Ethiopie: loin du front, les Tigréens visés par des arrestations arbitraires

Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP
Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP
Short Url
Publié le Vendredi 29 octobre 2021

Ethiopie: loin du front, les Tigréens visés par des arrestations arbitraires

  • Depuis douze mois, loin des combats, les Tigréens sont visées par une campagne d'arrestations arbitraires dans la capitale Addis Abeba et un peu partout dans le pays
  • Les arrestations ont commencé peu après le début, en novembre 2020, du conflit au Tigré, région la plus septentrionale d'Ethiopie

ADDIS ABEBA : Le jour n'était pas encore levé lorsqu'en ce jour de juillet, des policiers éthiopiens ont pénétré dans la cathédrale, à Addis Abeba. En pleine prière, ils ont emmené une douzaine de prêtres et moines d'ethnie tigréenne.

Les policiers n'ont donné aucune explication, mais les religieux ont immédiatement compris qu'ils allaient rejoindre les milliers de Tigréens accusés de soutenir le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) qui combat depuis un an l'armée fédérale dans le nord du pays.

addis
Des gens marchent devant des magasins incendiés dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

Depuis douze mois, loin des combats, les Tigréens sont visées par une campagne d'arrestations arbitraires dans la capitale Addis Abeba et un peu partout dans le pays, ce que beaucoup d'observateurs décrivent comme l'une des faces cachées de ce conflit dévastateur.

Les responsables des forces de l'ordre affirment que ces arrestations sont légitimes et s'inscrivent dans la lutte contre le TPLF, classé organisation "terroriste" en mai.

Mais des entretiens menés par l'AFP avec des dizaines de détenus, avocats, responsables judiciaires et militants des droits humains révèlent plutôt des arrestations systématiques ciblant toute personne d'ethnie tigréenne. 

Les victimes interrogées affirment que leurs expériences s'apparentent à du profilage ethnique, avec des dossiers construits sur des motifs douteux.

Les religieux arrêtés ont été détenus plus de deux semaines par la police qui les accusait de collecter des fonds pour le TPLF, de brûler des drapeaux éthiopiens et même de préparer des attentats.

L'un des moines se souvient n'avoir pu s'empêcher de rire lorsqu'un enquêteur lui a demandé où ils cachaient leurs pistolets.

"Nous leur avons dit que nous étions des hommes de foi, pas des hommes politiques", raconte-t-il, sous couvert d'anonymat: "Je ne sais pas d'où ils tiennent leurs informations. Mais ils utilisent cela pour nous réprimer, nous les Tigréens, pour nous faire vivre dans la peur."

Complot

Les arrestations ont commencé peu après le début, en novembre 2020, du conflit au Tigré, région la plus septentrionale d'Ethiopie. Cette confrontation armée a marqué le point culminant de mois de tensions entre le Premier ministre Abiy Ahmed et le TPLF, parti ayant dirigé de fait l'Ethiopie avant l'arrivée d'Abiy en 2018.

Au départ, elles ciblaient essentiellement le personnel militaire. 

Deux semaines après le début des combats, des dizaines d'officiers tigréens ont été convoqués pour une réunion à Addis Abeba. Les médias d'Etat ont diffusé les images, présentées comme une preuve de leur soutien au gouvernement. 

Mais un peu plus tard, au moins trois de ces officiers ont été arrêtés et leurs domiciles fouillés. Ils ont été emprisonnés pour avoir prétendument comploté pour renverser Abiy Ahmed, ont affirmé à l'AFP des membres de leurs familles.

Michael, fils de l'un d'eux, était stupéfait. "Il n'aimait pas parler de politique", explique-t-il en évoquant son père, officier de niveau intermédiaire avec 30 ans de service: "Il nous grondait quand nous parlions de politique."

Depuis que des médias d'Etat ont annoncé en août qu'un tribunal militaire avait prononcé des condamnations à mort contre des officiers "traîtres", l'inquiétude de Michael grandit.

Son père, toujours détenu dans un camp militaire à l'ouest d'Addis Abeba, peut recevoir des visites trois fois par semaine.

Il fait partie des mieux lotis. Des milliers d'autres ont été ou sont toujours détenus au secret.

Un porte-parole militaire n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP.

Commerces fermés

Alors que la guerre se prolongeait, les détentions ont continué. Elles se sont multipliées fin juin après que le TPLF a reconquis la majeure partie du Tigré.

Trois nuits après la reprise de la capitale régionale Mekele, des policiers ont frappé à la porte d'Alula, un militant tigréen qui dénonçait les massacres et viols collectifs sur internet.

tigrée
Alula (nom d'emprunt) dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

Détenu pendant une nuit dans un commissariat d'Addis Abeba, il a ensuite été conduit dans un camp militaire à 200 kilomètres à l'est. 

Pendant les sept semaines suivantes, Alula a vécu d'un morceau de pain et de deux tasses d'eau par jour, comme les plus de 1.000 prisonniers du camp.

Parmi eux se trouvaient des journalistes et des hommes politiques ayant évoqué les horreurs du conflit qui a fait des milliers de morts et poussé, selon l'ONU, des centaines de milliers de personnes au bord de la famine. 

Alula a été libéré mais il ne se sent plus en sécurité pour parler de la guerre. "Si je le fais, je serai à nouveau arrêté, peut-être tué", explique-t-il.

Des milliers d'entreprises "soutenant le TPLF" ont également été fermées, comme s'en est félicité un responsable du ministère du Commerce en septembre.

Sur un seul pâté de maisons d'Addis Abeba, sept bars et deux hôtels ont été fermés en juillet, officiellement en raison de la "pollution sonore".

addis
Un jeune vendeur de rue marche devant des magasins fermés, prétendument en raison de l'origine de leurs propriétaires, dans la ville d'Addis-Abeba, en Éthiopie, le 21 octobre 2021. EDUARDO SOTERAS / AFP

"C'est un mensonge", assure le propriétaire d'un des bars: "En gros, ils imaginent que les Tigréens célébraient l'avancée du TPLF".

Selon lui, ces fermetures prouvent que les autorités ciblent tous les Tigréens, pas seulement les soutiens actifs du TPLF.

Ethiopie: les dates marquantes du conflit au Tigré

Voici les dates marquantes de l'intervention de l'armée éthiopienne, lancée il y a un an, dans la région dissidente du Tigré, un conflit qui s'est propagé à d'autres régions, alimentant les craintes d'une famine de grande ampleur.

Intervention militaire

Le 4 novembre 2020, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, lance une opération militaire contre les autorités du Tigré, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) qu'il accuse d'avoir orchestré des attaques sur deux bases de l'armée fédérale.

L'Union africaine et l'ONU appellent à cesser les hostilités.

Le 13, l'ONU demande une enquête sur de possibles "crimes de guerre", puis s'alarme d'une "crise humanitaire à grande échelle" à la frontière avec le Soudan.

Des informations indiquent la présence de troupes venues de l'Erythrée voisine, ennemie jurée du TPLF.

Le 28, M. Abiy annonce que l'armée fédérale contrôle la capitale régionale Mekele et déclare l'opération militaire "terminée".

Exactions, désastre humanitaire

Malgré la victoire proclamée, les combats se poursuivent, entravant l'acheminement de l'aide humanitaire. Les récits d'exactions se multiplient.

Le 26 février 2021, Amnesty International accuse des soldats érythréens d'avoir tué "des centaines de civils" en novembre à Aksoum (nord du Tigré). Un massacre ultérieurement confirmé par la Commission éthiopienne des droits de l'Homme, organisme indépendant rattaché au gouvernement.

Le 10 mars, Washington dénonce des "actes de nettoyage ethnique" dans le Tigré occidental, contrôlé par les forces de la région voisine de l'Amhara appuyant l'armée éthiopienne.

Pendant des mois, Addis Abeba et Asmara nient toute présence militaire érythréenne au Tigré, finalement reconnue par Abiy Ahmed le 23 mars. Il annonce ensuite le retrait des troupes érythréennes. 

Le 26, les Etats-Unis exhortent l'Ethiopie à réagir face à l'aggravation du "désastre humanitaire" et appellent les troupes érythréennes à se retirer "de manière vérifiable".

En mai, Washington prend des sanctions contre des responsables érythréens et éthiopiens. Le président Joe Biden condamne des violations "inacceptables" des droits humains.

Elections, contre-offensive rebelle

Le 21 juin, l'Ethiopie organise des élections législatives et régionales, qui ne se tiennent pas dans certaines circonscriptions, notamment au Tigré. Le parti d'Abiy Ahmed remporte une majorité écrasante.

Le 28 juin, les rebelles pro-TPLF entrent dans Mekele, dix jours après avoir lancé une contre-offensive. Elles assurent que la lutte va "s'intensifier" jusqu'au départ des "ennemis" de la région, malgré un cessez-le-feu décrété par le gouvernement éthiopien.

Le 3 juillet, un haut responsable de l'ONU déclare que plus de 400.000 personnes ont "franchi le seuil de la famine" au Tigré.

Le conflit se propage aux régions voisines du Tigré, de l'Afar et de l'Amhara. 

Le 5 août, les rebelles prennent le contrôle de la ville amhara de Lalibela, classée par l'Unesco au patrimoine mondial.

Mobilisation générale

Le 10 août, Abiy Ahmed appelle la population à rejoindre les forces armées.

Le 9 septembre, le gouvernement affirme que les rebelles ont été "mis en déroute" dans la région de l'Afar.

Le 30 septembre, le gouvernement annonce l'expulsion de sept responsables d'agences onusiennes accusés d'"ingérence". 

Le 4 octobre, Abiy Ahmed est investi pour un nouveau mandat de cinq ans. 

Le 7, les forces gouvernementales et leurs alliés engagent des offensives aériennes et terrestres contre les rebelles dans la région de l'Amhara.

Le 18, l'aviation éthiopienne mène des frappes sur Mekele, une première depuis novembre, tuant trois enfants et blessant plusieurs autres personnes, selon l'ONU. 

D'autres frappes ont lieu les jours suivants au Tigré, tuant plusieurs civils.

Méfiance

L'ampleur exacte de cette répression est impossible à déterminer, estime Fisseha Tekle, chercheur pour Amnesty International.

Il affirme que l'ONG a "reçu plusieurs témoignages" faisant état d'un millier de personnes détenues dans un seul camp dans des conditions "sordides".

De nombreuses personnes arrêtées sont toujours portées disparues. "Des familles ont parcouru des centaines de kilomètres à la recherche de proches. D'autres ont fait le tour des commissariats d'Addis", souligne-t-il.

Ces arrestations ont été critiquée par certains dirigeants.

Fin septembre, Abraha Desta, haut responsable de l'administration intérimaire installée au Tigré après l'éviction du TPLF, a estimé sur Facebook que les autorités avaient créé un environnement où parler le tigrinya, la langue tigréenne, "est considéré comme un crime".

Le lendemain, il a été arrêté, accusé de violation de la législation sur les armes à feu et de provocation.

D'autres responsables ont exprimé leur mécontentement en privé.

Lors d'un séminaire en septembre, le procureur général Gedion Timothewos a ainsi réprimandé des membres de la direction du recouvrement des avoirs pour leur zèle dans la poursuite d'entrepreneurs tigréens, selon plusieurs participants.

Il les a accusés d'"abus de pouvoir" et les a appelés à arrêter le "profilage ethnique". 

Désormais ministre de la Justice, M. Gedion n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP. 

Même si ces arrestations cessaient, leurs victimes pensent qu'elles ont déjà gravement délité le tissu social éthiopien, notamment à Addis Abeba où les Tigréens vivaient autrefois librement.

"Il est évident que tout le monde se méfie (...) Personne ne sait ce qui se passera demain", explique un avocat tigréen, qui représente 90 Tigréens détenus: "Moi-même, je ne suis pas confiant. A tout moment, ils peuvent m'arrêter."


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Short Url
  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.