Migrants : les Européens divisés sur le financement de clôtures

La Pologne, qui a mis en place des barbelés le long de sa frontière, prévoit de construire un mur sur plus de 100 km. (Photo, AFP)
La Pologne, qui a mis en place des barbelés le long de sa frontière, prévoit de construire un mur sur plus de 100 km. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 11 novembre 2021

Migrants : les Européens divisés sur le financement de clôtures

  • «Il faudra clarifier la capacité pour l'Union européenne de faire preuve de solidarité ou pas vis-à-vis des pays qui sont en première ligne»
  • «Est-ce qu'il est possible pour l'UE de montrer notre solidarité en les aidant à protéger leurs frontières nationales qui sont aussi les frontières européennes ?»

BRUXELLES : L'UE doit-elle financer des clôtures à ses frontières pour empêcher l'arrivée des migrants qui transitent par le Bélarus? Le président du Conseil Charles Michel a envisagé mercredi cette possibilité réclamée par certains Etats membres, mais que rejette la Commission.


Alors que le Bélarus est accusé par l'UE d'orchestrer un afflux de migrants, dont plus de 2.000 sont bloqués à la frontière avec la Pologne, Charles Michel a indiqué qu'il était "juridiquement possible" que l'Union finance de telles infrastructures, lors d'une conférence de presse au côté du Premier ministre Mateusz Morawiecki à Varsovie.


Il a rappelé que cette question avait été abordée lors du dernier sommet européen, le 22 octobre à Bruxelles.


"Il faudra clarifier la capacité pour l'Union européenne de faire preuve de solidarité ou pas vis-à-vis des pays qui sont en première ligne", a-t-il dit.


"Selon le service juridique du Conseil -institution représentant les Vingt-Sept-, il est juridiquement possible de financer au niveau européen ces infrastructures", a-t-il ajouté, précisant que cette décision devrait être prise par la Commission européenne.


La Pologne, qui a mis en place des barbelés le long de sa frontière, prévoit de construire un mur sur plus de 100 km, dont le coût est évalué à 353 millions d'euros. La Lituanie a de son côté commencé à ériger une clôture en fer qui doit s'étendre sur 300 km.

 

Migrants: comprendre la crise à la frontière Pologne-Bélarus en 5 questions

MOSCOU : L'afflux de migrants à la frontière entre la Pologne et le Bélarus a provoqué une crise diplomatique entre ces deux pays et l'inquiétude de l'Europe.


Voici cinq questions pour comprendre cette situation complexe.

Quelle est la situation sur le terrain ?
Plusieurs milliers de migrants voulant gagner l'Europe sont bloqués le long des quelque 400 kilomètres de frontière entre le Bélarus et la Pologne, dont plus de 2.000 dans un camp de fortune face au village polonais de Kuznica.


Ces personnes, parmi lesquelles se trouvent des enfants et des femmes, vivotent dans des conditions difficiles. La nuit, les températures descendent sous zéro degré Celsius.


D'après les autorités polonaises, des groupes ont tenté mardi et mercredi de forcer la frontière en plusieurs points.


Des vidéos publiées par les autorités polonaises montrent certains migrants utilisant des troncs d'arbres comme béliers pour abattre la clôture surmontée de fils de fer barbelé érigée par Varsovie à la frontière.


Au moins dix personnes sont mortes ces dernières semaines, dont sept sur le sol polonais, selon le quotidien Gazeta Wyborcza.

D'où viennent les migrants ?
Il s'agit principalement de personnes qui ont fui des conflits ou la misère au Proche-Orient ou en Afrique.


Un grand nombre d'entre eux sont des Kurdes du nord de l'Irak. Ces trois derniers mois, 1.600 personnes ont rallié le Bélarus grâce à un visa de tourisme depuis le Kurdistan irakien, selon l'Association des réfugiés du Kurdistan.


Des personnes venant de Syrie, pays en guerre depuis dix ans, sont également présentes à la frontière.


Une Polonaise qui vient en aide aux migrants sur place a également dit à l'AFP avoir vu des ressortissants du Yémen, de Côte d'Ivoire et, même, de Cuba.

Pourquoi l'UE accuse-t-elle le Bélarus? 
Bruxelles accuse l'autoritaire président bélarusse Alexandre Loukachenko d'avoir orchestré cette crise migratoire pour se venger des sanctions occidentales imposées à son régime pour la brutale répression de manifestations l'an dernier.


M. Loukachenko, qui dirige d'une main de fer le Bélarus depuis 1994, réfute ces accusations.


Mais, fin mai, il avait prévenu les Européens que le Bélarus ne stopperait plus "les drogues et les migrants" en route pour l'Europe.


Varsovie accuse Minsk de délivrer des visas de transit aux ressortissants de plusieurs pays afin d'attirer les candidats à l'exil, de les acheminer jusqu'à la frontière et même de leur fournir des outils pour découper la clôture.


M. Loukachenko est accusé de jouer sur la peur de l'Europe d'un afflux massif de migrants, très vive depuis la crise de l'été 2015 lors de laquelle plusieurs centaines de milliers de personnes avaient gagné la Grèce depuis la Turquie voisine.


Début 2020, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait lui aussi joué sur cette crainte en laissant passer des dizaines de milliers de migrants vers la frontière grecque.

Comment réagit la Pologne ?
Face à l'afflux de migrants, Varsovie a dénoncé une "attaque" de Minsk, musclé son dispositif à la frontière, où elle a déployé quelque 15.000 militaires, et décidé de construire un mur.


La Pologne a aussi imposé l'état d'urgence dans la zone frontalière et autorisé ses forces de sécurité à refouler les migrants.


L'une des interrogations concerne la coopération entre la Pologne et l'Union européenne, dont les relations sont très tendues, Bruxelles s'inquiétant de la situation de l'Etat de droit dans ce pays membre.


Le président du Conseil européen Charles Michel s'est rendu mercredi à Varsovie pour s'entretenir avec le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki.

La Russie, solution ou problème ?
Accusée par la Pologne d'être la "commanditaire" de cette crise, la Russie, principal soutien du Bélarus, est restée relativement discrète jusque-là.


Conscientes de l'influence de Moscou sur Minsk, l'UE et l'Allemagne ont appelé mercredi le président russe Vladimir Poutine à intervenir pour faire cesser la crise.


Fragilisé par les sanctions occidentales, le régime de M. Loukachenko est fortement dépendant du soutien financier et politico-militaire de la Russie.


Mais M. Poutine, qui s'efforce depuis plusieurs mois d'obtenir de Berlin la mise en service d'un nouveau gazoduc, fait pour l'instant la sourde oreille, se bornant à appeler au dialogue.


Moscou a aussi invité l'Europe à apporter une aide financière à Minsk pour prendre en charge les migrants.

«Décision dès que possible»

Charles Michel a souligné que la Lituanie avait "600-700 km de frontière avec le Bélarus". "Nous faisons face à une situation totalement nouvelle", a-t-il plaidé, dénonçant à nouveau une "attaque hybride" de la part du Bélarus. 


"Est-ce qu'il est possible pour l'UE de montrer notre solidarité en les aidant à protéger leurs frontières nationales qui sont aussi les frontières européennes ?", a-t-il lancé. 


"J'espère qu'il sera possible de prendre une décision dès que possible sur ce sujet important", a-t-il ajouté, alors qu'un sommet par visioconférence consacré à la crise avec le Bélarus pourrait être convoqué prochainement, selon une source européenne.


Les ministres de l'Intérieur de 12 pays (Autriche, Bulgarie, Chypre, Danemark, Estonie, Grèce, Hongrie, Lituanie, Lettonie, Pologne et République tchèque, Slovaquie) avaient écrit en octobre à la Commission pour demander à l'UE de financer la construction de telles clôtures. Mais la présidente de l'exécutif européen Ursula von der Leyen avait opposé une fin de non recevoir à l'issue du dernier sommet.


"Il y a une position commune de longue date de la Commission et du Parlement européen (sur le fait) qu'il n'y aura pas de financement de barbelés et de murs", avait-elle déclaré.


La Hongrie avait érigé ce type de clôture à la frontière avec la Serbie et la Croatie -pays membre de l'UE mais qui n'est pas dans Schengen- lors de la crise migratoire de 2015. La Slovénie a fait de même avec la Croatie.


«Passion des murs»

Le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes Clément Beaune a épinglé sur Twitter "la passion des murs" qui "revient sur notre continent", rappelant que le 9 novembre était l'anniversaire de la chute du Mur de Berlin.


Interrogé lors d'un point de presse, un porte-parole de la Commission a réitéré la position de Mme von der Leyen, tout en soulignant que l'UE consacrait des "financements très substantiels" à la gestion des frontières, qui se sont élevés entre 2014 et 2020 à 1,6 milliard d'euros.


Ces fonds servent à l'acquisition de systèmes de surveillance modernes, de véhicules et de drones notamment, a-t-il précisé, assurant que la Commission savait exactement comment cet argent européen était utilisé.


La question de ce financement divise aussi au Parlement, où le chef du groupe PPE (droite), première force politique, l'Allemand Manfred Weber, s'y est déclaré favorable. "Il y a une guerre hybride en cours, nous ne devons pas être naïfs. La Lituanie, la Lettonie et les autres méritent tout notre soutien notamment des fonds pour une barrière physique si besoin", avait-il tweeté fin octobre.


A l'inverse, les Socialistes & Démocrates (S&D) s'y opposent. "Nous le disons haut et fort: l'UE ne financera jamais de mur", a tweeté le groupe. "Nous avons d'autres instruments pour arrêter le drame à la frontière entre la Pologne et le Bélarus", a déclaré la présidente de ce groupe, l'Espagnole Iratxe Garcia, devant l'hémicycle, appelant à l'adoption "sans délai" de nouvelles sanctions à l'encontre du régime bélarusse.


Poutine, investi président, promet aux Russes la victoire

Le président russe Vladimir Poutine (à droite) et le patriarche orthodoxe russe Kirill assistent à un service dans la cathédrale de l'Annonciation après la cérémonie d'investiture de Poutine au Kremlin de Moscou le 7 mai 2024 (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine (à droite) et le patriarche orthodoxe russe Kirill assistent à un service dans la cathédrale de l'Annonciation après la cérémonie d'investiture de Poutine au Kremlin de Moscou le 7 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Le chef du Kremlin fait face néanmoins à plusieurs défis, notamment économiques, alors que l'issue du conflit en Ukraine
  • Les Occidentaux, Washington en tête, avaient de leur côté fustigé un vote sous contrainte

MOSCOU: Vladimir Poutine a prêté mardi serment pour un cinquième mandat à la tête de la Russie, jusqu'en 2030, en promettant à ses compatriotes de vaincre "ensemble" en plein conflit armé contre l'Ukraine présenté comme existentiel.

Lors d'une cérémonie au Kremlin en présence de 2.500 invités, dont l'élite politique du pays et des soldats combattant en Ukraine, le président russe, 71 ans, a livré un court discours solennel.

"C'est un grand honneur, une responsabilité et un devoir sacré", a-t-il déclaré, en remerciant les "héros" qui combattent sur le front.

"Nous traverserons avec dignité cette période difficile et nous deviendrons encore plus fort", a ajouté le dirigeant russe, selon une journaliste de l'AFP présente sur place.

En pleine tension avec les Occidentaux, soutiens de Kiev contre l'offensive russe, il a assuré que Moscou ne refusait pas "le dialogue" avec ces derniers, mais que le "choix dépendait d'eux".

"Une discussion sur les questions de sécurité et de stabilité stratégique est possible (...) mais seulement sur un pied d'égalité, en respectant les intérêts de chacun", a-t-il affirmé.

La veille, il a ordonné la tenue d'exercices nucléaires près de l'Ukraine en réponse, selon le Kremlin, à des déclarations jugés menaçantes de dirigeants occidentaux, notamment celle du président français Emmanuel Macron sur le possible envoi de troupes en Ukraine.

"Nous sommes un peuple uni et grand, et ensemble nous surmonterons tous les obstacles (...) Ensemble nous gagnerons", a conclu Vladimir Poutine.

Il a ensuite assisté à une cérémonie religieuse en présence du patriarche Kirill, chef de l'Église orthodoxe russe et fervent soutien du Kremlin.

Pouvoir incontesté 

Le chef de l'État russe, aux commandes depuis près d'un quart de siècle, jouit d'un pouvoir incontesté en Russie après l'écrasement des voix dernières dissidentes dans la foulée du conflit en Ukraine.

Il rempile jusqu'en 2030, avec la possibilité d'effectuer ensuite un autre mandat jusqu'en 2036.

Son investiture est intervenue cette année à deux jours de l'anniversaire de la victoire soviétique du 9 mai contre l'Allemagne nazie, dont la célébration est un pilier de la politique de puissance de Vladimir Poutine, qui assure combattre en Ukraine des "néo-nazis".

La cérémonie coïncide aussi avec une situation plus favorable sur le front pour l'armée russe, qui avait subi d'humiliants revers au printemps et à l'automne 2022, lors des premiers mois de son attaque à grande échelle contre Kiev.

Ces dernières semaines, les assauts russes dans l'est de l'Ukraine ont augmenté en intensité et permis la prise progressive de plusieurs localités, en particulier dans la zone de la ville-clef d'Avdiïvka, conquise mi-février.

En face, les troupes de Kiev manquent de munitions et de recrues après leur contre-offensive infructueuse à l'été 2023. Elles attendent l'arrivée d'une nouvelle aide américaine, alors que l'industrie de défense russe tourne, elle, à plein régime.

«Ni paix, ni liberté»

Mi-mars, à l'issue d'un scrutin remporté officiellement avec plus de 87% des scrutins exprimés, Vladimir Poutine avait déjà dressé le portrait d'une Russie "unie" derrière lui et son armée.

Les Occidentaux, Washington en tête, avaient de leur côté fustigé un vote sous contrainte, quelques semaines après la mort en prison, le 16 février, du principal opposant russe, Alexeï Navalny.

En exil à l'étranger, la veuve de ce dernier, Ioulia Navalnaïa, qui a juré de poursuivre son combat, a fustigé Vladimir Poutine dans une vidéo publiée mardi quelques minutes avant le début de la cérémonie d'investiture.

"Avec lui à la barre, notre pays n'aura ni paix, ni développement, ni liberté", a-t-elle affirmé.

Lundi, la diplomatie ukrainienne avait pour sa part estimé que cette investiture était destinée à donner "une illusion de légalité" au maintien au pouvoir de M. Poutine qui, selon Kiev, a transformé la Russie "en État agresseur" et "en dictature".

Les principaux membres de l'opposition russe sont désormais en exil ou en prison, tout comme des centaines de personnes ordinaires qui ont affiché leur opposition à l'offensive de Moscou contre son voisin ukrainien.

Le chef du Kremlin fait face néanmoins à plusieurs défis, notamment économiques, alors que l'issue du conflit en Ukraine, très meurtrier, semble toujours incertaine.

L'inflation, tirée notamment par l'explosion du budget fédéral, liée aux dépenses militaires, reste persistante et inquiète la population, dont le pouvoir d'achat est déjà plombé par les effets des sanctions occidentales.

Et l'économie russe, toujours dépendante des revenus des hydrocarbures, doit également négocier un virage, revendiqué par Vladimir Poutine, vers l'Asie, même si les infrastructures nécessaires, coûteuses et longues à construire, manquent encore.


Biden va prononcer un discours axé sur la dénonciation de l'antisémitisme

Le président américain Joe Biden (Photo, AFP).
Le président américain Joe Biden (Photo, AFP).
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  • Son silence pendant plusieurs jours avait attiré des critiques des camps républicain comme démocrate en pleine année électorale
  • Son adresse au Congrès se fait dans le cadre de la cérémonie annuelle des Jours du souvenir, organisée par le musée américain de l'Holocauste au Capitole

WASHINGTON: Joe Biden doit s'exprimer mardi lors d'une cérémonie de commémoration de l'Holocauste pour condamner l'antisémitisme, au moment où la tension demeure sur les campus américains autour d'une vaste mobilisation propalestinienne.

Depuis le Capitole, siège du Congrès américain à Washington, le discours du président américain intervient quelques jours après ses premières remarques sur les protestations estudiantines contre la guerre d'Israël à Gaza.

Son silence pendant plusieurs jours avait attiré des critiques des camps républicain comme démocrate en pleine année électorale.

Son adresse au Congrès se fait dans le cadre de la cérémonie annuelle des Jours du souvenir, organisée par le musée américain de l'Holocauste au Capitole. Le démocrate va se "réengager à tenir à l'esprit les leçons de ce chapitre sombre" de l'Histoire, selon la Maison Blanche.

«Hausse alarmante»

"Il évoquera les horreurs du 7 octobre, quand le Hamas a été à l'origine du jour le plus meurtrier pour le peuple juif depuis l'Holocauste", a déclaré lundi la porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre.

"Et il s'exprimera sur le fait que --depuis le 7 octobre-- nous avons constaté une hausse alarmante de l'antisémitisme aux Etats-Unis, dans nos villes, nos quartiers et nos campus", a-t-elle ajouté.

Des étudiants juifs s'alarment d'une augmentation des actes et de la rhétorique antisémite depuis le 7 octobre, et le président israélien Isaac Herzog a dénoncé la semaine dernière "des universités réputées" qui sont selon lui "contaminées par la haine".

Joe Biden "va réaffirmer que nous respectons et protégeons le droit fondamental qu'est la liberté d'expression, mais que l'antisémitisme ne doit être toléré ni sur les campus, ni ailleurs", a déclaré Karine Jean-Pierre.

Nombreux étudiants juifs ont pris part à la mobilisation propalestinienne contre les actions du gouvernement israélien.

Le président américain a évoqué lundi la question de l'antisémitisme lors d'un appel avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Appel au cours duquel Joe Biden a également réitéré sa "position claire" contre une offensive terrestre israélienne à Rafah, selon le compte-rendu de leurs échanges.

Les deux dirigeants ont discuté de l'"engagement partagé" des Etats-Unis et d'Israël à se souvenir des six millions de morts juifs du fait de l'Holocauste perpétré par les nazis" et "à agir avec force contre l'antisémitisme et toutes les formes de violence alimentées par la haine".

«L'ordre doit prévaloir»

Les campus américains sont secoués depuis plusieurs semaines par des manifestations s'opposant à la guerre menée par Israël à Gaza.

A travers le pays, la police a été appelée à plusieurs reprises pour démanteler des campements et déloger manu militari des manifestants.

L'université Columbia à New York, épicentre de ce mouvement estudiantin propalestinien, a annoncé lundi "renoncer" à sa cérémonie en grande pompe de remise de diplômes.

Le prestigieux établissement va privilégier des événements plus modestes pour des raisons de sécurité selon lui, après trois semaines de colère condamnée par Joe Biden et réprimée par la police.

A six mois de la présidentielle, dans des Etats-Unis polarisés, le président démocrate a pris la parole la semaine dernière pour affirmer que "l'ordre devait prévaloir" sur les campus.

"Nous ne sommes pas un pays autoritaire qui réduit les gens au silence", a néanmoins assuré Joe Biden lors d'une courte allocution.

Auparavant, son adversaire républicain Donald Trump l'avait accusé d'inaction face au mouvement propalestinien. "Ce sont des tarés de la gauche radicale et il faut les arrêter maintenant", avait-il lancé à son arrivée à son procès à New York.


Contestation propalestinienne: Columbia à New York annule sa cérémonie de remise de diplômes

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  • Ce mouvement pour la cause palestinienne - qui compte des jeunes arabo-musulmans mais aussi des juifs de gauche antisionistes - cherche dorénavant un nouveau souffle
  • Cette prestigieuse université, financée par de riches donateurs et des investissements, a été secouée des jours durant par des manifestations

NEW YORK: L'université Columbia, épicentre de la contestation propalestinienne sur les campus américains, a annoncé lundi "renoncer" à sa cérémonie en grande pompe de remise de diplômes, après trois semaines de colère étudiante condamnée par Joe Biden et réprimée par la police.

Ces cérémonies constituent le grand rendez-vous institutionnel de la vie universitaire et scolaire des Etats-Unis, où, à la fin du printemps, étudiants et élèves en robe sont mis à l'honneur devant leurs familles.

L'établissement new-yorkais privé et huppé du nord de Manhattan, d'où des militants et des étudiants ont été délogés manu militari le 30 avril au soir par des centaines de policiers anti-émeute, a annulé "la grande cérémonie de l'université prévue le 15 mai".

"Toutes les cérémonies programmées" sur le campus -- désormais sous bonne garde de la police -- seront "déplacées" vers un complexe sportif fermé, a indiqué Columbia, qui compte 37.000 étudiants et des milliers de professeurs et membres du personnel.

Des remises de diplômes plus informelles et "festives" se tiendront du 10 au 16 mai car pour "nos étudiants (...) ces cérémonies à plus petite échelle sont les plus importantes pour eux et leurs familles", s'est justifiée l'université en rappelant que "ces dernières semaines ont été incroyablement difficiles".

Une centaine de personnes furieuses ont protesté à l'extérieur du campus et une pétition a recueilli 1.400 signatures. Ally Woodward, qui étudie les sciences politiques, s'est dite "en colère" contre Columbia qui "a plein d'argent et choisit la plus mauvaise des solutions".

«Tourmente»

Cette prestigieuse université, financée par de riches donateurs et des investissements, a été secouée des jours durant par des manifestations et l'occupation d'une pelouse puis d'un bâtiment.

Avant que la police ne déloge ces militants et étudiants non violents, à la demande écrite de la présidente de Columbia, Minouche Shafik.

Leur "village", un campement de tentes, a été démantelé, comme dans nombre d'universités à travers les Etats-Unis.

Ces images d'interventions policières musclées ont fait le tour du monde.

Columbia est un foyer historique de contestation étudiante depuis la guerre du Vietnam et le mouvement des droits civiques des années 1960-1970. Elle a été l'une des premières universités à gronder au début de la guerre d'Israël contre le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Très critiquée pour avoir appelé la police, la présidente Minouche Shafik, économiste américaine d'origine égyptienne, a invoqué la "tourmente" et l'"acte violent" de protestataires qui ont selon elle déstabilisé Columbia.

Ce mouvement pour la cause palestinienne - qui compte des jeunes arabo-musulmans mais aussi des juifs de gauche antisionistes - cherche dorénavant un nouveau souffle, après que 2.000 personnes ont été interpellées et certaines poursuivies en justice pour "délit d'intrusion".

«Vietnam de Biden»

Ailleurs aux Etats-Unis, des remises de diplômes ont été perturbées comme samedi à l'université du Michigan, où une dizaine de manifestants portant keffiehs et drapeaux palestiniens ont chanté "vous financez un génocide".

D'autres ont brandi en réponse une banderole "les vies juives comptent".

Lundi soir, quelques centaines de personnes parties d'une université publique de Manhattan ont été tenues à distance de l'extravagant gala du Met, rendez-vous planétaire des stars et de la mode.

Outre la fin de la guerre à Gaza, de jeunes Américains exigent que les universités rompent leurs partenariats éducatifs avec Israël et se désengagent d'investissements économiques.

Ils dénoncent l'appui quasiment inconditionnel des Etats-Unis à leur allié israélien, engagé dans une offensive dévastatrice dans la bande de Gaza en représailles à l'attaque du Hamas le 7 octobre sur son sol.

Le président Biden, longtemps silencieux, avait martelé jeudi que "l'ordre devait prévaloir" face au risque du "chaos".

Dans un pays polarisé, à six mois de la présidentielle entre le démocrate et le républicain Donald Trump, la colère d'une partie de la jeunesse contre la guerre à Gaza a ravivé un débat tendu sur la liberté d'expression, l'antisionisme et ce qui constitue de l'antisémitisme.

Pour Donald Trump, les manifestants sont des "tarés de la gauche radicale" et le président républicain de la Chambre des représentants Mike Johnson a dénoncé lundi des "étudiants sympathisant avec le terrorisme".

Pour la sénateur de gauche Bernie Sanders, le mouvement "pourrait être le Vietnam de Biden" qui risque de perdre "non seulement les jeunes, mais aussi une grande partie de la base démocrate".