«Très compliqué»: l'Ouzbékistan apprend à commercer avec les talibans

Les échanges commerciaux entre l'Ouzbékistan et l'Afghanistan se sont élevés en 2020 à 665 millions d'euros, en hausse de 25% par rapport à l'année précédente. (AFP)
Les échanges commerciaux entre l'Ouzbékistan et l'Afghanistan se sont élevés en 2020 à 665 millions d'euros, en hausse de 25% par rapport à l'année précédente. (AFP)
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Publié le Lundi 01 novembre 2021

«Très compliqué»: l'Ouzbékistan apprend à commercer avec les talibans

  • Les délais de franchissement des douanes se sont allongés, ce qui coûte de l'argent aux compagnies qui font du commerce et aux chauffeurs
  • «Avant, l'aller-retour durait trois jours. Maintenant, il faut une semaine !» affirme un livreur

TERMEZ: Accroupis dans la poussière soulevée par le ballet des poids lourds dans la ville de Termez, dans le sud de l'Ouzbékistan, des chauffeurs pestent contre le ralentissement du commerce avec l'Afghanistan depuis le retour des talibans.


"Avant, l'aller-retour durait trois jours. Maintenant, il faut une semaine !", maugrée Rafik Khoudjakov, qui livre régulièrement des haricots à Mazar-i-Sharif, dans le Nord afghan, d'où il revient habituellement avec une cargaison de patates.


"Ces gens-là (les talibans) ne savent même pas utiliser les ordinateurs" de la douane, ajoute-t-il.


Plus de deux mois après le retour au pouvoir des talibans à Kaboul, les commerçants du sud de l'Ouzbékistan constatent que les échanges sont possibles avec les extrémistes religieux, à condition de s'armer de patience.


Pour l'Ouzbékistan, un pays enclavé d'environ 34 millions d'habitants, l'Afghanistan représente à la fois un marché et une voie de passage pour atteindre les ports du Pakistan et de l'Iran, donc le reste du monde.


Et le centre de fret de Termez, où M. Khoudjakov et les autres camionneurs patientent, est une plaque tournante importante : ouvert en 2016, il est situé à 60 km à peine de Mazar-i-Sharif, grande ville afghane.

Nouveaux défis 
Si le commerce avec l'Afghanistan n'a jamais été facile, l'arrivée des talibans a engendré de nouveaux défis.


M. Khoudjakov explique ainsi que les délais de franchissement des douanes se sont allongés, ce qui coûte de l'argent aux compagnies qui font du commerce et aux chauffeurs.


"Ils vérifient et se contrôlent les uns les autres. C'est devenu très compliqué", peste le chauffeur, suscitant l'acquiescement de ses collègues autour de lui.


Ahmad, un patron ayant requis l'anonymat, explique que ses coûts ont augmenté car ses chauffeurs, des Afghans munis de visas ouzbeks, refusent d'aller plus loin que le poste-frontière d'Hairatan, craignant de ne plus pouvoir revenir.


Par conséquent, son entreprise doit embaucher d'autres chauffeurs de l'autre côté de la frontière pour conduire les marchandises à destination.


"Le retour au pouvoir de ce groupe (taliban) n'a rien apporté de bon", grommelle Ahmad.


Mais de l'autre côté du "pont de l'Amitié" qui enjambe la frontière naturelle entre les deux pays formée par le fleuve Amou-Daria, le nouveau chef --taliban-- de la douane du poste d'Hairatan dément tout allongement des délais.


"Il n'y a rien de tel. Tous ceux qui commercent sont satisfaits. Ils sont encore plus contents que sous le précédent gouvernement (afghan). Les marchandises franchissent la douane rapidement", affirme Abdoul Sattar Rachid.


Ce matin-là, l'AFP a vu plusieurs camions et deux trains d'une trentaine de wagons chacun franchir la frontière.

«Grand avenir»
Les échanges commerciaux entre l'Ouzbékistan et l'Afghanistan se sont élevés en 2020 à 665 millions d'euros, en hausse de 25% par rapport à l'année précédente.


Avant l'irruption des talibans, Tachkent et Kaboul avaient pour cible d'atteindre 1,7 milliard d'euros en 2023.


Pour parvenir à cet objectif ambitieux, une voie ferrée allant de Mazar-i-Sharif à la ville portuaire pakistanaise de Peshawar, via Kaboul, devait être construite.


Mais il faudrait des années pour aménager cette infrastructure, et obtenir les financements s'annonce difficile pour un régime isolé diplomatiquement comme celui des talibans.


Nodir Djalilov, le directeur du centre de Termez, reste toutefois optimiste.


"Notre centre a un grand avenir en ce qui concerne le commerce transitant (par l'Afghanistan) vers les ports au Pakistan comme Gwadar et Karachi", dit M. Djalilov à l'AFP.


"Bien entendu, le mot Afghanistan fait encore peur" aux hommes d'affaires, admet-il toutefois.


Même si Tachkent n'a pas encore reconnu le nouveau gouvernement de Kaboul, une délégation talibane s'est rendue mi-octobre à Termez pour discuter avec des responsables ouzbeks de la voie ferrée, entre autres.


Les talibans "voulaient tout savoir: comment les gens vivent ici, ce que l'Afghanistan peut acheter, ce qu'il peut vendre. Ils sont repartis très contents d'avoir un partenaire comme l'Ouzbékistan", déclare Amroulloh Sadoullah, un homme d'affaires afghan qui vit en Ouzbékistan depuis les années 1990.


Un nombre croissant d'Afghans sont venus à Termez pour y ouvrir des commerces ces dernières années, indique M. Sadoullah. 


Et pour lui, pas de doute, les échanges vont exploser: "Si vous revenez à Termez dans cinq ans, la ville sera méconnaissable !".


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.