Le scepticisme du président américain ne laisse rien présager de bon pour la COP26

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Publié le Jeudi 04 novembre 2021

Le scepticisme du président américain ne laisse rien présager de bon pour la COP26

  • Ce cynisme face à la motivation des autres participants de la COP26 met en lumière un degré d’ignorance auquel on ne s’attendrait pas de la part du «leader du monde libre»
  • Un peu moins de scepticisme pourrait persuader le reste du monde de suivre son exemple

Les dirigeants du monde entier sont arrivés. Ils se sont concertés puis ont prononcé leurs discours lors de la Conférence des nations unies sur les changements climatiques de 2021, également connue sous le nom de «COP26». Cependant, à Glasgow, un certain scepticisme menace de faire échouer tout accord potentiel une fois que le communiqué final sera rédigé à la fin de la semaine prochaine.

Le scepticisme ne découle pas uniquement des manifestants qui se sont rassemblés devant le Scottish Exhibition Centre pour exprimer leurs préoccupations en matière de changement climatique. Ces jeunes – principalement originaires de pays européens – adoptent une position idéologique qui ne se contentera de rien d'autre qu’une interdiction complète de ce qu’ils considèrent comme des combustibles fossiles très nocifs. D’ailleurs, ils ne sont pas prêts à écouter des arguments susceptibles de contredire cette position.

Ce scepticisme provient également de personnes qui devraient normalement être mieux informées. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est montré sceptique quant à la motivation de certains pays présents à l’événement. Il a laissé entendre que quelques participants anonymes ne sont pas sincères dans les buts qu’ils ont établis pour lutter contre le changement climatique, notamment en termes d’échéances au niveau de l’objectif zéro émission nette et de nouveaux objectifs pour les contributions déterminées au niveau national. Il a préféré en taire les noms.

Le président américain, Joe Biden, n'a pas fait preuve d'une telle retenue. Lors d'une conférence de presse organisée avant la COP26, après l'échec du Groupe des vingt (G20) à trouver des solutions significatives au problème du changement climatique, le dirigeant a appelé à davantage d'action.

«Nous avons fait des progrès importants et il reste encore beaucoup à faire. Mais cela va nous inciter à nous concentrer sur ce que la Russie, la Chine et l’Arabie saoudite ne font pas.»

Ce cynisme face à la motivation des autres participants à la COP26 met en lumière un degré d’ignorance auquel on ne s’attendrait pas de la part du «leader du monde libre».

Pour sa part, l’Arabie saoudite s’est engagée à mettre en place le plus grand changement de son Histoire au niveau de sa politique énergétique. Un objectif zéro émission nette d’ici à 2060 et de fortes réductions des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 sont des mesures radicales pour le plus grand exportateur de pétrole au monde.

 

«Le président américain arrive à la COP26 avec de nombreux gages de respect de l’environnement et un rôle de premier plan dans la campagne visant à contrôler le réchauffement climatique et à en atténuer les effets.» 

Frank Kane

 

La position saoudienne est beaucoup plus nuancée que Joe Biden ne le croit. Bien entendu, en tant qu’économie dont la plus grande partie du produit intérieur brut (PIB) provient du secteur pétrolier, elle doit veiller à ce que les revenus des hydrocarbures continuent de circuler afin de garantir qu’elle dispose des ressources nécessaires pour maintenir et améliorer le niveau de vie des citoyens et des résidents.

Le pays a également besoin de ces revenus pour financer la transition vers des formes de carburants plus propres qui joueront un rôle essentiel dans les futures sources énergétiques du Royaume. D’ici à 2030, le pétrole ne sera plus utilisé dans la production nationale d’électricité, qui sera plutôt alimentée par des sources renouvelables comme les énergies éolienne et solaire et une proportion égale de gaz naturel. Le président Biden devrait être au courant de tout cela.

Il n’est toutefois pas surprenant qu’il ait, lui aussi, adopté une attitude sceptique. La position de l’administration Biden sur les questions énergétiques est cynique depuis l’entrée en fonction du président. Redevable à l’aile gauche du parti démocrate, il met en œuvre un programme respectueux de l’environnement qui maintient le secteur énergétique américain, en particulier l'industrie pétrolière, dans l'impasse.

Malgré le prix du pétrole brut qui est proche de la barre des 90 dollars américains (1 dollar = 0,86 euro) le baril, les producteurs américains de schiste n’augmentent toujours pas leur production. Lorsque Joe Biden appelle les pays de l’Opep+ (14 pays de l'Opep + 10 autres pays) à augmenter la production de pétrole pour faire baisser les prix, il devrait d’abord balayer devant sa porte en encourageant l’industrie nationale à récupérer une partie de la production qu’elle a perdue lors de la grande récession en lien avec la pandémie de 2020.

Le président américain arrive à la COP26 avec de nombreux gages de respect de l’environnement et un rôle de premier plan dans la campagne visant à contrôler le réchauffement climatique et à en atténuer les effets. Un peu moins de scepticisme pourrait persuader le reste du monde de suivre son exemple.

 

Frank Kane est un journaliste spécialisé dans le domaine des affaires, ayant remporté de nombreux prix. Il est basé à Dubaï.  

 

Twitter: @frankkanedubai

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.