Fin de l'histoire d'amour entre Wall Street et les sociétés chinoises

En désertant le marché nord-américain, les entreprises chinoises se privent d'une base d'investisseurs unique au monde, qui pèse 52 500 milliards de dollars environ, contre 7 100 seulement pour la Chine, selon un rapport du cabinet McKinsey (2020). (Photo, AFP)
En désertant le marché nord-américain, les entreprises chinoises se privent d'une base d'investisseurs unique au monde, qui pèse 52 500 milliards de dollars environ, contre 7 100 seulement pour la Chine, selon un rapport du cabinet McKinsey (2020). (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 05 décembre 2021

Fin de l'histoire d'amour entre Wall Street et les sociétés chinoises

  • Cinq mois, c'est le temps qu'aura tenu Didi Chuxing entre son introduction, fin juin, et sa décision de quitter New York pour Hong Kong qui va reprendre prochainement la cotation du groupe
  • Selon les chiffres d'une agence gouvernementale américaine, datés de mai, quelque 248 sociétés chinoises étaient cotées aux Etats-Unis, avec une capitalisation boursière de 2 100 milliards de dollars

NEW YORK : L'annonce du retrait du "Uber chinois" Didi marque la fin de l'idylle entre Wall Street et les géants chinois de la technologie, pris en étau entre les autorités chinoises et les régulateurs américains.

Cinq mois, c'est le temps qu'aura tenu Didi Chuxing entre son introduction, fin juin, et sa décision de quitter New York pour Hong Kong, qui va reprendre prochainement la cotation du groupe ayant perdu, entre temps, quasiment deux tiers de sa capitalisation (-63%).

Vendredi, après l'annonce, les poids lourds du commerce électronique que sont Alibaba, JD.com ou Pinduoduo, tous cotés à Wall Street ont été fuis par les investisseurs. 

L'action Alibaba, dont l'entrée en fanfare à la Bourse de New York en 2014 avait ouvert le bal des méga-introductions chinoises, est descendue à son plus bas niveau depuis quasiment cinq ans, annoncée par la rumeur comme le prochain candidat au départ, après Didi.

Techniquement, malgré le transfert de New York à Hong Kong, les propriétaires d'actions Didi conserveront leurs titres et leur investissement ne va pas s'évaporer. 

Mais "les gens craignent la réglementation et le gouvernement chinois", explique Kevin Carter, gérant du fonds coté (ETF) EMQQ, spécialisé dans les marchés émergents. "Ils ont peur."

Hasard du calendrier, l'autorité américaine de régulation des marchés financiers, la SEC, avait annoncé jeudi que les comptes des sociétés étrangères cotées aux Etats-Unis devraient obligatoirement pouvoir être vérifiés, sous peine d'être sorties de la cote.

"Plus de 50 juridictions (...) ont permis des inspections", a commenté le président de la SEC, Gary Gensler, "mais deux ne l'ont jamais fait: la Chine (continentale) et Hong Kong."

«Données sensibles»

Dans une tribune, publiée vendredi et non signée, du Global Times, journal proche du Parti communiste chinois, ce nouveau règlement est accusé de permettre aux autorités américaines d'"espionner la situation intérieure de la Chine et de stocker des quantités importantes de données sensibles recueillies par les sociétés chinoises".

"La Chine n'acceptera pas cela", concluent les auteurs.

Beaucoup de ces titres cotés à Wall Street sont majoritairement détenus non par des particuliers mais par des investisseurs institutionnels.

Or, "un certain nombre de fonds doivent n'avoir que des actions qui se traitent sur les marchés américains", souligne Gregori Volokhine, président de Meeschaert Financial Services. "C'est ça qui met de la pression sur les titres."

Et pour beaucoup, le "Uber chinois" n'est que le premier domino à tomber. "Ce n'est pas spécifique à Didi puisque l'on voit depuis des mois l'emprise du Parti communiste être de plus en plus pesante sur les sociétés", estime Gregori Volokhine.

Peu après l'entrée en Bourse de Didi, la plateforme de réservation de camions Full Truck Alliance et le site de recherche d'emploi Kanzhun ont fait l'objet d'une enquête de l'Autorité chinoise de surveillance de la cybersécurité.

Le gouvernement chinois a aussi opéré un tour de vis réglementaire dans le secteur du soutien scolaire privé, qui a largement pénalisé plusieurs acteurs cotés à Wall Street.

Selon les chiffres d'une agence gouvernementale américaine, datés de mai, quelque 248 sociétés chinoises étaient cotées aux Etats-Unis, avec une capitalisation boursière de 2 100 milliards de dollars.

Après un début d'année "actif", les entreprises chinoises "ont, pour l'essentiel, arrêté de lever des fonds en s'introduisant en Bourse aux Etats-Unis, du fait des obstacles politiques et réglementaires", selon Matthew Kennedy, stratégiste pour le cabinet Renaissance Capital.

Cette semaine, le réseau chinois de soutien scolaire Spark Education a renoncé à son "IPO" (introduction).

"Dans les circonstances actuelles, on peut dire qu'il n'y aura plus d'IPO chinoises et que celles qui sont encore dans le +pipeline+ (35 selon Renaissance) vont être retirées les unes après les autres", abonde M. Volokhine.

En désertant le marché nord-américain, les entreprises chinoises se privent d'une base d'investisseurs unique au monde, qui pèse 52 500 milliards de dollars environ, contre 7 100 seulement pour la Chine, selon un rapport du cabinet McKinsey (2020).

Pour Kevin Carter, ce coup de pression politique a engendré une situation aberrante, qui voit les fleurons chinois de la technologie fondre en Bourse sans que leurs résultats ne soient en cause.

"Ces sociétés sont toujours rentables, toujours en croissance", fait valoir le gérant. En moyenne, leur chiffre d'affaires est en hausse de plus de 30%, souligne-t-il. "Le lieu où sont cotées leurs actions n'y change rien."


Pourquoi le chocolat reste cher avant Noël malgré la baisse du prix du cacao

Des producteurs récoltent du cacao dans une plantation à Agboville, dans la région d'Agneby-Tiassa, le 4 décembre 2025. (AFP)
Des producteurs récoltent du cacao dans une plantation à Agboville, dans la région d'Agneby-Tiassa, le 4 décembre 2025. (AFP)
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  • Après des récoltes déficitaires ayant fait exploser les prix du cacao en 2024, la production repart en Côte d’Ivoire et au Ghana grâce à la hausse du prix payé aux producteurs, entraînant une baisse des cours mondiaux
  • Malgré cette accalmie, les consommateurs ne verront pas les prix du chocolat baisser pour Noël, car les coûts élevés ont déjà conduit à des hausses tarifaires, des réductions de portions et une baisse de la teneur en cacao

LONDRES: Après être montés en flèche pendant deux ans, les cours du cacao sont largement retombés cette année, mais sans répercussion sur les prix du chocolat à quelques jours des fêtes de fin d'année. Explications.

- L'Afrique de l'Ouest est le coeur de la production -

La Côte d'Ivoire et le Ghana sont les principaux fournisseurs de cabosses, les fruits du cacaoyer, desquels sont extraits les fèves de cacao utilisées pour le chocolat.

Ces deux pays d'Afrique de l'Ouest concentrent plus de la moitié de la production mondiale, le reste étant principalement réparti entre le Nigeria, le Cameroun, ainsi que l'Equateur, l'Indonésie et le Brésil.

Cette concentration de la production mondiale dans quelques zones géographiques rend le marché très vulnérable aux aléas climatiques de l'Afrique de l'Ouest et aux maladies des cacaoyers.

- Les prix ont battu des records en 2024 -

Les récoltes des "saisons 2021-2022, 2022-2023, et 2023-2024 ont été déficitaires" par rapport à la demande, entraînant une hausse mécanique des prix, explique à l'AFP Oran Van Dort, de Rabobank.

Ce déficit s'explique selon lui par les mauvaises conditions météorologiques, mais aussi des problèmes systémiques dans les plantations ghanéennes et ivoiriennes, comme "le vieillissement des arbres, la propagation du "swollen shoot virus" (oedème des pousses du cacaoyer) ou la faible utilisation d'engrais et de pesticides", faute de revenus suffisants.

Résultat, en décembre 2024, le prix du cacao a atteint le niveau inédit de 12.000 dollars la tonne à la Bourse de New York, lui qui s'échangeait entre 1.000 et 4.000 dollars depuis les années 80.

- La récolte de fèves a redécollé ces derniers mois -

Au Ghana et en Côte d’Ivoire, le prix payé aux producteurs est fixé par l'État, qui l'a largement augmenté pendant l'année 2025, après l'avoir longtemps maintenu inchangé malgré la hausse des cours.

"Pour la première fois depuis des années, j'ai l'impression que nous cultivons avec le soutien du gouvernement", témoigne auprès de l'AFP, Kwame Adu, de la région d'Ahafo au Ghana.

La hausse des revenus a permis aux producteurs d'acheter des engrais et des machines pour améliorer la récolte, ainsi que de planter de nouveaux arbres, favorisant leurs perspectives.

"L'année passée (saison 2024/2025, ndlr), ça s'est bien passé parce qu'au moment où le cacao a donné les fruits, il y avait la pluie", explique aussi à l'AFP Jean Kouassi, agriculteur ivoirien de 50 ans, qui possède 4 hectares de plantation.

- Il y a moins de cacao dans les produits -

"Le coût record des matières premières a contraint les fabricants de chocolat à prendre une série de décisions impopulaires: réduction des quantités, augmentation des prix", mais aussi la "dilution discrète de la teneur en cacao" dans les produits, souligne Ole Hansen, analyste chez Saxo Bank.

La pratique peut même coûter l'appellation "barre au chocolat" à certains produits, comme c'est arrivé aux biscuits Penguin et Club de la marque McVitie's cette année au Royaume-Uni, qui impose un minimum de teneur en cacao.

La demande des géants comme Mondelez, Mars, Ferrero ou Nestlé s'est affaiblie, ce qui, ajouté à la bonne récolte 2024-2025, a entraîné une baisse des cours. La tonne de cacao évolue désormais à New York aux alentours de 6.000 dollars.

- Le chocolat reste cher -

La baisse des prix du cacao ne profitera pas aux amateurs de chocolat durant les fêtes, celle-ci arrivant "bien trop tard pour affecter les assortiments de Noël déjà produits et dont les prix ont été fixés il y a plusieurs mois", tranche Ole Hansen

"Les récentes fluctuations des prix du cacao sont encourageantes, mais le marché reste volatil (...) il est encore trop tôt pour se prononcer sur des changements spécifiques concernant les prix", reconnaît Nestlé, interrogé par l'AFP.

L'espoir demeure pour les oeufs et les lapins de Pâques, selon M. Hansen, à condition que le marché se stabilise autour des niveaux actuels.


EDF inaugure en Guadeloupe son premier compensateur synchrone pour stabiliser le réseau

Le logo du géant français de l'énergie EDF est visible au siège social de l'entreprise à Marseille, dans le sud de la France, le 10 octobre 2025. (AFP)
Le logo du géant français de l'énergie EDF est visible au siège social de l'entreprise à Marseille, dans le sud de la France, le 10 octobre 2025. (AFP)
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  • EDF a inauguré en Guadeloupe un compensateur synchrone de 180 tonnes, une première mondiale destinée à stabiliser un réseau insulaire en forte transition vers les énergies renouvelables
  • L’équipement, sans émission de CO₂, doit réduire les coûts et renforcer la sécurité électrique

PARIS: EDF a inauguré mercredi en Guadeloupe son premier compensateur synchrone, une machine de 180 tonnes destinée à stabiliser un réseau insulaire non interconnecté, une "première mondiale" pour l'électricien.

Installé sur le site industriel de Jarry, près de Pointe-à-Pitre, l'équipement sera "mis en service très prochainement", a indiqué à la presse Hugo Gevret, qui a piloté ce projet. Il s'agit d'"un gros alternateur qui tourne à vide" et contribue à maintenir la tension et à soutenir la fréquence du réseau, deux paramètres essentiels dans un système isolé.

Dans les systèmes électriques traditionnels, cette stabilité est assurée par les turbines lourdes des centrales thermiques ou nucléaires. Leur masse en rotation fournit une inertie mécanique qui amortit naturellement les variations de fréquence.

Mais la Guadeloupe, engagée vers la décarbonation et l'autonomie énergétique d'ici 2035, doit intégrer davantage d'énergies renouvelables, dont l'intermittence ne fournit pas cette sécurité. "L'éolien et le photovoltaïque (...) n'apportent pas cette inertie qu'on recherche dans un système électrique: c'est le rôle du compensateur", souligne encore Hugo Gevret.

Son rotor en rotation permanente imite l'inertie mécanique d'une centrale classique, sans brûler de combustible. La machine peut absorber ou injecter de l'énergie réactive pour maintenir la tension, et réagir en quelques millisecondes aux fluctuations du réseau, un paramètre crucial dans un territoire non interconnecté.

L'investissement, engagé en 2019, atteint plus de 20 millions d'euros. La machine doit "faire économiser cinq millions d'euros à la collectivité et 30.000 tonnes annuelles de CO2", précise Hugo Gevret car contrairement aux turbines à combustion utilisées jusqu'ici pour stabiliser le système, elle n'émet aucun gaz à effet de serre.

Ce dispositif constitue pour l'électricien une "première mondiale", a rappelé Marie-Line Bassette, directrice régionale d'EDF. Selon elle, d'autres installations sont prévues dans les territoires ultramarins, pour lesquels des appels d'offres ont été lancés.

L'archipel a été frappé ces dernières années par des délestages et coupures à répétition, aggravés par des conflits sociaux dans le secteur de l'énergie. En 2024, une grève avait même provoqué un black-out total de plus de 36 heures.


La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour 2025 et 2026 

La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1. (AFP)
La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1. (AFP)
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  • L'Insee et le gouvernement ont déjà relevé leur prévision de croissance à 0,8% pour 2025
  • La Banque de France prévoit cependant un ralentissement de la croissance au quatrième trimestre à 0,2% du produit intérieur brut (PIB)

PARIS: La Banque de France va remonter sa prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine, a indiqué mercredi le gouverneur François Villeroy de Galhau, au micro d'Europe 1.

Lors de la publication prévue le 19 décembre, "nous allons remonter un peu notre prévision de croissance pour cette année et pour l'année prochaine. Nous étions à 0,7% pour cette année, à 0,9% pour l'année prochaine", a-t-il indiqué en ajoutant qu'il ne pouvait pas encore donner de chiffres.

L'Insee et le gouvernement ont déjà relevé leur prévision de croissance à 0,8% pour 2025.

La Banque de France prévoit cependant un ralentissement de la croissance au quatrième trimestre à 0,2% du produit intérieur brut (PIB), contre 0,5% au trimestre précédent, a-t-elle indiqué jeudi.

"Evidemment, même si on allait à 1% (de croissance l'année prochaine, NDLR), ça ne suffit pas. C'est résilient, mais non suffisant", selon le gouverneur.

"L'économie, l'activité, résistent malgré cette incertitude" politique estime le gouverneur qui rappelle qu'il y a un an "beaucoup craignaient une récession", qui a été évitée.

"Il y a une estimation assez convergente qui dit qu'au total, l'incertitude nationale plus internationale nous coûte à peu près 0,5 point de croissance (...) et que la part nationale là-dedans, c'est au moins 0,2. Donc, si on arrivait à sortir avec une stratégie budgétaire et une stabilisation politique, on peut espérer gagner 0,2%", selon le gouverneur.

Le vote du budget de la sécurité sociale mardi "je relève simplement que c'est une étape franchie", "c'est pas du tout la fin de ce chemin", a insisté M. Villeroy de Galhau.

Les députés ont adopté de peu mardi le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026.

Les discussions sur le budget de l'Etat se poursuivront en janvier si le Sénat et l'Assemblée ne parviennent pas à un accord, a annoncé mercredi la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon, excluant de facto le recours au 49.3 pour faire adopter le texte sans vote.

"Baisser suffisamment le déficit total" 

Le gouverneur de la Banque de France a aussi rappelé mercredi qu'"on ne sait pas aujourd'hui si on va arriver à baisser suffisamment le déficit total".

"On part de 5,4% du PIB, du poids de notre économie, pour ce déficit total. Il faut être à 3% dans quatre ans (...) Donc, si on doit faire ce chemin en quatre ans, il faut faire le quart du chemin la première année. C'est pour ça que moi, j'ai plaidé un déficit à 4,8% l'an prochain".

Le gouverneur "croit qu'il reste très important d'être aussi proche que possible de ce chiffre de 4,8%", à la fois "pour sortir de l'étouffement progressif par la dette, parce que les intérêts de la dette prennent de plus en plus notre marge de manœuvre", et puis "pour ramener la confiance".

Le ministre de l'Economie et des Finances Roland Lescure a pour sa part dit mercredi sur RTL souhaiter toujours que le déficit public (Etat, sécurité sociale et collectivités locales réunis) soit à "5% (du PIB) et pas au-dessus" en 2026.

Cela implique que l'Etat renfloue les caisses de la Sécurité sociale de 4,5 milliards d'euros après le vote du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, celui-ci aggravant le déficit de la Sécu par rapport au projet initial du gouvernement.

M. Lescure considère que le vote la veille du budget de la Sécurité sociale, avec un déficit alourdi, faisait "remonter d'un cran" la difficulté d'obtenir un vote du budget de l'Etat, qui va devoir compenser.