Les médias arabes pleurent la perte de Youssef Khazem, le «doux géant»

L’expertise médiatique de Khazem était très recherchée à l’échelle mondiale. Il a occupé le poste de formateur auprès d’organisations comme le World Service Trust de la BBC. (Photo fournie)
L’expertise médiatique de Khazem était très recherchée à l’échelle mondiale. Il a occupé le poste de formateur auprès d’organisations comme le World Service Trust de la BBC. (Photo fournie)
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Publié le Jeudi 16 septembre 2021

Les médias arabes pleurent la perte de Youssef Khazem, le «doux géant»

  • Pendant ses trente ans de carrière, il a travaillé pour plus d’une douzaine de quotidiens et d’institutions médiatiques au Royaume-Uni, dans le monde arabe, ainsi qu’en Afrique
  • Son domaine d’expertise en tant que journaliste est l’Afrique, où il couvre la famine, les guerres et les conflits seize ans durant

LONDRES: Le célèbre journaliste libano-britannique Youssef Khazem est décédé, après avoir lutté contre un cancer. Il avait 64 ans.

«Cet ami que j’ai connu sur les bancs de l’université à Beyrouth va beaucoup me manquer», déclare l’une de ses proches, Najia al-Houssari, journaliste d’Arab News. «Rien n’a jamais altéré notre amitié au fil des décennies. Mais qu’est-ce qui aurait bien pu la menacer, quand on a affaire à une personne aussi noble, sincère, calme et aimante?»

«Le cancer a eu raison de Youssef, qui avait encore tant de projets à réaliser. Les médecins lui avaient dit qu’il n’avait que deux années à vivre, mais il en était presque à sa quatrième. Lorsque la douleur est devenue trop grande, Youssef a cessé de se battre. Il s’est résigné à son destin. Il voulait se reposer. Repose donc en paix, mon ami.»

Khazem incarnait le courage dans le monde souvent chaotique de l’information. Pendant ses trente ans de carrière, il a travaillé pour plus d’une douzaine de quotidiens et d’institutions médiatiques au Royaume-Uni, dans le monde arabe, ainsi qu’en Afrique.

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Son domaine d’expertise en tant que journaliste était le continent africain, dans lequel il couvre la famine, les guerres et les conflits seize ans durant. Plus tard, il met sa grande expérience de consultant au service d’un certain nombre de quotidiens, dont Arab News, et joue un rôle clé dans sa relance.

«C’était une personne gentille, patiente, extraordinaire», confie Noor Nugali, rédactrice en chef adjointe d’Arab News. Le quotidien était en pleine transformation. Il m’a présenté avec fierté la nouvelle maquette. Il m’a même demandé mon avis et a tenu compte de mes suggestions. C’était une douce figure paternelle.»

«J’adresse mes sincères condoléances à sa famille, si aimante. Nous avons perdu un grand homme, mais son image restera à jamais gravée dans nos mémoires. L’image d’un chevalier à l’armure éclatante qui nous montre le chemin.»

Outre Arab News, les articles de Khazem ont été publiés dans d’autres grands journaux comme le quotidien panarabe Asharq Al-Awsat, Al-Hayat, As-Safir au Liban ou Al-Watan en Arabie saoudite. Il a également écrit pour Al-Arabiya English et pour la BBC.

«Cette nouvelle est vraiment triste pour la communauté des médias», déclare Ghassan Charbel, rédacteur en chef d’Asharq Al-Awsat. «Youssef laisse une empreinte indélébile, tant sur le plan professionnel qu’amical.»

«Lorsqu’il partait en mission à l’étranger, il regardait les choses sous un angle différent afin de rédiger un article original et unique. Et, dans les bureaux de rédaction, il savait faire preuve de patience et d’ouverture d’esprit lorsqu’il échangeait avec ses collègues ainsi qu’avec les jeunes journalistes.»

«Sur le plan personnel, Youssef était aimable avec tous, même avec ceux qui avaient des opinions et des orientations politiques différentes des siennes. Lorsqu’il s’agissait de répondre aux enjeux de développement, son regard se tournait vers l’avenir. Il a également joué un rôle important en tant que formateur, laissant son empreinte dans l’avenir des médias à travers les jeunes journalistes dont il avait la charge.»

Eyad Abou Chakra, rédacteur principal chez Asharq Al-Awsat et chroniqueur chez Arab News, a travaillé pendant quatre ans avec Khazem. Il garde un excellent souvenir de lui.

«C’est douloureux de parler de Youssef Khazem au passé. Une amitié nous lie depuis plusieurs années», indique-t-il. «Nous nous sommes rencontrés à Londres la première fois. Il travaillait alors pour Al-Hayat. La première impression que Youssef m’a donnée est la suivante: c’est un doux géant, très gentil, accessible et sociable.»

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«Au-delà de sa personnalité, son expertise professionnelle était également assez impressionnante. Il était sans aucun doute l’un des meilleurs experts arabes des questions africaines, particulièrement de la Corne de l’Afrique; c’était une référence sur ce sujet, une source très respectée.»

«En plus de son travail écrit et de ses reportages, l’expertise médiatique de Khazem était très recherchée à l’échelle mondiale. Il a occupé le poste de formateur auprès d’organisations comme le World Service Trust de la BBC, Internews Europe, le British Council, la Cour pénale internationale de La Haye et Fojo, l’Institut suédois pour la formation continue des journalistes. Il a également organisé des programmes de formation multimédia avec la UK Press Association.»

«En sa présence, je me sentais inspirée, stimulée intellectuellement. Nous avions toujours des discussions profondes sur la situation dans notre région, se souvient Eman al-Shenawi, ancienne éditorialiste d’Al-Arabiya English. Je me souviens qu’il m’avait expliqué la crise du barrage du Nil d’une manière si claire que j’ai immédiatement demandé à rédiger un papier sur ce sujet.»

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«Son style était remarquablement fluide. Ses mots se lisaient facilement et on apprenait beaucoup de lui. Repose en paix, cher Youssef, toi ce géant si doux que je n’oublierai jamais.»

Ali al-Zaid, qui travaille au ministère saoudien des Médias, souligne: «Le nom de M. Khazem a toujours été associé à sa vocation d’améliorer le journalisme en Arabie saoudite et de le placer au même niveau que le journalisme mondial en termes de courage et d’intégrité. Aucun avantage personnel ni aucune opinion ne s’est jamais dressé entre son objectif et lui.»

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«J’ai travaillé avec lui pendant trois ans au journal Al-Watan. Je me souviens des efforts qu’il a déployés alors pour faire d’Al-Watan l’un des meilleurs quotidiens saoudiens de l'époque.»

Wael Mahdi, rédacteur économique chez Arab News, déclare: «J’ai rencontré Youssef pour la première fois en 2009. Il travaillait au développement d’un quotidien saoudien en essayant d’initier les journaux aux méthodes de survie dans cet environnement changeant.»

«Il était toujours silencieux, assis en retrait dans son bureau. Mais il parvenait à accompagner tout le monde de loin. Je l’ai à nouveau rencontré des années plus tard, alors qu’il travaillait pour Arab News. Où qu’il soit allé, il a apporté de nouvelles idées.»

«Youssef Khazem était l’un des meilleurs journalistes du quotidien saoudien Al-Watan. Il savait développer des compétences dans toutes les institutions pour lesquelles il a travaillé, et il y a laissé sa marque», salue le journaliste saoudien Jasser al-Jasser.

«Non seulement il possédait de solides compétences journalistiques, mais Youssef était aussi quelqu’un de créatif. Il a laissé une empreinte significative au sein de chaque journal pour lequel il a travaillé. Sur le plan personnel, Khazem était quelqu’un de très courtois et de jovial.»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

Disparition de l’écrivain libanais Jabbour Douaihy
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Des leçons de vie de la journaliste marocaine Fatima Daoui
Par Arab News -

Négociations de paix au Soudan: le chef de l'armée prêt à «collaborer» avec Trump

Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt. (AFP)
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  • Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)"
  • Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise

PORT-SOUDAN: Le chef de l'armée soudanaise et dirigeant de facto du pays, le général Abdel Fattah al-Burhane, s'est dit prêt à collaborer avec le président américain Donald Trump, au moment où les négociations pour un cessez-le-feu menées par les Etats-Unis sont à l'arrêt.

Le général al-Burhane "a affirmé la volonté du Soudan de travailler avec le président Trump, son secrétaire d'État (Marco Rubio) et son envoyé pour la paix au Soudan (Massad Boulos)", a déclaré le ministère des Affaires étrangères pro-armée dans un communiqué publié à l'issue d'un déplacement officiel à Ryad, à l'invitation du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane.

Ce voyage était destiné à discuter de l'initiative présentée par le dirigeant saoudien au président américain lors d'une récente visite officielle à Washington, selon une source gouvernementale soudanaise.

Les négociations de paix menées par les Etats-Unis avec le groupe de médiateurs du Quad (réunissant Egypte, Arabe Saoudite et Emirats) sont à l'arrêt depuis que le général al-Burhane a affirmé que la dernière proposition de trêve transmise par M. Boulos était "inacceptable", sans préciser pourquoi.

Le militaire avait alors fustigé une médiation "partiale" et reproché à l'émissaire américain de reprendre les éléments de langage des Emirats, accusés d'armer les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Abou Dhabi nie régulièrement fournir des armes, des hommes et du carburant aux FSR, malgré des preuves fournies par des rapports internationaux et enquêtes indépendantes.

De leur côté, les FSR ont annoncé qu'ils acceptaient la proposition de trêve mais les attaques sur le terrain n'ont pas pour autant cessé au Kordofan, région au coeur de combats intenses.

Pour l'instant, aucune nouvelle date de négociations n'a été fixée, que ce soit au niveau des médiateurs du Quad ou de l'ONU qui essaie parallèlement d'organiser des discussions entre les deux camps.

Le Soudan est déchiré depuis avril 2023 par une guerre opposant l'armée, qui contrôle le nord et l'est du pays - aux FSR, dominantes dans l'ouest et certaines zones du sud.

Depuis la prise du dernier bastion de l'armée dans la vaste région voisine du Darfour, les combats se sont intensifiés dans le sud du pays, au Kordofan, région fertile, riche en pétrole et en or, charnière pour le ravitaillement et les mouvements de troupes.

Le conflit, entré dans sa troisième année, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, déraciné des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire au monde".

 


Le prince héritier saoudien rencontre le chef du conseil de transition soudanais pour discuter de la sécurité et de la stabilité

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman a rencontré lundi à Riyad Abdel Fattah Al-Burhan pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à rétablir la sécurité et la stabilité dans le pays. (SPA)
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  • La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation
  • Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays

RIYADH : Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane a rencontré Abdel Fattah Al-Burhan à Riyad lundi pour discuter des derniers développements au Soudan et des efforts visant à restaurer la sécurité et la stabilité dans le pays, a rapporté l'Agence de presse saoudienne.

La réunion a eu lieu au palais Al-Yamamah, où le prince héritier s'est entretenu avec le président du Conseil de souveraineté transitoire du Soudan et sa délégation.

Au cours des entretiens, les deux parties ont passé en revue la situation au Soudan, ses implications régionales et les efforts visant à assurer la sécurité et la stabilité dans le contexte de la crise persistante que traverse le pays, a ajouté SPA.

Le ministre saoudien de la défense, le prince Khalid ben Salmane, le ministre des affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, le ministre d'État et conseiller à la sécurité nationale, Musaed bin Mohammed Al-Aiban, le ministre des finances, Mohammed Al-Jadaan, et l'ambassadeur saoudien au Soudan, Ali Hassan Jaafar, ont également assisté à la réunion.


Cisjordanie: 25 immeubles d'habitation menacés de destruction dans un camp de réfugiés

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  • "Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre"
  • "Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie

TULKAREM: L'armée israélienne va démolir 25 immeubles d'habitation du camp de réfugiés de Nour Chams, dans le nord de la Cisjordanie, ont indiqué lundi à l'AFP des responsables locaux.

Abdallah Kamil, le gouverneur de Tulkarem où se situe le camp, a déclaré à l'AFP avoir été informé par le Cogat --l'organisme du ministère de la Défense israélien supervisant les activités civiles dans les Territoires palestiniens-- que les démolitions interviendraient d'ici la fin de la semaine.

"Nous avons été informés par la coordination militaire et civile que l'occupation (Israël, NDLR) procédera à la démolition de 25 bâtiments le jeudi 18 décembre", a indiqué à l'AFP Faisal Salama, responsable du comité populaire du camp de Tulkarem, proche de celui de Nour Chams, précisant qu'une centaine de familles seraient affectées.

Le Cogat n'a pas répondu dans l'immédiat aux sollicitations de l'AFP, l'armée israélienne indiquant se renseigner.

"Il n'y a aucune nécessité militaire à mener ces démolitions", a affirmé à l'AFP Roland Friedrich, responsable de l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) en Cisjordanie.

Il estime qu'elles s'inscrivent "dans une stratégie plus large visant à modifier la géographie sur le terrain", qualifiant la situation de "tout simplement inacceptable".

"Crise" 

La Cisjordanie est occupée par Israël depuis 1967.

Début 2025, l'armée israélienne y a lancé une vaste opération militaire visant selon elle à éradiquer des groupes armés palestiniens, en particulier dans les camps de réfugiés du nord, comme ceux de Jénine, Tulkarem et Nour Chams.

Au cours de cette opération, l'armée a détruit des centaines de maisons dans les camps, officiellement pour faciliter le passage des troupes.

Selon M. Friedrich, environ 1.600 habitations ont été totalement ou partiellement détruites dans les camps de la région de Tulkarem, entraînant "la crise de déplacement la plus grave que la Cisjordanie ait connue depuis 1967".

Lundi, une vingtaine de résidents de Nour Chams, tous déplacés, ont manifesté devant des véhicules militaires blindés bloquant l'accès au camp, dénonçant les ordres de démolition et réclamant le droit de rentrer chez eux.

"Toutes les maisons de mes frères doivent être détruites, toutes! Et mes frères sont déjà à la rue", a témoigné Siham Hamayed, une habitante.

"Personne n'est venu nous voir ni ne s'est inquiété de notre sort", a déclaré à l'AFP Aïcha Dama, une autre résidente dont la maison familiale de quatre étages, abritant environ 30 personnes, figure parmi les bâtiments menacés.

Disparaître 

Fin novembre, l'ONG Human Rights Watch a indiqué qu'au moins 32.000 personnes étaient toujours déplacées de chez elles dans le cadre de cette opération.

Comme des dizaines d'autres, le camp de Nour Chams a été établi au début des années 1950, peu après la création d'Israël en 1948, lorsque des centaines de milliers de Palestiniens ont fui ou été expulsés de leurs foyers.

Avec le temps, ces camps se sont transformés en quartiers densément peuplés, où le statut de réfugié se transmet de génération en génération.

De nombreux habitants ont affirmé à l'AFP ces derniers mois qu'Israël cherchait à faire disparaître les camps, en les transformant en quartiers des villes qu'ils jouxtent, afin d'éliminer la question des réfugiés.

Nour Chams a longtemps été un lieu relativement paisible où vivaient dans des maisons parfois coquettes des familles soudées entre elles.

Mais depuis quelques années, des mouvements armés s'y sont implantés sur fond de flambées de violence entre Palestiniens et Israéliens et de précarité économique.