Une demande d'asile, une dose: la vaccination s'invite dans le parcours des migrants

Un migrant vénézuélien est vacciné contre le COVID-19 avec le vaccin Johnson & Johnson's Janssen, au Centre de district pour l'intégration et les droits des migrants, des réfugiés et des rapatriés à Bogota, le 11 octobre 2021. (AFP)
Un migrant vénézuélien est vacciné contre le COVID-19 avec le vaccin Johnson & Johnson's Janssen, au Centre de district pour l'intégration et les droits des migrants, des réfugiés et des rapatriés à Bogota, le 11 octobre 2021. (AFP)
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Publié le Vendredi 03 décembre 2021

Une demande d'asile, une dose: la vaccination s'invite dans le parcours des migrants

  • Arrivé en France depuis une semaine, après quatre mois de périple éprouvants, Ahmad Safi n'avait jamais été vacciné, selon Alexandre Macone qui traduit ses propos entre farsi et dari.
  • Le chemin dans le dédale administratif des soins français peut s'avérer bien plus tortueux pour les dizaines de milliers de nouveaux demandeurs d'asile enregistrés depuis janvier, comme pour les autres migrants.  

PARIS : Venu déposer son dossier de demandeur d'asile, Ahmad Safi repart du bureau parisien de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) avec une dose contre la Covid-19 dans le bras. Une vaccination impromptue, loin d'être une évidence pour de nombreux autres migrants.

"On m'a dit au guichet que c'était possible et important d'être vacciné, alors j'ai accepté", explique cet Afghan de 24 ans, entre les trois cloisons amovibles et quatre tables installées à deux pas des guichets de l'Ofii, dans le XVIIIe arrondissement de Paris.

Arrivé en France depuis une semaine, après quatre mois de périple éprouvants, Ahmad Safi n'avait jamais été vacciné, selon Alexandre Macone qui traduit ses propos entre farsi et dari.

Cet interne en médecine décrypte les démarches à effectuer pour obtenir une seconde dose qu'il devra réaliser à Grenoble où il sera logé. Il lui glisse aussi une adresse pour une consultation au sujet du prurit dont il souffre. 

A Ali Abderaman, exilé du Darfour, débarqué la semaine précédente dans l'Hexagone, on explique la nécessité d'obtenir un test négatif ou un pass sanitaire pour se déplacer en train. Or cet homme de 25 ans, pour l'instant à la rue, doit partir la semaine suivante pour Lyon. Il a donc suivi le flot et le voilà assis, l'air un peu perdu, dans la pièce exiguë et surchauffée.

Un autre Afghan se présente, pantacourt noir et veste légère. "Il parle quelle langue ? Farsi ? Pachto ? Vacciné en Serbie ? S'il n'y a pas de preuve de certificat, on reprend le schéma vaccinal depuis le début", tranche le Dr Karim Laouabdia. Et voilà le nouvel entrant déjà en train de remplir un questionnaire médical.

« Vrai micmac »

Mais le chemin dans le dédale administratif des soins français peut s'avérer bien plus tortueux pour les dizaines de milliers de nouveaux demandeurs d'asile enregistrés depuis janvier, comme pour les autres migrants.  

Dès novembre 2020, dans l'attente des premiers vaccins, la Haute autorité de santé avait classé parmi ses cibles prioritaires les quelque 300.000 à 600.000 sans-papiers de France, soumis à la promiscuité quand ils peuvent être hébergés, et pour la plupart privés de masque et de gel hydroalcoolique. 

La vaccination leur a finalement été ouverte quand elle a été généralisée fin mai à toute personne de plus de 18 ans. 

"Le ministère de la Santé a mis du temps à agir, certaines agences régionales de santé ont été très réactives, d'autres très lentes", estime Didier Leschi, directeur général de l'Ofii, qui propose depuis octobre, dans 19 de ses centres en métropole, la vaccination qui a bénéficié pour l'heure à 800 personnes.

Dès juin, des acteurs de terrain se sont mobilisés pour dépasser les nombreux freins à la vaccination rencontrés par les migrants. Outre la barrière de la langue, le manque d'information et les inquiétudes sur le vaccin, "la dématérialisation est un obstacle majeur", estime le Dr Marion Tambourindeguy, médecin référent au Comité pour la santé des exilés (Comede). 

"Certaines personnes ne se déplacent pas non plus dans les centres médicaux par peur d'être contrôlées dans les transports", ajoute-t-elle. Il faut donc aller vers elles dans les bidonvilles, squats et centres d'hébergement, pour déchiffrer avec elles "le système de soin français assez complexe", explique le Dr Tambourindeguy.

Au total, du 11 août au 24 septembre, environ 600 personnes ont par exemple été vaccinées grâce à l’opération Vaccibus menée par le Samu Social Paris en coordination avec la Croix-Rouge.

"Les personnes à la rue bougent sans cesse, c'est ainsi particulièrement difficile de maintenir un lien de confiance et de mener un suivi médical", souligne par ailleurs Nadia Sebtaoui, de Médecins sans Frontières. L'ONG a mené, elle aussi, une campagne de vaccination durant l'été en Ile-de-France pour les personnes précaires et administré plus de 10.000 doses.

Les tracas ne s'arrêtent cependant pas aux seules injections. Certaines personnes vaccinées hors de France doivent en effet obtenir la conversion de leur certificat, en pharmacie, moyennant 37 euros. Cette somme représente "7% de l'allocation des demandeurs d'asile", relève M. Leschi, qui plaide pour que l'Ofii puisse réaliser elle-même cette conversion.

Les exilés à la rue ne possèdent pas non plus tous un téléphone, fait remarquer Marie Cougoureux, cheffe de service de la Halte humanitaire pour la fondation Armée du Salut: "Gérer le pass sanitaire sur papier quand on vit dehors, c'est un vrai micmac".  


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.