Au procès du 13-Novembre, l'enquête vue côté belge

Ce croquis d'audience réalisé le 14 septembre 2021 montre (de gauche à droite) les coaccusés Mohamed Amri et Mohamed Abrini ainsi que Salah Abdeslam, le principal suspect des attentats de Paris du 13 novembre 2015. (Photo, AFP)
Ce croquis d'audience réalisé le 14 septembre 2021 montre (de gauche à droite) les coaccusés Mohamed Amri et Mohamed Abrini ainsi que Salah Abdeslam, le principal suspect des attentats de Paris du 13 novembre 2015. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 15 septembre 2021

Au procès du 13-Novembre, l'enquête vue côté belge

  • «Tous les policiers» belges, même ceux «qui faisaient de la TVA», sont mobilisés pour "remonter la piste" des commandos, partis de Belgique la veille des attaques, et «traquer» les survivants
  • Salah Abdeslam qui a fui à Bruxelles sera lui retrouvé après quatre mois de cavale, le 18 mars 2016. Quatre jours plus tard, la même cellule jihadiste frappe le métro et l'aéroport de Bruxelles et fait 32 morts

PARIS : "On ne s'est pas tourné les pouces": une juge antiterroriste bruxelloise a détaillé par le menu et défendu la "longue enquête" côté belge sur les attentats du 13 novembre 2015, mardi devant la cour d'assises spéciale de Paris.  

Toute de noir vêtue, fines lunettes et collier Chanel autour du cou, la juge Isabelle Panou témoigne à visage découvert, évoquant avec un débit ultra rapide et sans pratiquement consulter le volumineux cahier de notes posé devant elle, un dossier "exceptionnel". 

Cette magistrate d'expérience en est saisie "le 14 novembre 2015 vers 3H00 du matin", quelques heures seulement après les attaques qui ont fait 130 morts et des centaines de blessés à Paris et Saint-Denis. 

Un "GSM" (téléphone portable, NDLR) trouvé dans une poubelle près du Bataclan, un véhicule immatriculé en Belgique loué par Salah Abdeslam, résidant bruxellois et aujourd'hui seul membre encore en vie des commandos: les premiers éléments pointent vers la Belgique, rappelle la juge Panou.

Une équipe commune d'enquête franco-belge est immédiatement mise sur pied: "on envoyait les dossiers par camionnettes entières", se souvient la magistrate, saluant une "collaboration incroyable" entre les autorités des deux pays. 

"Tous les policiers" belges, même ceux "qui faisaient de la TVA", sont mobilisés pour "remonter la piste" des commandos, partis de Belgique la veille des attaques, et "traquer" les survivants, retrace Isabelle Panou. 

Un homme est rapidement identifié comme l'un des tueurs des terrasses de cafés à Paris, Abdelhamid Abaaoud, et "c'était excessivement une mauvaise nouvelle", estime la juge. 

«Je l'ai traqué»

Si elle ne l'a "jamais vu", le nom de cette figure du jihadisme francophone recherchée par les services occidentaux ne lui est pas inconnu: il est accusé d'avoir coordonné à distance la cellule jihadiste de Verviers (Belgique), démantelée in extremis début 2015 par les autorités belges averties d'un projet d'attentat imminent, un dossier qu'elle a elle-même instruit.

"Je l'ai traqué", il n'y a "pas une personne, pas un endroit qui n'a pas été investigué" pour le retrouver, assure la magistrate belge. 

"Quand on dit +qu'est-ce qu'ont fait les Belges pour trouver Abaaoud ?+ On ne s'est pas tourné les pouces", se défend-elle. 

Abdelhamid Abaaoud sera tué le 18 novembre 2015 lors d'un assaut policier, dans l'immeuble de Saint-Denis où il s'était retranché avec un complice. 

Salah Abdeslam qui a fui à Bruxelles sera lui retrouvé après quatre mois de cavale, le 18 mars 2016. Quatre jours plus tard, la même cellule jihadiste frappe le métro et l'aéroport de Bruxelles et fait 32 morts. 

"Je ne suis saisie que le 14 novembre 2015. J'ai appris le nom d'Abdeslam ce jour-là", répond vigoureusement la témoin à des questions sur d'éventuels "manquements" des autorités belges. 

Le dossier des attentats de Paris est "difficile, ne nous mentons pas" et ne se réduit pas à une "enquête franco-belge", elle a nécessité de "complexes" investigations internationales et de "travailler de manière artisanale", estime la juge. 

La majorité des hommes jugés par la cour d'assises spéciale de Paris résidaient à Bruxelles et vivaient dans un milieu "où tout le monde se connaît", mais "fermé", relève-t-elle encore.

"C'est difficile de travailler sur un tissu familial, social et économique à ce point fermé. Et c'est évidemment pas facile de dénoncer un cousin, un ami", dit-elle.

Dans le box, des accusés croisent les bras, la tête baissée. Les non francophones ont abandonné les écouteurs des traducteurs après plus de cinq heures d'exposé. 

"Il faut m'arrêter sinon je parle trop", convient la juge Isabelle Panou, s'attirant quelques rires sur les bancs des parties civiles et des avocats. 

"Je sais que j'ai été longue, mais l'ampleur des investigations méritait" ce long exposé, assure la témoin, qui pourra être rappelée à la barre après les interrogatoires des accusés, prévus en 2022. 

Avant de suspendre l'audience en début de soirée, le président de la cour Jean-Louis Périès a indiqué aux accusés qu'ils pourraient faire une déclaration spontanée mercredi midi à la reprise des débats. 


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».