Etats-Unis, Australie et Royaume-Uni scellent un pacte de sécurité, colère de Paris

Le destroyer lance-missiles de classe Arleigh Burke USS Barry (DDG 52) lance un missile de croisière Tomahawk en 2011en mer Méditerranée. Le Premier ministre australien Scott Morrison a annoncé le 16 septembre 2021 que le pays allait acquérir des missiles  américains à longue portée Tomahawk. JONATHAN SUNDERMAN / US NAVY / AFP
Le destroyer lance-missiles de classe Arleigh Burke USS Barry (DDG 52) lance un missile de croisière Tomahawk en 2011en mer Méditerranée. Le Premier ministre australien Scott Morrison a annoncé le 16 septembre 2021 que le pays allait acquérir des missiles américains à longue portée Tomahawk. JONATHAN SUNDERMAN / US NAVY / AFP
Le président américain Joe Biden a annoncé la création de la nouvelle alliance stratégique depuis l'East Room, à la Maison Blanche. (Photo, AFP)
Le président américain Joe Biden a annoncé la création de la nouvelle alliance stratégique depuis l'East Room, à la Maison Blanche. (Photo, AFP)
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken en compagnie de son homologue australienne Marise Payne lors d'une conférence de presse commune hier au Département d'Etat. (Photo, AFP)
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken en compagnie de son homologue australienne Marise Payne lors d'une conférence de presse commune hier au Département d'Etat. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 16 septembre 2021

Etats-Unis, Australie et Royaume-Uni scellent un pacte de sécurité, colère de Paris

  • Les Etats-Unis ont annoncé mercredi avec l'Australie et le Royaume-Uni un vaste partenariat de sécurité dans la zone indo-pacifique, comprenant notamment la livraison de sous-marins nucléaires à l'Australie
  • Conséquence immédiate de cette annonce spectaculaire: l'Australie a rompu un gigantesque contrat passé auprès de la France pour la livraison de sous-marins conventionnels, provoquant la colère de Paris

WASHINGTON : Les Etats-Unis, qui cherchent à renforcer tous azimuts leurs alliances face à la Chine, ont annoncé mercredi avec l'Australie et le Royaume-Uni un vaste partenariat de sécurité dans la zone indo-pacifique, comprenant notamment la livraison de sous-marins à propulsion nucléaire à Canberra.

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Une photo d'archive prise le 2 mai 2018 montre le président français Emmanuel Macron (2ème gauche) et le Premier ministre australien Malcolm Turnbull (2ème droite) debout sur le pont du HMAS Waller, un sous-marin de classe Collins exploité par la Royal Australian Navy, à Garden Island à Sydney. L'Australie vient d’annuler un accord de 50 milliards de dollars avec la France pour construire des sous-marins à propulsion conventionnelle (diesel-électrique), le remplaçant par des sous-marins à propulsion nucléaire utilisant la technologie américaine et britannique. (Photo, AFP)

Conséquence immédiate de cette annonce spectaculaire: l'Australie a rompu un gigantesque contrat passé auprès de la France pour la livraison de sous-marins conventionnels, provoquant la colère de Paris. Réagissant quelques instants après l'annonce, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a déclaré que Joe Biden avait "pris une décision "brutale", à la "Trump".

"La première grande initiative de (ce nouveau pacte appelé) «AUKUS» sera de livrer une flotte de sous-marins à propulsion nucléaire à l'Australie", a dit le Premier ministre australien Scott Morrison, apparaissant en visioconférence, ainsi que son homologue britannique Boris Johnson, lors d'un événement présidé par Joe Biden à la Maison Blanche.

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Le Premier ministre australien Scott Morrison a également annoncé l'achat de missiles américains Tomahawk. Sur cette photo, un missile de croisière Tomahawk lancé à partir d'un navire de l'US Navy. (Photo, AFP)

La France, qui voit un contrat de 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d'euros) échapper à son industrie navale, a aussitôt fustigé une "décision regrettable" et "contraire à la lettre et à l'esprit de la coopération qui prévalait entre la France et l'Australie", selon un communiqué conjoint des ministères de la Défense et des Affaires étrangères.

Et il n'est pas sûr que Paris se console avec les propos conciliants de Joe Biden, qui a assuré mercredi que les Etats-Unis voulaient "travailler étroitement avec la France" dans cette zone très stratégique. Paris "est un partenaire clé" des Etats-Unis, a-t-il encore dit.

Sous-marins: Paris fustige Canberra et Washington

La France a fustigé Canberra et Washington jeudi, dénonçant un "coup dans le dos" australien et une décision "brutale" de Joe Biden après l'annonce d'un partenariat stratégique entre l'Australie, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne qui a conduit à la rupture d'un gigantesque contrat de fourniture de sous-marins français à l'Australie.

"C'est vraiment, en bon français, un coup dans le dos", s'est indigné le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian sur la radio France Info, se disant "en colère, avec beaucoup d'amertume".

"Nous avions établi avec l'Australie une relations de confiance. Cette confiance est trahie", a lancé Jean-Yves Le Drian, qui avait conclu le "contrat du siècle" sur les sous-marins lorsqu'il était ministre de la Défense.

Au même moment, la ministre des Armées Florence Parly déplorait sur RFI "une très mauvaise nouvelle pour le respect de la parole donnée" et une décision "grave" en matière de politique internationale.

Les deux ministres français n'ont pas non plus mâché leurs mots vis-à-vis du président américain Joe Biden, accusé de piétiner ses alliés. 

"Cette décision unlilatérale, brutale, imprévisible ressemble beaucoup à ce que faisait Monsieur Trump", l'ancien président américain, a déclaré M. Le Drian.

"On a appris brutalement par une déclaration du président Biden que voilà, le contrat qui était passé entre la France et les Australiens s'arrête, et puis les Etats-Unis vont proposer une offre nucléaire, dont on ne connaît pas le contenu, aux Australiens", a pointé Jean-Yves Le Drian.

"Cela ne se fait pas entre alliés (..) Nous parlions de tout cela avec les Etats-Unis il y a peu de temps et là voilà cette rupture. C'est assez insupportable", a-t-il martelé.

"Nous sommes lucides sur la manière dont les Etats-Unis considèrent leurs alliés et leurs partenaires", a pour sa part estimé Mme Parly.

Interrogée sur la question d'éventuelles compensations, Mme Parly a répondu: "nous allons étudier toutes les voies" et tenter de "limiter le plus possibles les conséquences pour Naval Group".

"Il va falloir des clarifications. Nous avons des contrats. Il faut que les Australiens nous disent comment ils s'en sortent", a renchéri le chef de la diplomatie française, en réclamant des "explications" à l'Australie comme à Washington.

"Le Royaume-Uni, l'Australie et les Etats-Unis vont être liés encore plus étroitement, ce qui reflète le degré de confiance entre nous et la profondeur de notre amitié", a déclaré Boris Johnson, qui engrange là un succès diplomatique certain dans sa stratégie pour éviter l'isolement international après le Brexit."

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Un "stock" de Tomahawk dans un sous-marin de l'US Navy, autre vecteur de lancement du missile de croisière. (Photo, AFP)

Sur la base de notre histoire commune de démocraties maritimes, nous nous engageons dans une ambition commune pour soutenir l'Australie dans l'acquisition de sous-marins à propulsion nucléaire", ont fait savoir les trois partenaires dans un communiqué commun, qui précise qu'il s'agit bien de propulsion, et non d'armement.

"Le seul pays avec lequel les Etats-Unis ont jamais partagé ce type de technologie de propulsion nucléaire est la Grande-Bretagne" à partir de 1958, avait indiqué plus tôt un haut responsable de la Maison Blanche. "C'est une décision fondamentale, fondamentale. Cela va lier l'Australie, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne pour des générations."

Selon ce haut responsable, le pacte "AUKUS" prévoit aussi une collaboration des trois pays en matière de cyberdéfense, d'intelligence artificielle et de technologies quantiques.

Sous-marins: Londres assure ne pas vouloir «contrarier» la France

Le Royaume-Uni a assuré jeudi ne pas vouloir "contrarier" Paris en scellant avec les Etats-Unis et l'Australie un vaste pacte de sécurité dans la zone indo-pacifique qui a conduit à la rupture d'un contrat de fourniture de sous-marins français à Canberra.
"Nous ne sommes pas partis à la chasse aux opportunités. Fondamentalement, les Australiens ont pris la décision de vouloir une capacité différente", a déclaré le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, sur la chaîne télévisée Sky News. 
"Nous n'avons pas l'intention de faire quoi que ce soit qui puisse contrarier les Français", a-t-il poursuivi. "Les Français comptent parmi nos plus proches alliés militaires en Europe, nous sommes des forces assez importantes et comparables et nous faisons des choses ensemble", notamment dans la lutte contre le terrorisme en Afrique de l'Ouest. 

Selon Ben Wallace, "il ne s'agit pas d'envoyer un message à la Chine" avec ce nouveau partenariat. "Il s'agit de l'Australie qui cherche une nouvelle capacité, parce qu'elle a jugé que son programme d'acquisition actuel pour des sous-marins diesel-électriques ne lui donnerait pas la portée stratégique ou le côté indétectable nécessaire pour avoir un effet dissuasif", a-t-il expliqué sur Times Radio.

La Nouvelle-Zélande, qui interdit ses eaux à tout navire à propulsion nucléaire depuis 1985, a annoncé que les futurs sous-marins de son voisin et allié australien ne seraient pas les bienvenus chez elle.

La Chine n'a pas été mentionnée dans le communiqué conjoint des dirigeants australien, américain et britannique, qui évoque la "paix et la stabilité dans la région indo-pacifique". Mais il ne fait aucun doute que la nouvelle alliance vise d'abord à faire face aux ambitions régionales de Pékin.

Joe Biden répète depuis son élection qu'il entend se confronter à la Chine, comme son prédécesseur Donald Trump, mais de manière très différente, sans s'enfermer dans un face-à-face.

Mercredi, il a ainsi dit vouloir "investir dans notre plus grande source de force, nos alliances" et vouloir "les mettre à jour pour mieux faire face aux menaces d'aujourd'hui et de demain".

Sous-marins: le Parlement s'interroge sur la relation entre Paris et les pays anglo-saxons

La résiliation par l'Australie d'un gigantesque contrat de livraison de sous-marins français, conséquence d'un partenariat stratégique conclu entre Canberra, Washington et Londres "interroge" sur les liens entre Paris et ses alliés anglo-saxons et aura des "conséquences lourdes", ont fustigé députés et sénateurs jeudi.

Après la décision par l'Australie de rompre ce mirifique contrat de plusieurs dizaines de milliards de dollars, "nous allons devoir nous interroger sur l’attitude récurrente de certains de nos alliés, qui se comportent plus comme des adversaires que comme des concurrents loyaux", a déclaré Christian Cambon, le président LR de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat.

"La décision brutale (...) est très préoccupante, et nous interroge sur la position de nos alliés australiens, américains et britanniques. Ce véritable coup de Trafalgar doit être pris très au sérieux", a souligné Françoise Dumas, présidente LREM de la commission de la Défense et des Forces armées de l'Assemblée nationale, dans une déclaration transmise à l'AFP. 

Après l'achat par la Suisse d'avions américains F35 ou le retrait américain d'Afghanistan "sans concertation avec les alliés de l’Otan", ce nouvel événement "doit conduire à évaluer la nature exacte de la relation actuelle entre la France et son allié historique", a complété dans un communiqué la commission sénatoriale.

Les conditions de l'annonce, d'abord éventée par la presse, ont également considérablement déplu aux sénateurs qui fustigent "une attitude cavalière" de Canberra, en faisant mine de s'interroger sur l'avenir du partenariat entre la France "qui essuie un camouflet brutal" et l'Australie. 

"Nous devrons tirer toutes les conséquences de cette décision concernant notre partenariat avec l'Australie et pour la région dans son ensemble", a souligné Mme Dumas.  

Sur le volet géostratégique, le Sénat s'inquiète des "conséquences globales" du choix australien avec la vente à un pays non doté de l'arme nucléaire de sous-marins d'attaque à propulsion nucléaire. 

Cela "n'a pas de précédent": "Les Etats-Unis et le Royaume-Uni changent les règles du jeu", observent les sénateurs français alors que les tensions avec la Chine s'accroissent dans cette partie du monde.

Députés et sénateurs s'inquiètent en outre des conséquences sociales et économiques pour Naval group, l'ex-titulaire du contrat, et pour la sous-traitance.

A l'Assemblée, une mission d'information sur les "enjeux de la défense en indo-Pacifique" doit rendre ses conclusions en novembre prochain. 

"Il est temps de cesser de se bercer d'illusion, de refuser la caporalisation, de quitter l'Otan et d'expulser de France le Centre d'excellence Otan pour l'espace que les Etats-Unis veulent installer à Toulouse", a tonné le député et chef de file LFI, Jean-Luc Mélenchon.

Le «contrat du siècle» pour la France torpillé

Le président américain réunit d'ailleurs le 24 septembre à Washington les Premiers ministres australien, indien et japonais pour relancer un format diplomatique, le "Quad", qui végétait depuis plusieurs années.

Quant à M. Morrisson, il a affirmé jeudi, après l'annonce du pacte Aukus, qu'il lançait une "invitation ouverte" au dialogue au président chinois Xi Jinping.

Mais l'annonce de mercredi, malgré les précautions de langage de Joe Biden, risque bel et bien de jeter un coup de froid sur une autre alliance, avec la France, puisqu'elle a torpillé ce qui était parfois qualifié de "contrat du siècle" pour l'industrie de défense française.

Le français Naval Group avait été sélectionné en 2016 par Canberra pour fournir 12 sous-marins à propulsion conventionnelle (non nucléaire) dérivés des futurs sous-marins nucléaires français Barracuda. D'un montant de 50 milliards de dollars australiens (31 milliards d'euros) à la signature, la valeur de ce contrat est estimé actuellement à 90 milliards de dollars australiens en raison de dépassement de coûts et d'effets de change.

"La décision que nous avons prise de ne pas continuer avec les sous-marins de classe Attack et de prendre un autre chemin n'est pas un changement d'avis, c'est un changement de besoin", a expliqué jeudi le Premier ministre australien.

Contrat de sous-marins résilié par l'Australie: «déception modérée» de la CGT

La CGT de Naval Group Cherbourg a fait état jeudi d'une "déception modérée" après la résiliation par l'Australie d'un gigantesque contrat de livraison de sous-marins conventionnels, estimant que "le risque était connu". 
"C'est une déception modérée parce qu'on avait un enthousiasme modéré lors de la signature du contrat. Le risque était connu", a déclaré Vincent Hurel, secrétaire général de la CGT Naval Group à Cherbourg.
"On attendait la mise en œuvre. Tout ne roulait pas parfaitement", a ajouté le syndicaliste, qui s'est dit "déçu mais pas surpris".
"L'échec de ce contrat aura des conséquences industrielles très modérées parce qu'il n'était pas assez avancé", a ajouté M. Hurel. "On espère que ce retour d'expérience va faire réfléchir notre direction sur une stratégie sur la vente d'armes."
Selon lui, 500 emplois sont actuellement occupés dans des activités liées à ce contrat, ainsi qu'une "grosse centaine d'Australiens".
Il a dit souhaiter que Naval Group "se recentre sur ses activités de la marine nationale" et "qu'on cesse cette construction capitalistique sur tout ce qui peut rapporter du profit".

Le français Naval Group avait été sélectionné en 2016 par Canberra pour fournir 12 sous-marins à propulsion conventionnelle (non nucléaire) dérivés des futurs sous-marins nucléaires français Barracuda. D'un montant de 50 milliards de dollars australiens (31 milliards d'euros) à la signature, la valeur de ce contrat est estimé actuellement à 90 milliards de dollars australiens en raison de dépassement de coûts et d'effets de change.

"La décision que nous avons prise de ne pas continuer avec les sous-marins de classe Attack et de prendre un autre chemin n'est pas un changement d'avis, c'est un changement de besoin", a expliqué jeudi le Premier ministre australien.


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.


Australie: la communauté juive, bouleversée et en colère, enterre «le Rabbin de Bondi»

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
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  • Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies
  • Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé

SYDNEY: Dans une synagogue bondée, emplie de cris et de larmes, la communauté juive de Sydney traumatisée a rendu hommage mercredi au rabbin Eli Schlanger, première victime de l'attentat antisémite de la plage de Bondi a être mise en terre.

Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies.

Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé.

David Deitz, homme d'affaires de 69 ans, qui connaissait M. Schlanger "depuis très, très longtemps", explique à l'AFP que le rabbin a eu "une influence positive sur beaucoup de gens".

"C'est un choc pour l'Australie de voir un tel événement se produire ici. Ce n'est pas dans la nature des Australiens", poursuit-il.

Une forte présence sécuritaire a été mobilisée lors des obsèques, avec des policiers alignés dans la rue fermée au public.

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme.

En 2021, le nombre de juifs australiens était estimé à 117.000.

"Ils auraient pu nous écouter" 

Jillian Segal, la responsable de la lutte contre l'antisémitisme en Australie, a fustigé cette semaine des préjugés antijuifs "qui s’insinuent dans la société depuis de nombreuses années et contre lesquels nous ne nous sommes pas suffisamment élevés".

Mme Segal a été la première nommée à ce poste après une série d'attaques antisémites à Melbourne et à Sydney, au début de la guerre d'Israël dans la bande de Gaza.

Au cours des 12 mois suivant l’attaque du Hamas en Israel du 7 octobre 2023 qui a déclenché cette guerre, les incidents de nature antisémite en Australie ont augmenté de 316%, dépassant les 2.000, dit-elle.

"Nous devrions pouvoir être qui nous sommes sans avoir peur", a déclaré Brett Ackerman, un analyste de données âgé de 37 ans.

La colère gagne certains membres de la communauté qui estiment que leur cri d'alarme face à la montée de l'antisémitisme depuis le 7-Octobre n'a pas été pris en compte.

"Ils auraient pu nous écouter" se désole M. Ackerman. Pour lui, l'attaque n'était "pas une surprise".

A côté de lui, le rabbin Yossi Friedman acquiesce. "Le message était clair depuis un peu plus de deux ans", soutient-il. "Est-ce que nous nous sentons en sécurité? Pour être honnête, pas vraiment."

"Nous pensions être en sécurité. Nos grands-parents et arrière-grands-parents étaient des survivants de la Shoah, et beaucoup d’entre eux sont venus ici pour échapper à la haine et au sang versé, aux pogroms, à la persécution (...) et c'est ce qu'on retrouve ici", observe-t-il.

"Problème de société"

Le Premier ministre Anthony Albanese a dénoncé l'attaque de Bondi comme un acte terroriste antisémite de "pure méchanceté" perpétré par des hommes inspirés par l’idéologie jihadiste du groupe État islamique.

Mais il a rejeté les critiques selon lesquelles son gouvernement n'avait pas réagi suffisamment à l'appel de Mme Segal.

Le Premier ministre a souligné que son gouvernement avait pénalisé les discours de haine et interdit le salut nazi et les symboles haineux, entre autres.

Depuis la fusillade, M. Albanese mène une initiative conjointe entre le gouvernement central et les Etats d'Australie en faveur d’un contrôle plus strict des armes à feu. L'assaillant le plus âgé possédait six armes dûment enregistrées.

Mais pour l'écrivain Danny Gingef, 66 ans, "la réforme des armes à feu est une diversion totale par rapport au vrai problème, qui est la haine, il faut identifier la haine là où elle commence".

Au départ du cercueil, les spectateurs ont entonné des chants en hébreu. Submergés par l’émotion, certains se sont effondrés dans les bras de leurs proches, à peine capables de tenir debout.

"Je sens que ces dernières années, les Juifs ont été en état d’alerte maximale", dit M. Gingef. Il se sent triste et en colère, et fait référence aux "marches de la haine" où il a vu des manifestants porter des drapeaux du Hezbollah.

Pour lui, il n’y a pas "beaucoup plus que nous puissions faire" sans le soutien des autorités et d’autres groupes.

"L’antisémitisme n’est pas un problème que les Juifs doivent résoudre, c’est un problème de société".

lec-oho/mjw/lgo/alh/pt

 


La BBC va "se défendre" face à la plainte en diffamation à 10 milliards de dollars de Trump

Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump poursuit la BBC pour diffamation et pratiques trompeuses, réclamant jusqu’à 10 milliards $ après un montage contesté de son discours du 6 janvier 2021
  • L’affaire secoue l’audiovisuel public britannique : démissions à la tête de la BBC, lettre d’excuses envoyée à Trump, et réexamen annoncé de la charte royale

LONDRES: La BBC a assuré mardi qu'elle allait "se défendre" contre la plainte en diffamation du président américain Donald Trump, qui réclame 10 milliards de dollars au groupe audiovisuel public britannique pour un montage vidéo contesté de l'un de ses discours.

La plainte, déposée lundi devant un tribunal fédéral à Miami par le président américain et consultée par l'AFP, demande "des dommages et intérêts d'un montant minimum de 5 milliards de dollars" pour chacun des deux chefs d'accusation: diffamation et violation d'une loi de Floride sur les pratiques commerciales trompeuses et déloyales.

"Ils ont littéralement mis des mots dans ma bouche", s'est plaint le milliardaire de 79 ans, lundi devant la presse.

"Nous allons nous défendre dans cette affaire", a répondu un porte-parole de la BBC mardi matin, sans faire davantage de commentaire sur la procédure.

Le groupe audiovisuel britannique, dont l'audience et la réputation dépassent les frontières du Royaume-Uni, est dans la tourmente depuis des révélations sur son magazine phare d'information "Panorama".

Ce dernier a diffusé, juste avant la présidentielle américaine de 2024, des extraits distincts d'un discours de Donald Trump du 6 janvier 2021, montés de telle façon que le républicain semble appeler explicitement ses partisans à attaquer le Capitole à Washington.

Des centaines de ses partisans, chauffés à blanc par ses accusations sans fondement de fraude électorale, avaient pris d'assaut ce jour-là le sanctuaire de la démocratie américaine, pour tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden.

"La BBC, autrefois respectée et aujourd'hui discréditée, a diffamé le président Trump en modifiant intentionnellement, malicieusement et de manière trompeuse son discours dans le but flagrant d'interférer dans l'élection présidentielle de 2024", a dénoncé lundi un porte-parole des avocats du républicain contacté par l'AFP.

"La BBC a depuis longtemps l'habitude de tromper son public dans sa couverture du président Trump, au service de son programme politique de gauche", a-t-il ajouté.

- Lettre d'excuses -

Au Royaume-Uni, la controverse a relancé le brûlant débat sur le fonctionnement de l'audiovisuel public et son impartialité, alors que le groupe a déjà été bousculé ces dernières années par plusieurs polémiques et scandales.

L'affaire a poussé à la démission son directeur général Tim Davie et la patronne de BBC News Deborah Turness.

Le président de la BBC Samir Shah a pour sa part envoyé une lettre d'excuses à Donald Trump et la BBC a indiqué "regretter sincèrement la façon dont les images ont été montées" mais contesté "fermement qu'il y ait une base légale pour une plainte en diffamation".

Le groupe audiovisuel a "été très clair sur le fait qu'il n'y a pas matière à répondre à l'accusation de M. Trump en ce qui concerne la diffamation. Je pense qu'il est juste que la BBC reste ferme sur ce point", a soutenu mardi matin le secrétaire d'Etat britannique à la Santé Stephen Kinnock, sur Sky News.

Le gouvernement a également annoncé mardi le début du réexamen de la charte royale de la BBC, un processus qui a lieu tous les dix ans, pour éventuellement faire évoluer sa gouvernance, son financement ou ses obligations envers le public britannique.

La plainte de Donald Trump estime que, malgré ses excuses, la BBC "n'a manifesté ni véritables remords pour ses agissements ni entrepris de réformes institutionnelles significatives afin d'empêcher de futurs abus journalistiques".

Le président américain a lancé ou menacé de lancer des plaintes contre plusieurs groupes de médias aux Etats-Unis, dont certains ont dû verser d'importantes sommes pour mettre fin aux poursuites.

Depuis son retour au pouvoir, il a fait entrer à la Maison Blanche de nombreux créateurs de contenus et influenceurs qui lui sont favorables, tout en multipliant les insultes contre des journalistes issus de médias traditionnels.

L'un de ces nouveaux venus invités par le gouvernement Trump est la chaîne conservatrice britannique GB News, proche du chef du parti anti-immigration Reform UK, Nigel Farage.