans le territoire palestinien selon les chiffres du Hamas, fiables selon l'ONU, a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

La CPI a également émis des mandats d'arrêt contre l'ancien ministre israélien de la Défense Yoav Gallant et le commandant militaire du Hamas Mohammed Deif, tué depuis par Israël.


L'Arabie saoudite et le Pakistan signent un pacte de défense mutuelle

Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le chef de l'armée pakistanaise, le maréchal Syed Asim Munir (à droite), le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (2e à droite), le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif (2e à gauche) et le ministre saoudien de la Défense photographiés après la signature d'un pacte de défense historique à Riyad, le 17 septembre 2025. (PMO)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane reçoit le Premier ministre pakistanais Shehbaz Sharif au palais d'Al-Yamamah à Riyad, mercredi. (SPA)
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  • Le pacte marque une étape majeure dans le renforcement des liens sécuritaires et économiques entre deux alliés de longue date
  • L'accord de Riyad transforme des décennies de coopération militaire en un engagement sécuritaire contraignant

​​​​​ISLAMABAD : Le Pakistan et l’Arabie saoudite ont signé mercredi un « Accord stratégique de défense mutuelle », s’engageant à considérer toute agression contre l’un des deux pays comme une attaque contre les deux, renforçant ainsi la dissuasion conjointe et solidifiant des décennies de coopération militaire et sécuritaire.

Cet accord intervient moins de deux semaines après les frappes aériennes israéliennes à Doha visant des dirigeants du Hamas, un événement ayant intensifié les tensions régionales et souligné l’urgence pour les États du Golfe de renforcer leurs partenariats sécuritaires.

L'accord de Riyad marque également une volonté des deux gouvernements de formaliser leurs liens militaires de longue date en un engagement contraignant.

Le pacte a été signé lors de la visite officielle du Premier ministre Shehbaz Sharif à Riyad, où il a rencontré le prince héritier et Premier ministre Mohammed ben Salmane au palais Al-Yamamah. Accompagnés de ministres et responsables militaires de haut niveau, les deux dirigeants ont passé en revue ce que le bureau de Sharif a qualifié de relation « historique et stratégique » entre les deux nations, en discutant également des développements régionaux.

« L’accord stipule que toute agression contre l’un des deux pays sera considérée comme une agression contre les deux », a déclaré le communiqué conjoint.

Il décrit le pacte comme un reflet de l’engagement commun des deux gouvernements à renforcer la coopération en matière de défense et à œuvrer pour la sécurité et la paix dans la région et dans le monde.

Depuis des décennies, l’Arabie saoudite et le Pakistan entretiennent des liens étroits sur les plans politique, militaire et économique. Le Royaume accueille plus de 2,5 millions de ressortissants pakistanais — la plus grande communauté d’expatriés pakistanais — et a souvent soutenu financièrement Islamabad lors de crises économiques. La coopération en matière de défense a inclus des formations, des achats d’armes et des exercices militaires conjoints.

Le nouvel accord formalise cette coopération sous la forme d’un engagement de défense mutuelle, une étape qui, selon de nombreux analystes, place cette relation au même niveau que d’autres partenariats stratégiques dans la région.

Bien que le communiqué n’ait pas précisé les mécanismes de mise en œuvre, il a souligné que l’accord visait à développer les aspects de la coopération en matière de défense et à renforcer la dissuasion conjointe face à toute agression.

Cette visite intervient également alors que le Pakistan cherche à renforcer ses liens avec les États du Golfe, dans un contexte de défis économiques persistants.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.pk