Elections marocaines: les islamistes paient le prix de leur «ligne consensuelle»

Des membres du Parti de la justice et du développement (PJD) tiennent une conférence de presse dans la capitale Rabat pour annoncer la démission de son président Saad-Eddine El Othmani et de tous les membres de son secrétariat général, le 9 septembre 2021. (Photo, AFP)
Des membres du Parti de la justice et du développement (PJD) tiennent une conférence de presse dans la capitale Rabat pour annoncer la démission de son président Saad-Eddine El Othmani et de tous les membres de son secrétariat général, le 9 septembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 10 septembre 2021

Elections marocaines: les islamistes paient le prix de leur «ligne consensuelle»

  • Le PJD s'est écroulé, dégringolant de 125 sièges dans l'assemblée sortante à 12, selon des résultats provisoires
  • A la différence de l'Égypte et de la Tunisie où ils ont été écartés du pouvoir par des coups de force, le Maroc est le premier pays de la région où les islamistes sont battus dans les urnes

RABAT: Les islamistes au pouvoir au Maroc ont encaissé une déroute historique lors des élections générales, un séisme attribué à l'assouplissement de leur ligne politique depuis la révocation par le roi de leur ex-chef charismatique Abdelilah Benkirane, selon des analystes.

Le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste modéré) "a été sanctionné par sa ligne consensuelle sur les questions politiques, notable depuis l'éviction de son chef Abdelilah Benkirane", explique le politologue Ismaïl Hammoudi.

Le PJD s'est écroulé, dégringolant de 125 sièges dans l'assemblée sortante à 12, selon des résultats provisoires annoncés par le ministère de l'Intérieur jeudi, au lendemain du scrutin. 

Il a été très largement devancé par deux partis libéraux considérés comme proches du palais royal: le Rassemblement national des indépendants (RNI) de l'homme d'affaires Aziz Akhannouch arrivé en tête avec 97 sièges, devant le Parti Authenticité et Modernité (PAM, 82), sur un total de 395.

L'ampleur de la défaite des islamistes est d'autant plus inattendue que, malgré l'absence de sondages, médias et analystes jugeaient que le PJD jouerait encore les premières places.

«Ligne rouge»

Mais c'était sans compter avec les vives dissensions internes qui ont fissuré la cohésion du parti ces cinq dernières années.

Ces divisions se sont récemment cristallisées sur deux dossiers majeurs: la loi légalisant le cannabis thérapeutique – les députés du PJD ont été les seuls à voter contre – et la normalisation des relations avec Israël, une "ligne rouge" pour les islamistes.

Des désaccords qui ont même poussé l'influente aile religieuse du parti, le Mouvement de l'unicité et de la réforme (MUR), à "ne pas appeler ses membres à voter pour le PJD", note M. Hammoudi.

Depuis sa première participation aux législatives de 1997, le PJD avait poursuivi son ascension jusqu'à son arrivée au pouvoir en 2011 après les protestations du "Mouvement du 20 février" – version marocaine du Printemps arabe – qui réclamait la fin de "la corruption et du despotisme".

Aujourd'hui, à la différence de l'Égypte et de la Tunisie où ils ont été écartés du pouvoir par des coups de force, le Maroc est le premier pays de la région où les islamistes sont battus dans les urnes.

Si M. Benkirane s'est illustré par une forte présence médiatique et ses incessantes critiques contre "l'État profond" marocain, son parti n'a jamais vraiment été en mesure de gouverner pleinement.

Ainsi, après les législatives de 2016, il n'avait pas réussi à former une coalition gouvernementale en raison des desiderata d'Aziz Akhannouch, patron du RNI arrivé pourtant quatrième du scrutin.

Des tractations infructueuses avaient plongé le royaume dans une crise politique inédite pendant plusieurs mois avant que M. Benkirane ne soit démis de ses fonctions par le roi et remplacé par le numéro deux du PJD, Saad-Eddine El Othmani, personnalité plus consensuelle. 

"Le choix du compromis par M. Othmani a été considéré comme une compromission", résume le politologue Mustapha Sehimi. Cet épisode a fortement fragilisé les islamistes.

«PJD au tapis»

"L'alliance entre le Maroc et Israël et la perte de son leader charismatique (Abdelilah Benkirane) orchestrée en 2016 ont été apparemment fatales" à "un PJD au tapis", constate Pierre Vermeren, professeur d'histoire à l'Université Paris 1. 

"Des résultats (électoraux) optimaux pour le palais qui attendait cela depuis 2011", observe ce spécialiste du Maghreb.

À cette date, le Maroc avait adopté une nouvelle Constitution accordant de larges prérogatives au Parlement et au gouvernement.

Toutefois, les décisions et orientations dans des secteurs clés restent l'apanage du roi Mohammed VI.

"Une nouvelle séquence s'ouvre avec des partis qui ne contestent pas les fondements du pouvoir et ont une proximité avec le roi", opine M. Sehimi.  

Première conséquence, toute la direction du PJD a démissionné jeudi et a appelé à un congrès extraordinaire "dans les plus brefs délais".

"La réalité est que notre parti était une grande formation avec une petite direction au cours de la période récente", a admis une dirigeante du parti, Amina Maelainine, sur sa page Facebook.

Avant l'annonce des résultats provisoires, les islamistes ont fait état de "graves irrégularités", dont "la distribution obscène d'argent" à proximité de bureaux de vote. 

Le scrutin, marqué par un taux de participation en forte hausse (50,35%), s'est déroulé "dans des circonstances normales", a répondu le ministre de l'Intérieur Abdelouafi Laftit, hormis "des cas isolés". 


Oman et le Liban appellent à un retrait total d’Israël et exhortent à la fin des attaques

Joseph Aoun et le sultan Haitham bin Tariq. (Fourni)
Joseph Aoun et le sultan Haitham bin Tariq. (Fourni)
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  • Joseph Aoun et le sultan Haitham ben Tariq lancent un appel conjoint pour un arrêt immédiat des attaques israéliennes sur le territoire libanais
  • Réaffirmation de la position arabe unifiée en faveur de la fin de l’occupation israélienne et de l’établissement d’un État palestinien indépendant sur la base des frontières de 1967

​​​​​​BEYROUTH : Le président libanais Joseph Aoun et son homologue omanais, le sultan Haitham ben Tariq, ont lancé mercredi un appel conjoint pour un arrêt immédiat des attaques israéliennes sur le territoire libanais et un retrait total de toutes les terres arabes occupées, avertissant que la poursuite des violations constitue une menace directe pour la stabilité régionale.

La déclaration a été faite lors d’un sommet de haut niveau à Mascate, où les deux dirigeants ont exprimé leur « profonde préoccupation face à l’agression israélienne en cours » et qualifié l’occupation de « violation flagrante » de la Résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU ainsi que d’autres résolutions internationales.

Les deux parties ont également exprimé leur soutien aux efforts internationaux visant à apaiser les tensions, stabiliser la situation sur le terrain, faciliter le retour des personnes déplacées et faire progresser la reconstruction post-conflit.

Aoun conduisait une délégation ministérielle libanaise à Oman, comprenant les ministres des affaires étrangères, de l’intérieur, de la défense, de la santé et de l’agriculture, pour des discussions avec des responsables omanais.

La déclaration commune a mis l'accent sur le renforcement des relations bilatérales et l'élargissement de la coopération dans des secteurs clés tels que la politique, l'économie, l'investissement, le secteur bancaire, le tourisme, les transports et la logistique.

Les deux parties ont appelé à engager rapidement les préparatifs pour tenir la première session du Comité mixte omano-libanais, coprésidé par les ministres des affaires étrangères à Mascate, et à poursuivre de nouveaux accords et mémorandums d’entente destinés à renforcer la collaboration dans le commerce, la culture et la science. La déclaration a également souligné la nécessité de dynamiser la participation du secteur privé dans les opportunités de développement partagé.

La partie omanaise a réaffirmé son plein soutien à la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale du Liban, ainsi qu’au renforcement des institutions étatiques libanaises, en particulier l’armée et les forces de sécurité légitimes, et à l’appui apporté au pays dans ses réformes économiques, financières et administratives.

Les deux parties ont réaffirmé la position arabe unifiée appelant à mettre fin à l’occupation israélienne et à établir un État palestinien indépendant sur la base des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale. Elles ont également souligné l’importance de renforcer la solidarité arabe, de respecter la souveraineté des États et de promouvoir les principes de bon voisinage et de droit international.

La visite officielle d’Aoun à Oman s’inscrivait dans le rôle établi de Mascate en tant que médiateur régional et international. Lors de ses rencontres, Aoun a salué le statut diplomatique et l’approche du Sultanat, la qualifiant de « sage et responsable ».

Il a salué la politique étrangère d’Oman, fondée sur le dialogue, la médiation, l’équilibre et le bon voisinage, estimant qu’elle avait conféré au Sultanat « un statut distingué et un rôle pivot dans la promotion de la stabilité et la résolution des conflits par des moyens pacifiques ».

Aoun a déclaré qu’au Liban, « nous tenons cette approche sage en haute estime et accordons une grande valeur au soutien constant du Sultanat envers le Liban dans divers forums internationaux, ainsi qu’à son appui face aux défis qui se dressent devant nous ».

Pour sa part, le sultan Haitham ben Tariq a réaffirmé l’engagement continu d’Oman envers la stabilité du Liban et son suivi attentif des développements récents dans le pays.

Il a souligné la profondeur des relations entre les deux pays et l’importance de renforcer la coopération et la coordination bilatérales. Le sultan a également salué les contributions positives de la communauté libanaise à Oman.

En marge de la visite, le ministre libanais de l’intérieur Ahmed Al-Hajjar a tenu une réunion avec son homologue omanais, Hamoud ben Faisal Al-Busaidi, au palais Al-Alam à Mascate. Ils ont souligné le renforcement de la coopération conjointe, en particulier dans les domaines de la sécurité et du maintien de l’ordre.

Selon une déclaration conjointe, les discussions ont également porté sur les efforts du Liban pour consolider la sécurité interne et maintenir la stabilité.

Ont participé aux discussions élargies, côté omanais : Al-Busaidi ; Shihab ben Tariq Al-Saïd, vice-premier ministre chargé des affaires de défense ; Badr ben Hamad Al-Busaidi, ministre des affaires étrangères ; Hamad ben Saïd Al-Aufi, chef du cabinet privé ; Mahad ben Saïd Ba’owain, ministre du travail et chef de la mission d’honneur ; Saoud ben Hamoud Al-Habsi, ministre de l'Agriculture, de la Pêche et des Ressources hydriques ; et Hilal ben Ali Al-Sabti, ministre de la santé.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le chef de la diplomatie libanaise décline une invitation de l'Iran

Le ministre libanais des Affaires étrangères, Youssef Rajji, s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien au siège du ministère des Affaires étrangères au Caire. (AFP)
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Youssef Rajji, s'exprime lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue égyptien au siège du ministère des Affaires étrangères au Caire. (AFP)
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  • Le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Raggi a refusé une invitation à se rendre en Iran, évoquant des conditions inappropriées, et a proposé une rencontre dans un pays tiers neutre
  • Ce refus intervient sur fond de pressions américaines pour désarmer le Hezbollah, soutenu par l'Iran, alors que Beyrouth insiste sur la non-ingérence dans ses affaires internes

BEYROUTH: Le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Raggi a décliné mercredi une invitation de son homologue à se rendre en Iran, qui soutient le Hezbollah islamiste, et proposé une rencontre dans un pays tiers.

Le gouvernement libanais est soumis à une intense pression des Etats-Unis pour désarmer le Hezbollah, affaibli par une guerre avec Israël, alors que l'Iran a affiché son opposition à cette mesure.

Début décembre, le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi avait invité M. Raggi à se rendre à Téhéran pour évoquer "les relations bilatérales" ainsi que les "développements régionaux et internationaux", selon le ministère iranien des Affaires étrangères.

En réponse à M. Araghchi, "j'ai déclaré que je ne pouvais pas accepter son invitation à me rendre à Téhéran dans les circonstances actuelles", a annoncé mercredi M. Raggi sur X.

"Cela ne signifie pas un refus d'engager le dialogue, mais plutôt que les conditions ne sont pas propices à cette visite", a-t-il ajouté.

Il a proposé à son homologue de s'entendre pour se rencontrer "dans un pays tiers neutre", soulignant que les relations entre le Liban et l'Iran devaient être basées sur le principe de "non ingérence dans les affaires internes" de chaque pays.

L'Iran arme et finance le puissant Hezbollah, qu'une guerre a opposé à Israël d'octobre 2023 à novembre 2024.

En août, le Liban avait signifié à un haut responsable iranien, Ali Larijani, en visite à Beyrouth, son refus catégorique de "toute ingérence" dans ses affaires internes, après des critiques par Téhéran de la décision du gouvernement de désarmer le Hezbollah.

Téhéran dénonce régulièrement les frappes israéliennes qui le visent. Les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique, avaient appelé en novembre à "venger" l'assassinat par Israël au Liban du chef militaire du Hezbollah, Haitham Ali Tabatabai.


L'Arabie saoudite et l'Iran réaffirment leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin

Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
Une réunion organisée par Téhéran a rassemblé mardi des responsables saoudiens, iraniens et chinois. (SPA)
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  • Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a participé mardi à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint

RIYAD : L’Arabie saoudite et l’Iran ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin lors d’une réunion tenue mardi à Téhéran.

Le vice-ministre saoudien des Affaires étrangères, Waleed Al-Khureiji, a assisté à la troisième réunion du Comité tripartite conjoint entre l’Arabie saoudite, l’Iran et la Chine.

Les parties saoudienne et iranienne « ont réaffirmé leur engagement à mettre en œuvre l’Accord de Pékin dans son intégralité, ainsi que leur volonté de renforcer les relations de bon voisinage entre leurs pays, dans le respect de la Charte des Nations unies, de la Charte de l’Organisation de la coopération islamique et du droit international », a indiqué l’Agence de presse saoudienne dans un communiqué.

L’Arabie saoudite et l’Iran ont également salué le rôle positif continu joué par la Chine ainsi que son soutien constant à la mise en œuvre de l’Accord de Pékin.

De son côté, la Chine a réaffirmé sa disponibilité à poursuivre son soutien et à encourager les démarches entreprises par le Royaume et l’Iran pour développer leurs relations dans divers domaines.

Les trois pays ont salué les progrès continus dans les relations saoudo-iraniennes et les perspectives qu’ils offrent à tous les niveaux, a ajouté la SPA.

Les trois pays ont également appelé à une cessation immédiate des agressions israéliennes en Palestine, au Liban et en Syrie.

Ils ont en outre condamné tout acte portant atteinte à l’intégrité territoriale de l’Iran.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com