La crise humanitaire syrienne dans une «spirale descendante», prévient l'ONU

Le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires (OCHA) Martin Griffiths. (Photo, Reuters)
Le Secrétaire général adjoint des Nations Unies aux affaires humanitaires (OCHA) Martin Griffiths. (Photo, Reuters)
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Publié le Jeudi 16 septembre 2021

La crise humanitaire syrienne dans une «spirale descendante», prévient l'ONU

  • Jusqu'à 13,4 millions de personnes en Syrie ont désormais besoin d'une aide d'urgence, 20 % de plus que l'année dernière
  • Huit civils sont morts ces dernières semaines alors que la violence s'intensifie à Idlib, menaçant les travailleurs humanitaires

NEW YORK : La situation humanitaire en Syrie s'aggrave rapidement et les besoins du peuple syrien sont plus grands que jamais, a signalé mercredi le chef des opérations humanitaires de l'ONU.

Martin Griffiths, sous-secrétaire général de l'ONU aux affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence, a déclaré lors d'une réunion des 15 membres du Conseil de sécurité de l'ONU que «les besoins humanitaires en Syrie sont plus importants que jamais, même s'ils ne figurent pas constamment en première page des journaux.

Il a révélé aux délégués, dont des représentants de la Turquie, de l’Iran et de la Syrie, qu'en dépit des milliards de dollars de dons de la communauté internationale, les besoins humanitaires «dépassent tragiquement les ressources disponibles».

Griffiths a prévenu qu'au moins 13,4 millions de personnes à travers la Syrie ont désormais besoin d'une aide d'urgence, un bond de plus de 20 % par rapport à la même période l'année dernière, et le chiffre le plus élevé depuis 2017.

L'accès à l'eau potable est l'un des problèmes les plus urgents.

«Le manque d'accès à l'eau potable affecte de manière disproportionnée la santé générale des gens et surtout la santé reproductive des femmes et des filles», a-t-il ajouté.

L'accès à l'éducation, à la nourriture et à d'autres besoins humains fondamentaux sont en grave déclin dans tout le pays, a souligné Griffiths.

«La Syrie est prise dans une spirale descendante. Le pays continuera d'être un lieu de tragédie tant que le conflit se poursuivra. Les besoins et les souffrances continueront de croître à court terme», a indiqué le responsable de l'ONU.

La représentante du Royaume-Uni, Barbara Woodward, a imputé la responsabilité de cette crise au régime syrien et à ses bienfaiteurs, mais n'a pas nommé l'Iran, de façon spécifique.

«Les frappes aériennes et les bombardements d'artillerie, qui violent l'accord de cessez-le-feu, sont devenus la nouvelle norme dans le sud d'Idlib, avec environ 10 à 20 frappes aériennes actuellement enregistrées chaque jour, ce qui affecte directement les civils et les travailleurs humanitaires», a-t-elle ajouté.

«Ces dernières semaines, huit civils, dont deux femmes et un enfant, ont été tués, notamment lors de bombardements d'artillerie lourde sur des quartiers résidentiels de la ville d'Idlib par le régime syrien et ses alliés».

Woodward a aussi souligné le prix élevé que les travailleurs humanitaires ont payé pour leurs tentatives d'alléger les souffrances du peuple syrien.

«Depuis mars 2021, 19 travailleurs humanitaires ont été tués et 36 blessés dans les violences. Nous exhortons toutes les parties à respecter l'accord de cessez-le-feu et à se conformer à leurs obligations envers la protection des civils et des travailleurs humanitaires».

Amany Qaddour, directrice régionale de Syria Relief and Development, a déclaré lors de la réunion du Conseil de sécurité que les travailleurs humanitaires en Syrie avaient fourni des services vitaux dans «un contexte proche de l'enfer».

Au moment où les hostilités dans le nord-ouest du pays, l'un des derniers bastions rebelles restants, se sont intensifiées, la crise humanitaire s’est aggravée aussi, a-t-elle affirmé.

«En ce qui concerne certains groupes les plus vulnérables, nous constatons une augmentation de la violence, pour les femmes, par exemple, en termes de violence conjugale. Nous avons de plus constaté une augmentation des cas de viol et d'autres formes de violence sexuelle, en particulier chez les enfants et les adolescents», a dénoncé Qaddour.

Des enfants ont ainsi été contraints de travailler, en particulier des travaux pénibles tels que l'exploitation minière, pour aider leurs familles à survivre.

Qaddour a annoncé qu'il y a également eu une augmentation enregistrée des suicides chez les enfants et les jeunes. «L'atmosphère est palpable d'impuissance et de désespoir», a-t-elle confié.

Dans un discours puissant aux délégués, elle a expliqué que la pandémie mondiale n'a fait qu'aggraver les souffrances du peuple syrien.

Moins de 1,5% de la population est vaccinée contre le virus, et dans certaines régions, personne n'a été vacciné. Au lieu de cela, le gouvernement s'est appuyé sur des confinements localisés afin de freiner la propagation.

Mais dans un contexte où l'économie s'est effondrée, la nourriture est rare et les gens dépendent d'un salaire journalier, «les confinements sont absolument une condamnation à mort», a soutenu Qaddour.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Une offensive sur Rafah inquiète les travailleurs humanitaires

Des Palestiniens déplacés inspectent le site d'une frappe israélienne sur un camp de tentes, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 22 avril 2024 (Photo, AFP).
Des Palestiniens déplacés inspectent le site d'une frappe israélienne sur un camp de tentes, au milieu du conflit en cours entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 22 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • De son côté, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, n'a eu de cesse de le répéter: il y aura une opération sur Rafah
  • L'organisation britannique a publié, aux côtés de douze ONG un appel au cessez-le-feu le 3 avril, rappelant que 1,3 million de civils, dont au moins 610.000 enfants, sont à Rafah

JERUSALEM: Entre casse-tête logistique et incertitudes, les ONG s'inquiètent d'une opération militaire israélienne de grande ampleur sur Rafah, petite ville de la bande de Gaza surpeuplée et ravagée par plus de six mois de guerre.

"On s'est préparé à devoir déployer plus ou moins d'aide en fonction de la situation, mais la réalité, c'est qu'on a aucune idée de ce à quoi s'attendre", explique Bushra Khalidi, chargée de plaidoyer pour Oxfam.

L'organisation britannique a publié, aux côtés de douze ONG un appel au cessez-le-feu le 3 avril, rappelant que 1,3 million de civils, dont au moins 610.000 enfants, sont à Rafah "directement dans la ligne de tir"

De son côté, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, n'a eu de cesse de le répéter: il y aura une opération sur Rafah.

Après six mois de frappes et de combats acharnés, le mouvement islamiste palestinien conserverait quatre bataillons dans la grande ville de l'extrême sud de la bande de Gaza, à la frontière avec l'Egypte.

Israël dit plancher sur différents plans d'évacuation, évoquant notamment "des îles humanitaires".

Le ministre de la Défense Yoav Gallant a fait savoir qu'il étudiait une "série de mesures à prendre en préparation des opérations à Rafah, en particulier sur l'évacuation des civils".

Les ONG interrogées par l'AFP disent ne pas avoir été informées de ces mesures; et l'armée israélienne n'a pas été en mesure de répondre à l'AFP concernant ses échanges avec les acteurs humanitaires.

Le ministère a déjà acquis 30.000 tentes, dont le tiers doit être déployé dans les deux prochaines semaines près de Rafah, selon des sources à la presse israélienne, sans qu'on sache exactement de quel côté de la frontière entre la bande de Gaza et l'Egypte.

"Je n'ai aucune idée de ce que ce projet signifie", a commenté le directeur du bureau des affaires humanitaires (Ocha), Andrea de Domenico.

Suspendre les opérations 

"Certes on ne sait pas exactement quelle forme prendra cette offensive, mais ce qui est certain, c'est qu'il va y avoir d'une part une réduction de l'aide disponible et d'autre part, énormément de gens qui se déplacent", pose Jean-Raphaël Poitou, responsable Moyen-Orient d'Action contre la faim (ACF).

A Rafah, passée d'environ 250.000 habitants à plus d'1,3 million, les Gazaouis auraient peu d'options: renverser les murs et barbelés qui séparent la ville de l'Egypte, tenter de remonter au nord de la bande de Gaza - ce que l'armée interdit pour l'heure -, ou se ruer vers la mer Méditerranée.

"Rafah est minuscule, c'est comme un village, et donc une opération dans un endroit si exigu et si densément peuplé ne peut mener qu'à un carnage de masse", avertit Mme Khalidi.

Oxfam craint notamment de devoir suspendre ses activités à Rafah, où se trouvent la moitié de ses bureaux et des bâtiments hébergeant ses équipes.

Mme Khalidi explique qu'il est difficile d'anticiper où les services pourraient se déporter quand environ 60% des immeubles ont été détruits ou endommagés sur l'ensemble de la bande de Gaza et que le territoire est encore bombardé, ou truffé de bombes non explosées.

Scenario catastrophe

D'autres organisations craignent pour le réseau d'acheminement d'aide, un sujet sur lequel elles s'opposent aux autorités israéliennes depuis le début de la guerre.

Une offensive "nous couperait de notre artère vitale: le passage de Rafah", explique Ahmed Bayram, porte-parole de l'ONG Norwegian Refugee Council (NRC) au Moyen-Orient.

Ce terminal est en effet le point d'entrée dans Gaza le plus utilisé. Il permet de desservir l'ensemble du territoire où les réserves de nourriture comme de médicaments sont épuisées depuis des mois et où plus rien n'est produit.

"Nos équipes ont déjà du mal à faire face aux besoins croissants sur le terrain", décrit-il.

Et d'énumérer les difficultés: les pénuries de tout, y compris énergétiques, l'explosion du nombre de blessés, un système de soins à terre, reposant presque uniquement sur des hôpitaux de campagne à Rafah...

Combats au sol

"Les conditions actuelles ne permettent pas de mener des opérations humanitaires à l'échelle requise, alors imaginez ce qu'entraîneraient des combats au sol dans Rafah, ce serait un saut dans l'abîme", résume à l'AFP un employé des Nations unies à Jérusalem.

Interrogé par l'AFP lors d'un point presse au siège des Nations unies à New York, M. de Domenico a ajouté que l'ouverture du point de passage d'Erez (nord) devrait être accompagné de la sécurisation d'un entrepôt de stockage à proximité.

Selon lui, l'effort fourni par les humanitaires devra être "gigantesque".

Pas question néanmoins de prendre l'initiative de mettre d'ores et déjà sur pied des camps d'accueil d'urgence: "nous n'allons pas précipiter le mouvement ou l’encourager", a-t-il expliqué.

"Nous devons nous tenir prêts à fournir de l'aide humanitaire là où les gens se trouveront mais les Nations unies ne participent pas à des déplacements forcés", abonde l'employé des Nations unies à Jérusalem.

"D'ailleurs il n'y a pas vraiment la place de le faire".


Liban: un mort dans une frappe sur une voiture imputée à Israël

Cette photo prise depuis une position israélienne le long de la frontière avec le sud du Liban montre de la fumée s'échappant du village libanais d'Odaisseh lors d'un bombardement israélien le 22 avril 2024, dans un contexte de tensions transfrontalières persistantes alors que les combats se poursuivent entre Israël et les militants du Hamas à Gaza. (Photo de Jalaa MAREY / AFP)
Cette photo prise depuis une position israélienne le long de la frontière avec le sud du Liban montre de la fumée s'échappant du village libanais d'Odaisseh lors d'un bombardement israélien le 22 avril 2024, dans un contexte de tensions transfrontalières persistantes alors que les combats se poursuivent entre Israël et les militants du Hamas à Gaza. (Photo de Jalaa MAREY / AFP)
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  • La frappe a visé une voiture dans la région côtière de Tyr, à environ 35 kilomètres au nord de la frontière avec Israël, selon un photographe
  • L'armée a formé un cordon sécuritaire tandis que des membres du Hezbollah inspectaient le véhicule

BEYROUTH: Une personne a été tuée dans une frappe imputée à Israël qui a visé mardi un véhicule dans le sud du Liban, loin de la frontière, ont indiqué un média d'Etat et un journaliste de l'AFP.

Le Hezbollah libanais échange quotidiennement des tirs avec Israël depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien dans la bande de Gaza, il y a plus de six mois.

La frappe a visé une voiture dans la région côtière de Tyr, à environ 35 kilomètres au nord de la frontière avec Israël, selon un photographe de l'AFP qui a vu le véhicule entièrement carbonisé.

L'armée a formé un cordon sécuritaire tandis que des membres du Hezbollah inspectaient le véhicule, selon cette source.

L'agence nationale d'information (Ani, officielle), a de son côté fait état d"un martyr" lorsqu'un "drone a visé une voiture dans la région d'Abou el Assouad, au nord du fleuve Litani".

Depuis environ une semaine, le Hezbollah, allié du Hamas, a intensifié ses frappes contre des sites militaires israéliens sur fond de tensions entre Israël et l'Iran.

Lundi, le Hezbollah a dit avoir visé un quartier général militaire dans le nord d'Israël avec des "dizaines" de roquettes Katioucha, "en réponse" à des raids sur des villages du sud du Liban.

Les échanges de tirs entre Israël et le Hezbollah depuis le début de la guerre à Gaza le 7 octobre ont fait 377 morts du côté libanais, essentiellement des combattants du mouvement libanais ainsi que quelque 70 civils, selon un décompte de l'AFP.

Dans le nord d'Israël, onze soldats et huit civils ont été tués d'après l'armée. Des dizaines de milliers d'habitants ont dû fuir la zone de part et d'autre de la frontière.


Les Saoudiens obtiennent des visas de cinq ans dans le cadre de la mise à jour des règles de l'UE-Schengen

La mise en œuvre de la règle des visas de cinq ans marque une étape importante dans le renforcement des relations interpersonnelles entre l'UE et le CCG. (AFP)
La mise en œuvre de la règle des visas de cinq ans marque une étape importante dans le renforcement des relations interpersonnelles entre l'UE et le CCG. (AFP)
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  • La Commission européenne a adopté trois décisions d'application actualisant les règles de délivrance des visas à entrées multiples pour l’Arabie saoudite, Oman et Bahreïn
  • Les experts considèrent également qu'il s'agit d'un premier pas vers une dérogation à l'accord de Schengen

LONDRES : L'Union européenne (UE) a annoncé lundi l'assouplissement des règles en matière de visas pour les citoyens d'Arabie saoudite, d'Oman et de Bahreïn

La Commission européenne a adopté trois décisions d'application actualisant les règles de délivrance des visas à entrées multiples pour les trois pays du Golfe. 

L'annonce a été faite lors du forum de haut niveau UE-CCG sur la sécurité et la coopération régionales à Luxembourg, où le ministre des Affaires étrangères du Royaume, le prince Faisal ben Farhane, dirige la délégation saoudienne, qui comprend également l'ambassadeur auprès de l'UE, Haifa al-Jedea, et la conseillère du ministère des Affaires étrangères, Manal Radwan. 

La réunion a porté sur le renforcement de la sécurité et de la coopération stratégique entre les États du Golfe et l'UE, ainsi que sur l'évolution de la situation dans la bande de Gaza et ses environs et sur l'importance d'un cessez-le-feu immédiat. 

En vertu des nouvelles règles en matière de visas, les ressortissants vivant à Bahreïn, à Oman et en Arabie saoudite pourront bénéficier de visas à entrées multiples, ce qui leur permettra de se rendre dans l'UE plusieurs fois sur une période de cinq ans avec le même visa. 

Le code des visas actualisé fait partie d'un concept connu sous le nom de «cascade», une «approche harmonisée» de la délivrance de visas à entrées multiples ayant une longue durée de validité pour tous les demandeurs admissibles, y compris ceux qui voyagent pour la première fois. 

Pendant la durée de validité de ces visas, les titulaires bénéficient de droits de voyage équivalents à ceux des ressortissants exemptés de visa. 

Cette mise à jour vise à uniformiser les règles en matière de visas pour tous les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) dont les citoyens ont besoin d'un visa pour accéder à l'espace Schengen. 

La mise en œuvre de la règle des visas de cinq ans marque une étape importante dans le renforcement des relations interpersonnelles entre l'UE et le CCG. 

Elle s'inscrit également dans le contexte de la communication conjointe de l'UE sur un «partenariat stratégique avec le Golfe», qui couvre également les relations de l'UE avec le Royaume, Oman et Bahreïn. 

Les experts considèrent également qu'il s'agit d'un premier pas vers une dérogation à l'accord de Schengen. 

L'espace Schengen – qui comprend 29 pays européens et constitue la plus grande zone de libre circulation au monde – s'est étendu en février dernier à la Bulgarie et à la Roumanie, éliminant ainsi tous les contrôles aux frontières aériennes et maritimes. Une décision sur la suppression des contrôles terrestres sera prise ultérieurement. 

En novembre, les pays du Golfe ont annoncé leur intention de mettre en place un visa touristique unifié similaire à celui de Schengen, afin de rationaliser les efforts logistiques des résidents et des touristes. 

 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com