Un ex-chauffeur franco-rwandais jugé à Paris pour «complicité» dans le génocide des Tutsi

L’accusé, au centre (Photo, AFP).
L’accusé, au centre (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 22 novembre 2021

Un ex-chauffeur franco-rwandais jugé à Paris pour «complicité» dans le génocide des Tutsi

  • Claude Muhayimana, 60 ans, était en 1994 chauffeur de l'hôtel Guest House à Kibuye, sur les rives du lac Kivu
  • Il est accusé de «complicité» de génocide et de crimes contre l'humanité pour avoir «aidé et assisté sciemment» des miliciens «en assurant leur transport» sur les lieux de massacres

PARIS: Un ex-chauffeur franco-rwandais, citoyen "ordinaire" accusé d'avoir sciemment aidé des tueurs lors du génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda, est jugé à partir de lundi pour "complicité" de génocide, troisième procès en France pour des crimes liés à l'une des pires tragédies du XXe siècle.

Claude Muhayimana, 60 ans, était en 1994 chauffeur de l'hôtel Guest House à Kibuye, sur les rives du lac Kivu.

Il est accusé de "complicité" de génocide et de crimes contre l'humanité pour avoir "aidé et assisté sciemment" des miliciens "en assurant leur transport" sur les lieux de massacres dans la préfecture de Kibuye, les collines de Karongi, Gitwa et Bisesero (ouest), où des dizaines de milliers de personnes ont été exterminées.

Ces miliciens, armés de machettes, gourdins, houes et appelés "Interahamwe" ("ceux qui travaillent ensemble" en kinyarwanda) ont été les principaux bras armés du génocide contre la minorité tutsie, orchestré par le régime extrémiste hutu et qui a fait plus de 800.000 morts d'avril à juillet 1994.

M. Muhayimana, qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité, est réfugié en France, dont il a obtenu la nationalité en 2010. Cantonnier de profession, il vit à Rouen (nord-ouest). Il y avait été arrêté en 2014, un an après l'ouverture d'une enquête initiée par une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), qui lutte contre l'impunité et la présence en France de présumés génocidaires rwandais.

Le procès, qui s'ouvre lundi à 13h30 GMT après dix ans de procédure et deux reports à cause de la crise sanitaire, durera près d'un mois, avec l'audition d'une cinquantaine de témoins, dont une quinzaine viendront du Rwanda.

Sa singularité est qu'il juge un citoyen ordinaire, et non une personnalité ayant eu des fonctions politiques, administratives ou militaires pendant les tueries. Les deux précédents procès ont vu la condamnation à perpétuité de deux anciens bourgmestres et à 25 ans de prison d'un ex-capitaine de l'armée. 

"On a affaire à un citoyen lambda tout à fait ordinaire qui n'avait d'autorité sur personne", déclare à l'AFP Me Philippe Meilhac, l'un des avocats de l'accusé. "Il va s'expliquer en long, en large et en travers. C'est un homme qui attend depuis 10 ans".

«Faire leur deuil»

Alain Gauthier, cofondateur du CPCR, se "refuse" pour sa part à "parler de gros ou de petit poisson". "On est dans le cas d'un génocide, on ne parle pas de petit poisson".

Les prises de parole de l'accusé, resté très discret, sont très attendues. L'enquête a évoqué une personnalité ambigüe, des témoins attestant qu'il a sauvé des Tutsis en les cachant chez lui ou en leur procurant des pirogues pour fuir en République démocratique du Congo (RDC).

Les débats se concentreront sur le fait que l'accusé nie avoir été présent sur les lieux de massacres et sur les contradictions entre ses déclarations et celles de témoins, notamment son ex-épouse. Il a aussi menti et tenté de faire pression sur des témoins, selon l'accusation.

"Il y a des dizaines de témoignages concordants sur son transport sur les lieux de massacres", note Alexandre Kiabski, avocat du CPCR.

La défense, elle, pointe les contradictions et les lacunes des témoignages, "qui comportent beaucoup d'imprécisions sur les lieux, les dates", selon Me Meilhac, qui plaidera aussi l'argument de la contrainte.

"Ce n'est pas impossible qu'il ait été forcé (à transporter les miliciens, NDLR); mais même si c'est vrai, il avait le choix de prendre la fuite", estime M. Gauthier. "On ne va pas sur les lieux d'un crime gratuitement".

Pour le CPCR, l'accusé, qui a bénéficié d'un non lieu partiel pour sa participation directe aux massacres, "n'est pas poursuivi à la hauteur des faits".

Ce procès se tient dans le contexte inédit de la spectaculaire normalisation diplomatique entre la France et le Rwanda, après des années de très vives tensions.

Lors d'une visite en mai à Kigali, Emmanuel Macron avait reconnu les "responsabilités" de Paris dans le génocide, après la publication en France d'un retentissant rapport d'historiens ayant conclu à l'"aveuglement" du président français de l'époque François Mitterrand et de son entourage face à la dérive génocidaire du gouvernement hutu que soutenait alors Paris.

Les avocats du CPCR espèrent que ces "considérations politiques" ne "viendront pas parasiter le procès". 

"On a beaucoup de parties civiles qui ont perdu toutes leurs familles à Kibuye et Bisesero; ce procès est important pour eux, pour faire leur deuil. C'est aussi un hommage aux victimes et une manière de contribuer au devoir de mémoire", relève Me Kiabski.


Lecornu annule ses rencontres avec CGT et CFDT pour se «consacrer» au budget de la Sécu

Le Premier ministre Sébastien Lecornu a annulé ses rencontres avec les syndicats CGT et CFDT prévus jeudi afin de "consacrer sa journée aux débats parlementaires" sur le budget de la Sécurité sociale, dont l'adoption est de plus en plus hypothétique. (AFP)
Le Premier ministre Sébastien Lecornu a annulé ses rencontres avec les syndicats CGT et CFDT prévus jeudi afin de "consacrer sa journée aux débats parlementaires" sur le budget de la Sécurité sociale, dont l'adoption est de plus en plus hypothétique. (AFP)
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  • Sébastien Lecornu avait annoncé le 24 novembre un nouveau "changement de méthode" pour parvenir à l'adoption d'un budget avant la fin de l'année
  • A cette fin, il devait recevoir l'ensemble des formations politiques, ainsi que les partenaires sociaux pour discuter de cinq thèmes vus comme des "priorités (...) absolues"

PARIS: Le Premier ministre Sébastien Lecornu a annulé ses rencontres avec les syndicats CGT et CFDT prévus jeudi afin de "consacrer sa journée aux débats parlementaires" sur le budget de la Sécurité sociale, dont l'adoption est de plus en plus hypothétique.

"En l'état des discussions, le Premier ministre souhaite consacrer entièrement sa journée aux débats parlementaires sur le projet de loi de finances pour la Sécurité sociale", a expliqué son entourage.

"Pour cette raison, les consultations avec les syndicats CGT et CFDT ainsi que le déjeuner avec les parlementaires sur l'énergie seront reportés", a-t-on précisé.

Sébastien Lecornu avait annoncé le 24 novembre un nouveau "changement de méthode" pour parvenir à l'adoption d'un budget avant la fin de l'année.

A cette fin, il devait recevoir l'ensemble des formations politiques, ainsi que les partenaires sociaux pour discuter de cinq thèmes vus comme des "priorités (...) absolues" : le déficit, la réforme de l’État, l'énergie, l'agriculture ainsi que la sécurité intérieure et extérieure, avec débats et votes possibles à la clé.

Les partis présents au gouvernement (centre et LR), le PS, les Écologistes, le PCF et le RN ont été reçus, ainsi que les représentants du Medef.

La rencontre avec Force ouvrière prévue mercredi avait déjà été reportée.

La discussion sur le budget de la Sécu devait se poursuivre jeudi mais son éventuelle adoption le 9 décembre reste très hypothétique dans la mesure où les groupes Horizons et LR menacent de voter contre ou de s'abstenir.


Un homme tué par balles près de Grenoble

Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police. (AFP)
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  • L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang
  • La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête

GRENOBLE: Un homme non identifié et porteur de deux impacts de balles a été retrouvé mort dans la nuit de mardi à mercredi à Echirolles, en périphérie de Grenoble, a indiqué la police.

L'homme a été retrouvé par une passante, vers 02H00, gisant inanimé au sol dans une mare de sang, la mâchoire brisée, avec une trottinette à ses pieds. En arrêt cardio-respiratoire, il a été déclaré décédé sur place par le SAMU.

Deux impacts de balles dans son dos et dans sa mâchoire ont été relevés par la suite par le médecin légiste, selon même la source.

La Division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS, ex-PJ) a été saisie de l'enquête.


«Mieux vaut être un homme en politique»: quand les députés testent le programme Evars

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an. (AFP)
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  • Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons
  • A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité

PARIS: "Mieux vaut être un homme, en politique, qu’une femme". Comme des collégiens ou des lycéens, des députés ont suivi une séance d'Evars, un programme proposé aux élèves pour notamment remettre en cause les stéréotypes sexistes.

Prévu dans la loi depuis 2001 et doté d'un contenu depuis la rentrée, le programme d'Education à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars) aborde, de façon adaptée à chaque âge, la santé reproductive, la prévention, l’égalité filles-garçons, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, ainsi que les questions d’orientation et d’identité sexuelles.

A l'Assemblée, une petite vingtaine de députés, sur 577, - principalement de la gauche au centre-droit - ont répondu mardi après-midi à l'invitation de Marie-Charlotte Garin (écologiste), Véronique Riotton (EPR) et le Collectif pour une véritable éducation à la sexualité (Planning familial, Sidaction, Fédération des centres d' information sur les droits des femmes et des familles...) qui milite depuis 2023 pour la généralisation de ces séances.

"Nous voulons faire de la pédagogie auprès des députés pour qu’ils deviennent nos ambassadeurs dans les territoires", explique Marie-Charlotte Garin, en signalant que les députés reçoivent des courriers de parents opposés au programme, notamment de l'association Parents vigilants.

"Nous voulons faire vivre ces séances aux députés pour leur donner des arguments, il y a beaucoup de fantasmes autour de ce programme", observe Mme Riotton, présidente de la Délégation aux droits des femmes.

"On galère" 

Après une première partie sur des sujets à destination des CP (vocabulaire des parties intimes, prévention des violences sexuelles), le Planning familial propose ensuite aux élus de tester "la rivière du doute", outil utilisé cette fois au collège pour réfléchir aux stéréotypes sexistes.

"Je vais vous dire une affirmation et ceux qui sont d'accord se placent à gauche, ceux qui sont contre à droite: +Il vaut mieux être un homme en politique qu’une femme+, lance sa présidente Sarah Durocher.

Chez les députés présents, six sont d'accord. Et comme en classe, le dialogue s’engage.

"Je dis oui, mais c’est ce qu’il faut changer", commence Jean-Francois Rousset (EPR).

"C'est plus difficile d'être une femme, on galère, c'est difficile de se faire entendre", confirme Soumya Bourouaha (GDR). "Il y a beaucoup à changer et ça ne viendra pas des hommes" , renchérit une autre élue.

Second stéréotype: "Les hommes savent naturellement prendre la parole en public. D'accord ou pas?"

"Qu'ils soient compétents ou pas, la réalité montre qu’ils osent plus", remarque Anne-Cécile Violland (Horizons). "Tout à l'heure, j’ai pris spontanément la parole et je ne m’en suis même pas aperçu", constate Jean-Francois Rousset.

 "Sujet politique" 

"Nous voulons que ce programme devienne un sujet politique, dont s'emparent les députés. Il permet d'éviter les LGBTphobies, les féminicides, les maladies sexuellement transmissibles, c'est bénéfique pour les individus et collectivement", plaide Sarah Durocher.

En plein débat budgétaire, les associations veulent convaincre les élus de débloquer des moyens pour ces séances, qu'elles évaluent à 620 millions d’euros par an.

Depuis 2001, la loi impose trois séances annuelles d’information et d’éducation à la sexualité dans les écoles, collèges et lycées, mais elles n’ont jamais été généralisées.

Saisi par le Planning familial, Sidaction et SOS Homophobie, le tribunal administratif de Paris a reconnu mardi que l’État avait manqué à ses obligations, en tardant jusqu'en février dernier pour adopter le programme Evars. Dans son jugement, il écarte les arguments avancés par le ministère de l'Education qui avait fait valoir "la sensibilité du sujet et les controverses qu'il suscite" pour expliquer ce retard.

Les trois associations demandent "la reconnaissance" du "rôle central des associations" dans sa mise en œuvre". "Nous avons formé 150.000 jeunes dans 3.600 établissements, mais nous avons refusé autant de demandes faute de moyens", explique la présidente du Planning.

Pour Sandrine Josso (Horizons), "les députés devraient aussi suivre une formation sur les violences sexistes et sexuelles. Il en existe une depuis 2022 et personne n’y va".