Les Afghans de France retiennent leur souffle et leurs peurs

Maryam, réfugiée afghane à Paris, parle a son fils de 6 ans évacué de Kaboul en Ouzbékistan par les autorités françaises. (AFP).
Maryam, réfugiée afghane à Paris, parle a son fils de 6 ans évacué de Kaboul en Ouzbékistan par les autorités françaises. (AFP).
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Publié le Vendredi 27 août 2021

Les Afghans de France retiennent leur souffle et leurs peurs

  • Depuis la prise de pouvoir des talibans le 15 août, le président de l'association Enfants d'Afghanistan vit une mobilisation de tous les instants
  • Malgré l'épuisement, Reza Jafari, 25 ans, redouble d'efforts à l'approche des derniers vols spéciaux qui prendront fin vendredi soir

PARIS: Pendu au téléphone, Reza Jafari dicte des noms, transfère des photos de passeports: "Chaque minute, chaque instant compte". Pour lui et sa communauté afghane de Paris, les dernières évacuations de Kaboul prennent l'allure d'un compte à rebours tragique.


"Quand un soldat français sort de l'enceinte de l'aéroport, si les personnes (qu'on a placées sur la liste d'évacuation) ne sont pas au bon endroit, qu'il ne les voit pas, c'est raté. Ils demandent par exemple au groupe de mettre un chiffon rouge autour du bras gauche pour être reconnaissable et d'avoir un mot de passe sur un papier. On fait ça toute la journée, ça commence à 05H00 du matin, heure de Kaboul, jusqu'à la tombée de la nuit. Je n'ai pas dormi depuis dix jours", raconte ce porte-parole officieux de la diaspora à Paris.


Depuis la prise de pouvoir des talibans le 15 août, le président de l'association Enfants d'Afghanistan vit une mobilisation de tous les instants pour permettre l'exfiltration d'un maximum d'Afghans menacés.


"Ma liste initiale, c'était une vingtaine de personnes. Des femmes, des écrivaines, des chanteuses... (...) Avec mon équipe, on a pu faire sortir environ 200 personnes", raconte-t-il, après avoir apporté des vêtements et de la nourriture dans un hôtel de la banlieue parisienne où sont logés des exfiltrés fraîchement arrivés.


"On voulait faire sortir en premier les femmes", explique ce membre de la minorité hazara, devenu Français en 2013 après un parcours migratoire chaotique. "Tous ces gens-là, si on ne les avait pas évacués, il seraient morts" sous le nouveau régime.


Malgré l'épuisement, Reza Jafari, 25 ans, redouble d'efforts à l'approche des derniers vols spéciaux qui prendront fin vendredi soir.

"Ne nous abandonnez pas"

 "Les cris au téléphone des jeunes filles qui me disaient 'Ne nous abandonnez pas', c'est gravé dans ma tête. Je n'arrive plus à dormir, je pense aux gens restés là-bas."


Traversée par les mêmes divisions ethniques qu'en Afghanistan, la diaspora n'a pas crié son angoisse ni rassemblé ses doléances d'une seule voix, depuis la chute de Kaboul, comme en témoignent les deux manifestations prévues ce week-end à Paris: l'une samedi, pour les "pro-Massoud", l'autre dimanche. 


Mais, chacun de leur côté, tous les Afghans, premiers demandeurs d'asile en France depuis plusieurs années, se focalisent depuis dix jours sur un objectif commun: évacuer leur famille.


"C'est simple, on n'a plus qu'une seule question de la part des Afghans qui vivent dans la rue, +comment je fais pour faire venir ma famille?+, alors qu'ils sont eux-mêmes dans la galère", résume Maël de Marcellus, responsable parisien de l'association Utopia56, qui leur vient en aide.


Le recours de certains Afghans devant le Conseil d’État pour réclamer une procédure de réunification familiale d'urgence symbolise ces efforts tous azimuts, jusqu'au dernier moment.


Jeudi après-midi, au moment où un double attentat-suicide meurtrier se produisait devant l'aéroport de Kaboul, le juge administratif suprême se déclarait finalement incompétent pour ordonner que le dispositif d'évacuation soit modifié: impossible d'obliger la France à aller chercher dans les rues de Kaboul les familles dont le dossier de réunification avec des Afghans de France est en souffrance depuis des années.


Lors de l'audience, mardi, le ministère de l'Intérieur avait révélé un chiffre montrant l'ampleur de la mobilisation: des Afghans de France avaient appelé, à cette date, 120.000 fois le numéro de la cellule de crise du quai d'Orsay.


Mohammad Qassem Rahimie, interprète afghan auprès de la Cour nationale du droit d'asile, en faisait partie.


Avant la chute de Kaboul, ce Pachtoune de 52 ans avait demandé à sa femme et à son fils de fuir au Pakistan, où sa famille est désormais bloquée, car Islamabad ne délivre pas de visa pour gagner la France. Leur seule issue serait donc de repasser par Kaboul. Mais en repassant côté afghan, dit-il, "ils risquent de se faire tuer, si les talibans apprennent que je travaille pour la France". 


"La date butoir approche. J'ai tout essayé. A l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides, où il exerce également), avec d'autres interprètes, on a même écrit au directeur général. Pas de nouvelles." 


"Je rends service au gouvernement français. On nous doit ça. Ils pourraient au moins délivrer un laisser-passer depuis Islamabad!", s'étrangle Mohammad Qassem, Français depuis trois décennies, après avoir fui mineur l'Afghanistan en 1986.


Dans les dernières heures de l'opération, la France va encore tenter d'exfiltrer "plusieurs centaines" d'Afghans, a déclaré jeudi Emmanuel Macron. Ensuite? "Nous allons construire en lien avec nos alliés les voies et moyens, après le 31 août, d'assurer des opérations humanitaires", a promis le président.


"Il faut absolument trouver une solution pour continuer ce travail", convient Reza Jafari. 


"C'est quand la communauté internationale va se retirer que la répression talibane va vraiment commencer", prévient-il. Pour lui, "le combat" ne fait que débuter.

 


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
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  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir. 


« La France ne se définit ni par une race, ni par une religion », affirme Macron

Le président français Emmanuel Macron regarde avant d'accueillir le Premier ministre belge pour un déjeuner de travail au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron regarde avant d'accueillir le Premier ministre belge pour un déjeuner de travail au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • « La France est une patrie de volonté et de bravoure qui ne se définit ni par le sang, ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée », a déclaré le président de la République.
  • Près de 150 nationalités se côtoient au sein de la Légion étrangère, où les légionnaires sont commandés par des officiers français.

AUBAGNE, FRANCE : lors d'une cérémonie militaire commémorant la bataille de Camerone, à Aubagne, où est basé le commandement de la Légion étrangère, Emmanuel Macron a affirmé  mercredi que « la France ne se définit ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée ».

« La France est une patrie de volonté et de bravoure qui ne se définit ni par le sang, ni par une race, ni par une religion, ni par une identité figée », a déclaré le président de la République devant plusieurs dizaines de légionnaires réunis pour commémorer la bataille de Camerone, qui s'est déroulée le 30 avril 1863 au Mexique.

« La France se définit par une volonté chaque jour recommencée d'accomplir de grandes choses avec une poignée de notre terre dans la main. Un rêve d'universel, un idéal, cette solidarité, cette fidélité à la patrie », a poursuivi M. Macron, qui s'est déplacé à Aubagne (Bouches-du-Rhône) pour commémorer cet événement fondateur de la Légion étrangère, célébré chaque année par tous les régiments. 

M. Macron a prononcé ce discours après avoir reçu mardi des représentants d'institutions musulmanes qui ont dénoncé le « climat islamophobe ambiant » et demandé au président de la République des « actes concrets » pour protéger les musulmans, après le meurtre d'un fidèle dans une mosquée du Gard.

À Aubagne, le président a passé en revue les troupes de la Légion étrangère, la force combattante de l'armée de terre qui compte plus de 9 500 hommes.

Près de 150 nationalités se côtoient au sein de la Légion étrangère, où les légionnaires sont commandés par des officiers français.

L'hymne national a été joué et deux avions Rafale ont survolé la cérémonie à laquelle ont assisté les élus locaux et plusieurs centaines de spectateurs.

La cérémonie de Camerone, qui est une fête de la Légion, commémore une bataille survenue à Camerone, dans l'État de Veracruz, dans l'est du Mexique, au cours de laquelle 62 légionnaires français ont résisté à 2 000 soldats mexicains lors de l'expédition française au Mexique. 

Le président Macron a décrit la bataille menée par une « poignée de légionnaires assiégés par 2 000 ennemis » qui ont « tenu une position pendant 11 heures », saluant une « histoire de courage insensé ».

Chargés de protéger le passage d'un convoi de ravitaillement pour les troupes françaises assiégeant la ville de Puebla, les légionnaires retranchés dans une hacienda du village de Camaron de Tejeda avaient fait le serment de se battre jusqu'à la mort.

Après une journée d'affrontement, les derniers encore en état de combattre refusèrent de se rendre et chargèrent les Mexicains à la baïonnette.