La cruauté du régime des mollahs: un ancien prisonnier témoigne

Une détenue iranienne regarde derrière un mur alors qu'un gardien passe devant la section réservée aux femmes de la tristement célèbre prison d'Evin, au nord de Téhéran, le 13 juin 2006. AFP PHOTO/ATTA KENARE
Une détenue iranienne regarde derrière un mur alors qu'un gardien passe devant la section réservée aux femmes de la tristement célèbre prison d'Evin, au nord de Téhéran, le 13 juin 2006. AFP PHOTO/ATTA KENARE
Short Url
Publié le Jeudi 26 août 2021

La cruauté du régime des mollahs: un ancien prisonnier témoigne

  • Lorsque Farzin Nosrati a été amené dans la pièce, les membres du comité ont prononcé sa condamnation à mort dès qu’il a donné son nom
  • Les gouvernements du monde interagiront-ils avec un président qui a accompli un massacre générationnel, ou soutiendront-ils le peuple iranien?

PARIS : Il était midi et nous étions assis dans le couloir avec un autre prisonnier, appelé Farid. Je ne savais toujours rien de ce qui se passait dans la prison. Sous le bandeau, nous avons remarqué que les prisonniers étaient regroupés puis emmenés dans un couloir qui fut plus tard nommé «le couloir de la mort». Vers minuit ou minuit trente, tous les prisonniers avaient été emmenés.

Quelques minutes plus tard, Farid et moi avons été envoyés dans la cellule 4, quartier 2. Quand j'ai retiré mon bandeau, j'ai vu Siamak devant moi. La dernière fois que j'avais vu mon ami, c'était il y a cinq ans, et nous nous cherchions depuis. Dès que Siamak m'a vu, il m'a serré dans ses bras et il m'a dit qu'ils avaient tué tout le monde. Surpris par ce que j'avais entendu, j'ai dit: «Quoi?» Il a alors répété: «Ils ont tué tout le monde!» J'ai dit: «Ce n'est pas possible.» Je ne pouvais pas y croire.

Il m'a expliqué: «Depuis jeudi et vendredi de la semaine dernière, les Gardiens de la révolution ont changé de comportement. Ils nous ont interdit de regarder la télévision. Aucune visite en prison n'a été autorisée. La distribution de journaux a été arrêtée.» En réalité, ils ont commencé le massacre le samedi 29 août.

Il y a deux prisons principales à Téhéran: celle de Gohardasht et celle d'Evin. Cette dernière, tristement célèbre, est la principale prison de la capitale iranienne. Des milliers d'exécutions y ont eu lieu. La prison de Gohardasht est située près de la ville de Karadj, à l'ouest de Téhéran; elle abritait un grand nombre de prisonniers politiques.

Un comité de la mort a été affecté aux prisons d'Evin et de Gohardasht, chargé de déterminer si un prisonnier restait opposé au régime de Khomeini. Si la réponse était «oui», une sentence d'exécution était prononcée.

Ce comité, qui supervisait également le processus d'exécution, était composé de Hossein-Ali Nayeri, Mostafa Pour-Mohammadi, Morteza Eshraghi et Ebrahim Raïssi, le nouveau président du régime. Un groupe de trois personnes, parmi lesquelles figurent Mohammed Moghisehaei, Davood Lashgari et Hamid Nouri, était chargé d'exécuter les ordres donnés par le comité de la mort.

Hamid Nouri est actuellement jugé en Suède pour crimes contre l'humanité. Il emmenait les personnes condamnées par le comité de la mort dans la salle de pendaison et leur passait la corde au cou. Nouri attrapait souvent les prisonniers qui avaient la corde autour du cou et les tirait vers le bas pour accélérer le processus, se montrant impitoyable et barbare. Dieu sait qu'il a répété ce processus des centaines ou des milliers de fois. Le mot «tueur» ne peut pas le définir complètement. Bien que Nouri ait compté parmi ceux qui ont obéi aux ordres d'exécution, les coupables les plus importants sont ceux qui ont rendu le verdict et prononcé la peine de mort.

Le comité de la mort de Morteza Eshraghi et d’Ebrahim Raïssi, son successeur à l'époque, a établi des ordres d'exécution rapide du jeudi 27 août à la fin du mois de septembre.

Il a émis chaque jour entre vingt et trois cents ordres d'exécution. Pour eux, il s’agissait d’ordres aussi banals que de commander une tasse de thé et de la savourer. Vraiment inimaginable! Lorsque Farzin Nosrati a été amené dans la pièce, les membres du comité ont prononcé sa condamnation à mort dès qu’il a donné son nom. Il leur a fallu moins de dix secondes pour envoyer un jeune homme au bout d’une corde!

Ces mêmes personnes ont obtenu des postes gouvernementaux plus élevés pour avoir accompli toutes ces atrocités inhumaines. Par exemple, Ebrahim Raïssi, qui était procureur adjoint à l'époque, est devenu ensuite le chef de l'inspecteur général du pays, le chef du pouvoir judiciaire; il est aujourd’hui président de l'Iran. Mostafa Pour-Mohammadi, qui représentait le ministre du Renseignement au sein du comité de la mort, est devenu plus tard le conseiller à la sécurité de Khamenei. Au sein du cabinet d'Ahmadinejad, il s'est vu confier le poste de ministre de l'Intérieur; il est désormais à la tête de l'inspection générale. Ismail Shoushtari, qui était à la tête de l'organisation des prisons, est devenu ministre de la Justice sous la présidence de Rafsandjani et celle de Khatami.

La nomination de Raïssi comme président du régime illustre la cruauté sans précédent du régime des mollahs.

Raïssi a joué un rôle unique dans le meurtre de 30 000 prisonniers politiques en 1988, en application de la fatwa de Khomeini. Plus de 90% des prisonniers massacrés étaient des membres et des partisans du MEK (Organisation des moudjahidines du peuple iranien, NDLR), la principale opposition du régime. La fatwa de Khomeini déclarait que tous les militants du MEK, les ennemis jurés du régime iranien, s'ils persistaient dans leurs croyances – c'est-à-dire dans leur résistance face à ce régime pervers –, devaient être exécutés simplement au nom de leurs idées.

En outre, Raïssi, en tant que chef du pouvoir judiciaire, a été impliqué dans de nombreuses exécutions depuis le massacre de 1988, ainsi que dans la répression de manifestations généralisées telles que le soulèvement du mois de novembre 2019, au cours duquel plus de 1 500 manifestants ont été tués dans les rues de différentes villes d'Iran.

La nomination de Raïssi à la présidence avait pour but de faire cesser les vagues croissantes de soulèvements et de manifestations dans tout l'Iran, actuellement menés par la jeunesse iranienne.

Ces jeunes forment de petits groupes, appelés «unités de résistance», qui prônent le plan en dix points de Mme Maryam Radjavi, le leader de l'opposition iranienne. Ce programme appelle à l'égalité entre les hommes et les femmes, à la séparation de la religion et de l'État et à un Iran non nucléaire. L'arrivée du nouveau président iranien, Ebrahim Raïssi, marque la fin du système des mollahs.

À l'image des précédents présidents, la confrontation d'Ebrahim Raïssi avec le reste du pouvoir et les revendications légitimes du peuple ont déjà pris un nouveau départ. La participation maximale de 10% à l'élection présidentielle de juin 2021 (NDLR: le taux officiel de participation annoncé est de 48,8%)illustre le début de cet affrontement. Tout porte à croire que cette fois, le vainqueur ne sera pas le régime.

Dans le même temps, la présidence de Raïssi est une épreuve historique pour la communauté internationale. Les gouvernements du monde interagiront-ils avec un président qui a accompli un massacre générationnel, ou soutiendront-ils le peuple iranien?

 

Mahmoud Royaee, ancien prisonnier politique iranien et témoin du massacre de 1988

 


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Short Url
  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.