Au festival Arabesques, Leur Algérie, de Lina Soualem, raconte l’immigration et l’exil

La réalisatrice franco-algérienne et palestinienne, Lina Soualem, répond aux questions d’Arab News en français sur la thématique de son film: l’immigration, l’exil et la vie des de ses grands-parents en France. Photo fournie.
La réalisatrice franco-algérienne et palestinienne, Lina Soualem, répond aux questions d’Arab News en français sur la thématique de son film: l’immigration, l’exil et la vie des de ses grands-parents en France. Photo fournie.
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Publié le Vendredi 24 septembre 2021

Au festival Arabesques, Leur Algérie, de Lina Soualem, raconte l’immigration et l’exil

  • En découvrant l’Histoire de la colonisation française en Algérie, j’ai aussi commencé à comprendre le silence qui régnait dans ma famille
  • J’ai mêlé l’intime au collectif pour que cette histoire, même si elle est singulière, puisse toucher et parler aux autres

Projeté lors de la 16e édition du festival Arabesques, l’événement qui va à la rencontre des arts du monde arabe et qui se déroule du 7 au 19 septembre 2021 à Montpellier, le film documentaire Leur Algérie a été a été primé à plusieurs reprises en France, en Égypte, en Suède, au Québec, en Espagne et plus récemment à Amman. Sa réalisatrice franco-algérienne et palestinienne, Lina Soualem, répond aux questions d’Arab News en français sur la thématique de son film: l’immigration, l’exil et la vie des de ses grands-parents en France.

Par votre parcours académique, vous vous êtes intéressée aux sujets de l’immigration, de l’exil et de l’identité. Mais l’idée de réaliser ce film documentaire a été déclenchée par la séparation de vos grands-parents. Pourriez-vous nous en parler?

En effet, c’est un long processus. Tout a commencé lorsque j’ai choisi de suivre des études en Histoire des sociétés arabes contemporaines. En découvrant l’Histoire de la colonisation française en Algérie, j’ai aussi commencé à comprendre le silence qui régnait dans ma famille.

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Lina Soualem : En découvrant l’Histoire de la colonisation française en Algérie, j’ai aussi commencé à comprendre le silence qui régnait dans ma famille. Photo fournie.

Lors de mon voyage d’études organisé par la Sorbonne, je me suis présentée comme petite-fille d’Algériens immigrés en France dans les années 1950. À ce moment-là, je me rendais compte que je ne savais rien d’eux, juste les noms du village et de la région d’où ils venaient. Le malaise est né et les questions s’enchaînaient: comment se fait-il que je ne sache rien? Pourquoi ne m’ont-ils rien raconté?

Six ans plus tard, lorsque mon père (le comédien Azzedine Soualem) m’a appris la séparation de mes grands-parents, j’ai eu un choc. Leur silence m’est revenu en pleine figure, avec ce besoin vital de comprendre, non sans cette crainte, cette peur qu’ils disparaissent avant de me transmettre cette mémoire orale. De cette sensation instinctive de raconter leur histoire est née l’idée du film, celle de l’exil et du déracinement où l’intime se mêle au collectif.

Dans le film, votre grand-mère, pudique de nature, évoque des sujets tristes mais avec son rire, sa force les rend moins tristes…

En effet, j’ai toujours eu cette envie de filmer ma grand-mère, l’entendre me raconter son histoire. Je me suis emparée de la caméra pour capturer cette figure féminine très énigmatique. Depuis toute petite, je l’entendais raconter des histoires anecdotiques qui faisaient rire, on ne se rendait pas compte qu’elles étaient aussi tragiques, comme celle concernant la nouvelle de son mariage à 15 ans; sa réaction fut de grimper dans un palmier et d’y rester des heures. Pour nous, cette histoire était drôle, mais, en réalité, elle raconte un fait tragique.

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Lina Soualem : J’ai toujours eu cette envie de filmer ma grand-mère, l’entendre me raconter son histoire. Photo fournie.

Plus tard, j’ai voulu comprendre l’intrigue: comment cette femme, arrivée en France à 17 ans, séparée de sa famille, ne parlant pas français, a réussi à devenir cette femme extraordinaire, aimante, sociable et dotée d’une telle force? Accompagnée de ma caméra, que je considérais comme un bouclier de protection pour confronter cette mémoire intime, j’ai instauré un dialogue. Après quelques séances de tournage, la caméra était oubliée. Les non-dits du film signifient que nous étions arrivées à la limite de l’intime qu’il fallait préserver. Je ne voulais pas formuler ce que sa mémoire a occulté.

Comment avez-vous construit votre travail d’écriture et de réalisation sur un sujet si intimiste et pourtant universel?

C’était tout le défi. Pendant la construction du film, l’écriture, le tournage et le montage, j’ai mêlé l’intime au collectif pour que cette histoire, même si elle est singulière, puisse toucher et parler aux autres.

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Lina Soualem : Mes grands-parents sont très contrastés, différents. Photo fournie.

J’ai commencé par présenter l’idée de mon film lors des festivals grâce auxquels j’ai pu poursuivre mon projet en trouvant ma société de production en France, et ma monteuse et collaboratrice artistique, Gladys, une Franco-Libanaise. Ensemble, on réécrivait le film au fur et à mesures des séquences. Leur Algérie a été réalisé en trois ans, car il fallait suivre le rythme de mes grands-parents et marquer l’histoire dans le temps.

L’exil est perçu et vécu comme un traumatisme, une déchirure. Cela est-il transmissible aux générations d’après?

Il y a en effet quelque chose qui se transmet, sous une autre forme. L’exil a conduit au silence qui s’est transformé en poids pour les générations d’après. Les personnes de ma génération (trentenaires), qui se trouvent dans un espace intermédiaire, ont cette envie de comprendre notre Histoire qui se trouve entre deux réalités, deux pays, avec des perceptions stigmatisantes, une situation dans laquelle il est très difficile de se construire.  

Il est évident que pour moi, la douleur et son incompréhension se transmettent. La mémoire peut nous enfermer, comme elle peut nous sauver. Ce que j’essaie de faire, à mon niveau, en réactivant la mémoire avec son lot de moments douloureux, c’est de la transformer en quelque chose de positif. Comme dans cette scène où mon grand-père revoit la photo de ses parents, j’ai dû la refaire à plusieurs reprises, car je n’obtenais pas de réponses, or c’était vital pour moi.

En général, quand il est question de sujets délicats, tabous, le silence signifie aussi se faire une carapace. Dans votre film, vos grands-parents se murent dans le silence. Est-ce par pudeur ou par protection, voire les deux?

Mes grands-parents sont très contrastés, différents. Mon grand-père était enfermé dans son silence pour se protéger de la douleur de l’exil. Il ainsi construit quelque chose de très dur autour de lui, qui ne lui permettait pas, parfois, de se connecter aux siens, dont mon père. Ma grand-mère, elle, se protégeait par le rire, les émotions et son implication dans le social.

À travers cette histoire de couple, on constate que l’exil peut être vécu de façon différente. Cette multiplicité d’expériences nous enrichit et nous permet de nous reconnecter au reste de la société.

Vous dites: «C’est à travers Leur Algérie que j’ai trouvé la mienne»; comment l’expliquez-vous?

C’est vrai! L’Algérie, c’est d’abord le territoire perdu de mon grand-père, alors que pour moi, mon Algérie, c’était lorsque j’allais en Auvergne, vers le cocon familial, avec toutes les traditions maintenues. Je partais d’une absence d’Algérie à sa découverte, seule, pour les études et pour le film. Finalement, en explorant leur perception de l’Algérie, de ce qui reste de l’Algérie des années 1950, j’ai découvert l’Algérie contemporaine qui m’a permis de reconstruire les morceaux. Aujourd’hui, je me reconnecte à mon Algérie à travers mon travail et mes amitiés qui sont en dehors de la sphère familiale.

Le spectateur est transporté dans la grande Histoire, celle du colonialisme, de la privation, de la perte, de l’oubli…

Le film raconte la classe ouvrière, tous ces ouvriers qui ont donné leur vie à des métiers qui n’existent plus. L’histoire de mon grand-père est constituée d’une multitude de séparations, celle avec la famille, le travail dans les usines qui disparaissent aussi, ce sont des parcours de vie qui n’ont plus leur place dans l’Histoire.

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Lina Soualem : L’histoire de mon grand-père est constituée d’une multitude de séparations, celle avec la famille, le travail dans les usines qui disparaissent aussi, ce sont des parcours de vie qui n’ont plus leur place dans l’Histoire. Photo de Thomas Brémond

Dans le musée de la Coutellerie, l’Histoire des ouvriers maghrébins n’est pas évoquée, or pour grand-père, la coutellerie représente toute sa vie, il a tout sacrifié pour elle. Jusqu’à l’ultime question, que j’hésitais à poser; je la redoutais car elle a un lien avec mon existence et mon vécu: a-t-il regretté son exil en France? La réponse est dans le film et ainsi existe la mémoire.


«  Parlement », la série qui a rendu l'Europe captivante

"L'Europe a besoin de vous". Dans cette quatrième et dernière saison de la série actuellement en tournage, l'heure est grave. (AFP).
"L'Europe a besoin de vous". Dans cette quatrième et dernière saison de la série actuellement en tournage, l'heure est grave. (AFP).
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  • En s'attaquant avec malice à un sujet pas forcément évident, la série de France Télévisions créée par Noé Debré a conquis la critique et le public
  • Un pari osé mais un terrain vierge fantastique pour les scénaristes

STRASBOURG: "Silence... ça tourne!" : quand les eurodéputés désertent le Parlement européen, d'autres équipes les remplacent: celles de "Parlement", une série satirique qui a familiarisé le grand public avec l'institution... et l'encourage même à voter aux élections européennes.

"L'Europe a besoin de vous". Dans cette quatrième et dernière saison de la série actuellement en tournage, l'heure est grave. Carmen (Elina Lowensohn), de la Commission européenne, appelle Samy (Xavier Lacaille) à la rescousse. Le jeune Français s'est aguerri depuis ses débuts comme assistant parlementaire maladroit. Il se retrouve cette fois propulsé dans un Conseil européen où il devra une fois de plus se démener pour "sauver l'Europe".

En s'attaquant avec malice à un sujet pas forcément évident, la série de France Télévisions créée par Noé Debré a conquis la critique et le public (7 millions de vues pour les trois premières saisons).

Un pari osé mais un terrain vierge fantastique pour les scénaristes. "La grande chance qu'on a eue c'est qu'une comédie sur les institutions européennes, ça n'avait jamais été fait, donc toutes les vannes étaient possibles", souligne Pierre Dorac, coscénariste et coréalisateur de la série.

Cette coproduction européenne, au casting international et tournée dans les vraies institutions, a permis de dévoiler leur fonctionnement et de les ancrer dans l'imaginaire collectif.

« Intéresser » les gens 

"Si je parle de la Maison Blanche, vous avez une carte mentale de cet environnement, vous avez vu mille séries, mille films... Au niveau européen ce n'est pas le cas. Les bâtiments européens sont très peu montrés à la télévision et en fiction", compare Pierre Dorac.

Pour cela, il a fallu convaincre l'institution d'ouvrir ses portes aux tournages de cette série qui manie un humour mordant, avec des eurodéputés parfois dépeints en personnages paresseux, incompétents ou cyniques.

"L'administration du Parlement n'était pas forcément favorable parce qu'on a toujours peur de s'ouvrir, de se montrer", se rappelle Anne Sander, eurodéputée membre du groupe du Parti populaire européen (droite), qui trouvait de son côté que c'était une "excellente idée". "A l'heure où on dit que les gens se désintéressent de l'Europe c'est un bon moyen de les y intéresser", espère-t-elle.

L'acteur principal, Xavier Lacaille, assure avoir eu "plutôt des bonnes réactions, des gens enthousiastes, qui étaient contents qu'on s'intéresse à leur travail, à leur quotidien".

"C'est la quatrième saison et si on nous laisse encore tourner ici c'est qu'ils ne sont plutôt pas trop mécontents", glisse-t-il.

Preuve de la bonne image de la série, plusieurs personnalités ont accepté d'y faire une apparition (un "caméo") comme l'ancien commissaire européen Pascal Lamy, l'ex-secrétaire d'État aux Affaires européennes Clément Beaune ou l'eurodéputée (La Gauche) Manon Aubry.

« Décomplexifié la chose »

Dans la saison 4, l'eurodéputé écologiste Benoît Biteau jouera même son propre rôle.

"Depuis que quelqu'un qui a fait un +caméo+ dans la saison 3 est devenu tête de liste aux européennes, ça a créé des vocations", sourit Pierre Dorac, en référence à Valérie Hayer, aujourd'hui tête de liste du camp Macron aux élections du 9 juin.

Comme Maxime Calligaro, également scénariste, Pierre Dorac a travaillé au Parlement européen, côtoyant fonctionnaires, parlementaires et leurs équipes et captant leur "façon de parler ou de voir le monde".

"Ils ont apporté une vérité, des anecdotes, plein de choses ancrées dans la réalité. Et en plus ils sont hyper drôles", souligne Xavier Lacaille.

La "force" de la série, "c'est d'avoir décomplexifié la chose", analyse Anne Sander.

Pour la saison 4, dont le tournage s'achève en avril, les réalisateurs ont filmé au Parlement européen de Strasbourg et pendant un véritable sommet européen, à Bruxelles.

Brouillant un peu plus les frontières entre fiction et réalité, les acteurs ont tourné de petites vidéos humoristiques pour inciter les citoyens à voter aux prochaines élections.

Elles seront diffusées à partir du 9 mai, date de la journée de l'Europe.


L’équipe australienne d’ABC dénonce une couverture biaisée du conflit en faveur d’Israël

Selon certaines informations, des tensions persisteraient au sein d’ABC quant au conflit à Gaza, bien des mois après la première réunion du personnel. (AFP)
Selon certaines informations, des tensions persisteraient au sein d’ABC quant au conflit à Gaza, bien des mois après la première réunion du personnel. (AFP)
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  • Le personnel mentionne «une dépendance excessive aux sources israéliennes et une méfiance flagrante à l’égard des sources palestiniennes»
  • Il dénonce par ailleurs un langage qui «favorise le récit israélien par rapport au journalisme objectif»

LONDRES: Le personnel d’Australian Broadcasting Corporation (ABC) se montre inquiet face à ce qu'il considère comme une couverture biaisée du conflit à Gaza en faveur d’Israël

Dans un document obtenu par Al-Jazeera grâce à une demande d’accès à l’information, le personnel mentionne «une dépendance excessive aux sources israéliennes et une méfiance flagrante à l’égard des sources palestiniennes», ainsi qu’un langage qui «favorise le récit israélien par rapport au journalisme objectif».  

Le résumé de trois pages détaille une réunion de novembre dernier durant laquelle 200 membres du personnel ont exprimé leurs inquiétudes concernant la couverture médiatique du diffuseur. 

«Nous craignons que le langage que nous utilisons dans notre couverture soit biaisé, privilégiant le récit israélien au détriment du journalisme objectif», peut-on lire sur le document. 

«C’est mis en évidence par notre réticence à utiliser des mots tels que “crimes de guerre, génocide, nettoyage ethnique, apartheid et occupation” pour décrire divers aspects des pratiques israéliennes à Gaza et en Cisjordanie, même lorsque ces termes ont été utilisés par des organisations et sources respectables.» 

Même si ABC a reconnu ne pas pouvoir porter d’accusations pour génocide ou crimes de guerre, le personnel fait valoir que la chaîne «devrait être plus proactive dans sa couverture afin de remettre en contexte le conflit», insistant sur le fait que l’agression israélienne dans la région n’est pas décrite avec les «bons mots». 

En réponse à ces accusations, un porte-parole d’ABC déclare: «Tous les événements majeurs font l’objet de discussions internes approfondies. Nous écoutons et respectons les commentaires du personnel.» 

Le porte-parole s’est refusé à tout autre commentaire sur les questions internes, mais il affirme que le bureau du médiateur d’ABC a examiné la couverture du conflit à Gaza et l’a trouvée «professionnelle, de grande envergure et reflétant des événements dignes d’intérêt». 

Ces dernières nouvelles font suite à de précédentes controverses au sein d’ABC, notamment le licenciement prétendument illégal de la journaliste libano-australienne Antoinette Lattouf après qu’elle a partagé sur les réseaux sociaux un rapport de Human Rights Watch alléguant qu’Israël utilisait la famine comme arme de guerre à Gaza. 

Le personnel a menacé d’organiser une grève à moins que la direction de l’organisation ne réponde à ses préoccupations concernant une ingérence extérieure. 

Selon certaines informations, des tensions persisteraient au sein d’ABC quant au conflit à Gaza, bien des mois après la première réunion du personnel. 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com 


Abullatef Alrashoudi, le boulanger saoudien qui fait sensation à Paris

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  • Aujourd’hui âgé de 34 ans, Abullatef Alrashoudi gère son propre café dans l’un des quartiers les plus branchés de Paris
  • Abullatef Alrashoudi est déjà connu dans le quartier comme «le chef saoudien» et ses clients lui demandent toujours des nouvelles de son pays natal

LONDRES: Cinq ans après le début de sa carrière médicale, le chirurgien saoudien Abullatef Alrashoudi s’est séparé définitivement de son stéthoscope. 

Le jour de son 30e anniversaire, il reçoit une offre du Cordon Bleu, la prestigieuse école culinaire parisienne qui a formé des sommités – de la chef américaine Julia Child à Mary Berry, l’une des premières juges de «The Great British Bake Off». 

Aujourd’hui âgé de 34 ans, M. Alrashoudi, qui gère son propre café dans l’un des quartiers les plus branchés de Paris, considère ce courriel comme un tournant dans sa vie. 

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(Photo fournie) 

«C’était le plus grand des cadeaux», déclare-t-il. «La pâtisserie a toujours été mon rêve et la médecine me montrait que ce n’était pas la bonne voie.» 

Après ce changement, qui, selon lui, a énormément surpris ses collègues à l’hôpital, la carrière d’Abullatef Alrashoudi a connu un essor remarquable. Neuf mois exténuants à étudier les techniques de la pâte à pain et de la boulangerie qui lui ont permis de travailler dans les plus grands restaurants parisiens – et finalement d’ouvrir son propre café. 

LÂM – qui combine le surnom d’Abullatef Alrashoudi, «Latif», et «âme» – est ouvert depuis un peu plus de six mois, mais il accueille déjà un flux constant d’habitués. 

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(Photo fournie) 

Cet espace aéré et minéral à la façade verte se trouve en face d’une boutique de Bubble Tea et d’une galerie d’art dans un quartier «branché et en plein essor», juste à côté de la place de la République, dans la capitale française. 

Dans la vitrine, une machine italienne La Marzocco fabriquée à la main, dans le même vert vibrant que le drapeau saoudien, produit du café onctueux de la marque parisienne haut de gamme Coutume

Ces préparations aromatiques sont accompagnées de viennoiseries fines qui combinent les techniques françaises traditionnelles avec des saveurs alléchantes du Moyen-Orient: la richesse du tahini, le goût sucré des pistaches croustillantes et le parfum de la rose. 

Abullatef Alrashoudi est originaire de la province riche en dattes d’Al-Qassim, mais il a grandi dans le nord de Riyad. Il explique qu’à la place du roulé à la cannelle, sa boutique en sert une version au citron noir inspirée du dessert saoudien klēja, à base de pâte briochée moelleuse, de miel et de biscuits. 

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(Photo fournie) 

D’autres options novatrices incluent des petits pains au zaatar et à la feta, des pâtisseries mélangeant chocolat et cardamome, ainsi qu’un biscuit au tahini, pour lequel il utilise la technique française classique du beurre fondu pour ajouter «une saveur plus profonde». 

Depuis son ouverture en septembre, LÂM est rapidement devenu un lieu prisé. Alors que la plupart des clients sont «des habitants du quartier», M. Alrashoudi, qui parle couramment le français, espère que les mois à venir attireront davantage de visiteurs originaires du Golfe, en particulier à l’approche des jeux Olympiques, qui se tiendront dans la ville cet été. 

Mais avant que des millions de visiteurs du monde entier ne se rendent à Paris pour un mois d’épreuves sportives, Abullatef Alrashoudi se concentre sur le ramadan, avec des heures de jeûne dans la capitale française allant de 5 h 30 à 19 h cette année. 

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(Photo fournie) 

Pour marquer le mois sacré, il sert des dattes saoudiennes avec chaque café et il prévoit de perpétuer cette habitude après la fin du ramadan parce que les clients «apprécient vraiment cela». 

Impossible d’ôter à un Saoudien sa générosité. Conformément aux principes de la hafawa («hospitalité»), M. Alrashoudi réserve chaque soir une tasse de café à son voisin tunisien, un restaurateur qui fait le ramadan. 

Abullatef Alrashoudi est déjà connu dans le quartier comme «le chef saoudien» et ses clients lui demandent toujours des nouvelles de son pays natal – en particulier sur la transformation culturelle que connaît le Royaume ces dernières années dans le cadre de l’initiative Vision 2030 du prince héritier, Mohammed ben Salmane. 

Le jeune boulanger attribue une grande partie de son succès à ces changements. C’est la fondation Misk du prince héritier qui lui a accordé une bourse pour étudier au Cordon Bleu avec un groupe d’autres jeunes Saoudiens, qui depuis dirigent des restaurants dans le Royaume et au-delà. 

«Quand j'étais jeune, nombre de gens ne connaissaient pas l’Arabie saoudite, mais ces dernières années, cela a changé», explique M. Alrashoudi, qui reconnaît que LÂM est l’un des rares lieux culinaires du Golfe à travers le monde à avoir une incidence positive sur la perception que les gens ont de la région. 

Mais malgré la représentation croissante de la culture du Golfe sur la scène mondiale, pour la plupart des gens, la cuisine arabe évoque encore principalement des images de plats levantins comme le chawarma, le houmous et le falafel. 

Cela se reflète dans le paysage culinaire des grandes villes. Les statistiques de TripAdvisor révèlent que Londres et New York ne comptent, à elles deux, qu’un seul restaurant saoudien, bien qu’elles abritent des centaines de restaurants libanais et égyptiens. 

Abullatef Alrashoudi estime qu’il est temps de changer la donne, en particulier à une époque où les convives souhaitent de plus en plus élargir leurs horizons. 

«Le gouvernement déploie des efforts considérables pour inciter les gens à visiter l’Arabie saoudite et pour exporter notre culture», souligne-t-il. «C’est mon pays natal et je l’adore. Il est nécessaire que le reste du monde se familiarise avec notre culture.» 

 

Muffins à l’orange et au safran d’Abullatef Alrashoudi 

Ingrédients: 

200 g de sucre; zeste de 2 oranges; 2 œufs moyens; 105 ml d’huile d’olive; 2 cuillères à café d’essence de vanille; 300 g de farine tout usage; 1/2 cuillère à café de bicarbonate de soude; une généreuse pincée de sel; 60 g de farine d’amande; 120 g de babeurre; 120 ml de jus d’orange; 20 g de sucre; une pincée de safran 

Instructions: 

1. Mélangez 200 g de sucre avec le zeste d’orange jusqu'à ce que le mélange soit parfumé et que le sucre soit légèrement humide – cela aide à libérer les huiles du zeste, apportant une touche de saveur d’orange. 

2. Cassez les œufs dans le mélange sucre-zeste. Fouettez énergiquement jusqu’à ce que le tout soit bien mélangé. Ajoutez ensuite l’huile d’olive en fouettant. Il faut que le tout soit émulsifié, donnant à vos muffins une belle texture légère. Ajoutez ensuite l’essence de vanille. 

3. Dans un autre bol, fouettez ensemble la farine tout usage, le bicarbonate de soude, le sel et la farine d’amande. 

4. Creusez un puits au centre de vos ingrédients secs. Versez le mélange d’œufs, d’huile et de zeste. Mélangez le tout. 

5. Ajoutez le jus d’orange et le babeurre. Le mélange devrait maintenant être doré. Dans un autre bol, mélangez 20 g de sucre avec le safran pour saupoudrer les muffins. 

6. Versez la pâte dans des moules à muffins. Saupoudrez avec le mélange safran-sucre. Cuire au four préchauffé à 200°C pendant dix à quinze minutes, ou jusqu’à ce que les muffins soient dorés et qu’un cure-dents en ressorte propre. 

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com