La défense française étoffe ses troupes de cybercombattants

Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 09 septembre 2021

La défense française étoffe ses troupes de cybercombattants

  • «Le ministère des Armées recrutera 770 cyber-combattants en plus des 1 100 initialement prévus» pour atteindre 5 000 personnels en 2025
  • Pour les militaires, remplir ces ambitieux objectifs de recrutement sera un défi, alors que les cyber-spécialistes font cruellement défaut sur le marché de l'emploi

PARIS : Le ministère français des Armées augmente ses objectifs de recrutement dans la cyberdéfense et prévoit d'embaucher "770 cyber-combattants en plus des 1 100 initialement prévus" d'ici 2025, face à la multiplication et la gravité des cyberattaques, a annoncé mercredi la ministre Florence Parly.

Alors que la France dispose depuis 2017 d'un commandement militaire de cyberdéfense ("Comcyber"), la Loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025 prévoit un budget de 1,6 milliard d'euros pour la cyberdéfense et le recrutement de 1 100 cybercombattants supplémentaires pour atteindre un effectif de 4.000 personnes.

Or "compte tenu de la multiplication et de la gravité des cyberattaques, j'ai décidé d'intensifier les recrutements", a déclaré la ministre au Forum international de la cybersécurité de Lille (Nord), car "d'un +nouvel espace de conflictualité+, nous en sommes aujourd'hui à nous interroger sur l'existence d'une +Guerre froide dans le cyberespace+", où Russes et Chinois sont régulièrement accusés de prédation par les Occidentaux.

Ainsi, "le ministère des Armées recrutera 770 cyber-combattants en plus des 1 100 initialement prévus" pour atteindre 5 000 personnels en 2025 au sein des armées, de la Direction générale de l'armement (DGA) et du service de renseignement extérieur français DGSE, a-t-elle détaillé en rappelant l'ambition de la France de devenir "un champion de la cybersécurité".

Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde, ciblant différentes entreprises et administrations, dont un opérateur américain d'oléoducs, une entreprise de conditionnement de viande, le système informatique des services de santé irlandais ou une grande compagnie aérienne indienne.

Fin 2020, une gigantesque cyberattaque aux Etats-Unis a affecté les serveurs des e-mails de Microsoft et compromis le logiciel Orion de la firme américaine SolarWinds, utilisé pour la gestion et la supervision de réseaux informatiques de grandes entreprises ou d'administrations.

Plus récemment, la société informatique américaine Kaseya a été victime d'une cyberattaque géante au rançongiciel qui a affecté des centaines d'entreprises clientes aux quatre coins de la planète.

«Appui des opérations»

L'enjeu cyber revêt également une dimension militaire, a rappelé Mme Parly, en annonçant que la France comptait organiser en janvier un forum rassemblant les cyber commandeurs des 27 Etats-membres. "Le ministère des Armées a des missions et des enjeux (...) qui nécessitent que nous utilisions l'arme cyber en appui de nos opérations. Nos adversaires ne s'en privent pas, qu'ils s'agissent de puissances étatiques, de groupes terroristes ou de leurs soutiens". 

Sur le théâtre de l'opération Barkhane au Sahel, qui mobilise plus de 5 000 militaires français et doit être profondément redessinée ces prochains mois, "nous avons récemment constaté une augmentation des attaques", a notamment affirmé la ministre.

L'annonce de ces recrutements supplémentaires dans la cyberdéfense "démontre une prise de conscience de la vulnérabilité de plus en plus importante de nos sociétés" face au risque cyber "et du besoin d'y faire face et d'agir", a commenté auprès de l'AFP Aude Géry, chercheuse à l'Institut français de géopolitique. La France veut montrer "qu'elle est là, qu'elle a des moyens et qu'elle défendra ses intérêts stratégiques".

La question est maintenant de savoir où vont "aller les recrutements, vers le défensif, ou vers l'offensif", au risque dans ce dernier cas d'entretenir une certaine escalade dans la conflictualité numérique, selon l'experte.

Pour le ministère des Armées, remplir ces ambitieux objectifs de recrutement sera un défi, alors que les cyber-spécialistes font cruellement défaut sur le marché de l'emploi malgré les efforts pour ouvrir de nouvelles formations.

Les entreprises privées spécialisées sur ce créneau, qui sont sur un marché en croissance de 10% par an en moyenne, peinent à trouver les bras dont elles sont besoin malgré des conditions financières souvent plus avantageuses que le public.

Pour le Comcyber en tout cas, le recrutement n'a pas été un problème majeur "jusqu'à maintenant", grâce à l'attrait pour les missions au service de l'intérêt national, assurait mercredi le général Philippe de Montenon, le numéro 2 du Cyber, lors d'une table ronde organisée au Forum international de Lille.


Accord EU-USA: Bayrou juge que la France a été "un peu seule"

Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français, François Bayrou, s'adresse à la presse après une visite au siège de Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment d'argent du ministère des Finances, à Montreuil, près de Paris, le 31 juillet 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis
  • Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire"

PARIS: Le Premier ministre, François Bayrou, a jugé jeudi que la France avait été "un peu seule" dans la bataille commerciale face aux Etats-unis, en marge d'un déplacement dans les locaux de Tracfin, organisme de lutte contre la criminalité financière, à Montreuil (93).

Le chef du gouvernement, qui avait vivement critiqué lundi l'accord commercial conclu entre l'Union européenne et les Etats-Unis, déplorant une "soumission" de l'Europe, a estimé que ce n'était "pas la fin de l'histoire", et qu'il fallait "un processus encore pas totalement élucidé de ratification" de cet accord.

"Il y a à vérifier quelle est la portée exacte de ces accords, et les Etats auront d'une manière ou d'une autre leur mot à dire", a-t-il ajouté.

"Je sais que toutes les autorités françaises, et en particulier le président de la République (Emmanuel Macron), ont été ceux qui se sont battus le plus contre des concessions qu'on considérait comme excessives", a-t-il affirmé avant de s'interroger: "Est-ce que nous avons été un peu seuls? Oui".

"Est-ce qu'on a le sentiment qu'à l'intérieur de l'Union européenne, des forces politiques et économiques étaient plutôt sur une ligne de trouver des accommodements? Oui", a-t-il ajouté, en estimant que de son point de vue, "la voie pour l'Europe est une voie d'affirmation et de résistance quand il faut et de fierté le plus souvent possible".

La classe politique française a été unanime à dénoncer l'accord conclu entre le président américain, Donald Trump, et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui prévoit notamment une hausse de 15% des droits de douane sur les exportations européennes.

Le président Emmanuel Macron a déploré mercredi en Conseil des ministres que l'Union européenne n'ait pas été assez "crainte" dans ses négociations commerciales avec les Etats-Unis, affirmant que la France continuerait de faire montre "d'exigence et de fermeté" dans la suite des discussions.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
Short Url
  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
Short Url
  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.