Bill Richardson, l'ex-diplomate américain spécialiste des libérations de détenus

Le journaliste américain Danny Fenster (à gauche), emprisonné au Myanmar, débarque d'un avion aux côtés de l'ancien diplomate américain Bill Richardson à leur arrivée à l'aéroport international Hamad de Doha, la capitale du Qatar, le 15 novembre 2021. (Photo, AFP)
Le journaliste américain Danny Fenster (à gauche), emprisonné au Myanmar, débarque d'un avion aux côtés de l'ancien diplomate américain Bill Richardson à leur arrivée à l'aéroport international Hamad de Doha, la capitale du Qatar, le 15 novembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 16 novembre 2021

Bill Richardson, l'ex-diplomate américain spécialiste des libérations de détenus

  • Dans un communiqué, il met en avant son rôle, avec notamment «des négociations en tête-à-tête avec le général Min Aung Hlaing», chef de la junte birmane visé par des sanctions de Washington pour son coup d'Etat de février
  • En privé, des responsables américains s'étaient montrés agacés, comme par le passé, par l'activisme de cette ancienne figure du parti démocrate, redoutant qu'il vienne parasiter les efforts officiels

WASHINGTON : Il a été ambassadeur, ministre et gouverneur. Mais depuis qu'il est redevenu un simple citoyen américain, Bill Richardson se consacre à son rôle d'émissaire à son propre compte, spécialiste des missions délicates pour obtenir la libération de ses compatriotes détenus par "des régimes hostiles".

Dernier fait d'armes, le jour de son 74e anniversaire: il a contribué à la libération du journaliste américain Danny Fenster en Birmanie, gracié et expulsé lundi par la junte militaire après six mois de prison.

L'organisation à son nom qu'il a créée, le Richardson Center, a tweeté une photo de l'ancien ambassadeur des Etats-Unis auprès des Nations unies posant avec l'ex-prisonnier de 37 ans devant un petit avion sur le tarmac de Naypyidaw, la capitale de la Birmanie.

Dans un communiqué, il met en avant son rôle, avec notamment "des négociations en tête-à-tête avec le général Min Aung Hlaing", chef de la junte birmane visé par des sanctions de Washington pour son coup d'Etat de février.

Pourtant, il y a tout juste une semaine, Bill Richardson affirmait dans un entretien à l'AFP, au retour d'une précédente mission "humanitaire" en Birmanie, qu'il n'avait pas soulevé le cas de Danny Fenster. Il expliquait, sans plus de précisions, que le département d'Etat américain lui avait expressément demandé de s'abstenir.

 

Fenster craignait ne jamais sortir de prison

Le journaliste américain Danny Fenster a lutté pour "rester sain d'esprit" pendant ses six mois en prison en Birmanie, en craignant qu'il n'en sortirait jamais, a-t-il affirmé lundi après sa libération surprise à la veille d'un procès où il risquait la perpétuité pour terrorisme.

Très amaigri après six mois passés en prison, M. Fenster, 37 ans, a fait escale dans la nuit de lundi à mardi à Doha à bord d'un jet privé en compagnie de l'ancien diplomate américain Bill Richardson, qui a oeuvré en coulisses pour sa libération. Il était attendu mardi aux Etats-Unis.

"J'ai été arrêté et détenu sans raison... mais physiquement j'étais en bonne santé. Je n'étais ni affamé ni battu", a-t-il dit lors d'une conférence de presse pendant son escale au Qatar.

"Je me sens bien physiquement. Ce sont les mêmes privations que celles qui accompagnent toute forme d'incarcération. On devient juste un peu dingue", a-t-il poursuivi en décrivant ses conditions de détention. "Plus ça traîne, plus on s'inquiète que ça ne s'arrête jamais. Donc c'est le principal souci, juste rester sain d'esprit en traversant tout ça".

Danny Fenster, rédacteur en chef du magazine Frontier Myanmar, l'un des principaux organes de presse indépendants du pays, avait été arrêté en mai alors qu'il tentait de quitter la Birmanie. Il était détenu depuis à la tristement célèbre prison d'Insein, à Rangoun, aux côtés de nombreux prisonniers politiques.

La semaine dernière, il avait été condamné à onze ans de prison pour incitation à la dissidence, association illégale et violation de la loi sur les visas.

Il devait comparaître mardi devant un tribunal pour terrorisme et sédition, et encourait pour ces deux nouveaux chefs d'accusation la prison à vie.

 

Bêtes noires de Washington

En privé, des responsables américains s'étaient montrés agacés, comme par le passé, par l'activisme de cette ancienne figure du parti démocrate, redoutant qu'il vienne parasiter les efforts officiels.

Car le département d'Etat assurait régulièrement mettre tout en oeuvre pour obtenir la libération du journaliste.

Interrogé à ce sujet, le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price s'était borné à dire que l'ex-gouverneur de l'Etat du Nouveau-Mexique était "allé en Birmanie non pas en tant que représentant des Etats-Unis mais en tant que simple citoyen".

Lundi, il a toutefois assuré que Bill Richardson avait agi "en contact régulier, et même quasi-constant dans les dernières heures", avec le gouvernement américain.

Las, dans son communiqué de lundi, la famille Fenster remercie "spécialement l'ambassadeur Richardson", sans un mot pour le gouvernement des Etats-Unis. Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a lui-même dû saluer son rôle.

Né le 15 novembre 1947, Bill Richardson, dont la mère est mexicaine, a été un des premiers représentants de la communauté hispanique à atteindre de hautes fonctions politiques.

Avec un CV impressionnant: parlementaire, ambassadeur à l'ONU puis secrétaire à l'Energie sous la présidence de Bill Clinton à la fin des années 1990, gouverneur, puis premier Hispanique à concourir pour la Maison Blanche lors d'une candidature éphémère à la primaire démocrate en 2007.

Cet homme politique massif aux cheveux noirs avait ensuite soutenu Barack Obama, mais une affaire de financement de campagne l'avait contraint à renoncer à devenir le secrétaire au Commerce du président démocrate en 2009.

 

"Il n'avait rien fait de mal"

"C'est une merveilleuse nouvelle pour tous ses amis et sa famille", a déclaré à l'AFP son collègue de Frontier Myanmar, Andrew Nachemson. 

"Il n'aurait jamais dû passer six mois en prison (...) et tous les journalistes locaux qui restent emprisonnés devraient également être libérés immédiatement".

Bill Richardson s'était rendu en Birmanie au début du mois pour une "mission humanitaire privée". Il avait alors déclaré que le département d'État américain lui avait demandé de ne pas évoquer le cas de Fenster lors de sa visite.

Danny Fenster, qui a passé 176 jours derrière les barreaux, aurait contracté le Covid-19 pendant sa détention, d'après sa famille. Il a perdu plusieurs kilos, selon son avocat Than Zaw Aung.

La Birmanie a sombré dans le chaos depuis le putsch militaire du 1er février qui a renversé la dirigeante civile Aung San Suu Kyi et mis fin à une court parenthèse démocratique.

La presse est muselée par la junte qui tente de renforcer son contrôle de l'information, limitant l'accès à l'internet et annulant les licences des médias. 

Plus de 100 journalistes ont été arrêtés depuis le putsch, selon Reporting ASEAN, une association de défense des droits. Au total, 31 d'entre eux sont toujours en détention.

En parallèle de sa carrière politique institutionnelle, Bill Richardson s'est rapidement taillé une réputation de baroudeur, parfois surnommé l'Indiana Jones de la diplomatie américaine pour ses missions officieuses auprès des bêtes noires des Etats-Unis.

Saddam Hussein en Irak, Fidel Castro à Cuba, Kim Jong Il en Corée du Nord, Nicolas Maduro au Venezuela... Depuis près de 30 ans, le bouillonnant émissaire multiplie les médiations privées auprès des pires ennemis de Washington.

Mission "numéro un", selon le site internet du Richardson Center: "Négocier la libération de prisonniers et otages détenus par des régimes hostiles".

Avec plusieurs succès à son actif, mais aussi quelques échecs moins mis en avant par cette personnalité au goût prononcé pour la médiatisation.

Souvent, il élargit ses tractations à des sujets plus politiques, comme le nucléaire nord-coréen ou l'ouverture diplomatique de la junte birmane, suscitant les critiques de défenseurs des droits humains qui l'accusent d'offrir une légitimité à des régimes non démocratiques.

"Je ne suis pas un gouvernement. Je ne légitime pas des gouvernements", a répondu Bill Richardson la semaine dernière à l'AFP. "Je suis juste une personne qui tente de changer les choses."


CIJ: l'impartialité de l'UNRWA suscite de «sérieux doutes» selon les Etats-Unis

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence". (AFP)
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  • La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre
  • Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ

LA HAYE: Un représentant des Etats-Unis a fait part mercredi à la Cour internationale de Justice de "sérieux doutes" concernant l'impartialité de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) lors d'audiences consacrées aux obligations humanitaires d'Israël envers les Palestiniens.

"L'impartialité de l'UNRWA suscite de sérieux doutes, du fait d'informations selon lesquelles le Hamas a utilisé les installations de l'UNRWA et que le personnel de l'UNRWA a participé à l'attentat terroriste du 7 octobre contre Israël", a déclaré Josh Simmons, de l'équipe juridique du département d'État américain.

La CIJ, située à La Haye (Pays-Bas), a ouvert lundi sa semaine d'audiences plus de 50 jours après l'instauration d'un blocus total sur l'aide entrant dans la bande de Gaza ravagée par la guerre.

Israël, qui ne participe pas à ces audiences, a dénoncé lundi une "persécution systématique" de la CIJ.

M. Simmons a déclaré aux juges qu'Israël avait "de nombreuses raisons" de mettre en doute l'impartialité de l'UNRWA.

"Il est clair qu'Israël n'a aucune obligation d'autoriser l'UNRWA à fournir une assistance humanitaire", a-t-il déclaré.

Israël a promulgué une loi interdisant à l'UNRWA, d'opérer sur le sol israélien, après avoir accusé certains membres du personnel d'avoir participé aux attaques du Hamas le 7 octobre 2023, qui a déclenché le conflit.

Une série d'enquêtes, dont l'une menée par l'ancienne ministre française des Affaires étrangères Catherine Colonna, a révélé des "problèmes de neutralité" à l'UNRWA, mais a souligné qu'Israël n'avait pas fourni de preuves de son allégation principale.

Philippe Lazzarini, directeur de l'UNRWA, a déclaré mardi que plus de 50 membres de son personnel à Gaza avaient été maltraités et utilisés comme boucliers humains alors qu'ils étaient détenus par l'armée israélienne.

Lors de sa déposition face à la Cour, Diégo Colas, représentant la France, a appelé Israël à lever "sans délai" son blocage de l'aide vers la bande de Gaza".

"L'ensemble des points de passage doivent être ouverts, le travail des acteurs humanitaires doit être facilité, et le personnel doit être protégé conformément aux droits internationaux", a-t-il déclaré .

"Conséquences mortelles" 

Israël contrôle tous les flux d'aide internationale, vitale pour les 2,4 millions de Palestiniens de la bande de Gaza frappés par une crise humanitaire sans précédent, et les a interrompus le 2 mars dernier, quelques jours avant l'effondrement d'un fragile cessez-le-feu après 15 mois de combats incessants.

"L'interdiction totale de l'aide et des fournitures humanitaires décrétée par les autorités israéliennes depuis le 2 mars a des conséquences mortelles pour les civils de Gaza", a déclaré dans un communiqué Claire Nicolet, responsable de la réponse d'urgence de l'ONG Médecins sans Frontières dans la bande de Gaza.

"Les autorités israéliennes utilisent l'aide non seulement comme une monnaie d'échange, mais aussi comme une arme de guerre et un moyen de punition collective pour plus de 2 millions de personnes vivant dans la bande de Gaza," a-t-elle ajouté.

En décembre, l'Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution demandant à la CIJ de rendre un avis consultatif "à titre prioritaire et de toute urgence".

La résolution demande à la CIJ de clarifier les obligations d'Israël concernant la présence de l'ONU, de ses agences, d'organisations internationales ou d'États tiers pour "assurer et faciliter l'acheminement sans entrave des fournitures urgentes essentielles à la survie de la population civile palestinienne".

Les avis consultatifs de la CIJ ne sont pas juridiquement contraignants, mais celui-ci devrait accroître la pression diplomatique sur Israël.

En juillet dernier, la CIJ avait aussi rendu un avis consultatif jugeant "illégale" l'occupation israélienne des Territoires palestiniens, exigeant qu'elle cesse dès que possible.


Après la panne géante, les énergies renouvelables sur le banc des accusés en Espagne

Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
Des passagers attendent avant de monter dans leur train à la gare de Sants à Barcelone, le 29 avril 2025, au lendemain d'une panne d'électricité massive qui a touché toute la péninsule ibérique et le sud de la France. (Photo par Josep LAGO / AFP)
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  • Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne.
  • Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez.

MADRID : L'essor des énergies renouvelables a-t-il fragilisé le réseau électrique espagnol ? Deux jours après la panne géante qui a touché la péninsule, la nature du mix énergétique ibérique est au cœur de vifs débats mercredi en Espagne, malgré les messages rassurants des autorités.

« Le manque de centrales nucléaires et la multiplication par dix des énergies renouvelables ont mis à terre le réseau électrique », assure en une le quotidien conservateur ABC mercredi matin. « Les alertes sur les renouvelables depuis cinq ans » ont été « ignorées », regrette de son côté El Mundo, également classé à droite.

Dans le viseur de ces deux quotidiens, mais aussi des partis d'opposition, se trouve la politique énergétique mise en place depuis plusieurs années par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez, qui a fait de l'Espagne l'un des champions européens de la transition verte.

Selon le gestionnaire du réseau électrique espagnol REE, le solaire et l'éolien ont représenté en 2024 près de 40 % du mix électrique espagnol. C'est près de deux fois plus qu'en 2014, et près du double également de la part du nucléaire, tombée l'an dernier à 20 %. 

Cette évolution est défendue par l'exécutif, qui s'est engagé à fermer toutes les centrales nucléaires d'ici dix ans, mais elle est source de tensions dans le pays, plusieurs rapports ayant pointé ces derniers mois de possibles risques en l'absence de mesures fortes pour adapter le réseau.

- Une énergie « sûre » ?

Dans son document financier annuel publié fin février, Redeia, la maison-mère de REE, avait ainsi mis en garde contre « la forte pénétration de la production renouvelable sans les capacités techniques nécessaires à un comportement adéquat face aux perturbations ».

Cela pourrait « provoquer des coupures de production », qui « pourraient devenir sévères, allant jusqu'à entraîner un déséquilibre entre la production et la demande, ce qui affecterait significativement l'approvisionnement en électricité » de l'Espagne, avait-elle écrit. 

Un message relayé par l'organisme espagnol de la concurrence (CNMC) dans un rapport de janvier. « À certains moments, les tensions du réseau de transport d'électricité ont atteint des valeurs maximales proches des seuils autorisés, dépassant même ces seuils à certains moments », avait écrit l'organisme.

Après la coupure de lundi, certains experts du secteur se sont interrogés sur un éventuel déséquilibre entre production et demande (difficile à corriger dans un réseau où l'éolien et le solaire ont une place prépondérante) qui aurait pu contribuer à l'effondrement du système électrique espagnol.

Dans un entretien accordé mercredi matin à la radio Cadena Ser, Beatriz Corredor, la présidente de Redeia et REE (l'ex-députée socialiste) a cependant assuré que la production d'énergies renouvelables était « sûre ».

« Relier l'incident si grave de lundi à une pénétration des énergies renouvelables n'est pas vrai, ce n'est pas correct », a-t-elle insisté, en assurant que le rapport de février ne faisait que dresser la liste de risques potentiels, comme l'y oblige la législation. 

- « Ignorance » -

Mardi déjà, Pedro Sánchez avait lui aussi défendu le modèle énergétique mis en œuvre par son gouvernement, rappelant que la cause précise de la panne qui a provoqué le chaos au Portugal et en Espagne durant de longues heures lundi n'était toujours pas connue à ce stade.

« Ceux qui lient cet incident au manque de nucléaire mentent franchement ou démontrent leur ignorance », a assuré le dirigeant socialiste.

« Les centrales nucléaires, loin d'être une solution, ont été un problème » durant la panne, car « il a été nécessaire de rediriger vers elles de grandes quantités d'énergie pour maintenir leurs réacteurs stables », a insisté le chef du gouvernement. 

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la panne depuis deux jours, dont celle d'une cyberattaque. Mardi, la justice espagnole a ouvert une enquête pour déterminer si la panne avait été provoquée par un « sabotage informatique » susceptible d'être qualifié de « délit terroriste ».

REE estime cependant que cette hypothèse est peu crédible. « Au vu des analyses que nous avons pu réaliser avec l'aide notamment du Centre national du renseignement espagnol (CNI), nous pouvons écarter un incident de cybersécurité », a ainsi assuré le gestionnaire.

D'après REE, l'équivalent de 60 % de la consommation électrique de l'Espagne, soit 15 gigawatts, a disparu en l'espace de cinq secondes seulement lors de la panne survenue lundi à 12 h 33 (11 h 33 GMT), un phénomène qualifié d'« inédit » et « totalement extraordinaire ».


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.