Une délégation du Sénat américain qualifie le Hezbollah de «cancer qui se propage au Liban»

Une délégation du Congrès américain a rencontré mercredi le président libanais Michel Aoun. (@présidence LB)
Une délégation du Congrès américain a rencontré mercredi le président libanais Michel Aoun. (@présidence LB)
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Publié le Jeudi 02 septembre 2021

Une délégation du Sénat américain qualifie le Hezbollah de «cancer qui se propage au Liban»

  • ​​​​​​​Lors de sa visite, le sénateur Murphy prévient que tout membre du gouvernement impliqué dans des affaires de corruption sera passible de sanctions américaines
  • Ayant l’impression qu'un nouveau gouvernement sera formé à la fin de cette semaine, la délégation assure le président Aoun que Washington travaillera avec Beyrouth

BEYROUTH : Une délégation du Congrès américain dirigée par le sénateur Chris Murphy a rencontré Michel Aoun mercredi et a eu des mots durs envers le président libanais, avant de quitter le pays divisé en ayant l’impression qu'un nouveau gouvernement sera formé d'ici la fin de la semaine.

«Le Hezbollah est une organisation terroriste, il crée des destructions dans la région et il est comme un cancer qui se propage au Liban», a déclaré Murphy, président du sous-comité des relations étrangères du Sénat américain sur le Proche-Orient, l'Asie du Sud, l'Asie centrale et la lutte contre le terrorisme.

Malgré le mépris de Murphy pour le Hezbollah soutenu par l'Iran, il a assuré que les États-Unis ne tourneraient pas le dos au Liban alors qu'il tente de sortir d'un effondrement financier qui a commencé en 2019.

«Nous continuerons à soutenir le Liban », a-t-il affirmé. «La corruption est une attitude au sein du gouvernement libanais, et c'est inacceptable. Tout membre du gouvernement impliqué dans des affaires de corruption sera soumis à des sanctions américaines».

Le bureau des médias du président a révélé que la réunion avec la délégation américaine s'est concentrée sur «la situation au Liban et les futures étapes à suivre», alors qu'Aoun a déclaré aux Américains qu'il y avait «des progrès dans le processus de formation du gouvernement».

Lors d'une réunion avec plusieurs journalistes à l'aéroport avant le départ de la délégation américaine pour Israël, Murphy a annoncé que la délégation avait entendu de la part de tous les responsables libanais leur assurance qu'un nouveau gouvernement sera formé à la fin de cette semaine.

«La délégation du Congrès a assuré le président Aoun que Washington travaillera avec le nouveau gouvernement», a confié Murphy.

Le Liban est aux prises avec une crise économique profonde que la Banque mondiale a décrite comme l'une des crises les plus graves depuis le milieu du XIXe siècle.

La situation a paralysé les institutions militaires et les autres forces de sécurité. Le Liban est sans gouvernement stable depuis plus d'un an, même si trois personnalités différentes ont déjà été chargées de former un gouvernement.

Plus de 70% de la population libanaise est passée sous le seuil de pauvreté et la livre libanaise s'est effondrée, perdant plus de 90% de sa valeur sur le marché noir.

Il est également peu probable que la communauté internationale aide les institutions étatiques si un gouvernement national n'est pas formé.

Les pénuries de carburant que connaît le Liban depuis le début de l'été ont favorisé les ventes au marché noir et suscité des bagarres dans des stations-service.

«Il n'est pas nécessaire que le Liban dépende du carburant iranien, car tout carburant transporté à travers la Syrie est soumis à des sanctions», a averti Murphy.

«Le Hezbollah est une organisation qui prendra une partie de l'argent du pétrole, et ce pétrole ne résoudra certainement pas la crise du carburant au Liban».

Les tensions liées à la pénurie nationale de carburant se sont transformées en de violents affrontements avec des armes et des couteaux dans certaines régions, menaçant la coexistence civile.

Les prix de l'essence et du diesel ont aussi augmenté avec la suppression progressive des subventions, qui devrait être entièrement achevée d'ici la fin septembre.

Des descentes policières ont démasqué des entreprises accumulant des millions de tonnes de carburant subventionné à travers le pays, qui seront ensuite vendues à des prix plus élevés.

Le ministre de l'Énergie du gouvernement intérimaire, Raymond Ghajar, a déclaré au public mercredi: «La première cargaison de carburant irakien (30 millions de tonnes) arrivera au Liban au cours de la deuxième semaine de septembre et la deuxième cargaison (33 tonnes de pétrole) arrivera dans la troisième semaine de septembre».

Les cargaisons visent à augmenter la fourniture d'électricité d'aussi peu que 30 minutes par jour dans certaines régions jusqu’à plus de huit heures dans d’autres.

Le Liban a de plus signé un accord avec l'Irak pour acheter 1 million de tonnes de carburant à utiliser dans les centrales électriques.

Ghajar a ajouté : «Le Liban n'a reçu aucune demande d'importation de carburant d'Iran».

Mais le chef du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah, a déclaré auparavant qu'une troisième cargaison de carburant iranien était envoyée à Beyrouth.

Des sources proches du Premier ministre désigné Najib Mikati ont déclaré à Arab News : « Mikati a été rassuré par le Hezbollah que la cargaison iranienne ne causera de mal à personne».

Une rencontre a également eu lieu entre la délégation américaine et le commandant des Forces armées libanaises, le général Joseph Aoun. Elle s'est concentrée sur les moyens d'aider l'armée à maintenir la stabilité dans le pays.

Dans un discours prononcé en mars, le général Aoun a demandé à la classe politique au pouvoir au             Liban : «Où allons-nous ? Qu’avez-vous prévu de faire? Nous vous avons averti plus d'une fois du danger de la situation. Les Libanais ont faim et sont pauvres, et les soldats, comme le reste de la                             population, souffrent et ont faim, eux aussi».

Le général Aoun a en outre rejeté les critiques concernant l'acceptation de l'aide étrangère par l'armée et a répliqué : «Sans cette aide, la situation aurait été bien pire».

Selon un rapport publié par Washington, la délégation du Congrès au Liban a évoqué des questions liées à « la sécurité régionale et la démocratie».

Le groupe de sénateurs se rendra en Israël et en Cisjordanie après leur escale au Liban.

Il comprend les sénateurs Richard Blumenthal, Jon Ossoff et Chris Van Hollen.

Murphy et Ossoff partiront plus tard vers la Tunisie et la Grèce.

«Un nouveau leadership et des crises latentes parsèment le paysage de la Méditerranée en ce   moment», a souligné la délégation.     

 «Nous sommes impatients de parler directement avec les principaux acteurs de la région, en particulier le nouveau gouvernement israélien et les dirigeants palestiniens.  

 «Ce voyage nous permettra ainsi de discuter de la voie à suivre de manière à protéger la démocratie en Tunisie et aborder la crise économique et politique au Liban. Les États-Unis doivent être une force pour le bien au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, et nous souhaitons que ce voyage sera fructueux».

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com                                                                               


Syrie: six combattants pro-iraniens tués dans des frappes dans l'est

Un combattant des Forces démocratiques syriennes (FDS) monte la garde le long d'une route alors que d'autres se déploient pour imposer un couvre-feu dans la ville d'al-Busayrah, dans la province syrienne de Deir Ezzor (nord-est), le 4 septembre 2023, lors d'une visite guidée pour les médias organisée par les FDS. (AFP)
Un combattant des Forces démocratiques syriennes (FDS) monte la garde le long d'une route alors que d'autres se déploient pour imposer un couvre-feu dans la ville d'al-Busayrah, dans la province syrienne de Deir Ezzor (nord-est), le 4 septembre 2023, lors d'une visite guidée pour les médias organisée par les FDS. (AFP)
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  • Ces frappes sont intervenues alors que deux soldats syriens ont été blessés dans un raid israélien sur leurs positions plus à l'ouest, dans la même province de Deir Ezzor, selon le ministère syrien de la Défense
  • Selon l'OSDH, basée au Royaume-Uni et qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, les frappes ont visé trois positions de groupes alliés à Téhéran dans la région de Boukamal, près de la frontière avec l'Irak

BEYROUTH: Six combattants pro-iraniens ont été tués lors d'une frappe "probablement israélienne" qui a visé dans la nuit leurs positions dans une province de l'est de la Syrie, selon une ONG.

Ces frappes sont intervenues alors que deux soldats syriens ont été blessés dans un raid israélien sur leurs positions plus à l'ouest, dans la même province de Deir Ezzor, selon le ministère syrien de la Défense.

"Six combattants pro-iraniens ont été tués dans un raid probablement israélien" qui a visé trois positions de groupes alliés à Téhéran dans la région de Boukamal, près de la frontière avec l'Irak, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Selon l'OSDH, basée au Royaume-Uni et qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie, les frappes ont visé trois positions de groupes alliés à Téhéran dans la région de Boukamal, près de la frontière avec l'Irak.

Dans le même temps, le ministère de la Défense syrien a annoncé que deux soldats avaient été blessés dans un raid israélien qui a visé au cours de la nuit des positions de l'armée près de la ville de Deir Ezzor, un peu plus à l'ouest.

"L'ennemi israélien a mené des raids sur des positions de nos forces armées dans le périmètre de la ville de Deir Ezzor", a indiqué le ministère dans un communiqué. Il a fait état de "deux soldats blessés et quelques dégâts matériels".

L'armée syrienne ainsi que les groupes pro-iraniens qui combattent aux côtés du pouvoir de Bachar al-Assad depuis le début de la guerre en 2011 sont fortement déployés dans la région de Deir Ezzor.

Depuis 2011, Israël a mené des centaines de frappes aériennes sur le territoire syrien visant essentiellement les forces soutenues par l'Iran et le Hezbollah libanais, alliés de Damas et ennemis jurés de l'Etat israélien, ainsi que l'armée syrienne.

Mais l'armée israélienne observe généralement le plus grand mutisme sur les opérations qui lui sont attribuées en Syrie.

Le 14 septembre, deux soldats syriens avaient été tués dans un raid israélien contre leurs positions à Tartous, dans l'ouest du pays.

Les Etats-Unis, qui déploient des centaines de soldats en Syrie, ont également visé à plusieurs reprises les groupes pro-iraniens déployés à Deir Ezzor en riposte à des attaques les visant.

La guerre en Syrie, déclenchée en 2011 par la répression de manifestations pro-démocratie, a fait plus d'un demi-million de morts et déplacé plusieurs millions de personnes.


L’ambassadeur de Chypre fait ses adieux à l’Arabie saoudite

L’ambassadeur de Chypre fait ses adieux à l’Arabie saoudite. (Photo AN/Abdelaziz Alarefee)
L’ambassadeur de Chypre fait ses adieux à l’Arabie saoudite. (Photo AN/Abdelaziz Alarefee)
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  • L’ambassadeur déclare que les relations entre les deux pays se sont développées de manière exponentielle, malgré l’incidence de la pandémie de Covid-19, une situation qu’il qualifie de «difficile pour tout le monde»
  • «Pour nous, les diplomates, lorsque nous résidons dans des pays étrangers, nous en faisons notre maison; en partant, nous laissons une partie de notre cœur»

RIYAD: L’ambassadeur de Chypre en Arabie saoudite fait ses adieux au Royaume tout en évoquant les relations entre les deux pays pendant son séjour.

Stavros Avgoustides déclare à Arab News: «Je n’aime pas les adieux. Mon objectif est de retourner dans ce pays, peut-être à nouveau en tant que fonctionnaire, on ne sait jamais.»

M. Avgoustides est arrivé avec sa famille en août 2019 au début de sa mission.

Il indique: «Je n’avais jamais été en poste dans la région du Golfe auparavant. Pour nous, c’était une occasion de rêve.»

Constatant les similitudes entre les deux pays, notamment le «mode de vie», la «mentalité», la «culture» et les «traditions», il se sent très vite chez lui.

Il a œuvré à renforcer les relations bilatérales dans les secteurs de l’énergie, du tourisme et de l’économie numérique.

«Nos relations diplomatiques se sont développées au cours des cinq dernières années et ma mission était de renforcer les relations bilatérales entre les deux pays», précise-t-il.

«Et, bien sûr, nous nous sommes concentrés sur les visites officielles dans les deux pays.»

L’ambassadeur déclare que ces relations se sont développées de manière exponentielle, malgré l’incidence de la pandémie de Covid-19, une situation qu’il qualifie de «difficile pour tout le monde».

Il affirme: «Je profite de cette occasion pour saluer les efforts du royaume d’Arabie saoudite concernant la gestion de cette crise. Vous avez fourni les soins nécessaires aux habitants et aux étrangers vivant ici et contrôlé la propagation de manière exceptionnelle.»

Il est désormais temps de se tourner vers l’avenir. L’ambassadeur soutient: «Nous devons être pragmatiques dans nos relations. Nous devons évaluer dans quelles industries Chypre et l’Arabie saoudite pourraient apporter leur expertise et contribuer sur un pied d’égalité à cette relation.»

«Nous, diplomates et gouvernements, ne devrions pas travailler pour le présent, mais tracer la voie de l’avenir pour les générations futures. Les gens continueront de voir les réalisations des prochaines années pendant très longtemps.»

L'ambassadeur souligne la nécessité de poursuivre les efforts pour préserver les liens entre les deux nations et il évoque les partenariats stratégiques, les start-up et la coopération en matière d’infrastructure numérique qui ont contribué à développer une expertise mutuelle pour un monde numérique meilleur.

Il salue le travail de Deemah al-Yahya, secrétaire générale de l’Organisation de coopération numérique, pour ses efforts et son soutien dans le secteur.

Stavros Avgoustides estime que la coopération numérique fait partie de ses réalisations personnelles au cours de son mandat d’ambassadeur et il continuera à soutenir l’organisation.

Il déclare qu’une «relation de confiance» unit l’Arabie saoudite à Chypre.

Il soutient: «J’ai essayé de montrer le vrai visage de Chypre. Nous n’avons pas d’intentions cachées et nous voulons uniquement obtenir la confiance et l’amitié de l’Arabie saoudite – deux éléments importants qui m’ont facilité la tâche dans l’exercice de mes fonctions.»

L’ambassadeur fait part du soutien de Chypre à la candidature du Royaume pour accueillir l’Expo 2030. Il déclare: «Chypre figurait parmi les premiers pays au monde à exprimer leur ferme soutien à la candidature de l’Arabie saoudite pour accueillir l’Expo de Riyad.»

Il ajoute: «Nous sommes convaincus que vous accueillerez cet événement majeur. Cela nous donnera l'opportunité de promouvoir la région, de contribuer à sa prospérité, tout en présentant au monde les nombreuses réalisations de l'Arabie saoudite.»

M. Avgoustides affirme que les relations entre les peuples sont plus importantes à long terme que le commerce ou l’investissement, ajoutant que sa mission est de rapprocher les gens pour qu’ils comprennent la culture et le pays de chacun.

La coopération dans le domaine de l’éducation et la programmation de vols directs entre les deux pays ont contribué à atteindre cet objectif, précise-t-il.

Revenant sur ses plus beaux souvenirs dans le pays, il évoque le moment où il a présenté ses lettres de créance au Gardien des deux Saintes Mosquées, le roi Salmane.

Il affirme: «Je n’oublierai jamais cet honneur… c’était un moment spécial pour moi, car j’ai un profond respect pour ce dirigeant.»

L’ambassadeur estime que sa rencontre avec le prince héritier, Mohammed ben Salmane, est l’un des moments forts de sa carrière.

Il a également apprécié sa collaboration avec le ministère des Affaires étrangères et son ministre, le prince Faisal ben Farhane.

Stavros Avgoustides prendra ses fonctions comme nouvel ambassadeur en Grèce à la fin de sa mission.

Il déclare: «Je suis très honoré, mais pendant mon séjour en Grèce, je ne cesserai de me tourner vers l’Arabie saoudite. Je crois que je peux encore grandement contribuer à cette relation.

Nous avons tissé des amitiés ici et noué des relations étroites. Je ne dis jamais “au revoir”. Je dis juste “à bientôt”.»

«Pour nous, les diplomates, lorsque nous résidons dans des pays étrangers, nous en faisons notre maison. En partant, nous laissons une partie de notre cœur. Nous chérissons toujours les pays dans lesquels vous vivons.»

L’ambassadeur admet qu’«il allait manquer la période qui mène à 2030. C’est une période de progrès, de prospérité et de paix. Je ne souhaite que le meilleur aux dirigeants, au gouvernement et au peuple d’Arabie saoudite.»

Son message au prochain envoyé de Chypre en Arabie saoudite est le suivant: «Maintenez cet élan, rapprochez-vous du peuple saoudien, montrez le vrai visage de l’Arabie saoudite, coopérez avec le milieu des affaires et le gouvernement et faites preuve de créativité.»

«La diplomatie doit être créative pour ne pas être ennuyeuse et pouvoir porter ses fruits.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Battus, placés avec les morts: les témoignages glaçants d'ex-détenus syriens hospitalisés

Diab Serriya, partenaire fondateur de l'Association des détenus et des disparus de la prison de Sednaya (ADMSP), regarde un écran d'ordinateur affichant une page sur la prison hébergée par le site Internet d'Amnesty International, lors d'un entretien dans son bureau de Gaziantep, dans le sud-est de la Turquie, le 12 août 2022. (AFP).
Diab Serriya, partenaire fondateur de l'Association des détenus et des disparus de la prison de Sednaya (ADMSP), regarde un écran d'ordinateur affichant une page sur la prison hébergée par le site Internet d'Amnesty International, lors d'un entretien dans son bureau de Gaziantep, dans le sud-est de la Turquie, le 12 août 2022. (AFP).
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  • Les prisonniers malades recevaient rarement un traitement et étaient soumis à des "tortures brutales" de la part forces de sécurité, voire du personnel hospitalier
  • Les corps des prisonniers morts sous la torture ou du fait des conditions déplorables de détention étaient transférés dans cet hôpital où les causes de décès étaient maquillées

BEYROUTH: Des détenus syriens malades ont été maltraités, battus et parfois jetés avec les morts dans l'hôpital militaire de Damas où ils avaient été conduits, selon un rapport publié mardi et des témoignages recueillis par l'AFP.

Intitulé "Enterrés en silence", ce rapport de l'Association des détenus et des disparus de la prison de Sednaya (ADMSP) dresse un tableau glaçant du sort des prisonniers admis à l'hôpital militaire Techrine, dans la capitale syrienne.

Les prisonniers malades recevaient rarement un traitement et étaient soumis à des "tortures brutales" de la part forces de sécurité, voire du personnel hospitalier, selon ce rapport basé sur des entretiens avec 32 personnes, dont d'anciens détenus et des membres du corps médical.

Les corps des prisonniers morts sous la torture ou du fait des conditions déplorables de détention étaient transférés dans cet hôpital où les causes de décès étaient maquillées, avant d'être enterrés dans des "fosses communes" près de Damas, selon l'ADMSP.

"Les prisonniers avaient peur d'aller à l'hôpital car beaucoup d'entre eux ne revenaient pas", raconte à l'AFP Abou Hamza, 43 ans, un ancien détenu hospitalisé à trois reprises dans cet établissement.

"Si l'un de nous était en état de marcher, il était renvoyé en prison. Ceux qui étaient très malades étaient abandonnés à leur sort jusqu'à mourir dans la section de l'hôpital réservée aux prisonniers", ajoute Abou Hamza, détenu entre 2012 et 2019.

Depuis le début du soulèvement de 2011 en Syrie, plus de 100.000 personnes sont morts dans les prisons du régime, notamment sous la torture, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

Environ 30.000 personnes auraient été détenues depuis la révolte dans la tristement célèbre prison de Sednaya, près de Damas. Le rapport couvre la période entre 2011 et 2020 mais ses auteurs croient savoir que les exactions se poursuivent.

« Agoniser »

Les détenus malades étaient placés dans la prison de l'hôpital, où les corps des prisonniers décédés étaient également jetés. Parfois, "des détenus oscillaient entre la vie et la mort, avant qu'un policier les achève", selon l'ADMSP.

"Une fois, un détenu semblait agoniser (...), ils ne l'ont pas montré au médecin, ils l'ont placé parmi les corps et l'ont laissé mourir", raconte Abou Hamza.

Il a ensuite été forcé de transporter des heures durant, pieds nus et dans un froid glacial, les dépouilles numérotées des détenus, avant qu'un photographe ne vienne documenter les corps.

En 2013, un ex-photographe de la police militaire, dit "César", s'est enfui en possession de 55.000 photographies de corps torturés dans les prisons du régime et des hôpitaux militaires, comme celui de Techrine.

L'hôpital délivrait des certificats de décès, évoquant comme causes une crise cardiaque, une insuffisance rénale ou un AVC, et aucune autopsie n'était menée, selon le rapport.

L'ADSMP a également documenté "des actes de torture sauvage de détenus malades" par des policiers dans la prison de l'hôpital.

Certains prisonniers étaient également humiliés par le "personnel médical" et battus par des détenus de droit commun, sous le regard indifférent des agents de sécurité, note le rapport.

Parfois, les policiers ordonnaient à un prisonnier désigné responsable de la cellule de se débarrasser de détenus malades en les étranglant avec une serviette ou un chiffon, selon la même source.

« Politique délibérée »

"Techrine joue un rôle central dans les disparitions forcées, la dissimulation des tortures et la falsification des causes de décès, ce qui équivaut à des crimes de guerre", affirme le cofondateur de l'ADMSP, Diab Serriya.

"Ce qui se passe à Techrine et dans d'autres hôpitaux militaires est une politique délibérée", dénonce-t-il.

Plusieurs poursuites judiciaires ont été engagées en Europe contre le régime syrien, accusé d'avoir torturé des détenus et appliqué des condamnations à mort sans procès.

En Allemagne, un médecin des hôpitaux militaires, Alaa Moussa, est jugé à Francfort pour 18 cas de torture d'opposants et le meurtre par injection d'un détenu.

Mahmoud, 25 ans, arrêté alors qu'il n'avait que 16 ans, a été roué de coups par des détenus dans la prison de l'hôpital, sans qu'aucun agent de sécurité ne vienne le secourir.

"Ils m'ont mis à terre, m'ont marché dessus et m'ont fermé la bouche avec leurs mains jusqu'à ce que je (...) perde connaissance", raconte-t-il à l'AFP. "Je me suis réveillé au milieu des cadavres dans un coin de la cellule".

Deux corps qui gisaient sur l'adolescent ont roulé au sol et il a commencé à hurler de frayeur.

Cet ex-détenu, atteint de tuberculose, est rentré à Sednaya sans avoir été vu par un médecin, et a vécu dans la frayeur d'être ramené à Techrine. En prison, "mes camarades de cellule me cachaient dans les toilettes lors de la visite du médecin, pour qu'on ne m'emmène plus à l'hôpital".